Dans l’espace européen, la circulation des populations est ancienne et permanente : à la fin du
13ème la cathédrale d’Uppsala (suède) est construite par des maçons creusois ; on parlait des
langues très diverses sur les chantiers. La guerre de 30 ans a amené des départs massifs de
populations des zones dévastées (et donc la question des réfugiés). Aux 17ème et 18ème on a
des migrants économiques : les Auvergnats vers l’Espagne (maçons, boulangers, artisans…)
et cela s’arrête avec Napoléon. Au 19ème de nombreux Italiens sont sur les chantiers
industriels ; en 1848 à Paris on trouve de nombreuses émeutes xénophobes contre les
Allemands.
Claire Satinel : l’empire romain a connu de nombreux mouvements de population à
l’intérieur de ses frontières ; les migrations externes (Germains, Parthes..) sont peu
nombreuses en quantité. Au 4ème siècle, on a un important afflux venus de l’extérieur
(Alamans, Sarmates…) ; sont-ils extérieurs à l’Europe ?
Jean-Jacques Aillagon : la question est qu’est-ce que l’Europe ? C’est un morceau de
l’Eurasie avec des limites convenues (Oural, Atlantique, Arctique). C’est plus complexe au
Sud où l’Afrique du nord a souvent été amarrée à l’Europe ; c’est aussi très complexe avec le
Bosphore.
L’empire romain connaît une double fracture : Nord et sud de la Méditerranée , orient grec et
occident latin. L’Europe a une réalité confessionnelle : territoire qui n’est pas grec ni
orthodoxe. Cette Europe est catholique latine a se reconnait dans une identité partagée. En
2008, l’Union Européenne déborde ce territoire (Grèce, Roumanie, Bulgarie…). Clovis est roi
des Francs, mais son royaume est peuplé de Gallo-Romains ; parfois des petits groupes
peuvent imposer leur influence (cf. aussi l’Afrique de l’Ouest aux 19ème et 20ème siècles…).
L’idée d’Europe a donc un caractère très mouvant.
Claire Satinel : les Francs viennent d’où avant d’être en Gaule ? Sont-ils Européens ? Peut-
on comparer l’établissement des Francs et des Huns ?
Jean-Jacques Aillagon :les Francs sont les moins nomades des peuples barbares ; ce sont des
Belges…
Philippe Rygiel : il faut distinguer les réalités spatiales et politiques ; il faut voir le discours
d’où émerge l’idée que l’Europe a des ancêtres : l’empire romain, la chrétienté occidentale, ce
qui ne correspond pas aux mêmes espaces topographiques ; mais les musulmans sont aussi les
successeurs de l’empire romain.
En France, on compte de très nombreux immigrés belges ; à la fin du 19ème à Roubaix, on a de
nombreuses émeutes contre les Belges. En fait, il y a les nationaux et les autres : on fait la
« chasse » aux Belges, Italiens… et il y a des morts. Les Européens sont des gens pour
lesquels la 3ème génération antérieure venait d’ailleurs. La « vague conscience d’appartenir à
un ensemble est très récente ».
Alessandro Barbero : d’où viennent les Francs avant ? En fait ils n’existent pas avant de
venir en Gaule (comme les Huns). Le peuple se forme au moment de son déplacement ; les
tribus sont en contact avec les Romains ; elles se confédèrent et s’organisent avec un chef (on
peut faire la comparaison avec les Indiens en Amérique du Nord) ; les peuples se donnent un
nom nouveau, s’inventent une identité avec des ancêtres mythiques (par exemple les Francs se
disent descendants de Troie) ; ils veulent s’emparer de la civilisation romaine et non la
détruire ; ils veulent récupérer la notion d’impôt et la gloire. Les peuples qui ont du succès