VIVRE À L`ÉCRAN à la maison de retraite Saint-Vincent-de-Paul

10-11-12, novembre 1997 Générations Pp. 26-28
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Claude DEBRET
Directeur
La télévision pour communiquer, pour se connaître, pour se raconter, c’est une idée
simple qui se pratique avec succès depuis plusieurs années dans la maison de retraite
St-Vincent-de-Paul à Troyes.
Au départ, comme c’est souvent le cas, la vidéo ne servait qu’à filmer les fêtes, les anni-
versaires, les animations. Mais il est vite apparu qu’il était possible d’aller plus loin et de
faire davantage participer les résidents. L’idée est ainsi venue de créer avec eux un jour-
nal télévisé, ce qui leur a demandé un exercice intellectuel (chercher les informations dans
la presse, les trier, les présenter...), tout en les rapprochant les uns des autres et en créant
des amitiés entre eux et avec le personnel.
Puis est née l’émission « Aujourd’hui, je reçois... », un résident en invite deux ou trois
autres, et où, ensemble, on se présente, on évoque des souvenirs et on discute autour de
l’un ou l’autre thème. L’émission est ensuite présentée au salon, ce qui donne à chacun
l’occasion de mieux connaître - voire de découvrir - les goûts, les intérêts, la personnalité
des autres pensionnaires. Ceux qui ne peuvent se déplacer ont aussi l’occasion de voir
l’émission dans leur chambre par le circuit de télévision interne et les familles aiment bien
pouvoir se procurer une cassette.
Claude Debret, le directeur de la Maison Saint-Vincent-de-Paul, précise pour Générations
les motivations de son institution à utiliser la vidéo comme support à la communication.
C. Debret : La vidéo n’est pas une finalité pour nous, mais plutôt un moyen privilégd’ex-
pression et de communication. La philosophie développée par cette technique d’animation
vise, en effet, à favoriser les relations entre les résidents, ainsi que la joie simple d’être
ensemble sans artifice. Chacun a une histoire, son histoire, et le fait de partager ce qui fait
sa vie contribue au sentiment essentiel d’exister encore.
- En quoi la télévision vous aide-t-elle à réaliser ces objectifs ?
C. Debret : Par sa dimension créatrice, notre système de télévision interne donne la pos-
sibilité de s’exprimer à celles et à ceux qui le souhaitent. À ce jour, ils sont une trentaine
de personnes sur 60 à l’avoir utilisé. Il ne s’agit bien sûr pas de plagier les autres télévi-
sions.
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Pour nous, la vidéo est avant tout un outil au service de la communication, et celle-ci
s’exprime à toutes les étapes de la réalisation : au moment de l’élaboration des idées de
reportage, au moment du tournage (avec tous ses problèmes techniques), entre les rési-
dents - « vedettes du petit écran » - et lors de la projection, dont tous peuvent bénéficier, y
compris nos résidents alités, grâce au circuit interne.
- La communication semble vraiment être le maître mot de votre projet...
C. Debret : Oui, tout à fait. Nous avons cette responsabilité institutionnelle de favoriser l’art
d’être soi-même et nous devons, nous institutions, être des « facilitateurs d’expression ».
Même si nous sommes passés par les étapes obligatoires de la maîtrise de l’outil audiovi-
suel et de la production d’émissions internes, nous croyons fondamentalement que c’est la
communication entre les résidents qui est à privilégier.
Communiquer, prendre la parole est en effet un besoin fondamental, c’est manifester notre
liberté, c’est exister. Nous avons tous quelque chose à dire que personne ne peut dire à
notre place. Nous avons tous cette réelle nécessité de sortir de nous, de manifester nos
sentiments, nos pensées, nos projets, nos tempéraments. Et puis, découvrir le plaisir de
communiquer permet de dépasser certains a-priori, la peur d’être jugé, d’être critiqué, car
s’impliquer simplement, c’est le contraire de la neutralité.
Communiquer, c’est aussi accueillir l’autre, avec un regard positif, c’est l’écouter, lui don-
ner la primauté. C’est se faire comprendre, et nous savons tous ce que veut dire n’être
pas compris.
Et enfin, communiquer est également une excellente et efficace thérapie dans la vie rela-
tionnelle de chacun. « Vivre à l’écran », c’est donner une image de soi. Par le sourire,
l’humour, chacun est amené à s’ouvrir aux autres, à se positiver, à s’émouvoir. Cette dé-
marche de se montrer engage les acteurs, nos résidents, à se livrer, à s’impliquer. C’est
un apprentissage vivifiant pour nos anciens, qui très souvent n’ont pas eu l’habitude
d’exprimer leur ressenti.
Vous manifestez un tel enthousiasme lorsque vous parlez de cette réalisation, qu’à vous
entendre, on a un peu l’impression que c’est tout à fait simple à mettre en place et à orga-
niser.
C. Debret : Je ne voudrais pas donner l’impression que cela va tout seul ! Il nous faut, en
effet, réaliser avec nos résidents tout un travail en profondeur pour les amener à se révé-
ler, à se mettre en scène ou en image, à communiquer entre eux. Ils doivent se motiver,
s’entraîner pour se dépasser. Cela leur demande des efforts, de la concentration, de la
mémorisation, qu’il nous faut soutenir pour ne pas leur donner un sentiment d’échec.
Positiver leur marche, construire avec eux leur image, c’est un véritable travail de rela-
tion. Il faut donc du temps, de la patience et beaucoup de sérénité. Il nous faut également
créer un climat de confiance.
Et puis nous devons aussi compter avec leur fatigue, leurs indispositions, leurs humeurs.
Par l’écoute, l’accueil, nous voyons des résidents qui se « donnent » et tout cela fonc-
tionne beaucoup sur le mode du faire-plaisir. Alors, nous sommes dans une relation
d’échange. Au niveau du personnel, la disponibilité de l’équipe d’animation doit être per-
manente.
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Or nous avons nous aussi des moments de doutes, de fatigue, d’interrogations. Nos se-
niors sont exigeants, cyclothymiques, parfois agressifs. Cela demande des efforts soute-
nus, une persévérance, un regard neuf, mais au delà de ces difficultés que nous
connaissons tous, resurgit toujours la volonté de permettre à l’autre de s’exprimer.
Au fond, l’utilisation de la télévision dans votre institution est un moyen qui permet de re-
tisser des liens entre les résidents.
C. Debret : Oui, c’est ça. Le « vivre ensemble » qui constitue notre dynamique institution-
nelle a comme finalité la place de l’homme dans son milieu de vie, donc du résident dans
l’institution.
La condition essentielle pour que cela puisse se réaliser est que chacun compte aux yeux
de quelqu’un et que chacun reçoive et donne du plaisir. La télévision est un moyen qui
nous permet d’y arriver, en montrant bien que chacun existe dans sa problématique, avec
ses valeurs, avec ses différences.
Si, aujourd’hui, notre investissement se trouve récompensé, c’est que nous avons cou-
vert des moments de joie chez nos anciens, et c’est la finalité poursuivie.
Quelques témoignages de résidents
(extraits de la vidéo Vivre à l’écran)
« Moi je trouve ça parfait pour faire connaissance avec le personnel et les résidents, parce
qu’entre les étages, on n’arrive pas toujours à se connaître. »
« On invite 2 ou 3 personnes et on parle ensemble sur un sujet ou l’autre. On apprend à
mieux se connaître, on raconte ce qu’a ésa vie. Chacun donne son opinion et on ap-
prend beaucoup de choses sur la vie des personnes. C’est un moment agréable, on n’est
pas tout seul. On se lie un peu d’amitié. »
« Il y a des gens que je ne connaissais absolument pas. Ces émissions m’ont permis de
faire connaissance et de rencontrer des gens intéressants que j’ai revus après. »
« Ça fait travailler l’esprit et en même temps ça enrichit. Puis ça repasse dans les cham-
bres une semaine après avec la télévision interne. Les personnes qui n’assistaient pas à
cette discussion peuvent la voir dans leur chambre. »
« La vidéo nous apporte beaucoup. Quand on est filmé, on fait attention à ce qu’on dit, on
réfléchit. On essaie de faire des discussions fructueuses. »
« Quand on se revoit après, ça aide à réaliser ce qu’on peut mieux faire. »
« Les gens sont timides, ne se parlent pas. Ou alors, ils ont des préjugés les uns sur les
autres. La vidéo les fait se connaître. »
Mots-clés : communication institution maison de retraite raconter relation d’échange travail de ter-
rain
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