Thème B – La communication Introduction : L’expérience des figures géométriques. Soit cinq figures géométriques de couleurs différentes, en double exemplaire. Remettez un jeu à l’un de vos camarades. Disposez un jeu sur une feuille 21 x 29,7, puis donnez, oralement, des consignes pour que votre camarade reproduise votre agencement à l’identique. Ne regardez pas la façon dont il procède. Scénario 1 : Votre camarade ne peut pas parler. Il applique vos consignes en silence. Scénario 2 : Votre camarade peut vous poser des questions et vous devez lui répondre. Résultat : les agencements sont plus proche dans le scénario 2 ce qui montre que la communication n’est pas la simple transmission d’une information d’un émetteur à un récepteur mais un processus interactif de construction du sens. Information et communication sont des notions étroitement liées mais cependant distinctes. En effet, s’il suffisait d’informer pour communiquer, la publicité serait inutile : de simples catalogues rempliraient parfaitement ce rôle. Par la communication, l’information prend une signification, pour un acteur donné. La communication est bien plus que l’information, c’est un processus interactif de construction du sens, sens qui se construit dans cette relation d’échange. Avant d’analyser deux grands types de communication (interpersonnelle dans le chapitre 3 et des organisations dans le chapitre 4), il faut d’abord étudier les notions de base. I. La communication : un monde des signes. Quel point commun existe-t-il entre une conversation d’amis, une réunion de travail, une campagne contre le tabac ou une affiche publicitaire ? Il s’agit, dans tous les cas de communication, c’est à dire d’activités sociales qui mettent les hommes en relation… Mais comment s’opèrent ces échanges ? A. « Pour communiquer, les hommes se font signe ». Cette citation du sémiologue Georges Jean signifie que les hommes échangent des signes pour échanger des sens. 1. La multiplicité des signes. Ces signes sont multiples : un son, un geste de la main, une expression du visage, le logo d’une entreprise. Certains signes sont dit codifiés au sens où leur signification ne donne pas lieu à interprétation (une lettre, un chiffre, un logo) d’autres non (un signe de la main peut être interprété comme une salutation, une interpellation, un ordre d’arrêt…. D’autres sont dits symboliques au sens où ils ont valeur de symbole (la balance symbolise la justice…). 5 codifié non-codifié codifié symbolique symbolique 1 2. Signes, information et communication. Les hommes ont inventé les signes au cours des âges pour décrire le monde et lui donner une signification, entrer en relation avec les autres hommes et les influencer. Remarquons que l’écriture n’est pas le premier système organisé de signes puisque les hommes préhistoriques utilisaient les images réalistes ou abstraites. Scène des Aurochs de Lascaux. Les signes sont donc au cœur de la communication. Les entreprises élaborent et émettent des signes (logos, slogans, charte graphique, marques, publicités…) qui expriment certaines valeurs qu’elles s’attribuent (le naturel, le raffiné, la qualité, la convivialité). B. De l’information à la communication 1. L’information, un terme caméléon… Il désigne à la fois l’action de donner connaissance d’un fait et cet élément de connaissance lui même. Dans le langage courant, l’information désigne à la fois « les nouvelles » (les informations télévisées), le savoir (un article de l’encyclopédie) et les données numériques (bases de données). 2. La communication est une transformation de l’information et une relation. Chaque fois que nous transformons un information pour en saisir le sens ou que nous la transmettons à d’autres, nous communiquons. Par exemple, quand on fait une fiche de son cours, on réalise un exposé, on explique le chemin à quelqu’un… L’information est donc le contenu de départ mais il n’y a communication que si cette information subie une transformation pour devenir un exposé, une explication, un article, et qu’ainsi elle prenne du sens pour un ou plusieurs acteurs, dans le cadre d’une relation. La communication se fait toujours à deux niveaux : au niveau du contenu (l’énoncé, la partie « visible ») et au niveau relationnel (sens sous-jacent du message). Par exemple, « Ta chambre est en désordre, tu dois la ranger cet après midi. Je suis sérieuse. » Le contenu est « une chambre en désordre à ranger » et au niveau relationnel, il indique le lien entre les deux individus (ici, une mère et son enfant) et le sens du contenu (c’est un ordre à exécuter rapidement et sans discuter). Autre exemple, dans « Jeune fille, il est 9h35 » n’apparaît que le contenu de la communication mais si c’est un professeur qui le dit d’un ton sec et en fronçant les sourcils à une élève, le message souligne le retard de l’élève, l’impatience du professeur qui affirme son pouvoir pour le faire cesser. 2 II. Les principes de la communication. Communiquer ne consiste pas seulement à transmettre un message informatif, mais aussi à mettre en commun des significations. C’est un processus dynamique de production et d’échange de sens. Pour cela, différents éléments interagissent les uns avec les autres. Par exemple, devant une affiche encourageant le tri sélectif des ordures, chacun réagira différemment en fonction du message et de sa mise en forme (graphisme, slogan) mais aussi en fonction de lui-même, selon qu’il trie ses ordures ou non, qu’il est prêt à la faire ou pas…. Analyser une situation de communication, quel que soit son type, implique de s’intéresser d’abord à ses composantes. A. Les composantes de la communication. ► Schéma du processus de communication. 1. Qui ? : Les acteurs. Ce sont les personnes impliquées directement ou indirectement dans la communication. On distingue l’émetteur, la personne ou groupe de personnes qui édite le message et le récepteur, la personne ou le groupe de personnes qui accuse réception du message. Consciemment ou non, les acteurs filtrent sélectionnent les informations émises ou reçues, les interprètent. Ils ne sont pas neutres mais influencés par leur perception du monde et des autres, leurs attitudes, leur statut social, leur personnalité, leurs expériences et leur culture (voir Thème A). Exemple : un banquier refuse de recevoir un jeune qui souhaite obtenir un prêt pour l’achat d’une voiture à cause sa dégaine qui pour eux est signe de manque de crédibilité, de sérieux, de revenus (interprétation emprunte de préjugés). ► Exercice 1 du TD 5 2. Quoi ? : Message, code et sens Le message est l’information transmise, le contenu de la communication, l’information de départ qui va être communiquée. Le code est l’ensemble des signes choisi par l’émetteur. Ainsi, le message peut être écrit ou oral, formel ou informel, verbal (langage) ou non verbal (gestes, expressions, intonations…). Un message reçu n’est pas nécessairement un message compris par le récepteur et le sens donné au message par ce dernier n’est pas toujours celui qui était prévu par l’émetteur. Ainsi, on considère, par exemple, qu’un mail sur deux n’est pas compris par son destinataire. Il n’y a jamais de récepteur passif même devant une affiche publicitaire. Le destinataire du message participe lui aussi à sa construction, par le sens qu’il lui donne dans un contexte donné. Cette interprétation peut différer de l’information contenue dans le message. Généralement, quand l’émetteur envoie un message au récepteur, il attend une réaction de sa part. Cet effet-retour ou feedback permet de vérifier que le récepteur a bien reçu et compris le message. La rétroaction imprime une dynamique des relations entre les acteurs. 3 3. Comment ? : Le canal de circulation C’est la voie, le moyen de communication utilisée qui permet de transmettre le message . Ils sont multiples et font appel à plus ou moins de technicité : discussion en face à face, téléphone, lettre, télévision, radio, presse, affiche, réseaux informatiques… Il conditionne en partie la mise en forme du message, son code (écrite, orale, audiovisuelle…). 4. Où ? : Le contexte. C’est tout ce qui entoure la communication et qui va avoir une influence positive ou négative sur l’échange : le lieu (exigu ou spacieux), les circonstances matérielles (température, temps…), psychologiques (ambiance) et sociales (règles sociales en vigueur…). On qualifie de « bruit », les différents éléments du contexte qui affecte à des degrés divers la transmission du message… Il y a : Les bruits techniques qui ont pour origine les perturbations sonores ou visuelles (coupures dans la conversation téléphonique, micro mal réglé pendant un débat, fond musical excessif dans un bar, bavardages en classe…). Les bruits sémiologiques qui ont pour origine des différences de code entre les acteurs et qui empêche la correspondance entre le signe et le sens. Ce sont des différences culturelles ou langagières. Par exemple, les niveaux de langages différents entre un banlieusard du 93 et un parisien du 16ème. Autre exemple, un collègue japonais désirant montrer le grand respect qu'il éprouve pour la famille d'un collègue européen l'invitant à dîner apporte à la maîtresse de maison une fleur considérée comme l'une des plus belles au Japon : un chrysanthème. Gêne garantie chez celle-ci, pour qui cette fleur est symbole de cimetière. De même, le silence ne s’interprète pas de la même façon en Asie (signe de réflexion) quand Europe (signe de gêne). 5. Pourquoi ? : les stratégies. Un message a une forme et un fond. Il remplit souvent plusieurs fonctions suivants les stratégies conscientes ou inconscientes des acteurs pour informer, influencer, créer et maintenir une relation, faire passer une image, une émotion, etc. Fonctions du message Traduire les émotions Influencer le récepteur Informer le récepteur Créer ou maintenir une relation Faire passer une image Exemples de message « J’ai rougi de plaisir », « j’étais vert de peur », « J’ai sauté de joie à cette idée ». « Tu vois bien que tu as tord », « Ouvrez cette fenêtre, vous serez gentil », « Silence, s’il vous plait ». « Cet élève a une moyenne de 12,5/20 », « Ce client désire cette paire de chaussures », « Il pleuvra sur Paris, demain matin ». « Avez-vous l’heure, s’il vous plait ? », « Comment ça va ? », « Il fait beau ce matin, vous ne trouvez pas ? ». « Rapide comme l’éclair », « Il est têtu comme une mule ». « J’en ai jusque là ! » 4 B. Les différents types de communication. Suivant le nombre de personnes impliquées dans l’acte de communication, il existe différents types de communication. Celles-ci peuvent intervenir simultanément. 1. La communication interpersonnelle. Il s’agit d’échanges de personne à personne, chose que nous connaissons tous quotidiennement quand on appelle un(e) ami(e) au téléphone ou qu’on luis écrit une lettre, quand on consulte un médecin, on salue à l’entrée d’un magasin…. C’est la base de la vie en société. C’est en général là que la compréhension est la meilleure et que la rétroaction est quasi-systématique. La relation est une composante essentielle dans cette communication. Les acteurs de la relation interagissent l’un sur l’autre c’est à dire qu’ils exercent une influence réciproque l’un sur l’autre par leur parole, leur geste, leur regard, leur comportement et donne ainsi le sens de l’échange… Ces échanges visent plusieurs objectifs : transmissions d’informations, besoin de reconnaissance, de pouvoir, d’identité (on cherche à refléter l’image désirée : respectable, drôle, dynamique, séduisant…) 2. La communication en groupe. Cette communication met en scène plusieurs personnes dans un groupe de taille suffisamment limitée pour que les individus puisse se percevoir, interagir et communiquer. Elle est influencé par tous les mécanismes de fonctionnement propres aux groupes : sa taille, sa fonction, la personnalité des membres et leurs rôles respectifs, les objectifs du groupe, les règles et normes de fonctionnement, les conflits de pouvoir… On parle de « dynamique de groupe » pour désigner les phénomènes affectifs et émotionnels qui influencent toute vie de groupe. 3. La communication de masse. Cette communication s’adresse à une vaste audience, non homogène, anonyme et dispersée et se déroule dans un espace public. Ici, les récepteurs sont bien plus nombreux mais la compréhension est considérée comme la moins bonne, car le bruit est fort. Elle dispose rarement d'une rétroaction, ou alors très lente (on a vu des campagnes jugées agaçantes par des consommateurs, couches pour bébé par exemple, conduire à des baisses de ventes du produit vanté). Cette forme transite par des supports appelés mass média qui permettent une large diffusion de l’information (télévision, cinéma, radio, presse, affiche…). Les effets des médias sur le public sont en fait plus limités qu’on ne le croit. Malgré un certain conditionnement, tout individu garde sa part de liberté d’interprétation devant les messages diffusés. Cependant, l’absence de rétroaction en fait l’outil de propagande par excellence. Avec l’arrivé d’Internet, la rétroaction est rendue possible. ► Exercice 2 du TD 5. 5 III. Les enjeux de la communication. Chaque intervenant d’une situation de communication cherche à atteindre certains buts (cognitifs, affectifs, économiques, sexuels…). Il a un objectif à atteindre qui le motive, qui l’incite à communiquer : rencontrer des amis, visiter un client, obtenir un billet de retard de M. Cavallier. Les objectifs peuvent être : conscients et calculés : la stratégie du vendeur qui cherche à faire acheter ou… non-conscients et spontanés : la conversation amicale où le plaisir de l’échange semble le seul objectif). Dans les relations interpersonnels, Edmond Lipiansky distinguent quatre types d’enjeux : A. Les enjeux identitaires. Chaque participant se positionne dans une relation. L’enjeu identitaire est le moment où l’on engage cette image de soi. Par exemple, lors d’un débat, le but d’un intervenant est de garder la face, de ne pas être décrédibilisé par les autres. Le fait que la place des acteurs soit bien identifiée permet aux interlocuteurs d’éviter les malentendus, les conflits. C’est pour cela, par exemple, qu’il y a des codes vestimentaires précis pour un entretien d’embauche, pour une soirée en boite, pour tel ou tel type de métier. L’identité est toujours repérable dans l’énonciation de la communication. Par exemple dans « Avant de sortir avec tes amies, je voudrais savoir si tu as terminé ton devoir d’information et communication que tu avais à faire ». On a une père ou une mère qui s’adresse à son enfant et c’est bien en tant que tel que le parent adresse le message. Dans « Mathias, vous devez faire des efforts de concentration si vous ne voulez pas perdre le fil du cours ». C’est un enseignant et non un ami, ni même un parent qui donne le conseil. B. Les enjeux territoriaux. Dans tout acte de communication, les acteurs dévoilent qu’il le veuille ou non une partie leur personnalité et de leurs émotions. Mais cet accès à l’espace psychique, à l’intimité n’est pas toujours autorisé à autrui. L’ enjeu territorial correspond à la défense de son espace personnel par le maintient d’une distance (verbale ou physique). Exemples : le vouvoiement des l’élèves ou de quelqu’un qui vous interpelle en vous tutoyant, détourner son regard lorsqu’on répond à une question qui vous dérange, repousser ses cheveux… C. Les enjeux relationnels. La communication est le passage obligé pour entrer en relation avec autrui. Mais ce contact comporte certains risques, notamment au moment de « l’ouverture » et de la « fermeture » de la communication. Il y a des risques d’intrusion (un tiers vient intervenir dans la relation), de non-réponse (le récepteur n’a pas entendu ou fait mine de n’avoir pas entendu), d’abandon (le émetteur n’a pas réussi à se faire comprendre et quitte son interlocuteur), de blocage (l’émetteur et le récepteur campent chacun sur ses positions, ne sont pas d’accord ce qui empêche la poursuite de la relation)… L’enjeu est donc de réussir la communication notamment en respectant un cadre de référence (règles de courtoisie, taper à la porte,…). Exemples : Alain pénètre, furieux, dans le bureau d’un collègue. Sans le saluer, il lui demande des explications sur une affaire récente qui n’a pas aboutie… mais le 6 collègue est occupé au téléphone… afin de régler un autre problème. Pierre et Carole discutent à la sortie du bureau mais soudain Carole le quitte car elle a un rendez-vous urgent. D. Les enjeux d’influence. Dans plusieurs communication, chaque participant cherche à influencer l’autre afin de le faire adhérer à son point de vue. Cette recherche d’influence se base sur deux types de stratégies : La stratégie de pouvoir : l’individu exerce un rapport de force sur l’autre par la pression, l’intimidation. Exemple : « Si tu continue de bavarder, tu sera collé mercredi après-midi ». La stratégie de séduction : l’individu établie un rapport de complicité, de sympathie par la persuasion ou la réduction de la distance (physique ou psychique). Exemple : un sourire, chuchotement à l’oreille de quelqu’un… Cette dernière stratégie est la plus utilisée par les grandes marques qui associent leur image à celles des acteurs et des sportifs afin d’influencer les consommateurs notamment les plus jeunes. ► Exercices n°3 & 4 du TD 5 (à l’aide de la Méthode 2 : Grille d’analyse d’une situation de communication.) Conclusion : La communication est un processus complexe qui va au delà d’une simple transmission de l’information. Dans la communication, il s’établit une relation dans laquelle les acteurs vont construire le sens du message. Il y a différents types de communication : interpersonnel, de groupe et de masse dont la construction est influencée par des mécanismes qui leur sont propres. Dans chaque communication, il y a des enjeux qui motivent les intervenants. Les acteurs développent des stratégies, conscientes ou inconscientes, pour atteindre leurs objectifs. 7