Conductimétrie, apports théoriques
Ce document, conçu pour les enseignants, comporte deux grandes parties :
La première partie donne des éléments théoriques sur la conductivité des solutions d’électrolytes :
rappels de vocabulaire et définitions (électrolytes « forts »
1
, électrolytes « faibles », conductivité,
conductance, conductivité molaire, conductivité molaire ionique, etc.) comportement des ions
(mobilité d’un ion placé dans un champ électrique uniforme), relations entre la conductivité et des
grandeurs telles que l’intensité du courant, les concentrations molaires des ions présents dans la
solution.
La deuxième partie traite des titrages conductimétriques. La conductance a été choisie en classe de
première scientifique comme grandeur physique parce que, sous certaines conditions, elle est reliée
de manière linéaire à la concentration molaire ; cette observable permet de suivre une transformation
chimique, et donc de réaliser des titrages acido-basiques. Après avoir montré l’influence de la dilution
au cours d’un titrage conductimétrique (et proposé des remèdes lorsqu’elle celle-ci n’est pas
négligeable), différents titrages sont proposés :
- acide chlorhydrique par une solution de soude,
- solution d’ammoniac par de l’acide chlorhydrique,
- solution d’acide éthanoïque par une solution de soude.
Remarque importante : quel que soit le titrage réalisé, il importe de toujours mettre dans le becher
l’électrolyte «fort» afin de ne pas avoir à justifier la valeur de la conductivité initiale de la solution ; en
effet il y a ionisation plus ou moins partielle de l’électrolyte «faible» dans l’eau (ces notions sont hors
programme en Première S).
A. Quelques généralités
L’eau pure conduit très peu le courant électrique, sa conductivité est due aux ions oxonium
(hydronium) H3O+ et hydroxyde HO- qui viennent de l’autoprotolyse de l’eau :
2 H2O = H3O+ + HO-(aq) Kr = Ke = [H3O+].[HO-]
Ke = 10-14 à 25°C alors [H3O+] = [HO-] = 10-7 mol.L-1, ce qui est très petit.
Soit I0 l’intensité du courant mesurée sous une tension U.
1
Les appellations, électrolyte fort/faible, acide fort/faible, base forte/faible sont actuellement conservées mais
ce vocabulaire n’est pas introduit auprès des élèves y compris en Terminale S.
Lorsqu’un composé est dissous dans l’eau (ce composé est le soluté et l’eau le solvant), deux cas
peuvent se produire :
l’intensité I du courant reste égale à I0 : cas de l’éthanol, du glucose, etc. ; la mise en solution ne
fait pas apparaître d’ions supplémentaires, il y a solvatation des molécules de soluté par les molécules
d’eau par des interactions de Van der Waals ou/et des liaisons hydrogène :
CH3CH2OH(l) CH3CH2OH(aq)
l’intensité I du courant devient plus grande que I0 : cas des solutions de chlorure de sodium,
d’hydroxyde de sodium, de chlorure d’hydrogène, d’acide nitrique, de chlorure d’ammonium, d’acide
acétique, d’acétate de sodium, etc. ; des ions supplémentaires sont apparus, la solution est alors
appelée solution électrolytique et le composé qui a apporté les ions est l’électrolyte.
Il existe deux catégories d’électrolytes :
Les électrolytes « forts », qui sont des espèces chimiques qui se dissocient totalement dans
l’eau. Le système chimique ne contient que des ions solvatés dans l’état final :
- NaCl(s)
Na+(aq)
+ Cl-(aq)
- NaOH(s)
Na+(aq)
+ HO-(aq)
- HCl(g)
H+(aq)
+ Cl-(aq)
- HNO3(l)
H+(aq)
+ NO3-(aq)
Les électrolytes « faibles », qui sont des espèces chimiques qui ne se dissocient pas totalement
dans l’eau sous forme d’ions solvatés :
- NH4Cl(s)
NH4+(aq) + Cl-(aq)
puis
NH4+(aq) + H2O
NH3(aq) + H3O+
- CH3COOH(l)
CH3COOH(aq)
puis
CH3COOH(aq) + H2O
CH3COO-(aq) + H3O+
- CH3COONa(s)
CH3COO-(aq) + Na+(aq)
puis
CH3COO-(aq) + H2O
CH3COOH(aq) + HO-(aq)
B. Rappels théoriques sur la conductivité d’une solution électrolytique
1. Conductivité et mobilité
Rappelons pour commencer quelques notions concernant la mobilité des électrons dans un fil
métallique et sa relation avec la conductivité du matériau.
Dans un conducteur métallique, le nombre de charges par unité de volume susceptibles de se déplacer
est une donnée du conducteur (de l’ordre de un électron par atome). Sa résistivité (ou sa
conductivité), fonction de la température, résulte des frottements des charges sur le réseau des ions
immobiles. La vitesse moyenne des électrons (dite aussi vitesse de dérive) est proportionnelle au
champ électrique appliqué (mais en sens opposé) :
E.v
désigne la mobilité des électrons. Si l’on désigne par n le nombre d’électrons de conduction par
unité de volume et par e la charge élémentaire, la densité de courant a pour expression
E..e.nv.e.nj
Rappelons comment établir cette formule :
I =
dt
dq
dq = - n.e.S.v.dt
I = - n.e.S.v
j = - n.e.v
soit vectoriellement
v.e.nj
La conductivité du matériau (l’inverse de sa résistivité) est, par définition, égale au coefficient de
proportionnalité entre
j
et
E
. Elle est donc donnée par :
= n.e.
Pour un conducteur de section S, le courant a pour expression I = j.S, et le champ électrique, en valeur
algébrique, est relié à la différence de potentiel aux extrémités A et B du conducteur de longueur L :
E = (VA VB)/L. On peut donc écrire :
)VV(
LS.
IBA
ce qui n’est autre que la loi d’Ohm.
La conductance du fil (l’inverse de sa résistance) est alors égale à
L
S
.G
Dans une solution électrolytique,
- la densité des charges varie en fonction de la concentration,
i
e-
ν
S
- les cations, ions positifs, sont mobiles aussi bien que les anions, charges négatives,
- les frottements dépendent de la taille des ions solvatés et de la nature du solvant. Les
mobilités sont donc différentes pour chaque type d’ion.
Pour rendre compte de la conductivité d’une solution électrolytique, il est donc nécessaire d’expliciter
tous ces degrés de liberté.
Commençons par un cas simple : celui d’une solution de chlorure de sodium, de concentration molaire
c. On plonge dans cette solution deux plaques métalliques parallèles, de même surface S, distantes
l’une de l’autre d’une longueur L (figure 1). Quand une tension U est appliquée entre ces deux plaques,
il circule un courant d’intensité I dans la solution. Le passage de ce courant correspond au
déplacement des ions présents dans la solution sous l’action du champ électrique
E
existant entre les
deux plaques.
(figure 1)
U> 0
Solution
électrolytiqu
e
)(
l
V
E
)(
l
V
A
B
Sous l’effet de ce champ, chaque type d’ion acquiert une vitesse limite proportionnelle au champ. Les
ions positifs se déplacent dans le sens du champ, les ions négatifs dans le sens opposé. On a donc :
E.v )()(
l
E.v )()(
l
(+) et
(-) désignent les mobilités des ions Na+ et Cl- respectivement. Les deux types d’ions
contribuent à la densité de courant totale
j
. Exprimons les charges par unité de volume à l’aide de la
concentration molaire de soluté c. En désignant par NA la constante d’Avogadro, e la charge
élémentaire, F = e.NA la constante de Faraday (1 F = 96486 C. mol-1
96500 C. mol-1), la charge
positive par unité de volume est égale à [Na+].e.NA = c.F et la charge négative par unité de volume est
[Cl-].e.NA = -c.F. Par conséquent la densité de courant totale s’écrit :
La conductivité molaire
de la solution, coefficient de proportionnalité entre la densité de courant et
le champ électrique, est donc égale à :
).(F.c.F].Cl[.F].Na[)()()()(
Dans le cas d’un électrolyte «fort» qui se dissocie suivant l’équation :
)aq(X.b)aq(M.aXM ab
b
a
En désignant toujours par c la concentration molaire apportée du soluté MaXb, la concentration
molaire en ion Mb+ est égale à a.c, et le nombre de charge positives par unité de volume est égal à
a.b.c.F. La concentration molaire en ion Xa- est égale à b.c, et le nombre de charges négatives par unité
de volume est aussi égal à a.b.c.F (la neutralité électrique doit être respectée). La conductivité de la
solution devient donc :
).(F.c.b.a.F].X.[a.F].M.[b)()()(
a
)(
b
relation (1)
La conductance de la solution est reliée à sa conductivité par une relation de la forme
= G.Kcell
E)..(F.c)vv.(F.cjjj )()()(
l
)(
l
)()(
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