Le référé expertise, n'importe où ? La mise en cause judiciaire d'un professionnel de santé intervient le plus souvent dans le territoire de compétence du Tribunal où se trouve le cabinet ou l’établissement de soins au sein duquel se sont déroulés les soins litigieux. Mais cela n’est pas toujours le cas... Spécialité(s) : Sommaire ● ● ● Le lieu de réalisation des actes Choix de juridiction parmi les domiciles des défendeurs... sauf la C.P.A.M Le lieu de réalisation de l'expertise Auteur : Didier CHARLES, Juriste / MAJ : 18/04/2016 Le lieu de réalisation des actes La mise en cause d’un professionnel de santé libéral ou salarié par un patient ou par ses ayants droit s’effectue assez souvent par le biais d’une action civile auprès du Tribunal de Grande instance. La démarche initiale consiste en la délivrance au médecin, par un huissier, au cabinet du médecin ou au siège de la clinique, ou encore, plus rarement, au domicile privé, d'une assignation en référé, c'est-à-dire une convocation pour une date donnée afin que le ou les praticiens concernés se présentent à l’audience devant le juge des référés, personnellement ou représentés par un avocat. Cette mise en cause intervient le plus souvent dans le territoire de compétence, aussi appelé ressort, du Tribunal où se trouve le cabinet ou l’établissement de soins au sein duquel se sont déroulés les soins litigieux, mais cela n’est pas toujours le cas. Le texte de principe en la matière est l’article 46 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC) qui ne donne effectivement la possibilité de mettre en cause une personne qu’au lieu de son domicile ou au lieu de survenance du dommage. Cette disposition est normalement de nature à permettre à un médecin de ne pas être convoqué loin de son domicile professionnel… Choix de juridiction parmi les domiciles des défendeurs... sauf la C.P.A.M Néanmoins, en cas de pluralité de défendeurs (praticien, infirmière, clinique…), le patient qui intente son action, ne pouvant bien évidemment l’introduire simultanément devant différentes juridictions équivalentes, dispose d’un choix de juridiction parmi les domiciles des défendeurs, tel qu’il est prévu à l’article 42 alinéa 2 du NCPC. Cette disposition semble avoir échappé au juge des référés de Marseille qui a décidé par une ordonnance du 13 juin 2007 de se déclarer incompétent, malgré la domiciliation de la C.P.A.M. dans le ressort du Tribunal, au motif que « le fait que la C.P.A.M. ait son siège à Marseille ne peut-être une cause d’attribution de compétence puisque aucune demande n’est formulée à son encontre, la procédure ne lui étant dénoncée qu’afin de lui permettre de faire valoir ses droits comme subrogeé dans ceux de la victime. » Si les professionnels de l’indemnisation étaient conscients du statut réglementaire particulier des organismes sociaux, ils pensaient pourtant, à juste titre, que dans le cadre d’un procès civil une partie était, soit en demande, (le patient), soit en défense… ! Le magistrat phocéen propose, semble-t-il, un nouveau statut pour la C.P.A.M., sans préciser lequel, de nature à écarter, selon lui, l’application stricte et pour une fois assez simple du Code de Procédure Civile. Fort heureusement, le praticien mis en cause avait lui-même son domicile dans le ressort territorial voisin et en l’absence d’appel, nous ne saurons jamais si la Cour aurait infirmé cette surprenante décision. Le cas général reste néanmoins celui d’une mise en cause dans le territoire d’un ou de plusieurs défendeurs. Le lieu de réalisation de l'expertise Pour logique qu’elle soit, cette règle souffre néanmoins une exception lorsque les opérations d’expertise doivent se dérouler dans une région plus ou moins lointaine. En effet, une décision déjà ancienne de la Cour de cassation du 17 juin 1998 a rappelé expressément que « si le juge territorialement compétent pour statuer sur une demande de mesure d'instruction est le président de la juridiction appelée à connaître d'un litige éventuel sur le fond, il n'est pas interdit au demandeur de saisir en référé le président de la juridiction du lieu où doit être exécutée la mesure demandée ». Autrement dit, si un accident médical survient, par exemple, dans la région Nord mais que la spécificité du geste litigieux justifie l’analyse par un expert situé dans le Sud-est, le patient disposera du choix de saisir le juge du lieu de l’accident ou celui du lieu d’exercice professionnel de l’Expert préconisé. Le professionnel de santé devra alors se défendre devant cette lointaine juridiction et son assurance en responsabilité civile professionnelle désigner un avocat spécialisé dans cette région. Il est difficile d’expliquer juridiquement la raison de cette position qui s’est vérifiée dans plusieurs dossiers suivis en Responsabilité Civile Professionnelle. Il s’agit de fait d’un moyen commode pour le patient ayant déménagé de pouvoir saisir le juge de son domicile sous couvert de la désignation d’un Expert local. Tout professionnel de santé peut donc être attrait, en pratique, devant n’importe quel juge des référés français, préalablement au fait de se trouver confronté par la suite à devoir exposer personnellement des frais pour se rendre à des opérations d’expertise parfois bien éloignés de son lieu d’exercice. A lire aussi : La réforme de l'expertise psychiatrique judiciaire Expertises médicales et TVA A découvrir sur notre site : Infographie : check-list du patient au bloc opératoire Certificat médical : les réponses vos questions Fiscalité : quoi de neuf en 2017 ? Chiffres clés du rapport annuel 2015 (pdf - 72.25 Ko) Auteur : Didier CHARLES, Juriste / MAJ : 18/04/2016