Lycée Louis-Le-Grand, Paris Samedi 09/04/2016
MPSI 4 – Mathématiques
A. Troesch
Devoir Surveillé 8 – Algèbre linéaire
La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction, la clarté, la précision et la concision des raison-
nements entreront pour une part importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les résultats de leurs calculs.
L’usage de tout document et de tout matériel électronique est interdit. Notamment, les téléphones portables doivent
être éteints et rangés.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être une erreur d’énoncé, il le signalera sur sa copie et
poursuivra sa composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre
Problème Sous-espaces stables par un endomorphisme
Dans tout le problème, Edésigne un espace vectoriel sur un corps K. On suppose que Eest de dimension finie non
nulle.
Le but de ce problème est d’étudier les sous-espaces stables par un endomorphisme ude E. On rappelle qu’un sous-
espace Fde Eest dit stable par ulorsque u(F)F.
Étant donné u∈ L(E), on note K[u] = {P(u)|PK[X]}le sous-ensemble de L(E)constitué des endomorphismes
s’écrivant comme un polynôme en l’endomorphisme u. On rappelle que pour tous polynômes Pet Q, on a P(u)Q(u) =
QP(u) = (P Q)(u).
On rappelle que Pest un polynôme annulateur de usi P(u) = 0L(E).
Partie I – Quelques résultats préliminaires sur les sous-espaces stables
1. Intersection et somme de sous-espaces stables. Soit u∈ L(E).
(a) Justifier qu’il existe un sous-espace de Estable par u.
(b) Soit (Fi)iIune famille de sous-espaces stables par u. Montrer que \
iI
Fiest stable par u, ainsi que, lorsque
Iest fini, X
iI
Fi.
2. Endomorphismes laissant stable un sous-espace donné. Soit Fun sous-espace de E.
(a) Montrer que si Fest stable par uet vde L(E), alors Fest stable par λu +v(λK) et par uv.
(b) Que peut-on dire de la structure algébrique de {u∈ L(E)|u(F)F}?
(c) Justifier que si Fest stable par u, alors Fest stable par tout élément P(u)de K[u](PK[X]).
3. Sous-espaces stables définis par des noyaux et images de polynômes en u.Soit u∈ L(E).
(a) Montrer que Ker(u)et Im(u)sont stables par u.
(b) Montrer plus généralement que pour tout PK[X],Ker(P(u)) et Im(P(u)) sont stables par u.
4. Polynôme minimal ponctuel. Soit u∈ L(E)et xE.
(a) En étudiant la liberté d’une certaine famille, montrer qu’il existe un polynôme PK[X]non nul tel que
P(u)(x) = 0.
(b) Montrer que l’ensemble des polynômes Ptels que P(u)(x) = 0 est un idéal de K[X].
(c) En déduire l’existence et l’unicité d’un polynôme πu,x unitaire non nul de degré minimal tel que πu,x (u)(x) =
0. Ce polynôme πu,x est appelé polynôme minimal ponctuel de uen x.
5. Sous-espaces cycliques. Soit u∈ L(E).
(a) Soit Xune partie de E. Montrer l’existence d’un sous-espace stable par uminimal au sens de l’inclusion et
contenant X. Lorsque X={x}est un singleton, on note < x >uce sous-espace stable minimal.
1
(b) Montrer que < x >u= Vect(uk(x), k N), et en notant d= deg(πu,x), montrer que Bx= (uk(x))k[[0,d1]]
en est une base.
(c) Soit uxl’endomorphisme de < x >uinduit par usur le sous-espace stable < x >u. Déterminer sa matrice
dans la base Bxen fonction des coefficients du polynôme πu,x.
Partie II – Sous-espaces stables par un projecteur ou une symétrie
Soit pun projecteur de E.
1. Soit Fun sous-espace vectoriel de Im(p)et Gun sous-espace vectoriel de Ker(p). Montrer que F+Gest stable
par p.
2. Soit Hun sous-espace vectoriel de Estable par p. Montrer que H= (HIm(p)) (HKer(p)).
3. En déduire une description exhaustive des sous-espaces stables par p.
On montre dans la suite du devoir que ceci est un cas particulier d’une situation générique.
Partie III – Diagonalisation
Soit u∈ L(E). On dit que xEest un vecteur propre de us’il est non nul et si u(x)et xsont colinéaires, autrement
dit si xest non nul et s’il existe λKtel que u(x) = λx. Le scalaire λest alors appelé valeur propre de u. Ainsi,
λKest une valeur propre de usi et seulement s’il existe un vecteur xnon nul tel que u(x) = λx. On dira dans ce
cas que xest un vecteur propre associé à la valeur propre λ.
On note Sp(u)l’ensemble des valeurs propres de u. Ce sous-ensemble de Kest appelé spectre de u.
1. Valeurs propres et espaces propres
(a) Montrer que λest une valeur propre de usi et seulement si uλid n’est pas un automorphisme, et
que dans ce cas, les vecteurs propres associés à λsont les vecteurs non nuls de Ker(uλid). On note
Eλ(u) = Ker(uλid). Ce sous-espace de Eest appelé sous-espace propre de uassocié à la valeur propre λ.
(b) Soit λ1,...,λkdes valeurs propres de uet F1,...,Fkdes sous-espaces vectoriels de Eλ1(u),...,Eλk(u).
Montrer que F1+···+Fkest stable par u.
2. Valeurs propres et polynôme annulateur
(a) Soit Pun polynôme, et xun vecteur propre de u, associé à une valeur propre λ. Montrer que P(u)(x) =
P(λ)·x.
(b) En déduire que si Pest un polynôme annulateur de u,Sp(u)rac(P), où rac(P)désigne l’ensemble des
racines de P.
(c) Justifier que l’ensemble Iudes polynômes PK[X]tels que P(u) = 0 est un idéal de K[X], et en déduire
l’existence d’un polynôme unitaire non nul πuannulateur de uet divisant tout autre polynôme annulateur.
Ce polynôme est appelé polynôme minimal de u.
(d) Soit λune racine de πu. On écrit πu= (Xλ)Q, avec QK[X]. En supposant que λn’est pas valeur
propre de u, contredire la minimalité de πu.
(e) En déduire que Sp(u) = rac(πu).
(f) En déduire que uadmet un nombre fini de valeurs propres.
3. Lemme de décomposition des noyaux. Soit u∈ L(E).
(a) Soit Pet Qdeux polynômes de K[X]premiers entre eux. En se servant d’une relation de Bezout, montrer
que
Ker((P Q)(u)) = Ker(P(u)) Ker(Q(u)).
(b) En déduire que si P1,...,Pksont des polynômes deux à deux premiers entre eux, alors
Ker((P1···Pk)(u)) = Ker(P1(u)) · · · Ker(Pk(u)).
4. Diagonalisabilité. On dit que uest diagonalisable s’il existe une base Bde Etelle que MatB(u)soit diagonale.
(a) Soit λ1,...,λnles valeurs propres de u. Montrer que la somme Eλ1(u)+···+Eλk(u)est directe, et identifier
cette somme comme noyau d’un polynôme en u.
2
(b) Montrer que uest diagonalisable si et seulement si
E=M
λSp(u)
Eλ(u).
(c) En déduire que uest diagonalisable si et seulement si son polynôme minimal πuest scindé à racines simples.
Partie IV Description des sous-espaces stables
Soit uun endomorphisme de E, et πuson polynôme minimal, factorisé sous la forme
πu=Pα1
1···Pαk
k,
où les Pisont des polynômes irréductibles unitaires deux à deux distincts, et les αides entiers naturels non nuls.
1. Justifier que E=
k
M
i=1
Ker(Pαi
i(u)).
2. Soit Fun sous-espace stable par u, et v∈ L(F)l’endomorphisme de Finduit par u.
(a) Décrire Ker(Pαi
i(v)) en fonction de Ker(Pαi
i(u)) et F.
(b) En déduire que
F=
k
M
i=1
(Ker(Pαi
i(u)F).
3. En déduire qu’un sous-espace Fde Eest stable par usi et seulement s’il s’écrit comme somme directe de
sous-espaces Fides Ker(Pαi
i(u)), chaque Fiétant stable par u.
4. Donner une description des sous-espaces stables par un endomorphisme diagonalisable uen fonction des sous-
espaces vectoriels des sous-espaces propres de u.
5. Expliquer en quoi le résultat de la partie II concernant les projecteurs est un cas particulier du résultat de la
question précédente.
6. On suppose que upossède nvaleurs propres distinctes, nétant la dimension de E.
(a) Justifier que Eest diagonalisable et donner la dimension des sous-espaces propres de u.
(b) Montrer qu’il n’y a qu’un nombre fini de sous-espaces stables par u. En donner une description. Combien y
en a-t-il ?
Partie V Endomorphismes semi-simples
On dit que uest semi-simple si tout sous-espace de Estable par uadmet un supplémentaire dans Estable par u.
Soit uun endomorphisme quelconque de E.
1. Montrer que pour tout yEnon nul, πu,y divise πu(notation introduite dans la partie I pour le polynôme
minimal ponctuel πu,y et dans la partie III pour le polynôme minimal πu)
2. On suppose dans cette question que πuest irréductible. On souhaite montrer que uest semi-simple.
(a) Justifier que pour tout ynon nul de E,πu,y =πu.
(b) Soit Fun sous-espace stable par Etel que F6=E, et on fixe xE\F. Montrer que F< x >u={0}.
(c) Conclure soigneusement.
3. On suppose dans cette question que πu=P1···Pk, les Piétant irréductibles unitaires distincts.
(a) Soit i[[1, k]]. Montrer que l’endomorphisme ϕiinduit par usur Ker(Pi(u)) est semi-simple. On justifiera
au préalable que Ker(Pi(u)) 6={0}.
(b) En déduire que uest semi-simple.
4. On suppose inversement qu’il existe un irréductible unitaire Pde K[X]tel que P2divise πu. On note πu=P Q,
avec QK[X]. On souhaite prouver que le sous-espace F= Ker(P(u)) ne possède pas de supplémentaire
stable par u. On raisonne par l’absurde et on considère Sun tel supplémentaire.
(a) Soit xS. Justifier que Q(u)(x)F, et en déduire que Q(u)(x) = 0.
3
(b) L’endomorphisme uest-il semi-simple ?
Partie VI – K[u]-modules et sous-espaces stables
Soit Aun anneau, et Eun ensemble, muni d’une loi de composition interne additive notée +, et d’une loi de composition
externe sur A, notée ·. On dit que Eest un module sur A(ou un A-module) si ces lois vérifient les mêmes propriétés
que celles définissant un espace vectoriel, à la seule exception que le corps de base est remplacé par un anneau. Un
sous-A-module de Eest un sous-ensemble de Enon vide et stable par combinaisons linéaires à coefficients dans A. Si
Fet Gsont deux sous-modules de E, on définit la somme F+Gcomme l’ensemble des éléments de Es’écrivant sous
la forme f+g, où fFet gG. On dira, comme dans le cas des espaces vectoriels, que Fet Gsont en somme
directe si FG={0}(et on notera dans ce cas la somme FG), et que Fet Gsont supplémentaires dans Esi
FG=E. On prendra garde au fait que contrairement au cas des espaces vectoriels, un sous-module de Epeut ne
pas avoir de supplémentaire dans E.
On remarquera que si Aest un corps, les notions de A-module et de A-espace vectoriel coïncident.
On reprend le contexte initial (Eest un espace vectoriel sur un corps K) et on considère un endomorphisme ude E.
1. Justifier que K[u]est un anneau, isomorphe au quotient K[X]/(πu)(on pourra voir K[u]comme l’image d’un
morphisme d’anneaux de K[X]dans L(E)).
2. Montrer que l’opération P(u)·x=P(u)(x)munit Ed’une structure de K[u]-module.
3. Montrer que si Mest un sous-K[u]-module de E, alors Mest un sous-espace vectoriel de E. La réciproque
est-elle vraie en général ? Caractériser les endomorphismes pour lesquels la réciproque est vraie. Que vaut K[u]
dans ce cas ?
4. Montrer qu’un sous-espace vectoriel Fde Eest stable par usi et seulement s’il s’agit d’un sous-K[u]-module
de E.
En particulier, on observera qu’un sous-espace Fstable par uadmet un supplémentaire stable par usi et seulement si
le K[u]-module Fadmet un supplémentaire (en tant que K[u]-module) dans E.
5. On se propose dans cette question de retrouver à l’aide de cette structure de K[u]-module le fait que si πuest
irréductible, uest semi-simple. On suppose donc que πuest irréductible.
(a) Justifier que K[u]est un corps.
(b) En déduire que uest semi-simple.
Partie VII Endomorphismes cycliques et endomorphismes simples
On dit que uest cyclique s’il existe xEtel que < x >u=E. On dit d’autre part que uest simple lorsque les
seuls sous-espaces de Estables par usont {0}et E. On étudie dans cette partie quelques propriétés de ces familles
d’endomorphismes.
1. On suppose dans cette question que uest cyclique, et on fixe xEtel que < x >u=E. Soit Fun sous-espace
stable par u.
(a) Soit Pl’ensemble des polynômes PK[X]tels que P(u)(x)F. Montrer qu’il existe DK[X]unitaire
et divisant πutel que I=D·K[X] = (D).
(b) Montrer que F=< D(u)(x)>u.
(c) En déduire qu’il n’existe qu’un nombre fini de sous-espaces de Estables par u.
2. On suppose que Kest infini. Montrer la réciproque de la question précédente.
3. Dans cette question, on souhaite montrer que uest simple si et seulement si son polynôme minimal est irréduc-
tible de degré égal à n= dim(E).
(a) Supposons que πuest irréductible, et notons dson degré. Montrer que tout sous-K[u]-espace vectoriel de E
est un sous-K-espace vectoriel de dimension divisible par d.
(b) En déduire que si πuest irréductible de degré n, alors uest simple.
(c) Établir la réciproque.
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