CQFD 40
CQFD 40 (Dossier 4 de l’ECN 2008)
Enoncé
Une femme âgée de 40 ans, vous consulte pour une asthénie ressentie depuis environ six mois. La
patiente s'exprime difficilement, répond de manière partielle aux questions, succinctement, en
quelques mots; elle vous signale ne plus être réglée depuis 6 mois, ce qui semble coïncider avec sa
fatigue. Elle a cessé de travailler depuis le début de la semaine. Elle a déjà consulté à plusieurs
reprises dans le dernier trimestre. Dans les antécédents, on relève : une tentative de suicide il y a
deux mois, survenue dans le contexte d'une séparation conjugale. La patiente vit à présent seule;
elle n'a pas eu d'enfants. Les dernières consultations ont mis en évidence des troubles du sommeil,
avec un réveil vers 4 heures du matin ayant conduit à une prescription de clomipramine
(Anafranil®) qu'elle n'a que très peu pris. Elle a cependant gardé les médicaments "ça pourrait
servir" nous dit-elle. Enfin, la patiente se plaint d'une légère prise de poids, particulièrement au
niveau du visage qui s'est arrondi, ainsi qu'au niveau du cou. Elle a depuis peu un duvet sur les
joues et une discrète pilosité au dessus de la lèvre supérieure. A l'entretien, ce jour, elle exprime sa
difficulté à vivre seule, dit qu'elle n'a plus de but dans la vie. Elle délaisse ses amies, ne ressent plus
de plaisir à participer aux activités qu'elle faisait par le passé avec elles. Elle dit "qu'elle se sent
nulle", "laide avec cette moustache qui la défigure". Elle délaisse son appartement, se lamente sur
l'absence d'avenir depuis sa séparation, ressent un grand vide dans sa vie surtout parce qu'elle "n'a
pas su avoir une vie de couple enrichissante et n'a pas d'enfants". Elle pense à la mort, surtout le
matin au réveil. Elle a arrêté de travailler, du fait de la fatigue mais également parce qu'elle se sent
inutile. Elle n'a pas de consommation alcoolique.
Question N°1
Quel diagnostic psychiatrique évoquez-vous chez cette femme? Quels sont les éléments qui
orientent vers ce diagnostic?
Question N°2
Quels sont, chez cette patiente, les principaux facteurs de risque suicidaire?
Question N°3
En raison du risque suicidaire, vous décidez de faire hospitaliser la patiente en service de
psychiatrie. L'examen clinique, à son arrivée dans le service, note un poids de 64 kg pour une taille
de 1m60. La pression artérielle est mesurée, après 10 min de repos, à 160/105 mmHg. La patiente
présente une érythrose faciale et mentionne une prise de poids de 5 kg au cours des 6 derniers mois.
On note quelques ecchymoses sur les avant-bras, particulièrement nettes au niveau des points de
prélèvements veineux. Le tableau psychiatrique semble s'intégrer dans une pathologie organique,
laquelle? Quels sont les signes cliniques en faveur de cette pathologie? Quel est le lien entre le
tableau psychiatrique et la pathologie organique?
Question N°4
Quels examens biologiques demandez-vous chez cette patiente pour confirmer le diagnostic de la
pathologie organique ? Qu'en attendez-vous ?
Question N°5
L'aménorrhée entre-t-elle dans ce contexte ? Quelles autres situations pouvez-vous évoquer pour
expliquer l'aménorrhée et par quels examens complémentaires les éliminez-vous ?
CQFD 40
Question N°6
Après avoir vérifié l'absence de contre-indications vous décidez de prescrire à nouveau l'antidépresseur
précédemment prescrit ; quels effets indésirables potentiels devez-vous signaler à la patiente ?
CQFD 40
CORRECTION du Dossier 4 de l’ECN 2008
Q1/
20 pts
Trouble de l’humeur = épisode dépressif majeur d’intensité sévère, de type mélancolique
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Les éléments qui orientent vers ce diagnostic sont :
Terrain : femme d’âge moyen, isolement social, répercussion significative sur la vie
quotidienne et professionnelle (arrêt de travail)
Facteur déclenchant : séparation conjugale
Humeur dépressive :
- Tristesse pathologique
- Athymhormie
- Anhédonie
- Désintérêt : perte de l’élan vital, anesthésie affective, pauvreté des contacts sociaux.
- Dévalorisation ; idées d’incurabilité, d’indignité, de culpabilité, autodépréciation.
- Idées suicidaires (pensées de mort)
- avec antécédent d’autolyse (de passage à l’acte)
Ralentissement psychomoteur :
- Aboulie, apragmatisme, asthénie, lenteur des gestes.
- Incurie.
- Altération du langage : rare, peu informatif, perte de la prosodie, bradyphémie.
- Bradypsychie, monoïdéisme, ruminations dépressives, trouble de la concentration.
Troubles somatiques :
- Asthénie
- Insomnie de petit matin avec réveil matinal précoce.
- Aménorrhée secondaire.
- Prise de poids.
- Mauvaise observance du traitement antidépresseur antérieurement prescrit
- Pas de notion de prise de toxique, pas d’alcoolisation.
Durée supérieure à 14 jours (altération du fonctionnement habituel)
NB/ Signes somatiques (hirsutisme…) = rechercher une pathologie organique associée.
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Q2/
20 pts
Chez cette patiente les facteurs de risque suicidaire sont :
Antécédent de tentative de suicide
Troubles récents, première année des troubles
Etat dépressif majeur
valorisation
Expression d’idées suicidaires (intentionnalité élevée, intensité des idées suicidaires)
Evénement précipitant : séparation conjugale
Isolement social, familial et professionnel
Stockage de médicaments et accès à des moyens létaux (antidépresseurs tricycliques…)
Rupture de traitement : mauvaise observance du clomipramine, retard de prise en charge
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Q3/
20 pts
Hypercorticisme = syndrome de Cushing
Maladie de Cushing (le plus probable par argument de fréquence devant ce tableau
d’hypercorticisme avec virilisme modéré) lié à un adénome hypophysaire corticotrope
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CQFD 40
Signes cliniques en faveur de cette pathologie :
Asthénie
Aménorrhée secondaire
Erythrose faciale
Prise de poids récente (5 Kg en 6 mois) avec surpoids : IMC = 25 Kg/m2 et répartition
facio-tronculaire des graisses : visage arrondi, cou avec « bosse de bison »
Signes d’hypercatabolisme protidique : fragilité capillaire, ecchymoses multiples
Hirsutisme (pilosité du visage de type androïde)
Hypertension artérielle (> 140/90 mmHg), à confirmer par 2 autres mesures
Troubles psychiatriques : dépression mélancolique, crise suicidaire
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Il existe un lien entre le tableau psychiatrique et la pathologie organique :
L’état dépressif majeur fait partie du tableau d’hypercorticisme
L’hypercorticisme a favorisé le développement de l’état dépressif : les troubles
organiques (aménorrhée, prise de poids) précèdent de 6 mois les troubles psychiatriques
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Q4/
15 pts
Bilan biologique non spécifique :
NFS, plaquettes : polyglobulie, hyperleucocytose à polynucléose, thrombocytose
Glycémie à jeun : élevée voire diabète (> 1,26 g/L à deux reprises)
Bilan lipidique à jeun (cholestérol total, LDL et HDL, triglycérides) :
hypercholestérolémie, hypertriglycéridémie
Bilan hépatique : cholestase anictérique (gamma GT, PAS augmentées)
Ionogramme sanguin : hypokaliémie (hyperaldostéronisme)
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Bilan hormonal spécifique :
Cortisol libre urinaire des 24 heures : élevé
Cortisolémie plasmatique : élevée
Abolition du cycle nycthéméral du cortisol
Tests de freinage faible et standard à la dexaméthasone négatifs : pas de freinage de
la sécrétion de cortisol
Diagnostic étiologique :
Dosage de l’ACTH plasmatique (élevée en cas d’adénome corticotrope)
Tests dynamiques de freinage fort à la dexaméthasone
Tests de stimulation de l’ACTH (métopirone, CRF) positifs si adénome corticotrope
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NC
Q5/
10 pts
Oui, l’aménorrhée secondaire est un symptôme du syndrome de Cushing
L’excès de cortisol freine l’axe gonadotrope (inhibition de la sécrétion hypothalamique de
GnRH)
2
Autres situations pouvant expliquer l’aménorrhée
Grossesse évolutive : dosage quantitatif des béta HCG plasmatiques, échographie
pelvienne par voie sus-pubienne et endovaginale
Ménopause précoce (insuffisance ovarienne) : test aux progestatifs, dosage de FSH
(élevé), 17 bêta oestradiolémie (effondrée)
Hyperprolactinémie de déconnection sur adénome corticotrope ou adénome
hypophysaire mixte (prolactine et corticotrope) : dosage de la prolactine plasmatique
Hyperandrogénie : dosage des androgènes, testostéronémie, delta 4 androstendione,
sulfate de DHA, 17 OH progestérone, test à la LHRH, échographie pelvienne
Hypothyroïdie, insuffisance thyréotrope : dosage plasmatique de la TSHus et T4L
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CQFD 40
Autre tumeur hypophysaire avec insuffisance gonadotrope : IRM hypophysaire
Hypophysite auto-immune
Q6/
15 pts
Effets indésirables des antidépresseurs tricycliques : information claire, loyale et appropriée
sur les effets indésirables fréquents et graves :
Effets anticholinergiques :
- sécheresse buccale
- tachycardie ;
- hypotension artérielle orthostatique
- constipation
- dysurie, rétention d’urines
- troubles de l’accommodation, mydriase, hypertonie oculaire
- sueurs ; hyperthermie
Troubles de la repolarisation cardiaque (allongement du QT) + effet stabilisant de
membrane avec troubles de la conduction auriculo-ventriculaire et intra-ventriculaire
(risque de torsade de pointe)
Troubles neurologiques :
- Somnolence
- Tremblements des extrémités
- Crises convulsives
- Confusion
- Coma agité et hypertonie pyramidale en cas d’intoxication aiguë
Prise de poids
Baisse de la libido, asthénie
Troubles psychiatriques :
- Virage maniaque : inversion de l’humeur, épisode délirant aigu
- Exacerbation anxieuse + insomnie
- Augmentation du risque suicidaire par levée d’inhibition
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