Faux kyste du pancréas

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Un homme de 75 ans se présente dans un centre de santé pour une augmentation progressive
du volume de l'abdomen depuis 4 semaines avec une sensation de satiété rapide lors des repas.
Il se plaint également de nausées persistantes. Il n'y a pas de notion de fièvre, de difficultés
respiratoires ou
d'oedème des membres inférieurs ; il a un long passé de consommation de boissons
alcoolisées. Il a arrêté de boire il y a environ un an à la suite d'un épisode de pancréatite aiguë
alcoolique.
A l'examen il paraît légèrement pâle. Sa pression artérielle est 178/94 mm Hg, le pouls est à
84 bpm, la fréquence respiratoire à 20 par minute et la température à 36. Il n'y a pas d'ictère,
de cyanose ni d'hippocratisme digital. L'abdomen et distendu et il existe une défense au
niveau de l'hypochondre gauche. Les examens biologiques montrent un taux de globules
blancs à 7,0x109/L (7000 leucocytes par µL), une hémoglobine à 11g/dL, un hématocrite à
37 % (0,37) et des plaquettes à 220x109/L (220000/µL). Les tests hépatiques, incluant les taux
de bilirubine sont normaux. L'amylasémie, la lipasémie sont également dans les limites de la
normale.
Le diagnostic chez ce patient est un pseudokyste pancréatique. C'est la lésion kystique du
pancréas la plus fréquente représentant environ 75 % de toutes les masses pancréatiques. Les
pseudokystes du pancréas se définissent comme des collections liquidiennes riches en
amylase intra- ou extra-pancréatiques, entourées d'une paroi fibreuse dépourvue de
revêtement épithélial ; ils sont donc considérés comme des pseudokystes plutôt que des vrais
kystes. Les pseudokystes post-inflammatoires sont les plus fréquentes masses kystiques du
pancréas. Ils se développent habituellement après une pancréatite aiguë ou chronique mais
aussi après une chirurgie ou un traumatisme, chez l'enfant plus particulièrement. Les
pseudokystes pancréatiques sont habituellement solitaires mais ils peuvent être multiples dans
environ 15 % des cas. Les collections sont plus rarement localisées dans le pelvis et même le
médiastin. Environ 80 % sont dus à des pancréatites alcooliques ou lithiasiques.
Les pseudokystes compliquant la pancréatite aiguë sont dus à une rupture canalaire secondaire
à la nécrose pancréatique (pseudokystes post-nécrotiques) avec pour conséquence une fuite
canalaire entraînant une extravasation de sécrétions pancréatiques riches en enzyme et leur
cloisonnement dans des cavité virtuelles comme le sac péritonéal inférieur et l'espace
périrénal antérieur. Le plus souvent ces collections liquidiennes se résorbent spontanément,
mais celles qui persistent plus de 4 semaines restent cloisonnées dans une capsule fibreuse.
Les kystes qui persistent plus de 6 semaines sont simplement surveillés tant qu'ils font moins
de 6 cm de diamètre. Ceux qui ont un diamètre de plus de 6 cm ont peu de chance de se
résorber spontanément. Ces gros kystes sont souvent associés à une forte morbidité et doivent
être drainés.
À l'inverse, les patients ayant une pancréatite chronique développent des pseudokystes par la
mise sous pression des canaux pancréatiques du fait des sténoses, des calculs ductaux ou
d'autres raisons. L'élévation de la pression intracanalaire entraîne une petite rupture du canal
avec rétention intraparenchymateuse (kyste rétentionnel). De fait, la pancréatite chronique est
l'étiologie la plus fréquente des pseudokystes pancréatiques. Les patients ayant une
pancréatite chronique présentent en général des douleurs abdominales vagues, une satiété
précoce et parfois des nausées et des vomissements. Le diagnostic différentiel des collections
liquidiennes péripancréatiques sont les tumeurs kystiques (cystadénomes séreux ou mucineux,
cystadénocarcinomes), les collections liquidiennes pancréatiques aiguës (3-4 semaines après
la poussée aiguë) et la nécrose pancréatique organisée (les patients ayant une nécrose
pancréatique organisée sont plus malades que les autres).
Le scanner est l'examen de choix pour faire le diagnostic avec une sensibilité de plus de 90 %.
L'échographie et l'IRM peuvent également être effectuées. La plupart des pseudokystes
régressent sans traitement. Cependant les complications sont l'infection avec formation d'un
abcès, la rupture intrapéritonéale responsable d'une ascite, l'hémorragie par érosion des
vaisseaux adjacents, la compression des voies biliaires responsable d'un ictère et la sténose du
pylore.
Le drainage des pseudokystes est indiqué lorsque surviennent des complications ou lorsque le
patient devient symptomatique. Le drainage peut être chirurgical, percutané ou endoscopique
transmural ou transpapillaire. Le drainage chirurgical interne (cystogastrostomie) est le
traitement de référence. Ce patient a été adressé à un gastroentérologue pour un éventuel
drainage endoscopique transmural.
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