MINISTÈRE
DE L’ÉDUCATION
NATIONALE, DE
L’ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR ET DE
LA RECHERCHE
Les calculatrices, téléphones, tablettes, ordinateurs et autres appareils électroniques
similaires, ainsi que les documents sont interdits.
La qualité de la rédaction sera un facteur important d’appréciation des copies.
On invite donc les candidats à produire des raisonnements clairs, complets et concis.
Les candidats peuvent utiliser les résultats énoncés dans les questions ou parties
précédentes, en veillant dans ce cas à préciser la référence du résultat utilisé.
Notations.
Dans tout ce sujet, Eet Fdésignent des espaces vectoriels de dimension finie sur un corps commutatif Kde
caractéristique nulle. On considérera donc que Kcontient le corps Qdes nombres rationnels.
On note L(E,F)l’espace des applications linéaires de Edans F.
On note Mn,m(K)l’espace des matrices de taille n×mà coefficients dans Ket Mn(K)l’espace des matrices
carrées de taille n.
Étant données deux bases Bet Cde deux espaces Eet Fainsi que u∈L(E,F), on note MatB,C(u)la matrice
de udans ces deux bases.
Pour un espace Eon note Eson dual qui est donc l’espace L(E,K).
On identifie les éléments de Knà des vecteurs colonne, ou encore à des éléments de Mn,1(K). De même on
identifie les éléments du dual de Kn, qui est donc noté (Kn), à des vecteurs ligne, ou encore à des éléments de
M1,n(K).
On rappelle que pour u∈L(E,F), l’endomorphisme tu∈L(F,E)est défini par tu(f)=fupour tout
fF.
Pour A∈M
n(K)on note Tr(A)sa trace, et de même pour u∈L(E)on note Tr(u)sa trace.
Commentaires
Le sujet traite de diverses questions autour de la réduction des endomorphismes. Dans la partie Ion fait redé-
montrer un théorème de réduction de Jordan. Dans la partie II on prouve le théorème du bicommutant. Dans la
partie III on s’intéresse à la décomposition de Dunford d’un point de vue algorithmique, inspirée de la méthode
d’Euler. La partie IV est consacrée à la théorie des répliques de Chevalley.
Une partie préliminaire indépendante du reste du sujet, et pour laquelle on pourra adopter un mode de rédaction
concis, est consacrée à la résolution de trois exercices. On encourage les candidats à y prêter une attention
particulière.
Exercices préliminaires.
Matrices de rang 1
Vérifier qu’une matrice A∈M
n,m(K)est de rang 1 si et seulement s’il existe deux vecteurs non nuls XKn
et Y(Km)tels que A=XY .
Cette écriture est-elle unique ?
Dual de Mn,m(K)
Pour un élément Ade Mm,n(K)on note fAl’application de Mn,m(K)dans Kqui à une matrice Massocie
fA(M)=Tr(AM).
Montrer que l’application qui à Aassocie fAdéfinit un isomorphisme entre Mm,n(K)et (Mn,m(K)).
1
‒ 2 ‒
Matrices associées à une application linéaire donnée.
Soit uune application linéaire d’un espace Ede dimension mdans un espace Fde dimension n, et Aun élément
de Mn,m(K).
À quelle condition existe-t-il une base Bde Eet une base Cde Ftelles que MatB,C(u)=A?
I Réduction de Jordan
Dans toute la suite, Eest un espace vectoriel de dimension strictement positive. Pour uendomorphisme de
E, on note Iul’idéal des polynômes de K[X]qui annulent u, et πuun générateur unitaire de cet idéal qu’on
rappelle être un polynôme minimal de u. On introduit de même πMpour M∈M
n(K).
1. Vérifier l’égalité dimK(K[u]) = deg(πu).
2. Montrer que si uest nilpotent alors pour tout pN,Tr(up)=0.
3. On suppose que pour tout pN,Tr(up)=0. On écrit πu=XkQ(X)avec PGCD(X, Q)=1. On pose
F= Ker(uk)et G= Ker(Q(u)). On va montrer par l’absurde que G={0}.
(a) Montrer que E=FGet que cette décomposition est une décomposition en sous-espaces stables
par u.
(b) On suppose Gnon réduit à {0}et on note uGl’endomorphisme de Ginduit par u. Montrer que
Q(uG)=0et en déduire qu’il existe i>0tel que les traces de ui
Get uisoient non nulles.
(c) Conclure.
[Indication : on pourra étudier la matrice de udans une base adaptée à la décomposition proposée.]
Si dim(E)=n, on rappelle les définitions suivantes ; u∈L(E)est dit cyclique s’il existe x0Etel que
B=(x0,u(x0), ..., un1(x0)) soit une base de E. Un sous-espace Fnon nul de E, stable par u, est dit u-cyclique
(ou tout simplement cyclique s’il n’y a pas d’ambiguité) si u|Fest cyclique.
Pour u∈L(E)on définit C(u)={v∈L(E)/ uv =vu}, c’est-à-dire l’ensemble des endomorphismes de Equi
commutent avec u. Cet ensemble C(u)est appelé le commutant de u.
4. On va montrer que si un endomorphisme ude Eest cyclique, alors K[u]=C(u).
On se donne donc ucyclique, x0Etel que (x0, ..., un1(x0)) soit une base de Eet un endomorphisme
vvérifiant uv =vu.
(a) Vérifier qu’il existe un polynôme Ptel que v(x0)=P(u)(x0).
(b) En déduire l’égalité v=P(u), puis conclure.
5. On suppose l’endomorphisme udiagonalisable. À quelle(s) condition(s) sur ses valeurs propres uest-il
cyclique ?
6. On se donne u∈L(E)nilpotent d’indice 2 avec dim(E)=4. On pose C2=Å00
10
ã. Vérifier l’existence
d’une base Bde Etelle que MatB(u)=ÅC2O
OO
ãou MatB(u)=ÅC2O
OC
2ã.
7. Soit u∈L(E)nilpotent. On va établir un théorème de réduction de Jordan, énoncé ci-dessous, par
récurrence sur n= dim(E):
Si uest un endomorphisme nilpotent, alors il existe des sous-espaces F1, ..., Fktels que E=F1⊕···⊕Fk
et tels que les restrictions de uà chaque Fisoient cycliques.
Le cas n=1est évident et on ne demande pas de le rédiger. Pour le passage des rangs 1, .., n 1au
rang n, on va appliquer l’hypothèse de récurrence à u|Im(u).
On écrit donc Im(u)= p
k=1Fkoù les sous-espaces Fksont supposés cycliques. On choisit alors yktel que
Fk=K[u](yk)et on écrit yk=u(xk)avec xkE.
Posons G= Ker(u)Im(u), on note Hun supplémentaire de Gdans Ker(u).
2
‒ 3 ‒
Tournez la page S.V.P.
(a) Montrer que les sous-espaces cycliques de Hsont les sous-espaces de dimension 1.
(b) Montrer que E=p
k=1
K[u](xk)H.
(c) Conclure.
II Bicommutant
Dans cette partie on se donne un K-espace vectoriel Ede dimension finie.
Pour u∈L(E)on a défini C(u)={v∈L(E)/ uv =vu}, et pour une partie U⊂L(E)on note C(U)=
{v∈L(E)/uU, uv =vu}.
On abrège C(C(u)) en CC(u), voire CCK(u)si on veut faire référence au corps K, qu’on appelle le bicom-
mutant de u. De même on définit C(M)et CC(M)ou CCK(M)pour une matrice M∈M
n(K).
Le but de cette partie est de démontrer le théorème du bicommutant qui affirme : pour u∈L(E),CCK(u)=K[u],
ou, de façon équivalente, pour M∈M
n(K),CCK(M)=K[M].
1. Montrer que si uet vsont des endomorphismes semblables de E, alors dim (CC(u)) = dim (CC(v)).
2. Vérifier que, pour établir le théorème du bicommutant, il suffit de montrer que pour tout u∈L(E),
dim(CC(u)) = deg(πu).
3. Soit M∈M
n(K)et Lun surcorps de K. Montrer l’indépendance du rang par rapport au corps, à savoir
que le rang de Mest le même quand on fait opérer Msur Knou sur Ln.
4. Montrer que si Lest un surcorps de Ket M∈M
n(K), alors les polynômes minimaux de Mconsidérée
comme opérant sur Knet sur Lnsont les mêmes.
5. Montrer que si M∈M
n(K)et Lsurcorps de K, alors dimK(CCK(M)) = dimL(CCL(M)).
En considérant un corps de décomposition de πM, on peut supposer πMscindé sur le corps sur lequel on travaille
pour établir le théorème du bicommutant ; c’est ce que l’on supposera dans la suite de cette partie.
6. On suppose dans cette question M=ÅAO
OB
ã, avec Aet Bdes matrices carrées. On suppose que les
polynômes πAet πBsont premiers entre eux et scindés. On suppose ici que le théorème du bicommutant
est vrai pour les matrices Aet B.
(a) Montrer que la matrice ÅI0
00
ãest dans le commutant de M.
(b) Déterminer le commutant de ÅI0
00
ã.
(c) En déduire que le bicommutant de Mest l’ensemble des matrices ÅP(A)O
OQ(B)ãavec Pet Q
éléments de K[X].
(d) Conclure que le théorème du bicommutant est aussi vrai pour M.
7. On suppose dans cette question que u=λIdE+n, avec nnilpotent.
(a) Vérifier que C(u)=C(n)et CC(u)=CC(n).
(b) Comme nest nilpotent, on sait par la réduction de Jordan [Partie I], qu’on peut écrire E=p
i=1Ei,
avec les Eides sous-espaces cycliques.
On choisit alors xiEiet diNtels que Bi=(xi,n(xi), ..., ndi1(xi)) est une base de Eiet
d1... dp. On note B=p
i=1Bila base de Eainsi formée.
Montrer qu’on a MatB(n)=
Ö
Cd1
...
Cdp
è
, où on a noté Cdla matrice compagnon de taille d,
3
‒ 4 ‒
á00... 0
10... 0
......
0... 10
ë.
(c) Montrer que le théorème du bicommutant est vrai pour l’endomorphisme n.
[Indication : On pourra définir judicieusement des applications pinulles sur les Ejpour j=iet
telles que pi(xi)=xi, puis des applications qinulles sur les Ejsi j=pet telle que qi(xp)=xi].
8. Démontrer le théorème du bicommutant pour une matrice quelconque M∈M
n(K).
III Décomposition de Dunford pour une matrice
Une matrice M∈M
n(K)est dite semi-simple si elle est diagonalisable sur une extension convenable de K.
On va montrer dans cette partie, que Ms’écrit de manière unique M=D+Navec D∈M
n(K)semi-simple,
N∈M
n(K)nilpotente et DN =ND. Ce sont les composantes semi-simple et nilpotente de M.
1. Montrer que Mest semi-simple si et seulement si son polynôme minimal est à facteurs simples sur K.
On fixe jusqu’à la fin de cette partie une matrice A∈M
n(K). On note πAson polynôme minimal. On
écrit πA=Pα1
1...P αk
kla décomposition de πAen facteurs irréductibles. On note P=P1...Pkle produit des
irréductibles distincts divisant πA.
2. Quel est le lien entre Pet le polynôme caractéristique χAde A?
3. Justifier qu’il existe deux polynômes Ret Sde K[X]tels que RP +SP=1.
4. Montrer qu’il existe Qdans K[X, Y ]vérifiant P(X+Y)=P(X)+YP(X)+Y2Q(X, Y ).
On définit par récurrence la suite de matrices (Ak)k0, par A0=Aet pour tout entier k,
Ak+1 =AkP(Ak)S(Ak).
5. Montrer que pour tout entier k,P(Ak)appartient à P(A)2kK[A], et trouver un entier tel que P(A)=0.
6. Montrer que pour un tel entier A=A+(AA)est l’unique décomposition de Aen somme d’une
matrice semi-simple et d’une matrice nilpotente qui commutent.
IV Théorie des répliques de Chevalley
Dans toute cette partie, on considère l’algèbre des matrices carrées Mn(K). Pour M, N ∈M
n(K)on définit le
commutateur par [M, N]=MN NM et on note adM:N→ [M, N]l’endomorphisme de Mn(K)correspon-
dant. On définit de même le commutateur de deux éléments de L(E).
Pour A∈M
n,m(K)et B∈M
p,q(K)on définit ABcomme étant la matrice par blocs
(ai,j B)1in, 1jm∈M
np,mq(K),
et Mn,m(K)⊗M
p,q(K)comme l’espace vectoriel engendré par les matrices ABainsi définies.
On admet l’associativité et la bilinéarité de l’opérateur ainsi défini.
1. (a) Montrer que Mn,m(K)⊗M
p,q(K)=Mnp,mq(K).
(b) Établir que la famille ei,j fk,l indexée par 1in,1jm,1kp,1lq, est une base
de Mnp,mq(K)si (ei,j )i,j et (fk,l)k,l sont des bases de Mn,m(K)et Mp,q (K)respectivement.
(c) Si E=Mn,m(K)et F=Mp,q(K), expliciter un isomorphisme entre (EF)et EF.
2. (a) Si A∈M
n(K)et B∈M
m(K), calculer Tr(AB).
(b) Si A∈M
n(K)et B∈M
m(K), calculer det(AB).
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