encore un sens ? ». La lettre adressée en décembre 1959 à la
Fondation Rockefeller6 en vue d’obtenir une subvention lui
permettant de mener à bien sa tâche est encore plus
instructive. On y apprend que ses plans remontaient à l’année
1955 pour le moins, qu’elle disposait de larges extraits au
brouillon et qu’une des raisons pour lesquelles elle avait dû
différer ce projet tenait à la rédaction concomitante de La
Condition de l’homme moderne, publiée en 1958. Plus encore,
de l’aveu d’Arendt, La Condition de l’homme moderne, où
sont analysés le Travail, l’Œuvre et l’Action, était conçue
comme « une sorte de prolégomène au livre que j’ai l’intention
d’écrire maintenant […] [et qui] reprendra la question à
l’endroit où s’achève le précédent. Il sera exclusivement
centré sur l’action et la pensée ». Face au refus de la
Fondation, Hannah Arendt renonça à son projet qui ne
survécut plus que sous la forme de conférences :
« Introduction à la politique »7 et « Philosophie et politique :
qu’est-ce que la philosophie politique ? »8, sans pour autant
détruire les manuscrits. Ils sont au nombre de sept : aucun
n’étant daté, l’éditeur allemand, Ursula Ludz, s’en est chargé
ainsi que de leur classement9. Les fragments 1, 2a, 2b auraient
donc été rédigés entre 1956 et 1957, les fragments 3a, 3b, 3c,
3d entre 1958 et 1959. L’éditeur leur a rajouté un chapitre
prévu sur « La position socratique » qui n’a pas été écrit1 0 et,
très judicieusement, la conclusion d’un cours que Hannah
Arendt avait prononcé au début de l’année 1955 à l’université
de Berkeley, intitulée « Du désert et des oasis »11.
Quels sont les concepts dont Hannah Arendt dispose en
1955 alors qu’elle commence à réfléchir à la question « Qu’est-
ce que la politique ? » ? Hannah Arendt avait publié sa thèse
sur saint Augustin en 19291 2 . Elle retient de lui sa situation, la