Pancréatite chronique : Conclusion

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Conclusion
X. Hébuterne*
a lecture de ce dossier de La Lettre de l’Hépatoga s t roentéro l og u e consacré à la pancréatite ch ronique
nous montre que, si cette affection a largement bénéficié
de progrès technologiques récents dans le domaine de l’imagerie et
de l’endoscopie, les progrès dans les domaines de la compréhension
de l’affection et de son traitement étiologique sont ténus.
Comme le soulignent P. Chevallier et al., l’imagerie par résonance magnétique (IRM) est un progrès considérable pour le diagnostic et le bilan des affections pancréatiques. En effet, l’IRM
permet d’obtenir des images qui ont une résolution spatiale voisine de celle obtenue avec la tomodensitométrie, mais avec une
résolution en contraste nettement supérieure. D’autre part, elle
permet la réalisation de cholangio-pancréatographies par résonance magnétique qui donnent des images de plus en plus pro ches
de celles que l’on obtenait par pancréatographie directe par voie
rétrograde endoscopique, sans aucun danger pour le patient
puisque cet examen ne nécessite même pas d’injection de produit de contra s t e. Il est pro b able que les dern i è res évolutions technologiques améliorant les résolutions spatiale et en contraste de
l’IRM en feront un examen incontournable au cours de la PC.
Espérons que le parc d’IRM, encore faible en France, augmente
rapidement pour perm e t t re son accessibilité au plus grand nombre
de patients.
L’endoscopie diagnostique n’a pratiquement plus sa place au
cours de la PC. En revanche, la place de l’endoscopie interve ntionnelle est grandissante pour le traitement des complications de
cette affection. J. Sahel et L. Heyries nous ont exposé les différentes modalités du traitement endoscopique, dont la place n’est
plus discutée dans le traitement des kystes et pseudokystes, et de
moins en moins pour le traitement de la douleur pancréatique quand
l’hyperpression canalaire est en cause. On souhaiterait néanmoins
que des études contrôlées comparent différentes modalités thérapeutiques (par exemple : drainage des kystes sous guidage endoscopique versus radiologique versus chirurgie) et que des études
prospectives bien menées avec une évaluation objective et à long
terme de la douleur permettent de mieux préciser les indications
de la décompression du Wirsung par voie endoscopique.
L’échoendoscopie, qui s’affirme de plus en plus comme l’examen de choix en cas de suspicion clinique de pancréatite chronique au stade précoce, va probablement tro u ver une place de
plus en plus importante, permettant, avec un risque minimum,
des biopsies pancréatiques ainsi que des gestes interventionnels
comme la neurolyse cœliaque et le drainage des pseudokystes.
Même si de nouvelles entités, comme la pancréatite chronique
auto-immune, ont été identifiées, dans plus de 80 % des cas, la
PC est d’ori gine alcoolique. Comme le démontre P. Levy, ni l’âge
L
* Fédération d’hépato-gastroentérologie et de nutrition clinique, CHU de Nice.
de débu t , ni la durée de l’intox i c at i o n , ni la quantité d’alcool
consommée ne permettent de prédire la surve nue de la PC.
D’autre part, le rôle du tabac comme cofacteur reste controversé.
Autrement dit, on ne sait toujours pas pourquoi, à consommation
d’alcool équivalente, un malade fe ra une PC et un autre non. Cela
suggère bien évidemment une prédisposition génétique et, à cet
égard, les travaux qui démontrent une fréquence de la mutation
du gène de la mu c oviscidose (CFTR) plus élevée chez les malades
porteurs d’une PC comparativement à des témoins sont évidemment porteurs de grands espoirs.
Comparat ivement aux avancées tech n o l ogiques précédemment
citées, le traitement médical de la PC a relativement peu évolué.
Certes, il est de mieux en mieux codifié et aucun des différents
aspects de cette maladie n’est oublié : sevrage alcoolique, insuffisance endocrine et ex o c ri n e, douleur, dénutrition, re t e n t i s s ement psychologique, prise en charge des différentes complications. On se rend compte du rôle de chef d’orchestre joué par le
gastroentérologue, qui fait intervenir successivement différents
spécialistes à même de gérer tel ou tel problème spécifique de
cette affection chronique. Parmi ceux-ci, les chirurgiens ont toujours une place, qui a été bien précisée par M. Dahman. Le traitement étiologique de la PC n’existe malheureusement toujours
pas et, si nous sommes tous persuadés de l’intérêt du sevrage
alcoolique, c’est au moins autant en raison de l’effet désastreux
qu’aurait la poursuite de l’intoxication sur la survenue d’autres
complications de l’alcool que pour l’intérêt pro p re du sev rage
sur le cours évolutif de la PC. La recherche de molécules empêchant la progression de la fibrose doit être encouragée (1). On ne
peut être que déçu du faible apport des analogues de la somatostatine au cours de la PC, notamment sur la douleur, et leur intérêt semble être limité à la prise en charge de certaines complications (fistules ou ascite pancréatique). Enfi n , il peut paraître
étonnant que, en 2005, nous n’ayons à proposer à nos malades
que des extraits pancréatiques extractifs d’origine porcine, qui
posent le problème théorique de la transmission d’agents infectieux et celui bien réel des convictions religieuses de certains de
nos malades. Nous devons pousser les laboratoires pharmaceutiques à développer des enzymes pancréatiques de synthèse qui
régleraient ces deux problèmes. D’autre part, une grande étude
contrôlée nous semble nécessaire pour répondre clairement à la
question des effets de ces extraits pancréatiques sur la douleur.
Dans les années à venir, les progrès tech n o l ogiques dev raient se poursuivre, permettant un diagnostic précoce et un traitement de plus en
plus efficace des complications. On peut également espérer que des
traitements étiologiques permettent une prise en charge plus efficace.
1. Shimizu K, Shiratori K, Kobayashi M, Kawamata H. Troglitazone inhibits the progression
of chronic pancreatitis and the profibrogenic activity of pancreatic stellate cells via a PPAR gamma-independent mechanism. Pancreas 2004;29:67-74.
La Lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4-5 - vol. VII - juillet-octobre 2004
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