qu’ils étaient plus fréquents avec ceux de la classe IA, IC et III
en dehors de l’amiodarone. Ces derniers sont associés à un
risque accru de torsades de pointes, en particulier lorsque l’in-
tervalle QT–U est allongé, chez la femme, ou en cas d’associa-
tion à des diurétiques hypokaliémiants [17]. Chez les patients
porteurs de blocs auriculoventriculaires de deuxième ou troi-
sième degré, tous les antiarythmiques, en l’absence de stimula-
tion ventriculaire, sont a priori contre-indiqués. La toxicité ex-
tracardiaque est spécifique pour chacune des classes, le plus
souvent mineure (troubles digestifs) parfois sévère (hyperthy-
roïdie à l’amiodarone) [18].
5. Stratégie thérapeutique
5.1. Tachyarythmies atriales
Aux urgences, la fibrillation auriculaire est le trouble du
rythme le plus fréquemment observé [19,20]. Elle touche 3 à
5 % des patients de moins de 60 ans. La prévalence double
tous les dix ans à partir de 55 ans [21]. La stratégie thérapeu-
tique est établie après l’évaluation de la tolérance hémodyna-
mique, l’établissement du diagnostic, la recherche d’une car-
diopathie sous-jacente ou d’une cause extracardiaque.
Lorsque le patient ne présente pas de signes majeurs de mau-
vaise tolérance clinique et si l’ancienneté de l’arythmie n’est
pas connue, l’urgence n’est pas à sa réduction mais à l’appré-
ciation de la tolérance de la réponse ventriculaire. Pour une
cadence ventriculaire soutenue supérieure à 120/min, le ralen-
tissement rapide devra être effectué.
Les médicaments qui ralentissent la fréquence ventriculaire
sont les bêtabloqueurs, les inhibiteurs calciques, les digitali-
ques et la cordarone [22,23]. Ceux-ci sont utilisés après avoir
corrigé tous les facteurs favorisants :
●les inhibiteurs calciques (diltiazem, vérapamil), sont utiles
en urgence, mais leur réponse est transitoire et ils sont ino-
tropes négatifs [24,25]. La posologie du diltiazem est la sui-
vante : 0,25 mg/kg par voie veineuse lente (en deux minu-
tes) à renouveler si besoin à la 15
e
minute (dose maximale
totale 50 mg). Pour le vérapamil, la dose est de 5 à 10 mg
en deux–trois minutes, renouvelable une fois, 30 minutes
plus tard ;
●les bêtabloqueurs trouvent leur place surtout dans les cas
d’hyperadrénergie, mais comme les inhibiteurs calciques,
ils ont un effet inotrope négatif ce qui limite leur utilisation
en urgence [22,23]. Le bêtabloqueur le plus utilisé lors des
thyrotoxicoses est le propanolol à la posologie de 1 à 5 mg
par voie veineuse ;
●les digitaliques restent la classe la plus utilisée aux urgences
car elle est dépourvue d’effet inotrope négatif. La deslano-
side (Cédilanide
®
)n’étant plus commercialisée, la digoxine
reste utilisable par voie intraveineuse à la dose de 0,25 à
0,50 mg, deux à trois fois par jour en l’absence de contre-
indications formelles [26] ;
●l’amiodarone est recommandée lorsque les autres familles
sont inefficaces ou contre-indiquées [27]. Elle est veinoto-
xique et doit être injectée par voie centrale ou par voie pé-
riphérique après dilution. La posologie est de 5 mg/kg sur
60 minutes, deux à trois fois par jour [19] ;
●il faut aussi citer le sulfate de magnésium, bien qu’il ne
fasse pas partie des recommandations des sociétés savantes.
Une étude prospective randomisée a montré sa supériorité
en termes d’efficacité par rapport au diltiazem
®
[28]. La po-
sologie est de 2 g en bolus puis 1 g/h sur six heures.
Lorsque le patient présente des signes majeurs de mauvaise
tolérance clinique (hémodynamique instable, douleur angi-
neuse, infarctus ou préexcitation patente), il s’agit d’une ur-
gence vitale et la sanction thérapeutique est la cardioversion
par choc électrique externe [19]. Celle-ci s’effectue par courant
continu, sous anesthésie générale brève. Le choc doit être syn-
chronisé à l’onde R pour éviter la période vulnérable du seg-
ment ST, ce qui pourrait précipiter une fibrillation ventriculaire
[19],L’énergie nécessaire pour réduire une fibrillation auricu-
laire est comprise entre 200 et 400 Joules, mais des énergies
réduites de moitié peuvent être utilisées en cas d’onde bipha-
sique tronquée [22]. Il faut commencer par un choc à 200 Jou-
les, et, en cas d’échec, atteindre progressivement la valeur
maximale par paliers de 100 Joules.
5.2. Trouble du rythme jonctionnel
Le principe du traitement repose sur le freinage de la
conduction auriculoventriculaire qui peut être obtenu avec les
manœuvres vagales et/ou par traitements médicamenteux :
●dans un premier temps, les manœuvres vagales sont effec-
tuées [26], en respectant leurs contre-indications. L’effica-
cité de ces manœuvres est proche de 25 % [5] ;
●lorsque la réduction n’est pas obtenue par les manœuvres
vagales, le traitement de référence est l’adénosine triphos-
phate (Striadyne
®
) contre-indiquée en cas d’asthme, de
bronchopathie et d’hypertension [7,12,22,29].L’injection
doit se faire dans une veine de gros calibre et terminée par
le lavage de celle-ci. La posologie initiale est de 3 à 6 mg i.
v. en flash. En cas d’échec, l’injection peut être renouvelée,
à plus forte dose, jusqu’à 12 mg en une à trois secondes en
i.v. [30] ;
●pour certains auteurs, lorsqu’il n’y a pas de cardiopathie
ischémique associée, les inhibiteurs calciques doivent être
prescrits en première intention [29]. Toutefois, le vérapamil
est moins bien toléré que le diltiazem et peut entraîner des
complications hémodynamiques, rares mais sévères si la
fonction ventriculaire gauche est altérée. En revanche, l’in-
jection de diltiazem à 0,25 mg/kg (2,5 mg/min) jusqu’à une
dose maximum de 50 mg est efficace en quelques minutes
[31].L’efficacité des inhibiteurs calciques semble légère-
ment inférieure ou égale à celle de l’adénosine qui varie
entre 78 et 100 % [30,31]. Il faut noter que les inhibiteurs
calciques sont contre-indiqués dans les tachycardies récipro-
ques antidromiques sur une voie accessoire car ils favorisent
la conduction au niveau de la voie accessoire au détriment
M. Vergne et al. / Réanimation 14 (2005) 700–706704