De la lecture… à la pratique
Compte rendu de l’ouvrage
L’empathie.Unsixièmesens
Brunel M-L., Cosnier J., L'empathie. Un
sixième sens. (2012). Lyon: PUL, ISBN :
978-2-7297-0859-7.
Recension d’ouvrage réalisée par :
Marie Dumoulin, étudiante à la maîtrise en carriérologie, UQÀM
Sous la direction de :
Louis Cournoyer, Ph.D., c.o.
Professeur (counseling de carrière)
Université du Québec à Montréal
1. Avant-propos: l’empathie, un sixième sens chez les conseillers d’orientation...
Les clients rencontrés par les conseillers d’orientation se présentent non seulement
avec une problématique de carrière, mais également avec une personnalité et un vécu
propre à chacun d’eux. Différents types d’approches peuvent être mis de l’avant par
les conseillers, mais rares sont les interventions ne faisant pas preuve d’empathie. Ce
texte traite du livre L’empathie, un sixième sens de Marie-Lise Brunel et Jacques
Cosnier. On y présente d’abord l’histoire du terme « empathie » pour ensuite
développer sur ses origines biologiques et ses mécanismes. Les auteurs traitent
également de l’empathie dans les interactions de la vie quotidienne et des façons de
mesurer les degrés d’empathie des individus. Plus proche de la pratique des
conseillers d’orientation, cet ouvrage présente les différents outils d’intervention et
notions des psychothérapies humanistes et de la psychanalyse. En outre, on y
retrouve un chapitre sur les dysfonctions pathologiques présentent dans l’empathie,
pouvant apparaîtrent chez différents individus. Enfin, les auteurs mentionnent les
différentes formations à l’empathie disponibles et frôlent les quelques corps de métier
nécessitant de l’empathie.
Cet ouvrage, se voulant un premier bilan de l’empathie, a été publié en 2012 à Lyon.
La lecture de celui-ci est une occasion d’approfondir le concept d’empathie que nous,
conseillers d’orientation, utilisons quotidiennement dans nos pratiques
professionnelles.
2. Qui sont Marie-Lise Brunel et Jacques Cosnier ?
Marie-Lise Brunel avait fait des études supérieures en histoire avant de devenir
doctorante en psychologie du counseling et spécialiste de l’empathie. Elle était
professeure à l’Université du Québec à Montréal (UQÀM). Dans le cadre de ce
poste, elle a animé des formations et dirigé des recherches traitant de l’empathie. Elle
2
a également rédigé plusieurs publications sur le sujet. Jacques Cosnier est docteur
d’État en sciences naturelles et spécialiste en psychiatrie. M. Cosnier a une formation
pluridisciplinaire biologique, clinique, psychanalytique et psychiatrique. Professeur
émérite à l’Université Lumière Lyon 2, en France, il a enseigné la psychophysiologie,
l’éthologie et la psychologie des communications. Il est l’auteur de plusieurs
ouvrages dans le domaine de l’empathie. Les auteurs se sont rencontrés à l’Université
de Lyon 2 alors que Mme Brunel faisait une année sabbatique et que M. Cosnier
dirigeait le Laboratoire d’éthologie des communications de l’Université.
3. Compte rendu commenté de l’ouvrage de Brunel et Cosnier
Le titre du chapitre 1 de l’ouvrage résume très bien ce dont il est constitué: Histoire
du terme et du concept d’empathie. On y démontre combien les concepts reliés à
l’empathie ont un long passé en philosophie et une étendue dans diverses disciplines
comparativement à l’histoire du terme même. “Einfühlung” est la forme germanique
du terme “empathie” qui fut introduite par Robert Vischer durant la période du
romantisme allemand, en 1873. Le terme faisait alors référence au fait de s’identifier
à une oeuvre artistique et désignait davantage le sentir par rapport au réfléchir.
L’introduction du concept au domaine de la psychologie, où il désigne alors un
problème de compréhension d’autrui, vient du Philosophe Theodor Lipps. Freud
l’utilisera en faisant référence à la « communauté de représentation créée entre un
patient et son psychanalyste ». Au début du XXe siècle, le terme est introduit dans le
vocabulaire de la psychologie anglophone, mais reste inutilisé dans les laboratoires
universitaires étant donné l’arrivée de la vague behavioriste. C’est en 1960 que le
terme sera francisé. Il refera surface en grande partie grâce à l’approche non directive
de Carl R. Rogers, reconnue comme constituant la base de la psychologie du
counseling et des thérapies humanistes. Le concept sera ensuite intégré dans les
préoccupations de recherche de plusieurs disciplines grâce à la large place que
prendra le mouvement interactionniste dans les sciences humaines. L’histoire du
3
concept de l’empathie est liée à l’histoire et l’évolution de l’homme. Il prend
naissance pendant les grands voyages, lors de la découverte de peuples radicalement
différents. À la jonction du XIXe et du XXe siècle, le terme prend forme en
sociologie et en philosophie avant de devenir significatif dans plusieurs autres
disciplines des sciences humaines. En sociologie allemande on le développe sous
l’idée d’une sociologie compréhensive et en psychologie allemande Freud l’exprime
dans la psychanalyse et Schütz dans l’intersubjectivité. Le développement de l’École
de Chicago, où l’on étudie les rapports entre les individus, joue un rôle important
dans le développement du mouvement interactionniste. Les sociologues de langue
allemande ont contribué à son développement. À Chicago, Mead incorpore l’idée de
prise de rôle au concept d’empathie. Blumer introduit ensuite l’interactionnisme
symbolique désignant la mouvance interactionniste. Goffman en fera part en
microsociologie par l’étude des interactions conversationnelles. Les travaux du
biologiste éthologique Bateson inspirent l’école de Palo Alto et les modèles
systémiques. Dans le monde de la francophonie, le sociologue Tarde traite
« d’interpsychologie » tandis que la psychologie sociale traite plutôt d’une « science
de l’empathie ». C’est essentiellement dans la dernière partie du XXe siècle que
l’empathie devient un objet privilégié pour la psychologie scientifique, pour les
sciences du langage et l’éthologie, et ce, dans la volonté de développer une « théorie
de l’esprit » (capacité d’attribuer des états mentaux à autrui). Finalement, l’empathie
est associée à la mise en jeu de plusieurs structures cérébrales en neuroscience
cognitive. Les auteurs se servent de cette revue générale du terme d’empathie pour en
extraire une définition provisoire en trois versants (empathie de pensée, d’affect et de
comportement) d’où ils font ressortir trois dimensions mises au service de la
compréhension d’autrui (active, passive et motrice).
Le chapitre 2 s’intitule Phylogénèse et ontogénèse de l’empathie. Il vise à déterminer
les origines biologiques de l’empathie. Les auteurs observent des comportements qui
pourraient évoquer l’existence d’un processus empathique dans deux catégories
4
d’activités, soit dans la reproduction (composantes sexuelles et parentales) et dans la
vie sociale (organisation et systèmes de communication). Pour ce qui a trait aux
comportements reproducteurs, on observe des interactions impliquant le choix d’un
partenaire et des rapports et échanges corporels synchrones autant chez un
protozoaire commun (petit organisme unicellulaire) que chez l’épinoche à trois
épines, un oiseau où le mâle fait la cour à la femelle pour se reproduire et ensuite
s’occuper de ses petits. Les différents exemples donnés par l’auteur nous démontrent
que les animaux sont capables de synchronie interactionnelle. Les mammifères
démontrent également une forme d’empathie par les comportements parentaux que
l’on observe entre mères et petits. Chez les humains, l’empathie se révèle par les
phénomènes d’empreinte, d’attachement et de périodes sensibles. On observe des
interactions pouvant évoquer l’empathie dans le domaine social, de par cette
composante d’une société qu’est la pulsion affiliative (tendance de à entrer en
relation). Ce phénomène est également observable pour plusieurs autres espèces que
les mammifères, chez les reptiles et invertébrés par exemple. On l’observe par la
contagion motrice (bancs de poissons, envolés d’oiseaux, etc.), par l’effet de groupe
(facilitation sociale alimentaire et sexuelle des mammifères) et par le travail
coopératif observé chez les abeilles dans la construction d’une alvéole, par exemple.
Il est aussi possible d’évoquer l’empathie en observant les jeux de jeunes
mammifères et la manière dont se fait l’apprentissage interactionnel, soit par
observation et imitation. Les auteurs reviennent ensuite à une perspective plus
évolutionniste en traitant de la façon dont les primates sont capables d’inférence, de
prévision des réactions, de prévision de l’état d’autrui et de relations individuelles
privilégiées. Ces exemples permettent de rendre compte que l’intersubjectivité existe
dans le règne animal. Une empathie trans-spécifique est aussi observable par
exemple chez les hommes et les animaux de compagnie et dans certaines interactions
écosystémiques observées entre les proies et leurs prédateurs, celle-ci étant nécessaire
pour la survie de l’espèce. Finalement, un processus empathique est aussi notable
dans l’affectivité mère-enfant. Alors que la mère est attentive aux comportements du
1 / 14 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !