Expérimentation Haie, agroforesterie, biodiversité :
Suivi des populations de syrphidae
RAPPORT D'ACTIVITÉS 2008 - 2010
CONTEXTE
Depuis plusieurs décennies, nous assistons à une diminution alarmante de la biodiversité, phénomène en
grande partie lié à la gradation et au cloisonnement des habitats qui se sont opérés avec
l'intensification de l'urbanisation et des pratiques agricoles.
La stratégie européenne pour la biodiversité, déclinée au niveau national et régional a pour ambition de
stopper la perte de biodiversité d’ici 2010. Le chantier est énorme et il semble évident que ces objectifs
seront difficiles à atteindre sans la présence d'infrastructures agro-écologiques, notamment de type
trames arborées et herbacées.
La restauration et la création de haies et de parcelles agroforestières tendent à répondre à cette
nécessité de recréer les conditions favorables à la biodiversité et à l'équilibre des milieux. Et il ne
s'agit pas de constituer de simples zones de compensation écologique mais bien de développer des
zones de protection qui soient productives et qui seront ainsi mieux acceptées par le monde agricole.
Au delà de la production de cultures agricoles et de bois d'œuvre, bois de chauffe ou bois raméal
fragmenté, un environnement agroforestier est aussi en mesure de créer des services écologiques.
Pourtant, force est de déplorer que ces contributions, notamment sur la biodiversité, sont encore mal
appréciées, faute de données précises. Le monde agricole est notamment demandeur en matière de
références techniques sur les aménagements favorables aux auxiliaires des cultures.
C'est précisément pour répondre à cette attente et pour vérifier et évaluer ces services que l'association
Arbre et Paysage 32 a impulsé la création d'une plateforme d’expérimentation et de démonstration
sur une des premières parcelles d'agroforesterie moderne située à Mauvezin.
OBJECTIFS DU SUIVI DES POPULATIONS DE SYRPHIDAE EN PARCELLE AGROFORESTIÈRE
L'objectif de ce projet est d'apprécier et de comprendre le rôle et les contributions des composantes
végétales d'une parcelle agroforestière pour la circulation, le nourrissage, la reproduction d'insectes
auxiliaires de la famille des syrphidae, insectes aussi considérés comme indicateur écologique.
Il s'agira en particulier de dire si les bandes enherbées et arborées hébergent certaines espèces de
syrphes qui iront ensuite coloniser l'espace cultivé à la recherche de pucerons. Il s'agira aussi de
vérifier si la parcelle agroforestière est visitée par des espèces typiquement forestières, se servant de
celle-ci comme relais entre deux massifs forestiers. Dans l’affirmative, l’agroforesterie serait synonyme
de meilleure perméabilité du paysage, atténuant ainsi les effets de la fragmentation des habitats, cause
majeure de l’érosion de la biodiversité avec leur disparition ou dégradation.
Objectifs du projet :
1/ Établir un état initial de la biodiversité entomologique dans une parcelle agroforestière comparée à une
parcelle conventionnelle et à des bords de champ en ripisylve
2/ Étudier l’évolution sur 3 années.
Objectif à long terme :
Réaliser un suivi sur 10, 15 ou 20 ans, de l’évolution des niveaux de biodiversité.
Cette évolution dans la parcelle agroforestière sera le reflet de l’impact du développement des arbres sur
le peuplement entomologique : de nouveaux habitats pourront être supportés par les arbres eux-mêmes,
comme par la bande enherbée ; dans un contexte de changement reconnu des conditions climatiques
l’ensemble des sites de suivi pourra également révéler des changements de biodiversité inhérents à cette
évolution climatique.
INTÉRÊT DE L'ÉTUDE DES SYRHIDAE
L'intérêt des syrphes comme objet d'étude est multiple. D'une part, de nombreuses espèces sont
auxiliaires de cultures : adultes pollinisateurs et larves prédatrices de pucerons. D'autre part, la famille
des syrphidae est relativement intéressante car elle est plutôt bien identifiée et suffisamment
d’informations sont disponibles sur les habitats, microhabitats et traits de vie de plus de 95% des
espèces françaises. De plus, les différentes espèces de syrphes occupent différents compartiments de
l’écosystème et peuvent fournir des informations sur toutes les strates verticales des milieux, de la zone
racinaire des graminées jusqu’à la canopée des arbres dominants en forêt. Elles sont également
présentes dans une large gamme de types d’habitats : il existe des espèces caractéristiques de presque
tous les habitats présents en France.
On recense en France environ 500 espèces appartenant à la famille des syrphidés.
PROTOCOLE ET DISPOSITIF
Caractéristique du site d'expérimentation
Surface de la parcelle = 9,8 ha dont la moitié en agroforesterie depuis 2007
Sol : argilo calcaire, jusqu’à 42% d’argile et quelques zones d’affleurement calcaire
Assolement depuis la plantation : Tournesol / Blé dur / Tournesol / Féverole
Cultures en semis direct depuis 10 ans – Passage en bio courant 2009
Structures arborées présentes :
- Haies existantes sur 3 côtés (ripisylve au sud)
- Plantation de rangées d'arbres agroforestiers et de haies au cours de l'hiver 2006 – 2007
Essences agroforestières :
- Noyer : 25 %
- Alisier torminal : 18%
- Cormier : 15 %
- Érable champêtre : 15%
- Chêne sessile : 10%
- Chêne pubescent : 7 %
- Merisier : 8 %
- Orme champêtre : 2%
Essences pour les haies plantées :
Chêne pubescent, Érable champêtre, Alisier torminal, Poirier franc, Prunier domestique, Cornouiller sanguin,
Viorne lantane, Troène des bois, Aubépine monogyne, Prunellier, Rosier persistant, Néflier, Églantier, Cormier.
Le protocole
Les relevés d’insectes sont réalisés à l’aide de pièges d’interception de type Malaise Tunnel dont les
flacons collecteurs sont remplis d’alcool à 70°. Le dispositif comprend quatre emplacements :
- Ligne d'arbres de la parcelle agroforestière
- Parcelle cultivée ouverte
- Bord de ruisseau arboré en bas de parcelle agroforestière
- Bord de ruisseau arboré en bas de parcelle cultivée
Relevés 1 fois par mois la première année
Relevés tous les 15 jours à partir de 2009 pour se caler sur le suivi sur carabidae.
Parcelle agroforestière de Mauvezin dans sa quatrième saison de développement
Présentation des tendances observées entre 2007 et 2010
EVOLUTION DE L'ABONDANCE SPÉCIFIQUE
Entre 2007 (année de mise en place de la plantation agroforestière) et 2010 (3° année de croissance des
arbres), un total de 36 espèces de syrphidae ont été piégées. Certaines espèces ont été observées sur
les 4 années et avec des effectifs significatifs, d'autres sont apparues de manière plus anecdotiques.
Rappel du contexte :
Modalité PAF = Bande agroforestière intercalaire
Modalité PC = Parcelle cultivée ouverte
Modalité RAF = Haie en bas de la parcelle agroforetière
Modalité RC = Lisière en bas de parcelle cultivée ouverte
C'est au niveau de la modalité PAF que l'on observe le plus de diversité dans les espèces de syrphes
piégés, et ce dès les premiers mois suivant la plantation, avec 14 espèces recensées. Il semblerait que la
ligne d'arbres plantées, à travers la bande enherbée installée à ses pieds, joue déjà un rôle de corridor de
circulation entre les haies voisines et la parcelle cultivée. En 2010, le nombre d'espèces atteint un
maximum avec 18 types différents.
Si l'on regarde l'ensemble des 4 années de piégeage, le nombre total d'espèces piégées par modalité est
de : PC (19 espèces) = RAF (19 espèces) < RC (21 espèces) < PAF (23 espèces).
En terme d'évolution, il semblerait que 3 ans après la plantation, le nombre d'espèces piégées ait
augmenté dans les 4 milieux évalués.
Culture année 2007 : Tournesol
Culture année 2008 : Blé
Culture année 2009 : Tournesol avec problème
de levée
Culture année 2010 : Féverole
DISTRIBUTION DES EFFECTIFS ENTRE ESPÈCES PIÉGÉES
De manière à évaluer l'équilibre dans la distribution des espèces dans chaque modalité, un coefficient
d'équitabilité à été calculé sur les 4 années de piégeage. Ce coefficient varie entre 0 et 1. Il tend vers 0
quand la quasi-totalité des effectifs est concentrée sur une seule espèce et tend vers 1 lorsque les
effectifs sont équitablement répartis entre les diverses espèces.
Le coefficient d'équitabilité est assez peu différent entre les 4 milieux en 2007, l'année de la plantation. On
aurait pu s'attendre à avoir un meilleur équilibre au niveau des haies et de la lisière en bas de parcelle.
Si l'on fait une moyenne de ces coefficients d'équitabilité sur les 4 années du suivi, c'est la parcelle
cultivée ouverte qui semble la moins équilibrée et la haie en bas de parcelle agroforestière qui serait la
plus équilibrée : PC (0,49) < PAF (0,59) < RC (0,6) < RAF (0,68).
Si on regarde la composition des espèces piégées, on s'aperçoit rapidement qu'une espèce domine
largement les effectifs : Sphaerophoria scripta et dans une moindre mesure (Eupeodes corollae en
2007, puis Paragus bicolor ou Paragus romanicus en 2008, 2009, 2010). C'est notamment l'explosion de
la population de Sphaerophoria scripta en 2010 qui expliquerait la moindre part des autres espèces et
donc la baisse des indices d'équitabilité. A l'inverse, l'année 2009, qui présente les meilleurs coefficients, a
été bien moins fructueuse que les autres en matière d'effectifs piégés, et notamment pour l'espèce
dominante Sphaerophoria scripta, ce qui explique le meilleur équilibre dans les effectifs.
Si on fait le lien avec les cultures en place, on constate que ce sont les années avec des cultures propices
aux pucerons (blé en 2008 et féverole en 2010) et donc favorables aux espèces aphidiphages, qui
présentent les coefficients d'équitablité les plus faibles. Cela s'explique par la forte représentation des
espèces aphidiphages (Sphaerophoria scripta, Eupeodes corollae, Paragus sp.) dans l'effectif total
piégé.Ci-dessus, quelques-une des espèces de syrphes observées sur le site de Mauvezin.
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