ALLOGREFFE ET TRANSFUSION SANGUINE © Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016 6. La sortie dU Patient compléter les informations et de répondre à ses éventuelles questions. Un rendez-vous est pris avec Certains patients rentrent à domicile après la greffe, la diététicienne auquel est convié le conjoint pour tandis que d’autres – pour des raisons de fatigue, aborder toutes les consignes liées à l’alimentation d’isolement familial… – seront pris en charge dans post-greffe. Un livret d’information récapitulant les une structure de soins de suite. recommandations est remis à cette occasion. en plus du bilan hématologique, la décision de sortie Le jour de la sortie, un bilan sanguin est effectué dépend d’un ensemble de critères : état général du de façon à organiser, si besoin, une transfusion avant patient, contrôle de la GVHD s’il y en a une, bilan son départ. Les ordonnances médicales sont expli- rénal et hépatique, état infectieux, besoins transfu- quées au patient par l’interne et l’infirmière qui l’a sionnels. en charge. Le cathéter est fermé avec un bouchon Quand la décision médicale de sortie est évoquée, anti-reflux et un pansement occlusif est mis en l’infirmière de coordination voit le patient en consul- place. tation pour lui rappeler les règles d’hygiène de vie Le patient est informé qu’il peut téléphoner à tout qu’il devra respecter, les éléments de surveillance moment pour poser la moindre question. L’infirmière quotidiens : prendre sa température une fois par de coordination du parcours patient appelle par jour, surveiller sa peau et les signes digestifs, appeler téléphone les patients avant le premier rendez-vous l’hôpital en cas de fièvre et autres signes. Le patient en hôpital de jour (et plus si nécessaire) pour faire sera revu peu de temps avant sa sortie afin de un point avec eux et prendre des nouvelles. * Particularités de la transfusion des allogreffes de CSH pour prévenir l’incompatibilité aBO, source d’accidents et d’incidents transfusionnels chez le receveur de cellules souches hématopoïétiques, une politique transfusionnelle adaptée est nécessaire. L es résultats des examens d’immunohémato- receveur et des produits transfusés, ce qui peut poser logiques du patient et de son donneur (ou des difficultés d’interprétation lors du contrôle pré- des donneurs en cas de double greffe de sang de cordon) doivent être connus et pris en TexTe : RICHARD TRAINEAU, ancien responsable du site transfusionnel de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP) transfusionnel ultime au lit du malade ou d’examen de groupage sanguin. compte dans les protocoles transfusionnels dès le Du fait de la greffe et des éventuels traitements anti- début du conditionnement (groupes sanguins, RAI, rejet ou antiréaction du greffon contre l’hôte, le anticorps anti HLA, etc.). Les produits sanguins labiles patient est en profond déficit immunitaire pour plu- (PSL) transfusés devront être compatibles avec le sieurs mois, voire plusieurs années. Cela rend très patient et le donneur de cellules souches hémato- rare l’apparition d’une immunisation « de novo » anti poïétiques (CSH). érythrocytes (RAI), mais impose la transfusion de Au cours du premier trimestre de la greffe, le patient PSL irradiés (lire p. 44). va passer progressivement de ses groupes sanguins Les alloanticorps du patient préexistant à la greffe propres à ceux de son donneur si les groupes sont vont progressivement disparaître : anticorps du sys- différents. Pendant la première année, le greffé peut tème ABO, anticorps anti-érythrocytes «irréguliers » notamment présenter dans le système ABO, des (RAI positive), anti HLA… L’immunité du donneur va doubles, voire des triples populations, constituées remplacer progressivement celle du patient : atten- d’érythrocytes ayant les groupes du donneur, du tion aux RAI positives du donneur. N° 375 * octobre 2016 * L’INFIRMIÈRE MAGAZINE u 59 ION FORMAT concentrés de globules rouges (CGR) devront être antigéniquement compatibles avec le donneur et le receveur, et ne devront donc pas apporter d’antigènes A ou B absents chez l’un ou chez l’autre. Les plasmas thérapeutiques devront, eux, être sérologiquement compatibles avec le donneur et le receveur et ne devront donc pas apporter d’anticorps du système ABO susceptibles de réagir avec les antigènes de l’un ou de l’autre. > Pour les concentrés de plaquettes (CP), la prise en charge transfusionnelle des patients recevant une allogreffe de CSH est plus complexe. Celle-ci est indiquée sur la carte de consigne transfusionnelle et est © Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016 fonction des différents types d’incompatibilité ABO entre le donneur et le receveur, et de la disponibilité La carte de consignes transfusionnelles remise au patient est susceptible d’être révisée s’il n’a reçu aucune transfusion de globules rouge dans les trois derniers mois. des produits plaquettaires. transfusion de cgr u cartes de groupes sanguins et protocoles transfusionnels > Dans le système Rhésus Kell : en absence d’alloanticorps chez le receveur : Avant le début du conditionnement, les consignes – respecter si possible en priorité les antigènes et protocoles transfusionnels doivent être mis à jour absents chez le donneur et chez le receveur ; en tenant compte des résultats du donneur (groupes et RAI). Les consignes transfUsionneLLes > À J0 de la greffe, une carte dite de consigne transfusionnelle est éditée par le laboratoire immunohématologique du site de délivrance des PSL. Cette concernant Les cgr PoUr Le système aBo concernant Le groUPe aBo des PLasmas PATIENT DONNEUR CHOIX DES PRODUITS PATIENT DONNEUR CHOIX DES PRODUITS carte de consigne doit être remise au patient à sa O O (ou A , ou B, ou AB) A A (ou AB) B B (ou AB) O AB AB O O O A (ou AB) A A (ou O) A A (ou AB) cédents ; cette mise à jour sera effectuée à la vue B O B AB des résultats d’un nouveau prélèvement du patient : AB A (ou O) AB AB chimérisme 100 % donneur (prise « totale » de la O O O B (ou AB) sortie en lui expliquant son importance. Les cartes de groupe antérieures à la greffe doivent être détruites par le service clinique et le patient doit O être informé de détruire celles en sa possession. > La carte de consigne transfusionnelle peut être révisée un an après la greffe si aucune transfusion de globules rouges n’a eu lieu dans les trois mois pré- A greffe), prise partielle ou rejet. O O A O B O AB A O transfusion dans le système aBo B B (ou O) entre 40 et 50 % des greffes de CSH allogéniques AB ne sont pas réalisées en situation ABO identique B entre le donneur et le receveur : 20 à 25 % le sont en situation d’incompatibilité majeure, 20 à 25 % d’incompatibilité mineure et 5 % d’incompatibilité bidirectionnelle. Dans le système ABO, on doit transfuser des PSL compatibles avec le receveur et le donneur. Les 60 L’INFIRMIÈRE MAGAZINE * N° 375 * octobre 2016 AB O A A AB B B (ou AB) B (ou O) AB AB O O O AB A A (ou O) A AB B B (ou O) B AB AB AB (ou A , ou B, ou O) AB AB B AB En rouge : situations d’incompatibilité majeure. En bleu : situations d’incompatibilité mineure. En vert : situations d’incompatibilité bidirectionnelle ALLOGREFFE ET TRANSFUSION SANGUINE – en cas de difficulté ou impossibilité, respecter en pour une durée minimum d’un an où elle pourra être priorité le phénotype du donneur. reconsidérée mais le plus souvent et notamment en > Dans les autres systèmes : en l’absence d’alloimmu- cas de poursuite des traitements immunosuppres- nisation chez le donneur et le receveur, on ne tient seurs, cette indication sera maintenue à vie. Selon pas compte des autres systèmes antigéniques. les recommandations de la Haute Autorité de santé © Espaceinfirmier.fr, Initiatives Santé 2016 (HAS) en 2015, « l’indication de la transformation rai positive “irradiation” est notifiée par le prescripteur à chaque > Si l’anticorps est présent chez le receveur et l’anti- prescription. Lors de la première prescription, le motif gène cible présent sur les hématies du donneur de précis de l’indication est porté à la connaissance de CSH, on respecte cet anticorps, pendant la période la structure de délivrance pour qu’elle puisse inscrire, LEXIQUE > gVh (graft versus host) : la réaction du greffon contre l’hôte (lire p. 51). > PsL > Si l’anticorps est présent chez le receveur et l’anti- grammée. » Ces produits ne contenant pas de gène cible absent sur les hématies du donneur de lymphocytes t viables, l’irradiation des plasmas est CSH, on respecte cet anticorps durant les premiers inutile. Certains CP sont soumis à une technique d’at- (produits sanguins labiles) : CGR, CP, concentrés de granulocytes, plasmas produits par l’etablissement français du sang. mois de la greffe ; on peut le négliger à distance, ténuation d’agents pathogènes, cette technique fait > cgr : lorsque le chimérisme établi correspond à 100 % des intervenir un psoralène et une illumination par la concentrés de globules rouges. post-greffe, jusqu’à la mise en évidence, dans le sang dans sa base de données, le protocole transfusionnel. périphérique du receveur, d’hématies originaires du Le patient en est informé et reçoit un document men- greffon. tionnant cette indication et sa durée si elle est pro- cellules du donneur et que l’anticorps a disparu. lumière ultraviolette (UVA). Cette transformation • Si l’anticorps est présent chez le donneur de CSH, permet d’inactiver les lymphocytes t résiduels et est > cP : on doit toujours le respecter et ne transfuser, dès le équivalente à une irradiation ionisante. concentrés de plaquettes (MCP et CPA). début du conditionnement, que des CGR ne présentant pas l’antigène cible. indication cmV négatif > mcP Aucune étude ne montre une supériorité de l’adjonc- Prévention de l’immunisation anti-rh1 tion de la qualification CMV négatif sur la déleu- elle est indiquée en cas de transfusion de concentrés cocytation des PSL telle qu’elle est pratiquée en de plaquettes RH1 à une receveuse RH-1 ayant un France. Selon la HAS, « il n’y a pas lieu de prescrire avenir obstétrica, mais est inutile du début du condi- la qualification CMV négatif pour les CP et les CGR ». tionnement à 1 an post-greffe en raison de l’immu- seuils transfusionnels nosuppression. > CGR. Les transfusions de concentrés érythrocytaires RECEVEUR DONNEUR PROPHYLAXIE RH1 RH -1 RH -1 RH -1 Pas de prévention au cours des 12 premiers mois et/ou tant qu’il persiste des hématies du receveur. Puis possibilité d’une prévention chez les patientes de sexe féminin en fonction de la clinique, des traitements immunosuppresseurs et si possibilité d’avenir obstétrical. Pas de prévention au cours des 12 premiers mois. Puis possibilité d’une prévention chez les patientes de sexe féminin en fonction de la clinique des traitements immunosuppresseurs et si possibilité d’avenir obstétrical. sont prescrites à partir d’un taux de 7 à 8 g/dl d’hémo globine. Cependant, en cas de mauvaise tolérance clinique, notamment en présence d’un contexte cardio-pulmonaire à risque, le seuil peut être augmenté jusqu’à 10 g/dl. Chez les patients réfractaires aux transfusions de plaquettes qui ont une absence totale de rendement transfusionnel, le taux d’hémoglobine doit être maintenu au-dessus de 9 à 10 g/dl > CP. Le seuil des transfusions de plaquettes peut être fixé à 10 000/mm3, mais en présence de signes Aucune prophylaxie n’est nécessaire si le donneur hémorragiques, d’infection, de fièvre, d’hypertension est RH1 et chez les patients de sexe masculin. artérielle mal contrôlée, de GVH ou de maladie veinoocclusive, le seuil doit être remonté à 20 000/mm3. irradiation des PsL Il sera augmenté à 50 000/mm3 pour la pose d’un Les CGR, CP et concentrés de granulocytes doivent cathéter central, pour la réalisation d’un examen être irradiés, afin de prévenir la GVH post-transfu- invasif (fibroscopie avec biopsie), et en cas de cystite sionnelle. La transfusion de PSL irradiés doit débuter hémorragique ou de prescription d’héparine à dose au plus tard au début du conditionnement du patient hypocoagulante. * N° 375 (mélange de concentrés plaquettaires) : pool de plaquettes provenant de plusieurs dons de sang. > cPa (concentré de plaquettes d’aphérèse) : Concentré de plaquettes provenant d’un seul donneur prélevé sur « machine ». > csh (cellules souches hématopoïétiques) : cellules ayant une capacité d’autorenouvellement à l'origine de toutes les lignées de cellules sanguines. * octobre 2016 * L’INFIRMIÈRE MAGAZINE 61