Haute Ecole Pédagogique – BEJUNE
Volée 1518
qui est masqué dans l'oral. Ces spécificités vont déplacer des objets
fondamentaux, et c'est ce qui permet de penser différemment, et donc
conserver à l'identique, accumuler, reproduire, analyser avec le temps du
contrôle, en manipulant les unités, les variations formelles...
L'école ne peut donc viser l'apprentissage et la maitrise de toute la culture
écrite pour tous. C'est ce qui explique l'existence de filières, de voies de
formation différentes. L'école ne peut pas viser directement l'apprentissage et
la maîtrise des différentes sphères de l'écrit, parce que la société différencie
la famille, l'école et les milieux professionnels. On n'apprend plus "sur le tas",
mais on apprend certaines choses avant d'entrer dans les sphères
professionnelles. L'Ecole cherche donc à travailler dans un "univers de l'écrit"
spécifique, l'appropriation des cultures écrites scolaires. Il ne s'agit pas
d'apprendre à lire, mais apprendre à lire certaines choses dans
certaines situations, grâce à des formes pédagogiques. Selon les
pédagogies, les univers de l'écrit sont différents, au sein même d'une
institution qui influence les choix des contenus et la forme des pratiques.
Quelles conséquences pour la classe ?
La conséquence majeure est que si des difficultés sont en difficulté, ils ne le
sont pas face à la lecture "en général", mais face aux univers scolaires. Cette
différence exclut tout déterminisme, et redonne toute sa place à l'école,
pourvu qu'on luindonne les moyens de fonctionner, et ouvre plusieurs pistes
d'intervention. Certaines élèves peuvent "sembler en difficulté", mais ne le
sont pas : ils s'ajustent au fonctionnement qu'ils rencontrent. A l'extrême, on
pourrait voir des élèves lisant correctement avant d'entrer au CP se remettre
à anonner lorsqu'ils pensent que "c'est comme ça qu'on lit à l'école".
La première piste d'intervention concerne la hiérarchisation des contenus :
"on privilégie à l'heure actuelle les codes, les techniques et les normes, au
détriment du cadre même dans lequel ils prennent sens. Si le cadre d'accueil
n'est pas construit, à quoi servent les techniques ?"
Ce qui caractérise les relations entre les contenus du "français", c'est le
morcellement, là où il faut installer de la "conscience disciplinaire". Lorsque les
enfants disent "on a fait un contrôle" sans savoir "un contrôle de quoi ?", on
perçoit comment les élèves reconstruisent,ou non, les disciplines. Pour les
élèves, on fait "la lecture", "l'orthographe", "la conjugaison", "la poésie", "la
grammaire", tout ça sans articulation. Rien ne fonctionne en interaction. Il y a
certes quelques explications à aller chercher dans les outils et les pratiques.
Pour Reuter, il n'est pas rare de voir des cahiers et des classeurs qui en portent
la trace, dans leur grande diversité.
Plus généralement, la part de l'écrit dans les disciplines peut être pensée
comme secondaire, comme si une grande part des savoirs n'étaient pas des
savoirs langagiers. Pour une bonne partie des élèves, les matières scientifiques
rendent la place de l'écrit second.
Il est donc intéressant de réfléchir sur les moyens d'acquérir la culture écrite et
ses outils. Il semble donc nécessaire au didacticien de mettre en place des
situations moins opaques, où on sache davantage ce qui est en jeu. Quand