Si bien que l’on peut écrire, sans grand risque la formule de base de la communication
linéaire :
M’ = f (M, r)
qui signifie que le message mémorisé M’ est fonction d’au moins deux éléments : ce qui a
été dit (M) et l’interprétation que nous en avons faite (r). (
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)
C’est pourquoi, plus notre interprétation est forte sur un sujet donné, ce qui est le cas
quand nous connaissons bien le sujet et que celui-ci nous tient à cœur, plus r est
important et plus diminue l’importance de ce qu’on nous dit. Ainsi, quoi qu’on me dise sur
le thème de la communication, il est probable que cela ne modifiera guère mon point de
vue sur la question, je n’entendrai pas ce qui se dit si c’est contraire à ce que je pense
déjà.
En entreprise cette formule est importante car elle montre l’importance des messages en
période de lancement de produit : en effet, c’est le seul moment où le recodage est
fortement réduit (pas d’interprétation sur des sujets que nous ne connaissons pas), et où
l’on peut parfois aller jusqu’à écrire :
M’ = f (M)
Cette conception de la communication fut la seule admise pendant les décennies qui
suivirent ; elle commença à être battue en brèche par l’avènement de la cybernétique et
du concept de rétroaction. Malgré cela, il faut dire qu’en matière de conception générale,
c’est encore cette conception linéaire qui prime, aussi bien dans nos esprits, qu’en
entreprise, où l’on voit les vendeurs essayer de vendre avec des argumentaires
monologués. Mais ceci est développé dans un autre livre : Le management de la relation.
Les faiblesses de la communication linéaire
Il existe de nombreuses critiques radicales de cette conception linéaire de la
communication. Examinons les principales.
Premièrement, et le constat est facile à faire : M’ est toujours différent de M ; ce que
j’entends est toujours différent de ce qui a été dit, du moins dès que la phrase prononcée
atteint une vingtaine de mots.
Tout simplement parce que notre capacité à mémoriser est extrêmement limitée.
Deuxièmement, et pour les mêmes raisons, ce que j’ai entendu est toujours moins complet
que ce qui a été dit ; une grande partie du message de mon partenaire a tout simplement
été occultée.
L’oubli peut être important, et il sera d’autant plus grave qu’il peut porter sur des parties
fondamentales du message.
Enfin, ce schéma, valable pour décrire des phénomènes technologiques, n’est pas tout à
fait applicable aux relations humaines, dans la mesure où il postule que chaque partenaire
parle ou agit à tour de rôle, ce qui ne correspond pas du tout à la réalité des interactions
entre individus.
Dans une relation à deux (ou plus) chaque partenaire est co-auteur simultané de tout ce
qui se passe, de tout ce qui se dit.
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Dans la réalité, c’est plus complexe, car la mémorisation dépend aussi des bruits de la communication et de
l’environnement.