
L’évaluation tabacologique
L’intervention s’adapte aux besoins du patient et se struc-
ture en trois phases successives : la consultation initiale, de
sevrage et de suivi qui doit être prolongée actuellement
pendant environ un an [7]. Lors de la consultation initiale,
les tabacologues utilisent souvent un dossier spécifique de
l’Institut national pour l’éducation et la santé (INPES), bien
adapté à la prise en charge du sevrage. L’évaluation tabaco-
logique doit comprendre plusieurs aspects.
Évaluation de la situation tabagique
Une reconstitution de l’histoire du tabagisme (ancienneté,
consommation, antécédents d’arrêt et circonstances de re-
prise, pathologie somatique impliquant le tabagisme, anté-
cédents psychiatriques, co-dépendances (alcool, cannabis),
tabagisme environnemental, contexte socioprofessionnel)
est réalisée [7]. Cette évaluation permet aussi de savoir dans
quels stades décrits par Prochaska et Di-Clemente se trouve
le patient (figure 1).
Évaluation de la motivation
Il est possible d’utiliser l’échelle Q-MAT en quatre ques-
tions ou de Richmond [7], ce qui permet de faire une rapide
et fiable évaluation de la motivation du patient pour une
prise en charge immédiate de l’arrêt ou pour un entretien
motivationnel. Cela permettra une prise de décision ulté-
rieure. L’échelle de De maria et Grimaldi permet de
prévoir les difficultés de l’arrêt [7].
Évaluation du niveau de dépendance physique
L’instrument de mesure de référence de la dépendance
tabagique est le questionnaire de Fagerström [2] :
–score de0à2:lesujet n’est pas dépendant à la nicotine. Il
peut souvent arrêter de fumer sans avoir recours à des
substituts nicotiniques ;
–score de3à4:lesujet est faiblement dépendant à la
nicotine ;
–score de5à6:lesujet est moyennement dépendant à la
nicotine ;
–score de7à10:lesujet est fortement ou très fortement
dépendant à la nicotine.
Évaluation de la dépendance
psychocomportementale
Cette évaluation repose sur l’analyse clinique, les échelles
visuelles analogiques ou différents tests notamment le test
de Horn, le test de Gilliard 1998. Les patients les plus
dépendants ont, le plus souvent, des niveaux élevés de
dépendance pharmacologique et psychocomportementale,
associant fréquemment des troubles anxiodépressifs et des
codépendances [7]. Ils ont accumulé les échecs dans leurs
tentatives d’arrêt antérieures, leurs conditions socio-
économiques sont souvent précaires [7].
Évaluation du niveau d’anxiété et de dépression
Il est évalué par la recherche d’antécédents de troubles
anxieux et/ou de dépression, notamment d’état dépressif
majeur. Il est dépisté sur les signes de ces pathologies selon
les critères du DSM IV et on en évalue l’intensité avec le
test HAD (hospital anxiety depression scale) [7]. Si ce test
est perturbé avec notamment un score d’anxiété et/ou de
dépression supérieur ou égal à 8, le bilan peut être complété
par d’autres tests notamment le questionnaire de Beck en
13 items (BDI : Beck depression inventory – forme abré-
gée) et la « mini-interview » structurée (DSM IV) permet-
tant de mieux préciser les troubles anxieux fréquemment
associés au tabagisme [8]. Des tests d’identification des
tempéraments affectifs d’Akiskal et Hantouche et le test de
Angst [7, 9] permettent de discerner des troubles bipolaires
dans leur forme atténuée ou majeure. Ces troubles sont très
fréquents chez les consultants des centres spécialisés en
tabacologie [7-9].
Dimension de personnalité et tabagisme
Tous les individus ne sont pas égaux devant la dépendance
et de nombreuses études montrent l’implication dans les 2
sexes, chez les adultes et les adolescents de l’extraversion
et du névrosisme (modèle de personnalité d’Eysenck), de la
recherche de sensations, de la recherche de nouveauté [10].
Utilisation des marqueurs biologiques
du tabagisme
En pratique tabacologique, le CO dans l’air expiré, témoin
de la profondeur de l’inhalation permet ultérieurement de
valider un arrêt et de renforcer la motivation du patient qui a
arrêté. Il faut noter le temps écoulé entre la dernière ciga-
rette et la mesure du CO expiré. Le dosage de la cotinine
urinaire aide à fixer et à adapter la posologie de la substitu-
tion nicotinique. Ce dosage a un intérêt particulier chez les
patients les plus dépendants, chez les patients ayant une
cardiopathie ischémique et les femmes enceintes pour les-
quelles l’adaptation posologique doit être la plus précise
possible [11].
Stratégie de prise en charge
La date d’arrêt est toujours choisie par le patient lui-même.
Un arbre de décision a été récemment proposé (figure 2)
STV, vol. 18, n° 3, mars 2006 139
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