Introduction : • Marchés parfaitement concurrentiels : l`équilibre

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Economie Publique
Eric Malin
Introduction :
• Marchés parfaitement concurrentiels : l'équilibre général traite de l'allocation des ressources dans
un cadre décentralisé. Dans ce cadre, les agents économiques n'interagissent qu'au travers de l'effet
de chacune de leurs décisions sur les prix.
• Définitions
Externalité ou Effet Externe : Tout effet indirect d'une activité de production ou de
consommation sur un ensemble de consommation ou de production; l'effet est indirect au sens
où il est créé par un autre agent que celui qui est affecté et qu'il n'agit pas par l'intermédiaire
des prix. On parlera d'externalité négative (positive) si elle réduit (augmente) les possibilités
de consommation ou de production. Cette définition est contingente à la définition précise des
agents et des marchés. Etant donné un système économique (un ensemble d'agents
économiques et de marchés), il peut ou non subsister un certain nombre d'externalités. Le
problème est qu'il y a une réflexion très limitée sur la détermination de la taille des unités
économiques et du nombre de marchés; notamment Arrow-Debreu étudie une économie à
agents et marchés donnés.
Bien public : non excluabilité (on peut en empêcher la consommation en le faisant payer par
exemple) et non-rivalité (l'usage du bien par un agent n'en prive pas d'autres agents ou ne
dégrade pas cet usage). Les biens publics "purs" vérifient les 2 conditions (ex: connaissances
scientifiques, défense nationale). Les ressources communes (ex: poissons, environnement) ne
vérifient pas la non-rivalité. La propriété de non-rivalité distinguant les biens publics est un
peu artificielle : il y a toujours "destruction" par l'usage si le bien est défini très précisément.
C'est sans doute la plus ou moins grande difficulté d'exclusion d'usage qui va définir le
caractère public d'un bien (notamment selon le nombre d'agents concernés: plus il est grand
plus il est difficile d'exclure des agents de son usage). Enfin on peut noter qu'il y a une relation
étroite avec les externalités : un agent qui finance un bien public crée une externalité positive
pour les autres agents (ex: éducation); de nombreux biens impliqués dans les problèmes
d'externalité sont publics (environnement, etc.).
• Présentation:
(I) nécessité de l'intervention de l'autorité publique à des degrés divers pour corriger
l'inefficacité causée par les effets externes ou les biens publics
(II) qu'est ce qui doit guider cette intervention : prise en compte des préférences
individuelles et analyse coûts - bénéfices
I.
Externalités et Biens Publics sont des défaillances de marché dont la résolution nécessite
l'intervention publique
A. Invalidation du premier théorème de l'économie du bien-être: inefficacité de
l'équilibre concurrentiel
1) Caractérisation d'un optimum de Pareto avec externalité et comparaison avec
l'équilibre concurrentiel
A l'optimum de Pareto, le surplus social est maximisé. Cela se traduit par l'égalité de
la valeur marginale sociale de l'externalité et du coût marginal social de cette
externalité. Valeur sociale et coût social tiennent compte des effets privés et des effets
induits sur d'autres agents. Par exemple, s'il s'agit d'une seule externalité négative de
production, le coût social intègre à la fois le coût privé de production et les coûts subis
par les "pollués". En revanche, l'équilibre concurrentiel est caractérisé par l'égalité des
seuls bénéfices et coûts marginaux privés. L'équilibre est inefficace car les agents
générant l'externalité ne prennent pas en compte, dans leur choix d'externalité, la
désutilité des agents affectés. D'autre part, les agents "pollués" n'ont pas dans le cadre
standard la possibilité d'influencer le choix des "pollueurs" en les payant (ceci suggère
donc la création d'un marché). En termes plus formalisés, l'efficacité est caractérisée
par l'égalité des TMS sociaux (TMS privés + effets induits) et des TMT sociaux (TMT
privés + effets induits) alors que l'équilibre est défini par l'égalité des TMS et TMT
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privés. En cas d'externalité négative (positive), il y a sur-production (sous-production)
d'effet externe par rapport à ce qui serait optimal.
2) Caractérisation d'un optimum de Pareto avec bien public (Condition de BowenLindahl-Samuelson) et comparaison avec l'équilibre concurrentiel de souscription
privée : problème du passager clandestin
Dans la mesure où tous les agents pourront profiter de la même façon du bien
public (ils peuvent consommer la même quantité de ce bien), la quantité de bien
public devrait être fixée sur la base de la somme des dispositions à payer le bien
public. A l'optimum de Pareto, la somme des bénéfices marginaux privés tirés de
la consommation du bien public est égale au coût marginal de production du bien
public (condition de Bowen-Lindahl-Samuelson). Alors qu'à l'équilibre
concurrentiel on va encore avoir égalité des bénéfices marginaux privés avec le
coût marginal. Dans la caractérisation de l'équilibre concurrentiel, chaque
consommateur choisit sa quantité demandée de bien public étant donné son prix et
compte tenu des achats (ou contributions) des autres agents puisqu'il pourra
également en profiter (bien public!); le producteur de bien public choisit la
quantité qui égalise son coût marginal au prix du bien public. La quantité de bien
public à l'équilibre concurrentiel sera inférieure à la quantité optimale : le
problème est qu'en achetant du bien public un agent ne tient compte que de son
bénéfice privé et pas de l'externalité positive qu'il génère pour les autres alors qu'il
a bien conscience des retombées positives pour lui des contributions des autres
agents. Il y a un problème de passager clandestin : chaque agent est incité à
profiter des contributions des autres agents tout en contribuant soi-même de
manière insuffisante. Formellement, la résolution est celle d'un équilibre de Nash
d'un jeu proche du dilemme du prisonnier ou du duopole de Cournot : à l'équilibre
de ces jeux on a une situation sous-optimale pour les agents due aux tentations
d'opportunisme.
B. Ces défaillances peuvent être résolues par des mécanismes de marché ou
décentralisés…
Le principe est de compléter les marchés soit de manière fruste (négociation) soit sophistiquée
(biens publics personnalisés).
1) Code moral ou sanction sociale conduisant les décisions décentralisées vers
l'optimum : insuffisant
2) Cas des effets externes: Négociation et Théorème de Coase; robustesse du résultat
d'efficacité à la distribution des dotations (mais effet redistributif)
Théorème de Coase (1960): si les droits de propriétés sont bien définis et qu'on
peut les faire respecter, alors une négociation bilatérale permet aux agents
d'effectuer les transferts monétaires pour atteindre une allocation optimale. La
répartition des droits n'influence pas l'efficacité du résultat mais par contre affecte
les niveaux de bien-être à l'équilibre. Par exemple, si le non-fumeur détient tous
les droits sur l'air de la chambre, il peut faire une proposition "à prendre ou à
laisser" au fumeur lui demandant une compensation monétaire en échange de
fumée : la meilleure offre du non-fumeur est formulée de façon à être acceptée par
le fumeur et spécifie une quantité de fumée égale à la quantité optimale et un
transfert monétaire correspondant exactement à la variation de bien-être du
fumeur. Le résultat final sera plus favorable au non-fumeur étant donné la
répartition initiale des droits. On constate déjà au niveau de cette négociation
simple que les agents ont besoin d'information sur les préférences pour mener la
négociation vers l'optimum. Malgré tout l'information nécessaire est moindre que
celle requise dans les procédures de décentralisation par l'Etat. Les coûts de
transaction sont sans doute non négligeables (puisqu'il n'existait pas spontanément
de marché) ce qui fragilise la procédure. La complexité de la négociation peut
également représenter un obstacle à l'efficacité : durée de la négociation, nombre
d'agents devant se coordonner au sein de procédures bilatérales interdépendantes.
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3) Cas des biens publics : Equilibre de Lindahl.
Il s'agit d'un équilibre concurrentiel dans une économie fictive où l'on a élargi
l'espace des biens pour avoir les biens privés et des biens publics personnalisés.
Chaque consommateur maximise son utilité étant donné le prix de son bien public
et émet une demande fonction de ce prix. Il y a production jointe de ces biens
publics par la même entreprise et la quantité est produite pour maximiser le profit
en fonction du prix annoncé qui est la somme des prix individualisés. A l'équilibre
de Lindahl, le système de prix est tel que tous les agents demandent la même
quantité de bien public et que cette quantité est également celle produite par
l'entreprise pour la somme des prix personnalisés. Comme d'habitude une fois le
bien public produit tout le monde peut en profiter de la même façon. Cet équilibre
est bien un optimum de Pareto ce qui est logique puisqu'on a complété les
marchés. Cependant, cet équilibre pose deux types de problèmes : celui du
comportement concurrentiel sur des marchés individualisés ne concernant par
définition qu'un agent!! Celui de la révélation correcte de la demande de bien
public au prix annoncé (on est tenté est de contribuer le moins possible dans la
mesure où l'on pourra profiter du bien public acheté par les autres). On a déjà vu
plus haut ce comportement de passager clandestin qui est d'autant plus fort que le
nombre d'agents est grand.
C. …Mais en général réclament l'intervention à des degrés divers de l'autorité publique
(du simple cadre légal nécessaire à la création de marchés jusqu'à la décentralisation
d'un optimum de Pareto)
1) Définition précise et garantie légale des droits de propriété :
Ces conditions nécessitent l'intervention de l'Etat (la théorie, par exemple dans le
cas des négociations, est ambiguë puisqu'elle néglige trop souvent l'origine du
cadre institutionnel minimal pour procéder aux échanges). Cette condition touche
bien sûr en priorité les effets externes pour permettre les négociations (Coase) ou
la création d'un marché de droits mais elle est également valable pour les biens
publics. En effet, dans certains cas, l'attribution de droits de propriété sur des biens
publics permet de résoudre en partie les problèmes. C'est surtout vrai pour les
ressources communes: par exemple, la privatisation des troupeaux d'éléphants
dans certains pays d'Afrique a permis de réguler la population d'éléphants qui
augmente de nouveau.
2) Création de marchés de droits pour les externalités
C'est la même logique que Coase : on passe d'une procédure très particulière de
marché (négociation simple) à un marché où les agents échangent des droits sur
l'externalité. Etant donnés leurs dotations en droits d'externalité et le prix du droit
d'externalité, les agents prennent leur décision d'achat ou de vente de droits et
atteignent un équilibre concurrentiel pareto-optimal (l'efficacité est indépendante
de la répartition initiale des droits). Ce résultat est dû au fait qu'on a complété les
marchés permettant ainsi de retrouver le cadre théorique standard. Cependant, des
problèmes subsistent. Si les marchés concernent un nombre limité d'agents, il y a
peu de chance que leur fonctionnement soit concurrentiel et efficace; en revanche,
lorsque de nombreux agents "polluent", l'externalité est impersonnelle car seul
compte l'effet agrégé et en fixant l'offre inélastique au niveau optimal, le grand
nombre de "pollueurs" permet d'espérer un comportement concurrentiel. Il y a
aussi un problème distributif dans la mesure où la redistribution finale dépend de
la répartition initiale des droits par l'Etat. Enfin on comprend mal pourquoi les
coûts de transaction sont devenus suffisamment faibles (par rapport aux bénéfices
de l'ouverture du marché) qu'ils autorisent la création d'un marché qui n'existait
pas spontanément auparavant.
3) Quotas et Taxes (Subventions) (Pigou 1920)
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L'Etat peut intervenir de façon plus explicite en décentralisant un optimum qu'il
juge souhaitable de réaliser. Parmi les principaux instruments : quotas et taxes.
Les quotas consistent pour l'Etat à fixer le niveau d'activité génératrice
d'externalité correspondant à l'optimum puis à organiser la répartition de ce quota
total sur un marché de permis à "polluer" pour une offre fixée au niveau du quota.
Cet instrument est équivalent au choix d'une taxe préconisée à l'origine par Pigou
(taxe pigouvienne ou taxe pollueur-payeur). Le choix des taxes dans le cas
d'externalité négative (ou subventions pour les effets positifs) est réalisé de
manière à ce que le comportement d'optimisation des agents conduise à l'optimum
de Pareto. Les taxes sont fixées au niveau des effets marginaux des activités (de
consommation ou de production) "polluantes" sur les activités "victimes" des
effets externes. Les agents "pollueurs" internalisent les coûts ou bénéfices sociaux
de leur activité. Il est préférable de taxer directement l'activité génératrice de
l'externalité car sinon on risque de ne pas affecter correctement les comportements
des "pollueurs" et on va introduire des distorsions de consommation. Par
exemple, si pour limiter le bruit provoqué par la musique on taxe les CD, il n'y a
pas de raison que cela permette de restaurer l'optimum car il y a d'autres moyens
de faire du bruit musical et en modifiant le prix des CD on a changé les prix
relatifs des biens et induit des effets de substitution peu contrôlables. Autre
exemple: il vaut mieux taxer la pollution d'une firme plutôt que sa production sauf
s'il y a une relation croissante parfaite entre quantités de pollution et de
production.
L'utilisation de subventions est valable également pour inciter à une plus grande
production de biens publics (effet externe positif).
La limite de ces approches est informationnelle : l'Etat doit connaître coûts et
bénéfices marginaux pour en déduire le quota optimal ou la taxe efficiente.
4) Distinction externalités multilatérales privées (ex: décharge) et publiques (ex: air
pollué)
Dans de nombreux cas, les externalités sont émises et reçues par de nombreux
agents (pollution industrielle, congestion, etc.), on parle alors d'externalités
multilatérales qui peuvent être privées (il y a rivalité si le fait qu'un agent
subissant une externalité réduit le montant d'externalité ressenti par d'autres
agents) ou publiques. Les solutions de marché sont efficaces pour les externalités
privées si les droits de propriété sont biens définis et respectés. Par contre, pour les
externalités publiques, il est difficile de faire respecter des droits dans la mesure
où la pollution est diffuse. Seule une solution mixte (quotas et permis d'externalité
échangeables) pourra donner une issue efficiente.
5) Intégration des entreprises : on revient à une situation efficiente puisque la
nouvelle entité maximise le profit joint des entreprises auparavant indépendantes.
Conclusion: l'autorité publique doit disposer d'une information considérable pour
restaurer l'optimalité. Cette exigence informationnelle est également en jeu dans les
procédures de marché où l'Etat intervient moins lourdement.
D. Dans tous les cas, l'information asymétrique réduit l'efficacité des procédures et
nécessite la mise en place de mécanismes révélateurs
1) Les procédures usuelles (négociation, taxes, quotas) perdent leur efficacité et leur
équivalence.
La manipulation de l'information, visant à payer (l'effet externe ou le bien public)
moins qu'on ne le devrait, entraîne évidemment un résultat inefficace. D'autre part,
l'équivalence des quotas et taxes est rompue. Prenons par exemple l'information
incomplète sur les coûts subis par les consommateurs du fait de l'effet externe. Si les
coûts marginaux des consommateurs varient fortement à la hausse avec l'externalité,
les quotas sont le meilleur instrument. Si leurs coûts marginaux sont indépendants du
niveau de l'externalité la taxe donnera un meilleur résultat.
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2) Mécanismes de révélation : principe de révélation (Gibbard 1973) et exemple de
mécanisme à la Groves (1973) - Clarke (1971)
L'Etat va mettre en place des mécanismes visant à obtenir de l'information privée des
agents.
Qu'est ce qu'un mécanisme?
Le cadre théorique est le suivant: les agents ont une information privée sur leurs
caractéristiques (ex: dispositions à payer, coûts, etc.) et l'Etat devrait prendre la
meilleure décision pour la collectivité en fonction de ces caractéristiques. On appellera
fonction de choix social la fonction qui associe aux caractéristiques des agents un état
social.
On sait que dans cette situation d'information incomplète, les agents sont amenés à
envoyer des messages (à l'Etat) qui ne correspondent pas forcément à leurs vraies
caractéristiques (par ex: pour payer l'externalité ou le bien public, les agents vont
envoyer un message concernant leur disposition à payer mais ils ont tout intérêt à
prétendre une disposition plus faible).
Un mécanisme associe aux messages envoyés par les agents un état social réalisable
(spécifiant la quantité d'externalité, de bien public, etc.). Un mécanisme concrétise la
fonction de choix social si à partir des messages envoyés par les agents, il donne le
même état social que celui qu'il serait optimal de réaliser pour les vraies
caractéristiques des agents.
Un équilibre en stratégies dominantes (ici les stratégies sont les annonces faites par les
agents sur leurs dispositions à payer, leurs coûts…) est une combinaison de messages
(un pour chaque agent) telle que pour tout agent, il n'a pas intérêt à changer de
message quels que soient les messages des autres agents (le choix du message par un
agent conduit à un état social préféré à tout autre qui aurait pu être obtenu avec un
autre message).
Principe de révélation (Gibbard) : Soit un mécanisme qui concrétise la fonction de
choix social en stratégie dominante; alors il existe un mécanisme direct qui concrétise
cette fonction de choix social par révélation dans un équilibre en stratégies
dominantes.
Illustration par un mécanisme simple de type Groves-Clarke :
Il y a 2 agents (un consommateur, une firme) et 2 niveaux d'externalité 0 et h; b est le
bénéfice de l'externalité pour la firme et c est le coût pour le consommateur. ba et ca
sont les annonces faîtes par les agents à l'Etat qui va associer à ces annonces un état
social spécifiant un niveau autorisé d'externalité et un niveau de taxe. Le mécanisme
révélateur est le suivant: si ba > ca alors l'Etat autorise l'externalité au niveau h, prélève
une taxe ca sur la firme et verse une subvention ba au consommateur; sinon ba < ca et
pas d'externalité ni de transferts. Il est facile de montrer que les 2 agents ont intérêt à
révéler leur vraie nature. Montrons par exemple que la vérité est une stratégie
dominante pour le consommateur. Si la firme annonce ba > c alors le consommateur
sait qu'il fera un bénéfice net (ba - c >0) par rapport à la situation sans externalité et
choisira donc ca < ba pour que l'Etat autorise l'externalité. On constate que le
consommateur est indifférent entre les niveaux d'annonce qui sont < ba puisqu'ils lui
donnent de toute façon le même bénéfice net (ba - c) : il sera donc plus simple
d'annoncer la vérité c (qui est bien < ba). La vérité est donc la meilleure réponse pour
le consommateur à la stratégie d'annonce ba (> c ) de la firme. Si la firme annonce ba
≤ c alors le consommateur sait qu'il fera une perte nette (ba - c ≤ 0) par rapport à la
situation sans externalité et choisira donc ca ≥ ba pour que l'Etat n'autorise pas
l'externalité. On constate encore une fois que le consommateur est indifférent entre les
niveaux d'annonce qui sont ≥ ba (même perte (ba - c)) et la vérité est donc la meilleure
réponse pour le consommateur à la stratégie d'annonce ba ( ≤ c ) de la firme. L'annonce
de la vérité est la meilleure réponse du consommateur à toute stratégie de la firme, elle
est donc une stratégie dominante. Par le même raisonnement, l'annonce de vérité par la
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firme est une stratégie dominante. Le mécanisme proposé par l'Etat aboutit à une
révélation des vraies caractéristiques en stratégies dominantes (faiblement ici).
Conclusion de la section: réflexion sur l'absence de certains marchés, les coûts de création de
ces marchés; compléter les marchés n'est pas la solution absolue; importance de la définition
des biens (public/privé)
II.
Une procédure de choix collectif est nécessaire en cas d'intervention publique
Problématique du choix social : Le critère d'optimalité parétienne permet de définir un sousensemble d'états de l'économie parmi lesquels il semble souhaitable que la société choisisse.
Quel est le critère utilisé pour effectuer ce choix? La théorie des choix sociaux s'inscrit dans
une tradition philosophique (Rousseau, Locke, Rawls, etc.). Dans le contrat social, les agents
s'entendent sur les règles de décision collective et la théorie de l'agrégation des préférences
s'interroge sur la possibilité d'aboutir à une procédure de décision collective cohérente issue
des préférences individuelles.
A. Le choix social doit refléter les préférences des individus et le cadre informationnel
sur ces préférences
Le décideur social veut agréger les préférences individuelles et doit disposer d'une
fonction de choix social qui soit invariante aux représentations (sous forme d'utilité) de ces
préférences. La théorie économique est en général fondée sur une représentation ordinale
des préférences et ne nécessite donc pas de comparabilité des préférences entre individus.
Cependant, le décideur peut s'il dispose d'information envisager de telles comparaisons
pour peu que la représentation des préférences soit cardinale. On a donc plusieurs
situations, selon la richesse de l'information et le caractère ordinal ou non de l'utilité, qui
donnent des critères de choix sociaux bien distincts.
1) Cadre informationnel le plus riche et le plus simple: représentation cardinale des
préférences et comparabilité totale (pour les différents états sociaux, l'Etat peut
comparer les niveaux d'utilité et les variations de niveaux d'utilité); ex de critère
possible dans ce cadre: Critère utilitariste de Bentham (somme des utilités
U
i
i
); ré-interprétation d'Harsanyi
1
U i (la moyenne des utilités peut être
I i
interprétée comme l'espérance d'utilité d'un agent qui ne connaissant pas
précisément ses préférences a une probabilité
1
d'avoir une utilité U i .
I
2) Cadre informationnel le plus exigeant: représentation ordinale des préférences et
non-comparabilité totale (l'Etat ne peut comparer ni les niveaux d'utilité ni leur
variation); ex: Règle de Borda :chacun attribue des points aux états sociaux selon
ses préférences (1 pour l'état préféré, puis 2, 3, …); l'état préféré socialement est
celui qui totalisera le moins de points.
3) Représentation ordinale et comparabilité de niveaux; ex: Critère maximin de
Rawls (proche de l'interprétation d'Harsanyi) : Max( Min(U1 ,...,U I ) . Il faut
prendre comme référence la situation du plus défavorisé et choisir le meilleur état
social de ce point de vue. Ce critère s'interprète dans le même esprit qu'Harsanyi:
il représente les préférences d'un agent qui ne connaissant pas précisément sa
place dans la société et qui du fait de sa grande aversion au risque se comporte
comme s'il allait être le plus mal loti.
4) Représentation cardinale et non-comparabilité totale; ex: Critère de Nash
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5) Représentation cardinale et comparabilité de variations d'utilité; ex: Critère de
Nash Généralisé
B. Cependant, il est difficile de trouver un critère de choix social possédant toutes les
caractéristiques désirables
Peut-on sauvegarder le principe d'ordinalité et de non-comparabilité des préférences
individuelles dans l'agrégation de ces préférences pour avoir une règle sociale respectant les
propriétés usuelles d'une relation de préférence? La réponse est NON!
1) Cas simple de deux alternatives:
Le vote à la majorité simple est une procédure satisfaisante d'agrégation des
préférences individuelles. Le Théorème de May énonce que le vote à la majorité
simple est défini par les propriétés d'anonymat (ou symétrie) des agents, de neutralité
entre alternatives de choix, de réponse positive (si x est préféré ou indifférent à y par
la société et que certains agents voient leur évaluation de x augmenter, alors x sera
strictement préféré à y). Cette procédure vérifie également le principe de Pareto
d'unanimité (si chaque individu préfère x à y alors la société préfère x à y).
2) Cas général (au moins trois alternatives de choix): Théorème d'Impossibilité
d'Arrow (1951)
Condorcet (1785) avait montré que la procédure de vote à la majorité simple ne
définit pas une fonction de choix social cohérente (pour plus de 2 alternatives) car elle
n'est pas transitive. Il se trouve qu'aucune procédure de choix social n'est satisfaisante.
Arrow a généralisé le paradoxe de Condorcet en cherchant à caractériser les
procédures vérifiant trois propriétés essentielles : la propriété d'unanimité parétienne,
la propriété d'Indépendance des Etats Non Pertinents (IENP) et la propriété de NonDictature (ND). IENP signifie que pour établir un classement social entre x et y, on ne
devrait s'intéresser qu'au classement de ces seuls états par les agents et ne pas se
soucier de la présence ou de l'absence d'autres alternatives. IENP semble être une
condition minimale pour prendre des décisions simples en séparant bien distinctement
les problèmes. Enfin, une constitution est dictatoriale s'il existe un agent dont les
préférences déterminent l'ordre social (si le dictateur préfère x à y alors la société
préfère x à y). Le Théorème d'Impossibilité d'Arrow énonce que toute règle de
choix social vérifiant les propriétés d'unanimité et d'IENP est dictatoriale.
C. Comment rétablir alors la possibilité de prendre des décisions cohérentes à un niveau
agrégé?
1) Ce que suggère le théorème d'Arrow: on prend malgré cette impossibilité
théorique des décisions mais ce théorème nous dit que les détails institutionnels et
les procédures du processus politique ne doivent pas être négligés car leur choix
n'est pas neutre sur le résultat. De plus, on ne devrait pas attendre de la collectivité
qu'elle se comporte de manière aussi cohérente qu'on peut l'exiger d'un individu.
Cela ouvre donc la porte à des relâchements de la théorie.
2) Rationalité collective plus faible:
Il n'est pas nécessaire d'exiger des préférences sociales que l'on puisse comparer
tous les états sociaux. Par exemple, Sen (1970) a proposé l'Acyclicité au lieu de la
transitivité. Problèmes: les procédures obtenues dans ce nouveau cadre sont peu
satisfaisantes car peu démocratiques (oligarchie, agents avec droit de veto)
3) Etude de préférences particulières : Préférences Unimodales et Agent Médian.
On peut également restreindre les problèmes d'agrégation à des classes de
préférences particulières. L'idée est que si l'on a de l'information sur les
préférences des agents, on va pouvoir construire une constitution pour une société
donnée (par les préférences individuelles connues) et non pas une constitution
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pour toutes les sociétés possibles. La classe de préférences la plus souvent utilisée
est celle des préférences unimodales : les préférences portent sur une seule
caractéristique ou dimension de l'économie, par exemple le niveau de taxe sur un
bien. Les états sociaux peuvent donc être classés sur une droite selon cette
dimension (ex: des états sociaux avec faibles niveaux de taxes jusqu'aux états avec
les niveaux les plus élevés). Les préférences de chaque individu sont unimodales
si elles connaissent un pic de satisfaction (avec l'ex de la taxe: il y a une taxe qui
donne un pic de satisfaction tel que si la taxe est inférieure (supérieure), la
satisfaction augmente (décroît) lorsque le niveau de taxe augmente.
La procédure de vote à la majorité simple pour de telles préférences et sous les
conditions parétienne et IENP conduit à un ordre social cohérent (complet,
transitif, etc.) lorsque le nombre d'agents est impair (!). Plus précisément, si l'on
classe les agents selon leurs pics de satisfaction, l'agent médian est celui dont le
meilleur choix est la médiane de l'ensemble des meilleurs choix ordonnés (ou qui
"partage" la population en deux). On peut montrer que c'est le meilleur choix de
l'agent médian qui l'emporte toujours dans un vote à la majorité simple (on parle
de gagnant de Condorcet). Cependant, c'est un résultat très limité car il repose
d'une part sur un classement unidimensionnel des états sociaux (ce qui est très
réducteur) et d'autre part sur l'unimodalité des préférences (très contestable).
Pourtant ce résultat a été utilisé de manière trop extensive par l'école du Public
Choice (Buchanan par ex)…
Comment prendre en compte la multi-dimensionnalité des états sociaux? Compte
tenu des remarques précédentes, le dernier recours reste la représentation cardinale des
préférences avec possibilité de comparaison. Cela explique l'usage fréquent de critères
de type utilitariste (somme d'utilités ou de transformations d'utilités).
Conclusion:
•
En pratique les gouvernements recourent à l'évaluation Coût - Bénéfice
Fondements théoriques : choix social et analyse duale du consommateur
(variation compensatoire, variation équivalente, variation de surplus)
En pratique: Problème de définitions, conventions et mesures des coûts et
avantages
Exemple : politiques technologiques, Santé (prix d'une vie humaine), etc.
•
•
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Externalités et biens publics sont présents dans pratiquement tous les domaines de
l'économie (pas seulement l'environnement, etc.) : Exemple récent de la taxe pollueurpayeur pour les licenciements proposée par Blanchard et Tirole dans un rapport au Conseil
d'Analyse Economique
Aspects macroéconomiques : Externalités, biens publics et Croissance Endogène
(Romer, Aghion - Howitt, etc.)
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