Unifié en 1871, l’Empire allemand entre, à la fin du XIXème siècle, dans une phase d’intense développement économique qui bouleverse son organisation sociale. Le nombre des ouvriers augmente rapidement à la faveur de l’industrialisation et de l’urbanisation, mais les conditions de travail sont précaires. Les ouvriers constituent des syndicats et un parti politique unifié se constitue, le SPD (Parti social-démocrate d’Allemagne), au programme révolutionnaire. L’ensemble de ces organisations forme le mouvement social-démocrate. Social-démocratie = Forme de socialisme où un parti de masse, soutenu par les syndicats, est à l’initiative de réformes sociales. 1875-1914. Naissance et affirmation de la social-démocratie allemande 1875-1945. Socialisme et syndicalisme : de l’unité à la division 1914-1933. Le temps de la division entre socialistes et communistes 1933-1945. L’anéantissement du mouvement ouvrier - L’industrialisation et l’urbanisation rapides de l’Allemagne entraînent le développement d’une classe ouvrière nombreuse (1/3 de la population active), qui s’organise en syndicats. Face aux conditions de travail très difficiles et aux inégalités entre la classe bourgeoise et ouvrière (le prolétariat), en 1875, est créé un parti qui prend ensuite le nom de SPD. Son programme, défini lors du Congrès de Gotha, en 1875, repose sur une idéologie révolutionnaire et marxiste qui donne naissance à la social-démocratie. Cependant, dès l’origine, partis et syndicats ouvriers sont traversés par 2 courants opposés, l’un qui prône la révolution et l’autre qui souhaite réformer la société par voie légale. Marxisme = Courant d’idées né en Allemagne, reposant sur les travaux de Karl Marx et qui insiste sur la nécessité de la lutte des classes et sur l’organisation du prolétariat en vue d’établir le socialisme - Entre 1878 et 1890, le chancelier conservateur Bismarck interdit le SPD et les syndicats perçus comme révolutionnaires. Pour détourner les ouvriers du SPD, il accorde des droits sociaux aux ouvriers, comme l’assurance maladie, un système de retraite, sans parvenir à enrayer la progression électorale des socialistes qui se présentent individuellement. - A nouveau autorisé à partir de 1890, le SPD présente un nouveau programme au congrès d’Erfurt, en 1891. Deux tendances s’affrontent alors : les réformistes, autour d’Edouard Bernstein, qui sont pour améliorer les conditions des ouvriers par des réformes ; les révolutionnaires et marxistes, autour de Rosa Luxembourg. Parallèlement, les syndicats s’unissent au sein de la Confédération allemande des syndicats (DGB) en 1892 et obtiennent par leurs actions (grèves, comme celle de la Ruhr en 1905) des avancées sociales. Réformisme = Branche du socialisme favorable à des transformations sociales par l’intégration du mouvement ouvrier à la vie politique légale et par des accords avec le patronat. - Le SPD progresse rapidement en nombre de voix et de militants et, en 1912, il devient la 1ère formation politique en Allemagne. Il encadre de nombreuses organisations (syndicats, coopératives, associations de loisirs) et, contrairement à la ligne fixée par la IIème Internationale (refus de la guerre, courants pacifistes), il participe à la vie politique (à l’Union sacrée, où les divergences entre partis sont mises de côté) et choisit de défendre l’effort de guerre. - Les divisions du socialisme après la guerre sont particulièrement vives en Allemagne. Une minorité révolutionnaire, la Ligue Spartakiste, fondée par Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht, se soulève en 1918 contre le nouveau régime, la république de Weimar (une démocratie parlementaire). Elle soutient la révolution bolchévique russe, donne naissance au Parti communiste (KPD) en 1918, et mène une agitation révolutionnaire dans le pays (insurrection de Kiel en 1918). - Le SPD, soutien de la république de Weimar, dont le 1er pdt est l’un de ses chefs, Friedrich Ebert. Et il participe à la coalition gouvernementale qui réprime le mouvement spartakiste ; lequel s’achève lors de la « semaine sanglante », du 5 au 12 janvier 1919, et la mort de Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg. - Entre 1918 et 1933, avec l’appui du DGB, le SPD est au cœur de la vie politique et il obtient de nombreuses mesures en faveur des ouvriers, comme l’inscription du syndicalisme dans la constitution, la journée de 8h, les conventions collectives chargées de régir les droits des ouvriers dans le cadre d’une activité, l’assurance chômage. - Toutefois, le SPD doit faire face à l’opposition très vive du KPD, qui suit le modèle communiste soviétique. Or, cette division entre socialistes et communistes est exploitée par les partisans du nazisme. - Ainsi, à partir de 1933, le NSDAP au pouvoir entreprend d’anéantir le mouvement ouvrier. Les partis et les syndicats sont interdits et socialistes, communistes et syndicalistes sont arrêtés, internés ou contraints à l’exil. Un totalitarisme se met en place, et le mouvement ouvrier est contrôlé par un syndicat unique nazi, le Front du travail. Néanmoins, sans s’unir, les socialistes et communistes essayent de s’opposer au nazisme dans la clandestinité. En RFA, la socialdémocratie sans le marxisme Depuis 1945. Un mouvement ouvrier en quête d’identité En RDA, un Etat sous l’œil de Moscou Depuis la réunification : une nouvelle gauche ? - En 1945, l’Allemagne vaincue est divisée en 4 zones d’occupation : Etats-Unis, URSS, RU, France. En 1949, dans le cadre de la Guerre froide, après le blocus de Berlin, l’Allemagne est divisée en 2 pays : la RFA et la RDA. - En RFA, le SPD, recréé au congrès d’Hanovre (1945), devient une force politique de 1er plan en participant au nouveau modèle démocratique, tandis que le KPD décline avant d’être interdit. La Confédération allemande des syndicats (DGB) participe à l’économie sociale de marché avec les lois sur les conventions collectives et la cogestion (participation active des employés dans la gestion de l’entreprise). Economie sociale de marché = Modèle économique qui concilie le libéralisme économique avec une politique sociale garantie par l’action des syndicats. - Longtemps parti d’opposition, le SPD adapte son programme lors du congrès de Bad Godesberg de 1959 permettant l’arrivée de Willy Brandt à la chancellerie en 1969. C’est l’apogée de la social-démocratie où l’Etat s’entend avec les organisations syndicales et patronales pour garantir le progrès social. Malgré un terrorisme d’extrême gauche dans les années 1970 et le retour des chrétiens-démocrates au pouvoir en 1982, ce modèle subsiste jusqu’à la réunification, en 1990. - A l’Est, le SPD et le KPD fusionnent en 1946 au sein du SED (Parti socialiste unitaire), qui devient un parti unique, un parti-Etat, dont le secrétaire général est le dirigeant de la RDA (Walter Ulbricht jusqu’en 1971 / Honecker jusqu’en 1989). Il applique le modèle soviétique, collectivise l’agriculture et l’industrie, l’objectif étant de faire de la RDA une vitrine du bloc soviétique. Ce parti unique joue donc un rôle central en RDA : il forme les fonctionnaires, interdit le droit de grève, supervise les syndicats et contrôle l’ensemble de la population en imposant une morale socialiste et grâce à sa police secrète, la Stasi, créée en 1950. - La réalisation du « socialisme réel », sur le modèle soviétique, privilégie la classe ouvrière, qui a fait de l’économie de la RDA la 1ère du bloc de l’Est. Cependant, le contrôle totalitaire de la population conduit à l’échec. Les pénuries, le faible niveau de vie (sauf pour les cadres du SED), provoquent des mécontentements et le départ de 3 millions d’Allemands de l’Est vers l’Ouest, jusqu’à la construction du mur de Berlin en 1961. - En définitive, la société est-allemande s’isole et son économie stagne avant de s’effondrer dans les années 1980. Les contestations se multiplient en RDA en 1989 et, le 9 novembre, le mur de Berlin est ouvert et le SED est contraint d’organiser des élections libres. - En mars 1990, les Allemands de l’Est choisissent la réunification et l’abandon du « socialisme réel ». Le SED devient le PDS, un parti minoritaire aux élections, mais qui reste important sur l’ancien territoire de la RDA. - Le SPD réunit un tiers des voix dans tout le pays et retrouve le pouvoir en 1998 avec l’arrivée à la chancellerie de Gerhard Schröder. Cependant, les difficultés économiques entraînent des réformes qui renforcent la compétitivité allemande aux dépens de son modèle social dans le cadre du programme Agenda 2010. Le parti est divisé et perd les élections fédérales de 2005. Dans un 1er temps membre d’une coalition menée par Angela Merkel (chrétienne-démocrate), entre 2005 et 2009, le SPD redevient ensuite un parti d’opposition, mais il doit composer avec un électorat plus divers et des tendances de gauche plus radicales, comme les Verts et Die Linke. Les Verts = Parti fondé en 1980, aux revendications écologistes et pacifiques Die Linke = Part issu de la fusion entre le PDS, héritier du SED, et les sociauxdémocrates opposés à Gerhard Schröder. Au total, durant la Guerre froide, les pays d’Europe orientale, comme la RDA, deviennent des démocraties populaires. A l’Ouest, les partis socialistes se modernisent, acceptent l’économie libérale capitaliste, puis ils s’adaptent à la mondialisation, poursuivant le tournant libéral (années 1990) tandis que des mouvements plus radicaux se développent à gauche.