Prélèvements

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D. TIOUIT
EXAMEN CYTOBACTÉRIOLOGIQUE DU PUS
I.

Introduction-Généralités
Les prélèvements de pus et sérosités correspondent à un ensemble de prélèvements
comprenant les liquides organiques
(péritonéaux, péricardiques, et pleuraux) les
liquides articulaires, les hématomes, les abcès, les lésions superficielles de la peau et
des tissus.

Il se forme du pus au cours d’infections urinaires, respiratoires, méningées, génitales et
même intestinales. Il est alors retrouvé dans les urines, les expectorations, le liquide
céphalorachidien, les prélèvements génitaux, les selles , mais sont individualisés sur le
plan de l'examen bactériologique (techniques bactériologiques, germes et interprétation
différentes).

Dans des circonstances particulières de moindre résistance tissulaire, n’importe quelle
bactérie peut créer un processus infectieux.

Toutes les espèces bactériennes pathogènes et même quelque fois celles réputées non
pathogènes peuvent être mises en causes.

Il convient de comprendre que l'infection peut survenir dans des foyers ouverts cutanéomuqueux avec contamination inévitable par une flore commensale de voisinage ou qu'il
peut s'agir d'infections fermées en tissus sains où le mécanisme est circulatoire et
métastatique.

Une infection suppurée localisée peut se développer dans n’importe quel région ou
organe du corps.

Elle peut être due soit à :
 Un traumatisme suivi de contamination bactérienne.
 Une modification des conditions locales rendant un tissu sensible aux bactéries
de la flore normale locale.
 Une extension d’une lésion contigüe ou une greffe métastasique du germe
propagé par le sang ou la lymphe.
II.
Rappels physiopathologiques:
1- Généralités sur la genèse d’un pus :

La formation d’un pus est l’un des signes les plus caractéristiques d’une infection.
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
Le pus est constitué de cellules à activité phagocytaire ( en général des polynucléaires
neutrophiles altérés) et de bactéries ( pas toujours très nombreuses à l’examen direct).

Les cellules en activité phagocytaire sont attirées au foyer infectieux par diverses
substances constitutives la paroi des bactéries : la muréine joue le rôle le plus actif, mais
d’autres polysaccharides possèdent, à un degré moindre, cette propriété.
Les germes dont la paroi est la plus riche en muréine (Staphylocoques, Streptocoques)
attirent massivement les polynucléaires, le pus est alors abondant : ces germes sont dits
pyogènes.
Les phagocytes subissent ensuite, au foyer infectieux, certaines dégradations dues à
l’action de substances sécrétées par les bactéries (leucocidines).
2- Origine des suppurations :
A / Les suppurations primitives :
Les exemples typiques en sont l'anthrax staphylococcique ou le. Ces infections surviennent
spontanément sur un terrain éventuellement affaibli et succèdent à des petites infections
localisées (gaine du poil).
Plus graves certaines suppurations primitives sont d'origine hématogènes et touchant par voie
sanguine ou par voie lymphatique, des organes profonds ou des séreuses (abcès hépatiques,
ostéomyélites, certaines arthrites sont de cette origine)
B / Les suppurations secondaires :
Sont dues à des manœuvres chirurgicales, traumatisme ou encore un facteur local favorisant
les infections (escarres, ulcères variqueux, brûlures…).
3- Facteurs favorables à l’infection suppurée :
Ils sont multiples :
 Traumatismes ;
 Obstruction d’une voie d’excrétion normale ( ex : glandes sudoripares , voies biliaires,
arbre bronchique , voies urinaires ) ;
 Ischémie ( Infractus , gangrène ) ;
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 Substances chimiques irritantes ( ex : contenu gastrique , bile injecté par voie I.M … );
 Formation d’un hématome ;
 Accumulation d’un liquide de sécrétions ( obstruction lymphatique , œdème
cardiaque … ) ;
 Corps étrangers (ex : balles , éclats , fils de suture … ) ;
 Troubles vasculaires …
4- Les principaux types de suppuration :
A / Suppurations superficielles :
Les germes pathogènes sont des contaminants de
la peau ou de l'environnement :

Infections d'escarres.

Infections de plaies traumatiques ou chirurgicales.
B / Suppurations profondes :

Abcès sous cutanés ou viscéraux

Phlegmons.

Adénites.

Infections des séreuses.
III. Conduite à tenir proprement dite :
 Les prélèvements sont d'origine très diverse.
 La mise en évidence des bactéries pathogènes dépend de la localisation de la
suppuration (proche ou non d'une flore commensale, du mode de prélèvement
(écouvillon, seringue, biopsie) et du mode de transport.
1- Objectifs :

Faire le diagnostic de certitude d’une infection suppurative.

Identifier le ou les agents microbiens responsables.

Déterminer la sensibilité aux antibiotiques du germe incriminé.
2- Démarche diagnostique :
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3- Prélèvements :
A / Fiche de renseignements :
Les renseignements cliniques doivent être correctement donnés :

Identité du patient prélevé.

Identité du médecin prescripteur.

Examen demandé.
Pour une efficience maximale, la fiche de renseignements devrait contenir les informations
complémentaires suivantes (Données obtenues par l’interrogatoire) :

Nature et localisation anatomique du produit pathologique.

Méthode de prélèvements employée, si non usuelle.

Circonstances epidémio-cliniques amenant la demande.

Notion de traitement antibiotique, local ou général récent.
B / Conditions de Prélèvements :
Les prélèvements doivent être réalisés :
 Avant toute antibiothérapie préalable.
 Les règles d’hygiène doivent être respectées : dans des conditions extrêmement
strictes d’asepsie, après désinfection soigneuse de la peau.
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 L’étiquetage des prélèvements doit être rigoureux.
 Les délais d’acheminement doivent être respectés.
 Certains prélèvements se font dans un milieu spécialisé, et par un personnel qualifié.
C / Modes de prélèvements :
1- Ecouvillons : (Nettoyage préalable)
a / 02 écouvillons
:  Examen direct
 Culture.
(Si un seul écouvillon, se contenter d'une culture)
b/ On repérera et on prélèvera les traces purulentes qui devront être échantillonnées.
En leur absence le prélèvement devra être au fond de la plaie ou aux endroits où celle ci est
peu accessible aux contaminations, il faut au besoin écarter les berges.
c/ Un écouvillon que l'on peut immerger ou imbiber de milieu de transport est préférable à un
écouvillon sec qui ne permet pas la recherche de germes anaérobies.
d/ La qualité du diagnostic est inversement proportionnelle au temps passé avant la culture.
2- Prélèvement à la seringue :

Se fait par ponction du pus ou de la sécrétion à analyser, après désinfection de la peau à
l'alcool.

On peut envoyer rapidement le prélèvement dans la seringue, après avoir recouvert
l'aiguille de son capuchon et purgé l'air éventuellement présent.

Si
le délai est trop lent utiliser un milieu de transport dans lequel on injecte le
prélèvement.

Dans le cas particulier des ponctions articulaires : il faut faire en plus un prélèvement sur
tube avec anticoagulant pour la cytologie de même qu'il faut penser à ensemencer
parallèlement un flacon à hémoculture si on suspecte une brucellose.

Autres cas particuliers : ceux des abcès du cerveau, des infections osseuses (ce sont ici
des biopsies qui sont envoyées au laboratoire).

Remarquons, enfin, que dans le cas d’une infection oculaire, il n’y a guère d’autre
solution que de prélever avec un écouvillon stérile imbibé de bouillon nutritif.
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D / Transport

Les prélèvements doivent être réalisés stérilement, acheminés immédiatement au
laboratoire pour éviter la prolifération des bactéries commensales (Prélèvements non
protégés) et la mort des bactéries pathogènes fragiles.

Un bon milieu de transport doit :
 Protéger les bactéries anaérobies de l'oxygène de l'air,

Empêcher la dessiccation du produit pathologique,

Et préserver la multiplication ultérieure des bactéries aérobies ou anaérobies.
 Eviter les aléas relatifs aux conditions de transport et à la mauvaise conservation du
prélèvement.
 Si le laboratoire est éloigné, utiliser :

Milieux de transport aéro-anaérobies pour bactéries fragiles et anaérobies ( type
Portagerm® , TGV® ).


Milieux d’hémocultures.
A + 4°C : lyse des leucocytes en quelques heures + mort des bactéries fragiles.
 L’ECB du pus ne doit pas être différé dans le temps.
IV. Conduite de l’examen cytobactériologique :
1- Aspect macroscopique :
On note la consistance, la couleur, l'aspect, ainsi que la viscosité du pus.
Le pus peut être épais, visqueux, élastique, mélangé au sang ou non, fluide ou séreux.
La couleur varie de la teinte chocolat au blanc, certains pus sont verdâtres ou bleutés.
 Lorsqu’un prélèvement est assez abondant, l’examen macroscopique ( odeur , couleur
de pus ) peut fournir des renseignements intéressants :

l’odeur nauséabonde des pus à anaérobies,

l’aspect granuleux, mal lié, des pus à streptocoques,

les pus crémeux à Staphylocoques ou à Pneumocoques sont
d’orientation dont il faut tenir compte.
2- Analyse microscopique :

L'examen microscopique est fondamental et est indispensable.
 Il permet d'orienter le diagnostic.
des éléments
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 Dans tous les cas, il permet d'envisager la suite des examens à effectuer.
 L'examen direct a donc une forte valeur pour le choix des milieux d’isolement.
 Ne peut avoir qu’une valeur présomptive.
Examen direct :

Bleu de méthylène pour observer et décrire la cytologie.

Gram pour orienter la flore.

et éventuellement coloration de Ziehl Neelson.

Sur un des 2 écouvillons.

Sur le pus contenu dans un tube ou seringue, sur matériel de prothèse stérilet ou drain.

Si le pus ne
peut pas être recueilli (prothèse) : ajouter 1 ml de BHIB, agiter
soigneusement (utiliser éventuellement le vortex).
Faire l’ED du bouillon et ensemencer 2 à 3 gouttes sur différents milieux.

Organe, tissus, biopsies : si possible découper le prélèvement à l'aide de ciseaux stériles,
apposer sur une lame un fragment représentatif(purulent si possible) et faire la coloration
Culture: Broyer dans un mortier stérile à l'aide du pilon les fragments restants ( travailler
entre 2 becs Bunsen ou sous hotte à flux laminaire)
 Ensemencer les mêmes milieux que pour pus.
2.1. Examen direct à l’état frais :

Une
goutte
du
prélèvement
est
déposée
sur
lame
porte-objets.
On ajoute une lamelle puis on observe au microscope optique, au grossissement x40.

Cet examen permet de

Distinguer les cellules d'accompagnement : soit des PN ou des lymphocytes
(étude qualitative et quantitative).


Constater l'état des cellules (intactes ou altérées ).

Observer la morphologie et la mobilité des bactéries éventuelles.
L’examen cytologique consiste à apprécier le degré d’altération et le nombre des
polynucléaires neutrophiles et, éventuellement, la présence d’autres cellules.
2.2. Ex amen direct après coloration
Au microscope optique, grossissement X 100.
A. Coloration de Gram : On notera :
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 la présence ou l’absence de bactéries (une ou plusieurs espèces) ,
 leur morphologie,
 leur position intra ou extracellulaire,
 en cas de pus polymicrobien, l’espèce dominante, et leur abondance.
B. Coloration au bleu de methylène :
Cet examen permet de :
*
Confirmer les résultats de l'examen à l'état frais ( nature des éléments cellulaires , leur
état, et le calcul de leur % ) .
*
Observer éventuellement les bactéries ( forme et disposition).

Devant un pus amicrobien et / ou si la cytologie révèle une majorité de lymphocytes, la
recherche des Mycobactéries s’impose. Une coloration de Ziehl sera alors nécessaire.
Résultats de l'examen direct :
-
Cytologie :
PN + altérés,
Lymphocytes dans le pus dû à des mycobacteries
Pour les liquides articulaires : il faut quantifier les cellules.
Caractéristiques du liquide articulaire.
3- Culture :
•
C’est l’élément clé de diagnostic
Des isolements sur différents milieux sont réalisés en tenant compte de la fiche de
renseignements cliniques et des examens macro et microscopiques sur :
 Gélose au Sang Cuit incubée sous CO 2,
 Gélose au Sang Frais,
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 Gélose Chapman,
 Gélose Hecktoen,
 Gélose Columbia au sang frais incubée en anaérobiose 48 heures à 05 à 07 jours en
anaérobiose,
 Gélose Loweinstein Jensen ( si suspicion de Mycobactéries ),
 Autres types de milieu si le clinicien oriente vers certains types particuliers de germes.
L’identification est ensuite effectuée sur les différents types de germes isolés et purifiés.
 Méthode d’ensemencement :

On dépose une goutte de pus sur la surface de la gélose à ensemencer ou bien on
frotte l'embout de l'écouvillon ( qui peut être imbibé avec un bouillon nutritif) sur une
partie de la surface de cette gélose.
 Avec une pipette fermée, on effectue un épuisement en stries.
Résultats de la culture :
 Recherche de bactéries Aérobies, Anaérobies et éventuellement des Mycobactéries
Exemples de germes à rechercher en fonction de la clinique.
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Antibiogramme sur les bactéries estimés pathogènes.
V.
Interprétation :
Suppurations superficielles ou profondes en continuité avec le milieu extérieur
(ex
: abcès fistulisé):
Les germes isolés peuvent être des contaminants.
L'interprétation sera aidée par l'ED, les espèces quantitativement plus importantes ayant plus
de chance d'être en relation ave l'état pathologique constaté.
De même l'isolement répété d'un germe réputé non pathogène (Staphylococcus epidermidis)
dans les prélèvements successifs pourra faire soupçonner sa participation au processus
suppuratif.
Suppurations profondes et fermées :
En général sont monomicrobiennes et ne posent pas de grands problèmes d'interprétation.
VI. Conclusion :
 Le diagnostic microbiologique du pus est la première étape incontournable de
la prise en charge des infections suppuratives.

La mise en évidence du germe après examen direct et ou la culture permet un
diagnostic de certitude et oriente le traitement antibiotique.

Seule la microbiologie quand elle est positive, permet de donner une étiquette
étiologique précise.

Pour la fiabilité des résultats, on n’insistera jamais assez sur :

Respect strict de toutes les étapes de l’examen,

Permanente coopération entre le prescripteur et le microbiologiste.
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