Droit Administratif Mme Rainaud Séance 6 Mardi 12 Octobre 2010

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Droit Administratif
Mme Rainaud
Séance 6
Mardi 12 Octobre 2010
Régime des actes administratifs
1) Motivation des décisions administratives
Cette obligation est à l’origine jurisprudentielle. Elle a été reprise par le
législateur. Cela concerne deux types de décisions :
- Décisions dérogatoires : éviter l’arbitraire.
- Décisions individuelles et défavorables ainsi que les refus d’autorisation
2) Cas de dispense de motivations
C’est notamment le cas en cas d’urgence. En effet, s’il est justifié par l’urgence ou
par l’urgence absolue, le défaut de motivation n’entache pas d’irrégularité la
décision. Il est possible de demander à l’Administration la communication des
motifs de ladite décision. Ils devront être motivés dans un délai de deux mois
après la demande de l’administré.
Le refus de communication peut justifier un recours au juge administratif. C’est le
cas par exemple dans des cas d’hospitalisation d’office ; un Maire peut prendre
un arrêté provisoire d’hospitalisation pour éviter un trouble à l’ordre public. Dans
ces conditions, la sauvegarde de l’ordre public peut être considérée comme un cas
d’urgence.
De même, on trouve la question de l’expulsion de personnes présentant un
caractère dangereux (terroriste, menace de la sûreté de l’Etat). Dès lors, il est
possible de prononcer des expulsions sans justification.
Le CE est amené à apprécier les circonstances :
- Atteinte à l’ordre public
- Circonstances de la prise de la décision administrative : exemple contexte
d’actes terroristes.
Il y a la Théorie des Circonstances Exceptionnelles : pris en période normale,
ces actes pourraient être entachés d’illégalité. Ce n’est pas le cas dans le cadre de
circonstances précises.
2) Non motivation des décisions implicites
Une décision implicite n’est pas forcément illégale du seul fait de l’absence de
motivation. L’intéressé peut toujours demander (délai du recours contentieux : 2
mois) à l’Administration quels sont les motifs de sa décision de refus.
L’Administration dispose d’un délai d’un mois pour répondre après la
formulation de la demande. Il sera alors éventuellement possible d’attaquer la
réponse donnée en estimant que les motifs ne sont pas réguliers (délai de 2 mois).
En cas de silence, il est possible d’attaquer la décision de refus de motivation ; le
juge constate l’illégalité de la décision.
Le législateur a cherché à réduire le champ de la décision implicite. A contrario,
en matière d’urbanisme, les décisions implicites sont productrices de droit : le
silence vaut acceptation.
3) Contenu de la motivation
- Ecrite : énoncer les considérations de droit ou de fait qui constituent le
fondement de sa décision. L’Administration ne peut se borner à énoncer
l’existence d’un texte et de circonstances particulières ; elle doit être
précise quant aux références textuelles auxquelles elle se base. De même, la
décision ne peut se fonder sur des formules générales et ne donnant aucun
renseignement précis. Par exemple, quand un particulier se voit refuser une
autorisation, la motivation doit expliquer en quoi l’intéressé ne peut
bénéficier d’un droit. Parfois, le juge attend des preuves de la part des
services (ex : expulsion). Arrêt Beslari, CE 24/7/1981 : expulsion d’un
étranger. « La présence de cet étranger est de nature à compromettre
l’ordre public » ; il manque notamment des éléments de fait. Ici, le CE
constate que les pouvoirs publics n’ont pas apporté les éléments de fait
précis. Arrêt Abi, 1988.
IV) Décisions exécutoires
C’est la caractéristique des décisions administratives ; elles ont une force
juridique qui s’impose aux particuliers. Pour être exécutoire (opposabilité),
l’acte doit avoir une certaine publicité et doit être porté à la connaissance des
administrés concernés.
Les règlements sont publiés : la publication se fait au JO. Lorsqu’il émane
d’un Ministère particulier, il est publié au bulletin officiel ministériel
compétent (ex : Education Nationale). On trouve également le recueil des
actes administratifs dans un département donné. On trouve aussi une
publication dans les journaux locaux qui se font en // avec un affichage en
Mairie (double publicité de l’acte). Ces doubles publicités relèvent d’une
obligation substantielle ; l’intérêt porte notamment sur la question des délais
de recours (à compter de la publication de l’acte). Ce genre de problème a
tellement été invoqué que le législateur est intervenu pour fixer une seule
publicité (exemple : permis de construire, affichage unique sur le terrain).
Les décisions individuelles sont notifiées : elle se fait par lettre simple ou
recommandée.
Un exemple jurisprudentiel montre le caractère complexe de ces règles de
publicité : Arrêt CE, 7 Novembre1986, « Jouffre de la Pradelle » : le
particulier a contesté la décision du CE sur un problème d’interprétation du
délai de recours. Il est allé à la CEDH. Il s’agit d’une réglementation sur la
classification de certains sites et espaces naturels. Le décret procédant au
classement fait l’objet d’une publication ; la législation prévoie qu’il peut y
avoir des notifications complémentaires aux habitants les enjoignant de
n’utiliser les lieux d’une certaine manière (restrictions). Dans cet arrêt, il y a eu
cette double publicité (publication et notification). Le particulier a pris comme
point de départ la notification et non la publication ; le CE a estimé qu’il était
forclos. La CEDH a sanctionné la France : « il y a des règles de délai
applicable qui ne sont pas d’une clarté suffisante ».
Cela crée de l’aléa quant aux solutions retenues et donc de l’injustice.
Concernant l’exécution des décisions administrations, celles-ci doivent être
respectées par les particuliers.
Quelle conséquence en cas d’inexécution ?
L’Administration peut ordonner des sanctions pénales en cas d’inexécution. Il
peut également y avoir des sanctions administratives.
Dans de rares cas, l’Administration peut recourir à l’exécution forcée ; elle est
en principe interdite car l’Administration doit saisir le juge pour faire exécuter
ses décisions.
Arrêt de 1902, conclusions du commissaire Romieu, TC « Société
immobilière de Saint Juste », 2 Décembre 1902.
Quand peut-on recourir à l’exécution forcée ?
- Lorsque l’Administration est confrontée à un refus caractérisé d’exécuter
l’acte.
- La loi peut autoriser le recours à l’exécution forcée :
o Réquisitions militaires ou la mise en fourrière d’un véhicule
o urgence caractérisée : il y a des justifications liées à la sauvegarde de
l’ordre public.
o Quand il n’existe pas d’autres voies de droit pour faire exécuter la
décision.
V) Disparition des décisions administratives
Il existe trois cas où une décision administrative peut disparaître :
- L’acte peut prévoir une durée de validité ; passé ce délai, l’acte devient
caduque. Par exemple, les permis de construire ont une durée limitée à 3
ans puisqu’ils dépendent du POS (par définition mouvant).
- Une décision de Justice : elle peut venir annuler l’acte y compris de
manière rétroactive.
- Sur décision de l’Administration : on trouve deux hypothèses ;
o Abrogation de la décision : l’Administration met fin aux effets d’un
acte pour l’avenir sans remettre en cause les effets produits avant la
décision d’abrogation.
o Retrait de la décision : l’Administration met fin globalement aux
effets de l’acte tant en amont qu’en aval de la décision retirée. Se
pose alors le problème de la sécurité juridique.
Dans ces deux hypothèses, il y a un certain parallélisme au niveau des
compétences et procédures :
- La décision de retrait ou d’abrogation est prise par l’autorité compétente
pour prendre la décision. Il y a des règles dérogatoires dans le cadre de la
fonction publique (le supérieur hiérarchique peut se substituer à son
subordonné).
- Les procédures suivies pour l’élaboration de la décision doivent également
être respectées dans le cas du retrait et de l’abrogation.
L’Administration retire ces décisions souvent au nom du principe de légalité.
Cette irrégularités peut apparaître dès le départ ou après l’adoption de l’acte.
Parfois, il y a une question d’opportunité motivé par l’intérêt général. Le but est
d’offrir un meilleur service aux particuliers.
Règles de l’abrogation
 Acte légal créateur de droit
L’abrogation d’un acte légal est toujours possible par un acte contraire ; le
nouveau règlement abroge l’ancien (pratique fréquente). Il s’agit ici d’une
abrogation expresse ; la règle est qu’il n’y a pas de droit acquis au maintien d’un
règlement. Cela est vrai même si le règlement en question a été prévu pour une
certaine durée de validité et que l’Administration l’a abrogé avant terme. Dans ce
cas, c’est souvent dans un but d’intérêt général, au non du principe de mutabilité
des services publics.
CE, Arrêt Vannier, 27 Janvier 1961: modalité de la réception de la télévision. Les
pouvoirs publics passent à un autre mode de réception obligeant certains
particuliers à renouveler leur matériel. L’abrogation est acceptable même si la
responsabilité de l’Etat pourra être mise en jeu.
 Acte non créateur de droit
Lorsque les actes sont non créateurs de droit, l’Administration est libre de les
abroger.
A forciori, lorsqu’une décision de Justice annule un acte individuel pris sur le
fondement d’un acte règlementaire entaché d’illégalité : l’Administration doit
abroger tout règlement illégal dès lors qu’un particulier fait une demande en ce
sens. La base juridique est illégale (par exemple : violation d’un principe général
du droit). La condition est qu’il n’y ait pas eu de droit créé à l’égard des tiers.
Il s’agit là d’une obligation lorsque la demande émane de particuliers ;
théoriquement, l’Administration devrait le faire d’office. Cette obligation résulte
de la hiérarchie des normes. Ainsi, lorsque des traités sont intégrés dans le droit
interne (à la source d’actes dérivés), il y a obligation pour l’Administration
d’abroger les règlements illégaux.
Arrêt CE, 13 Février 1989, Compagnie Alitalia : abrogation d’un règlement illégal
suite à l’adoption d’un acte communautaire.
Bilan
Les actes n’ont pas vocation à être figés.
Actes individuels
On les distingue selon qu’ils créent du droit ou non.
- Non créateur de droit : ils peuvent être abrogés par l’Administration. Par
exemple, cela concerne le droit d’occupation du domaine public.
- Créateur de droit : ils ne peuvent en principe pas être abrogés. Il y a une
intangibilité de ces actes. Néanmoins, la loi ou le règlement peut prévoir la
possibilité d’abrogation. Par exemple, il y a le fait d’abroger la nomination
d’un fonctionnaire pour insuffisance professionnelle dans l’intérêt du bon
fonctionnement des services publics.
Règles de retrait
Lorsqu’il y a retrait d’un acte administratif, il est mis fin aux effets de celui-ci à
partir du moment où cet acte est intervenu dans l’ordre juridique. Il y a alors
annulation de cet acte.
Il convient d’opérer une distinction basé sur le rôle créateur de droit.
o Actes créateurs de droit : la jurisprudence du CE est intervenu très
tot. CE, Dame Cachet, 3 Novembre 1922 : ici, le retrait ne peut
intervenir qu’à deux conditions :
 Acte illégal
 Retrait intervenant dans les délais du recours contentieux (2
mois à compter de la publication ou de la notification).
Après quelques hésitations, il y a eu fin à une période d’imprécision
jurisprudentiel :
CE, Arrêt Ternon, 26 Octobre 2001 : l’Administration peut retirer une décision
inividuelle explicite, créatrice de droit, si elle est illégale et dans le délai de 4 mois
suivant la prise de décision.
Avec cette jurisprudence, on a les différents critères opérants.
Apport législatif
La loi du 12 Avril 2000 avait prévu que les décisions irrégulières, créatrices de
droit et implicites peuvent être retirées dans le délai de 2 mois à compter du jour
où elles étaient intervenu.
En cas de recours, le retrait peut se faire pendant la durée de l’instance.
A contrario, les décisions obtenues par fraude peuvent être retirées à tout
moment et sans condition de délai.
Pour les actes non créateurs de droit, le retrait peut toujours avoir lieu sans
condition de délai ou d’auteur de la demande.
Section 2) Les actes de Gouvernement
Ils constituent une catégorie spécifique d’actes administratifs. Ils dérogent aux
principes généraux des actes administratifs. Notamment, ils sont insusceptibles de
recours devant le juge administratif.
Néanmoins, le juge administratif n’a eu de cesse de réduire cette catégorie d’actes
au profit des libertés des citoyens.
§1) Présentation académique de la notion
Le juge administratif (notamment CE, « Prince Napoléon », 1875) va mettre un
terme à la notion d’actes politiques qui permettait de justifier l’incompétence du
juge administratif pour apprécier cette catégorie d’actes.
A partir de 1875, le juge administratif s’estime compétent même si le pouvoir
exécutif justifie, sur un fondement politique, la prise de décision. Cet arrêt est
symbolique du rejet de l’incompétence invoquée par l’Administration.
Au cours du XIX° siècle, le CE avait admis cette «Théorie du Mobile
Politique » ; par exemple, arrêt Duc d’Omal (1867), est intervenu la saisie
d’ouvrage du Duc d’Omal. Ce dernier a fait un recours devant le CE. Celui-ci
s’est déclaré incompétent. On a aussi « l’arrêt Lafitte » où un banquier réclame le
paiement d’une dette. Le pouvoir en fonction a refusé de faire droit à sa requête.
Dans l’arrêt Prince Napoléon (cousin de Napoléon 3), le Général demande une
réintégration. Un refus est avancé par le Ministère de la Guerre ; le CE prend en
considération la requête et observe le fondement de la décision. Il rejette que
l’exécutif invoque l’incompétence du juge (contemporaine de la loi de 1872). Le
mobile politique n’est plus un argument permettant d’écarter la compétence du
juge administratif.
L’acte de Gouvernement sera par la suite présenté par le CE de manière peu
synthétique ; il se borne à établir une liste permettant d’affirmer ce qui relève de
la notion d’acte de Gouvernement. Il y a globalement deux grandes catégories
d’actes de Gouvernement :
- Actes relatifs au rapport du pouvoir exécutif avec le pouvoir législatif :
- Actes mettant en cause la conduite des relations extérieures de la France :
Il y a donc une définition casuistique des actes de Gouvernement. Le but est de
donner une certaine souplesse à cette notion. La définition se fait au cas par cas.
A) Les actes relatifs aux rapports entre pouvoir exécutif et pouvoir législatif
On trouve notamment la procédure législative : par exemple, le
-
refus du PM de déposer un projet de loi.
- De même, on trouve le refus du PM de proposer au Président de
soumettre un référendum. Il s’agit là d’un acte de Gouvernement (CE, 26
Février 1992, Allain).
- En outre, le décret de promulgation d’une loi est considéré comme un acte
de Gouvernement.
- Décret soumettant un projet de loi à référendum
- Exercice de l’article 16 de la Constitution
Dans tous ces cas de figure, il ne peut y avoir contestation devant le juge
administratif.
B) Actes relatifs à la conduite des relations internationales
Le CE estime que certains actes relèvent de cette conduite des relations
extérieures. Ils ne peuvent donc faire l’objet d’une contestation devant le juge
administratif ; on trouve :
- La procédure d’élaboration, signature et ratification de traités
internationaux. Ce sont des actes de Gouvernement.
- Décisions de suspension d’un Traité ou d’une Convention internationale.
Par exemple, en 1995, le CE s’est estimé incompétent pour juger de la décision
du Président Chirac quant aux essais nucléaires. Le CE a considéré qu’il s’agit là
d’une suspension d’un moratoire international interdisant les essais nucléaires
(CE, 29 Septembre 1995, Association Green Peace France).
- Décisions en vue de prendre position dans une organisation internationale :
exemple, suspension de toute coopération avec l’Irak pendant la Première
Guerre du Golfe. CE, 23 Septembre 1992, Arrêt Gisti : des étudiants
irakiens se sont vus refuser l’inscription dans les Universités françaises
- Décision du Ministère des Affaires Etrangères refusant de délivrer un titre
de séjour à un ressortissant étranger présent par la voie diplomatique.
Toute cette série d’actes ne peuvent être contestés devant le juge
Mais, il y a eu une tendance à admettre de plus en plus facilement des recours
contre certains actes administratifs liés à la conduite des relations internationales.
Il y a donc une politique jurisprudentiel tendant à restreindre cette catégorie
d’actes de Gouvernement.
b) admission des recours de certains actes liés aux relations internationales
- Le CE va recevoir les recours contre les actes administratifs dont il est
allégué leur contradiction avec un traité ou avec un acte de droit dérivé de
ces traités. Ceci est particulièrement affirmé dans la jurisprudence du CE ;
dans l’arrêt Nicolo, le CE respecte la hiérarchie des normes (article 55) :
« les traités ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des
lois sous réserves de son application par l’autre Partie ». C’est la condition
de réciprocité. Ici, le CE va contrôler les modalités d’introduction du traité
dans le droit français (arrêt Villa) : acte de ratification, conditions régulières
de publication. L’enjeu est la condition d’opposabilité du traité. Notons
que la question de réciprocité n’est pas appréciée par le CE ; ce dernier
renvoie cette question devant le Ministre des Affaires Etrangères (question
préjudicielle). En fonction de la réponse du Ministre, le CE prendra une
décision.
A ce tire, il convient de souligner l’Arrêt d’Assemblée du 9 Avril 1999, Arrêt
Chevrolle-Benkeddach : ici, il s’agissait en l’occurrence de l’appréciation de
l’application d’une coopération scientifique entre la France et l’Algérie. La
requérante se prévalait d’un titre de Docteur en Médecine acquis en 1969 par une
décision de l’Université d’Alger. En1962, des accords de coopération
interviennent entre la France et l’Algérie comprenant une reconnaissance de
diplôme.
La requérante porte sa question au CE ; celui-ci renvoie la question de
récirpocité devant le Ministre des Affaires Etrangères. Pour ce dernier, le titre
émis en 1969 ne relevait pas de la coopération : le CE renvoie la requérante à ses
prétentions et s’abstient d’interprétation de ces considérations relevant des
relations internationales.
- Question de l’interprétation des traités : si, dans les temps anciens de
l’Histoire de la juridiction administrative, les juges se déclaraient
incompétent, le CE estime désormais qu’il est compétent pour interpréter
les traités dès lors qu’ils ne posent pas de doute. Il y a donc mise en avant
de la Théorie de l’Acte Clair ; dès lors, le CE apprécie l’acte administratif
par rapport au Traité.
Arrêt Wong Yu Kong : si l’acte est clair, le CE apprécie la régularité de l’acte par
rapport à une norme d’ordre international.
A contrario en cas d’ambiguïté, le CE opère un renvoi préjudiciel. Il pose alors
une question préjudicielle au Ministre des Affaires Etrangères. L’inconvénient est
que la résolution d’une question de droit va dépendre de l’interprétation d’une
autorité politique.
Ceci a donné lieu à une saisine de la CEDH (Arrêt de la CEDH, 24 Novembre
1994, Arrêt Beaumartin contre France) : la CEDH condamnera la France pour
ingérence du pouvoir politique dans un processus juridictionnel (article 6 de la
C°EDH).
Le CE va avoir une position évolutive sur cette question de l’interprétation des
traités. Il a cherché à interpréter les actes internationaux qui comportaient des
zones d’obscurité. S’il renvoie devant le Ministre des Affaires Etrangères, le CE
ne s’estime pourtant pas lié par cet avis.
Concernant le droit européen, là aussi se pose le problème de l’interprétation des
dispositions obscures. Théoriquement, l’interprétation des Traités relèvent de la
CJCE. Il y a eu un conflit entre le CE et la CJCE : le CE a quelque peu renaclé à
saisir la CJCE alors même qu’il aurait dû le faire au regard des traités constitutifs.
Néanmoins, la politique actuelle du CE est de renvoyer devant la CJUE si un
problème sérieux d’interprétation se présente. Sur ce point, on constate une
jurisprudence constante.
Jurisprudence « Arcelor Atlantique et autres » du 8 Février2007 : en
transposant le droit communautaire, l’Administration peut copier mot pour mot
la disposition communautaire. Dans ces conditions, et si l’acte communautaire est
considéré comme violant les libertés fondamentales, le CE doit apprécier in fine
la régularité de la directive européenne. Or, ce point relève théoriquement à la
CJUE.
La directive contestée viole-t-elle les principes généraux partagés par l’Etatmembre et l’Union ?
C’est une question épineuse.
Si c’est le cas, le CE peut alors interpréter les dispositions. Ce n’est seulement
qu’en cas de doute que le CE fait appel à la CJUE.
- Appréciation des Conventions internationales par rapport aux normes
constitutionnelles :
Le CE va faire prévaloir, dans le contrôle des actes administratif, la Constitution
par rapport à des normes internationales. Cela ressort dans l’Arrêt Koné, 3 Juillet
1996. Il permet d’empêcher d’extrader un particulier pour des mobiles politiques.
En l’occurrence, l’interessé contestait un arrêté visant à l’extrader. L’arrêté
d’extradition est attaqué par rapport au respect de la Constitution. Bien que
touchant aux relations internationales (Conventions Internationales signées par la
France), le CE va apprécier la requête de la personne en phase d’être extradé par
rapport aux normes constitutionnelles.
Le CE a invoqué un élément contenu dans le Préambule de la Constitution de
1946 : pas d’extradition pour mobile politique.
A l’occasion de cet arrêt, le CE a fait sortir de ces textes datant de la III°
République le principe de l’interdiction de l’extradition pour mobile politique. Le
CE constate que l’acte relevant des relations internationales contrevient aux
PFRLR.
Le CE conclut à l’annulation de l’acte à valeur international.
- Théorie de l’Acte Détachable des Relations Internationales :
Certes, l’acte est pris dans le cadre des relations internationales ; toutefois, sur le
plan intelectuel, il peut être détaché des relations internationales : le recours peut
s’effectuer devant le juge administratif.
Il s’agit par exemple des actes administratifs d’occupation de territoire au profit
d’ambassades et de Consulats.
Arrêt ? (ambassade du Viet Nam) : même s’il s’agit de relations diplomatiques,
les actions de l’Ambassade n’échappent pas au droit français. Le Ce considère
qu’il s’agit d’un acte détachable des relations diplomatiques. La requête peut donc
être accueillie par le CE.
De même, ont été détachés des relations internationales, les décrets d’extradition.
Depuis 1937, le CE estime que ne font pas parties des actes de Gouvernement les
décrets accordant, à un Etat étranger, l’extradition d’un de ses ressortissants.
Ici, l’idée est de pouvoir défendre les droits de la personne ; le particulier à
extrader sera soumis à la rigueur du droit du pays dont il est ressortissant.
A contrario, le CE a considéré comme un acte de Gouvernement le refus de
l’extradition. En effet, pour le CE il s’agit là d’éléments appartenant au jeu des
relations internationales. Le CE a estimé qu’il n’a pas à interférer.
Mais, il y a eu une évolution en 1993 : CE, 15 Octobre 1993, R-U, Irlande
du Nord, Colonie de Hong Kong. Ici, le CE s’est rendu compétent pour
connaitre d’un recours contre un refus d’extradition opposé par la France aux
autorités étrangères. Ces actes sont considérés comme détachables du jeu des
relations internationales.
En revanche, tous les actes intervenant en amont de la décision d’extradition,
relèvent de la catégorie d’actes de Gouvernement.
§2) Le Président de la République et les actes de Gouvernement.
Il s’agit des actes de Gouvernement dans le cadre de l’exercice de l’article 16 de la
Constitution.
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