Editions 2015 - Le franc fort: bienfaits et inconvénients pour l`industrie

Economic Research
Zurich, 30 novembre 2015
Raiffeisen Economic Research
economic-research@raiffeisen.ch
Tél. +41 044 226 74 41
Economic Res
e
arch
Eclairage
Le franc fort: bienfaits et inconvénients pour l'industrie
§Depuis longtemps, lconomie suisse doit s'accommoder d'un franc fort. Néanmoins, la part de l'industrie
reste stable, l'emploi ne baissant que modérément – à l'inverse de l'érosion de la base industrielle dans
les pays anglo-saxons.
§Une hausse moindre des coûts de production était en mesure de compenser les désavantages en matière
de prix en raison du cours élevé de la monnaie, jusqu'au moment de la crise financre. Le franc a dès
lors, cependant, connu une évolution trop excessive par rapport à l'euro du moins. Les entreprises, inca-
pables, au cours des années de boom avec un franc sous-évalué, de se constituer une réserve de marge,
se voient aujourd'hui soumises à une forte pression.
§L'industrie suisse reste toujours bien positionnée, en comparaison internationale, malgré les coûts élevés.
L'évolution de la productivité que les chiffres officiels déclarent comme étant nettement plus faible qu'aux
Etats-Unis est en grande partie affaire de statistiques. Le niveau de productivité est très haut en Suisse.
§Parallèlement, la monnaie forte a favorisé un changement structurel continu vers la production de biens
«plus complexes». Avec un taux de coûts salariaux unitaires correspondant à la moyenne internationale,
l'industrie suisse reste concurrentielle – du fait également de la spécialisation dans les marchés de niche.
§Le franc fort a en outre un effet positif sur l'innovation. De plus, les dépenses en formation sont compa-
rativement utilisées de manière plus efficiente – selon les exigences des entreprises. Une désindustrialisa-
tion n'est donc pas en vue.
§Le secteur des exportations suisse peut beaucoup mieux affronter le grand défi que ne le pourraient
d'autres pays face à une évolution similaire de leur monnaie. Cependant, la rapidité et l'ampleur du choc
monétaire devraient au moins temporairement accélérer le changement structurel et entraîner de dou-
loureuses adaptations.
Un franc historiquement fort
Le 15 janvier 2015 est une journée qui fera date dans
l'histoire monétaire de la Suisse. L'abandon du taux
plancher CHF/EUR d'1.20 par la Banque nationale a in-
duit la plus grande valorisation du franc qu'il ne l'eût
jamais connue. La comtitivité des exportateurs
suisses a subi une détérioration subite au niveau des
prix, suivant le choc monétaire, nourrissant les craintes
d'un effondrement de l'industrie suisse et d'une désin-
dustrialisation de la place économique suisse.
Certes, l'industrie suisse est tenue de s'accommoder à
un franc augmentant fortement depuis bien des décen-
nies. La valeur du franc suisse par rapport à l'USD et les
autres partenaires commerciaux dans leur ensemble,
exprie dans le taux de change pondéré des échanges
commerciaux, a plus que triplé, depuis l'adoption de
taux de change flexibles après l'effondrement du sys-
tème Bretton Woods en 1973 (cf. diagramme 1).
L'industrie suisse semble, selon toute vraisemblance, se
trouver dans une situation désespérée, ne pouvant af-
fronter avec succès la concurrence sur les marchés in-
ternationaux. La pression sur les prix devrait provoquer
un exode de grande ampleur de la production et de
l'emploi vers des sites à l'étranger.
Diagramme 1: tendance à la hausse du franc
suisse sur le long terme
Indice de taux de change (1973=100)
Sources: Datastream, Raiffeisen Research
Une industrie faisant preuve de résistance
Les chiffres témoignent toutefois d'une autre situation.
Bien que la participation du secteur manufacturier à la
création de valeur de l'ensemble de l'économie suisse
n'ait certes cessé de baisser entre 1980 et 2000,
l'ampleur du recul reste toutefois dans les normes, en
comparaison avec d'autres pays industrialisés, (cf. dia-
gramme 2), notamment aux Etats-Unis, où le recul de
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Taux de change pondéré des échanges commerciaux
CHF/USD
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cette part est tout aussi important, et en Allemagne qui
a connu une correction plus importante après la réuni-
fication – notamment du fait de la restructuration de
l'industrie est-allemande, en piteux état à l'époque. La
part du secteur manufacturier suisse à la création de va-
leur affiche une certaine stabilité depuis le début du
nouveau millénaire, comme en Allemagne, également.
D'autres pays industrialisés cependant se voient con-
frontés à une contribution en baisse continue, par
exemple en Grande-Bretagne, où ce niveau est même
passé en dessous du seuil des 10% au cours des der-
nières années, malgré une phase de baisse assez longue
de la livre sterling. En Suisse, cette part atteint presque
le double, avec près de 20%.
Diagramme 2: contribution stable de l'industrie
suisse
Part du secteur manufacturier à la création de valeur,
en % de l'ensemble de l'économie
Sources: Datastream, OFS, BEA, Raiffeisen Research
L'évolution de l'emploi reflète l'écart entre les participa-
tions à la création de valeur au cours des vingt dernières
années. La Grande-Bretagne est le pays ayant enregistré
de loin la plus forte perte d'emplois dans le secteur ma-
nufacturier, suivie par la France et les Etats-Unis. Avec
un peu plus de 6%, le recul en Suisse fut en revanche
comparativement modéré (cf. diagramme 3).
Diagramme 3: maintien du niveau de l'emploi
dans l'industrie suisse
Emploi dans le secteur manufacturier, évolution en %
de 1995 à 2014
Sources: Datastream, OFS, Raiffeisen Research
Un changement structurel sain par opposition à
l'érosion de la base industrielle
Malgré une participation plus faible à la création de va-
leur depuis 1980, on ne peut donc pas parler jusqu'à
présent de désindustrialisation en Suisse. La théorie
économique précise qu'un recul modéré de la contribu-
tion de l'industrie est également la conséquence d'un
changement structurel sain dans une économie pros-
père. Le progrès technologique conduit dans l'industrie
à des taux de croissance de la productivité plus élevés
que dans le secteur tertiaire, comme ce fut le cas d'an-
tan dans le secteur agricole. Une hausse du niveau de
vie induit donc une plus grande consommation de pres-
tations de service avec parallèlement une baisse du tra-
vail requis dans l'industrie.
Les pays anglo-saxons se servent souvent de cette argu-
mentation dans le but de relativiser l'importance du très
fort recul de l'emploi que connaît le secteur manufactu-
rier dans ces pays. Certes, tant la Grande-Bretagne que
les Etats-Unis accusent un emploi total ayant connu une
forte hausse en raison du nombre important de postes
créés dans le secteur tertiaire. Ces pays contestent da-
vantage, depuis la crise financière, que le rapide chan-
gement structurel depuis le milieu des années 1990, ac-
compagné d'une perte d'emplois sans précédent dans
l'industrie, ait vraiment été avantageux.
Il existe en effet de bonnes raisons de conserver une
base industrielle saine. Les salaires sont en règle géné-
rale supérieurs à ceux des postes nouvellement créés
dans le secteur tertiaire, dans l'industrie et notamment
dans la production de biens de plus grande qualité. Un
employé dans le secteur manufacturier suisse gagnait
en moyenne 5% de plus que dans le secteur tertiaire.
La différence est plus prononcée aux Etats-Unis, avec
plus de 20%. Par ailleurs, le secteur manufacturier cons-
titue un excellent moteur d'innovation, mû par la pro-
ductivité, et contribue donc généralement au dévelop-
pement du potentiel de croissance d'une économie. En-
fin, selon des études empiriques, les effets indirects sur
l'emploi sont plus forts dans l'industrie que dans le sec-
teur tertiaire. Un poste supplémentaire dans l'industrie
crée plus d'emplois supplémentaires qu'un nouveau job
dans le secteur tertiaire, du fait de la demande externe
de l'entreprise et de la consommation du salarié.
Le changement structurel rapide des pays anglo-saxons
s'est accompagné de l'intégration croissante des pays
émergents asiatiques dans le processus international de
création de valeur depuis la fin des années 1990, auquel
l'adhésion de la Chine à l'Organisation mondiale du
commerce en 2001 donna une impulsion supplémen-
taire.
Des facteurs cycliques et structures tant aux Etats-Unis
qu'en Grande-Bretagne favorisèrent d'antan le cours
très agressif des externalisations de processus complets
de fabrication dans des pays à bas salaires. Les mon-
naies des deux pays connaissaient une valorisation mas-
sive sur plusieurs années, depuis le milieu des années
1990, exerçant une pression notable sur les marges et
la compétitivité des entreprises exportatrices. Outre la
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flexibilité des marchés du travail, deux facteurs essen-
tiels ont, selon nous, contribué au net recul de la part
de l'industrie dans ce contexte:
En premier lieu, l'approche du «Shareholder-value» était
jadis déjà bien ancrée dans les entreprises cotées en
bourse, augmentant les incitations pour le management
à maximiser les bénéfices à court terme. Les pays anglo-
saxons étaient particulièrement susceptibles de multi-
plier les externalisations de la production, l'industrie y
étant davantage détenue par de grandes entreprises co-
es en bourse que dans les autres pays. Par ailleurs, la
politique économique libérale n'a que très peu promu
les PME dans le cadre de la mondialisation. Enfin, les
interdépendances entre les entreprises industrielles
elles-mêmes étaient plus faibles que sur le continent eu-
ropéen.
Les pays anglo-saxons ont, en deuxième lieu, connu un
boom de la consommation et de l'immobilier basé sur
les crédits, qui a stimulé la demande intérieure et donné
un coup de fouet à la demande sur le marché du travail,
entraînant une pression accrue sur les salaires à laquelle
le secteur manufacturier ne pouvait se soustraire. La
Suisse a connu une situation inverse, où la conjoncture
domestique est restée atone un bon moment, suite à
l'éclatement de la bulle immobilière au début des an-
nées 1990, limitant la pression sur les salaires pour les
entreprises exportatrices.
Le taux de change «équitabl
L'évolution différente des salaires, ou bien plus encore
des coûts totaux des entreprises, termine la compéti-
tivité proprement dite de l'industrie en matière de prix
dans les divers espaces monétaires, en conjonction avec
le taux de change nominal.
Les prix nationaux jouent donc un rôle central dans l'ex-
plication des mouvements des taux de change. Il existe
une multitude de facteurs exerçant une influence sur les
taux de change. Il est quasiment impossible de prédire
les mouvements à court terne et même des baisses ex-
trêmes peuvent se maintenir pendant un certain temps
avant qu'un mouvement inverse ne s'amorce soudaine-
ment. L'histoire du franc suisse en est la parfaite illus-
tration.
A long terme, on peut toutefois observer une oscillation
du cours pour la plupart des monnaies autour du con-
cept de la parité du pouvoir d'achat. C'est-à-dire que la
différence en termes d'évolution des prix dans les divers
espaces monétaires se reflète dans les taux de change,
sur une période assez longue. La évaluation continue
du franc suisse par rapport au dollar américain est ainsi
expliquée par un taux d'inflation plus élevé aux Etats-
Unis. Le taux de change réel, corrigé des différents
mouvements des prix, devrait en revanche, présenter
une évolution latérale à long terme, selon la théorie de
la parité du pouvoir d'achat.
Habituellement, on utilise les prix à la consommation
pour calculer les taux de change réels. Le cours el du
franc suisse, pondéré des échanges commerciaux, évo-
luait autour de sa moyenne à long terme jusqu'au mo-
ment de la crise financière (cf. diagramme 4). Depuis,
on constate toutefois une montée en flèche. Selon ce
calcul, l'USD paraît, avec la valorisation dont il bénéficie
depuis le milieu de l'année 2014, nettement surévalué
– un peu comme ce fut déjà le cas au tournant du mil-
lénaire. L'euro réel, se basant sur les prix à la consom-
mation, s'échange, en revanche, à un cours situé sous
sa moyenne à long terme.
Diagramme 4: le franc explose clairement selon
la parité du pouvoir d'achat
Taux de change réels, sur la base des prix à la consom-
mation, indice (moyenne à long terme=100)
Sources: BRI, Raiffeisen Research
Il n'existe cependant aucun meilleur procédé pour cal-
culer un taux de change «équitable». Le niveau du taux
de change réel calculé par le biais des parités du pouvoir
d'achat dépend, d'une part, fortement du choix du
point de départ. Entamant par exemple la correction
des prix dans une phase de faiblesse du franc, une su-
révaluation mesurée lors du contre-mouvement qui s'en
suit sera alors surestimée. Par ailleurs, la mesure des prix
à utiliser est discutable. Les prix à la consommation ha-
bituellement utilisés sont en grande partie déterminés
par les prix de biens immeubles et avant tout des pres-
tations de service destinées aux ménages privés. Toute-
fois, ce sont davantage les coûts de production qui sont
déterminants, en matière de compétitivité des entre-
prises en termes de prix.
Les dépenses en matières premières et fournitures ainsi
que les coûts salariaux constituent de loin les postes de
coûts les plus importants dans le secteur manufacturier.
Il n'existe cependant aucune enquête officielle sur les
prix concernant les coûts de matières premières. En
guise d'alternative, nous utilisons les prix des produc-
teurs et ceux à l'importation en qualité de proxy pour
les coûts de prestations préalables achetées en Suisse et
à l'étranger, afin d'estimer l'évolution des coûts. L'on
obtient ainsi des valeurs approximatives concernant la
part que représentent les salaires, les prestations préa-
lables nationales et étrangères dans les coûts totaux de
production, sur la base des statistiques de production,
qui fournissent des chiffres concernant la structure des
coûts dans le secteur manufacturier suisse, ainsi que de
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CHF EUR USD
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données indiquant la part de biens importés dans les
exportations dudit secteur. En moyenne, le poids de
chacune des trois composantes est d'environ un tiers. A
l'aide de cette pondération, nous calculons un indica-
teur des coûts de production.
Notre indicateur des coûts de production, depuis 1990,
indique une hausse nettement plus faible pour la Suisse
que les équivalents des principaux pays industrialisés
que nous avons calculés avec la même méthode. La
hausse cumulée des coûts pour la Suisse ne dépasse pas
10%. En revanche, on constate pour la Grande-Bre-
tagne et l'Italie que les coûts exprimés en monnaie na-
tionale se sont presque multipliés par deux (cf. dia-
gramme 5) sur la même période.
Diagramme 5: évolution fortement divergente
des coûts de production
Indicateur Raiffeisen des coûts de production du sec-
teur manufacturier, indice (1990=100)
Sources: Datastream, Raiffeisen Research
Des coûts de production modérés compensent
pour une bonne part un franc fort
Les coûts de production constituent, selon nous, un ou-
til mieux adapté pour mesurer les changements de la
compétitivité en termes de prix. C'est pourquoi nous
utilisons notre indicateur des coûts de production pon-
déré comme mesure des prix pour le calcul d'un taux de
change réel, à la place des prix à la consommation.
Nous avons choisi l'année 1990 comme point de -
part. En effet, la volatilité des principaux taux de change
était relativement faible. Actuellement on obtient ainsi,
à titre d'exemple, un taux de change EUR/CHF nette-
ment plus bas et «équitable», par rapport au calcul sur
la base des prix à la consommation qui se situe à peine
au-dessus de l'ancien taux plancher, à 1.24.
Diagramme 6: différents taux de change «équi-
tables»
Taux de change nominal EUR/CHF et valeurs «équi-
tables» sur la base des parités du pouvoir d'achat (PPA)
Sources: Datastream, Raiffeisen Research
Le franc n'est pas surévalué par rapport à toutes
les monnaies
Les taux de change réels du franc, basés sur l'indica-
teur des coûts de production, n'indiquent aucune ten-
dance haussière ininterrompue à long terme, en com-
paraison avec les espaces monétaires (cf. diagramme
7). En particulier durant la décennie précédant la crise
financière, l'industrie suisse a même pu profiter d'une
nette amélioration de la compétitivité en termes de
prix, également vis-à-vis de la zone euro.
Diagramme 7: un euro faible constitue un net
avantage en termes de coûts pour la zone euro
Taux de change réels, sur la base de l'indicateur des
coûts de production, indice (1990=100)
Sources: Datastream, Raiffeisen Research
S'ensuit cependant un revirement radical. La faible
hausse des coûts de production n'était pas en mesure
d'absorber la valorisation du franc. Le taux de change
réel selon les parités du pouvoir d'achat calculé sur la
base de l'indicateur des coûts de production indique,
après le choc monétaire début 2015, une surévaluation
par rapport à l'euro pouvant atteindre 15%. Toutefois,
ceci ne vaut pas pour les pays anglo-saxons. Par rapport
au dollar américain (USD) et à la livre sterling (GBP), on
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Prix à la consommation sur la base des PPA
Coûts de production sur la base des PPA
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GBP/CHF USD/CHF EUR/CHF
Surévaluation du franc
Sous-évaluation du franc
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n'observe aucun écart significatif si l'on opère une com-
paraison sur le long terme. Au contraire, on assiste
me à une légère sous-évaluation (cf. diagramme 7).
Cette évolution n'est guère dramatique pour les entre-
prises suisses ayant été en mesure d'accroître leurs
marges durant la période de taux favorables avant la
crise financière et de constituer, de ce fait, de bonnes
réserves. Par ailleurs, les enquêtes de la Banque natio-
nale suisse au sujet du taux de change révèlent que
nombre d'entreprises ont augmenté la proportion de
prestations préalables importées afin de compenser le
désavantage dû à la monnaie. Notre indicateur des
coûts de production ne nous permet pas de mesurer cet
effet. Le niveau des coûts pour les entreprises baisse
toutefois en raison de ces mesures. Enfin, toutes les en-
treprises ayant tout juste réussi à défendre leur compé-
titivité, au cours des années de boom avec un franc
sous-évalué accuseront de très sombres perspectives.
Une haute productivité compense des coûts éle-
vés
L'évolution des coûts ou de la compétitivité proprement
dite en matière de prix n'est cependant pas le seul élé-
ment déterminant pour la capacité compétitive des en-
treprises suisses. La productivité joue un rôle au moins
tout aussi important. Plus on peut produire avec une
quantité précise de matières premières et de travail,
moins la compétitivité sera entravée par des hauts ni-
veaux de salaire ou une monnaie forte.
La mesure la plus utilisée pour la productivité est la va-
leur ajoue brute par heure travaillée. Tout change-
ment dans la productivité du travail est alors calcusur
la base de la valeur ajoutée brute réelle afin d'exclure
les effets distordants des prix. Le miracle de productivité
ressort ainsi clairement d'une comparaison des chiffres
de la productivité à l'échelle internationale sur le long
terme aux Etats-Unis. Dans le secteur manufacturier, la
productivité y a augmenté bien plus fortement qu'en
Suisse ou en Allemagne (cf. diagramme 8).
Diagramme 8: le miracle de productivité ari-
cain
Productivité du travail dans le secteur manufacturier,
valeur ajoutée brute réelle par emploi,
indice (1990=100)
Sources: BEA, OFS, Statistisches Bundesamt, Raiffeisen Research
Alors que la productivité du travail a augmenté en
moyenne de 2,9% en Suisse, en comparaison annuelle
depuis 1990, cette hausse s'élève à 4,2% aux Etats-Unis
selon les chiffres officiels. Les chiffres confirment égale-
ment que l'industrie étatsunienne aurait énormément
gagné en compétitivité, principalement après le tour-
nant du millénaire. Pourtant, aucune répercussion à
long terme n'a été constatée sur le marché du travail.
Par ailleurs, il n'existe aucune corrélation entre la per-
formance des industries exportatrices suisses et alle-
mandes en matière d'évolution de la productivité, indi-
quée comme fortement inférieure à la moyenne, et leur
succès.
Comparant par ailleurs les valeurs de productivité abso-
lues des pays, soit la valeur ajoutée brute nominale par
heure travaillée, il convient d'émettre de forts soupçons
envers la pertinence des périodes de productivité. Con-
vertie avec les taux de change, la valeur ajoutée par
heure travaillée dans le secteur manufacturier suisse est
en effet sensiblement supérieure à la valeur étatsu-
nienne en 2013 (cf. diagramme 9). Même avec une dé-
cote pour le franc fort sur les valeurs calculées sur la
base de l'euro, on n'obtient pas une évolution de pro-
ductivité durablement et nettement plus mauvaise.
Diagramme 9: aucune trace d'une faiblesse de la
productivité suisse
Niveau de productivité dans le secteur manufacturier
par heure de travail fournie, indice (Allemagne=100),
calculé en 2013 en euros.
Sources: OFS, Statistisches Bundesamt, IW, Raiffeisen Research
Le miracle de productivité étatsunien fonde, selon notre
analyse, essentiellement sur des données statistiques.
L'évolution de la productivité américaine se voit gonflée
davantage par différents procédés de correction des
prix lors du calcul de la valeur ajoutée brute réelle, en
comparaison à d'autres pays. Une correction des diffé-
rentes méthodes de calcul affiche des valeurs beaucoup
plus faibles pour les Etats-Unis, principalement au cou-
rant du nouveau millénaire. Au total, l'avance en termes
d'évolution de la productivité par rapport au secteur
manufacturier suisse disparaît ainsi complètement. Pour
plus de détails, veuillez vous reporter à l'encadré 1 à la
page suivante.
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