Depuis sa création en 1945, les partenaires sociaux (syndicats ouvriers et patronaux) géraient
l'assurance-maladie et l'Etat avait un droit de regard. Or en 1995, l'Etat a bouleversé les règles du jeu. Le
Parlement, sur proposition du gouvernement, vote désormais l'enveloppe des dépenses de santé et son
augmentation annuelle. Il introduit la notion de "quotas" imposés aux praticiens libéraux avec sanctions à la clé
pour tout dépassement. Ainsi, un médecin ayant dépassé son quota ne peut plus recevoir ses patients
(désireux d'être remboursés par la sécurité sociale) indépendamment de la gravité des cas, sous peine de
sanctions financières.
Le financement de la santé
Il est assuré en grande partie par les cotisations salariales et patronales, auxquelles s'est ajoutée il y a deux
ans une contribution sociale généralisée (C.S.G) prélevée sur toutes les formes de revenus (revenus
financiers, retraites).
La santé publique
L’obligation de faire l’avance des frais médicaux et pharmaceutiques a un effet pervers sur la santé d’un
nombre croissant de personnes. Elle pousse certains (catégories des employés et chômeurs) à consulter
tardivement, voire même à renoncer aux soins (20 à 30 % des personnes de ces catégories). Ces personnes
hésitent à passer des examens (type scanner), car il faut faire l'avance des frais, etc. Malgré l’accès aux soins
ouvert à la quasi-totalité de la population, les inégalités sociales de santé n’ont pas disparu. La vie des
personnes les plus modestes est non seulement plus courte, mais vécue en plus mauvaise santé. Ceci est dû
aux conditions de vies, d’hygiène et d’alimentation.
Sont exclus du système de couverture maladie (0,7%) les moins de 25 ans (hors étudiants) n'ayant jamais
travaillé, plus une partie importante de la population des "sans domicile fixe" (SDF) et des immigrés en
situation irrégulière qui n'ont accès à aucun soin. Cela favorise, entre autres, l'apparition de maladies liées à la
précarité et à la pauvreté telles que la tuberculose. Ces exclus ont alors la possibilité de se faire soigner
gratuitement par des organismes humanitaires (Médecins du Monde...).
Concernant les problèmes de santé publique, cette société déshumanisante, telle que nous la connaissons
aujourd’hui, entraîne des troubles comportementaux et de communication dans les familles, le voisinage, au
travail. Un tiers des hospitalisations sont motivées par un trouble mental. Ces situations sont favorisées par
l'augmentation du stress, la détérioration des relations, les conditions de travail (pression, responsabilités,
accélération), les difficultés financières graves, le sentiment de dépréciation, l’isolement, la perte des repères et
du sentiment d'utilité. Un autre signe indique ce malaise social, celui des suicides. En effet, la France figure
parmi les pays à forte mortalité par suicide : plus de 37 % de croissance entre 1976 et 1985, le nombre passant
de 8 400 à 12 500 (près de 12 000 en 1998).
Il convient également de s’inquiéter de l’augmentation de la toxicomanie sous toutes ses formes, car la France
est le pays au monde où l'on consomme le plus d'alcool, aidée en cela par le puissant lobby français des
producteurs d’alcool. L'usage des psychotropes a triplé en 5 ans. La consommation de drogues augmente
(notamment le crack et l’ectasy), qui touche des âges de plus en plus jeunes. La faiblesse des budgets ne
permet pas de lutter efficacement contre la toxicomanie (protéger les personnes dépendantes contre les
risques de santé et leur assurer un accompagnement vers l’abstinence). En 1995, la France a consacré 4,72
milliards de F à la lutte contre la drogue, mais seuls 15 % sont parvenus aux structures de soins, la police, les
douanes et la justice ayant récupéré les 85 % restants.
La place du patient dans le système de soins
Dans son désir de progresser dans l’accumulation de techniques, d’établir des protocoles pour uniformiser les
intérêts et la recherche, la médecine est tombée dans un mécanisme excessif et déshumanisant. Ainsi, elle est
arrivée à supposer que la machine humaine fonctionne sans aucune différence d’un individu à l’autre, oubliant
le "sujet malade" pour le convertir en "objet malade" comme destinataire de ses intérêts. La désignation même
de "patient" suit la même voie dans l’attitude de résignation et de patience que doivent assumer les personnes
face au système de soins, à devoir supporter les queues, les retards, les abus, les mauvais traitements et enfin
la dénégation de leur santé. Dans le système actuel de santé, rien n’affirme notre propre identité, notre
capacité de réfléchir, de penser et de décider pour notre propre corps.
La médecine curative face aux médecines alternatives
La situation française est particulière dans le sens ou la médecine est presque exclusivement curative. En effet
seuls 2,4 % des dépenses de santé sont alloués à des actions de prévention. La vision mécaniste de l'être
humain donnée par le système néolibéral conduit à une médecine hyperspécialisée et symptomatique qui se
borne, dans le meilleur des cas, à réparer la fonction, voire à remplacer l'organe en cause, comme on le ferait
pour une voiture ou un ordinateur.
Cependant, un nombre sans cesse croissant d'individus ne se contentent plus de cette méthode thérapeutique.
Ainsi peut-on expliquer la résurgence de médecines que l'on appelle nouvelles, douces ou alternatives, mais
qui au fond sont des médecines souvent bien antérieures à notre civilisation, qui se préoccupent de maintenir
en harmonie l'homme et son milieu et qu'il serait préférable d'appeler "médecines de terrain". Si ces
médecines, de par leurs bienfaits, parviennent à un consensus entre patients et thérapeutes qui s'y intéressent,