Homologie des variétés au delà de leur dimension.

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Nullité de l’homologie d’une variété topologique
au delà de sa dimension
Soit n un entier au moins égal à 1 (le cas n = 0 étant trivial). L’objet de ce texte est
de démontrer le théorème suivant (l’homologie étant à coefficients dans un anneau
commutatif quelconque) :
+ 1 Théorème. Soit X une variété topologique de dimension n (pas nécessairement compacte, mais sans bord). Alors Hi (X) = 0 pour tout i > n.
Au passage, on obtiendra :
+ 2 Théorème. Si U est un ouvert de Rn , on a Hi (U ) = 0 pour tout i ≥ n.
Noter que dans l’énoncé de ce second théorème, la condition est i ≥ n et non pas
i > n comme dans le premier théorème. C’est le mieux qu’on puisse faire, puisqu’en
enlevant un point de Rn on obtient un ouvert U ayant le type d’homotopie de Sn−1
et donc tel que Hn−1 (U ) 6= 0.
Commençons par un lemme de topologie métrique.
+ 3 Lemme. Soit X un espace métrique localement compact, et K une partie
compacte de X. Pour tout ε > 0, on note K + ε l’ensemble des points x de X tels que
d(x, K) ≤ ε.
(a) Pour tout η > 0, il existe ε > 0 aussi petit qu’on veut et une famille finie de
boules compactes F1 , . . . , Fp de rayons au plus η, dont les centres sont dans K, tels
◦
◦
que K + ε ⊂ F1 ∪ · · · ∪ Fp .
(b) K est l’intersection d’une suite décroissante K0 ⊃ K1 ⊃ K2 ⊃ . . . où chaque Ki
est une réunion finie de boules compactes. De plus, pour tout voisinage U de K, il
existe i tel que Ki ⊂ U .
Démonstration. (a) Pour tout x ∈ K, il existe un voisinage compact de x et donc
une boule fermée Fx compacte (parce que fermée dans un compact) de centre x
◦
et de rayon non nul, qui peut être pris inférieur à η. Notons Fx l’intérieur de Fx .
◦
◦
Une famille finie Fx1 , . . . , Fxp suffit à recouvrir K. Comme le complémentaire de
◦
◦
U = Fx1 ∪ · · · ∪ Fxp est fermé et comme la distance d’un fermé à un compact disjoint
n’est pas nulle, on voit qu’il existe ε > 0 (qui peut être pris aussi petit qu’on veut)
◦
◦
tel que K + ε ⊂ Fx1 ∪ · · · ∪ Fxp .
(b) On construit la suite K0 ⊃ K1 ⊃ K2 ⊃ . . . par récurrence. En appliquant (a)
◦
◦
avec η = η0 = 1, on obtient ε0 > 0 et K0 = Fx1 ∪· · ·∪Fxp tels que K +ε0 ⊂ Fx1 ∪· · ·∪ Fxp .
Supposons K0 ⊃ · · · ⊃ Kp−1 construits tels que K + εi ⊂ Ki . On peut supposer que
la suite des εi est décroissante et que εi < ε0 /2i . Appliquons (a) avec un ηp < εp−1 ,
ce qui donne une nouvelle famille de boules compactes dont la réunion sera notée
Kp . La condition ηp < εp−1 entraîne que Kp ⊂ Kp−1 , et on peut supposer que εp <
1
ε0 /2p . Comme ηp tend vers 0 quand p tend vers l’infini, on voit que K = i∈N Ki . La
dernière assertion résulte du fait que la distance d’un compact à un fermé disjoint
est non nulle.
o
T
+ 4 Lemme. Si K est un compact de Rn , on a Hi (Rn , Rn − K) = 0 pour i > n.
Démonstration. (0) Le cas K = ∅ est trivial.
(1) Si K est un convexe non vide, soit x0 ∈ K. Soit B une boule de centre x0 dont
l’intérieur contient K. Alors Rn − K se rétracte par déformation sur le complémen◦
◦
◦
taire de l’intérieur B de B. Il en résulte que Hi (Rn − K) ' Hi (Rn − B). Or Rn − B a
le type d’homotopie de Sn−1 . On a la suite exacte (pour i > n) :
0 = Hi (Rn )
/
Hi (Rn , Rn − K)
/ Hi−1 (Rn
− K) = 0
ce qui donne le résultat.
(2) Soient maintenant K et L deux compacts de Rn tels que Hi (Rn , Rn − K) =
Hi (Rn , Rn − L) = Hi (Rn , Rn − K ∩ L) = 0. Alors Hi (Rn , Rn − K ∪ L) = 0. En effet, on
a la suite exacte de Mayer-Vietoris :
0 = Hi+1 (Rn , Rn − K ∩ L)
/ Hi (Rn , Rn − K ∪ L)
/ Hi (Rn , Rn − K) ⊕ Hi (Rn , Rn − L) = 0
qui donne le résultat.
(3) Supposons maintenant que K soit une union finie de boules compactes, K =
B1 ∪ · · · ∪ Bk . On raisonne par récurrence sur k. Les cas k = 0 et k = 1 ont déja été
traités ci-dessus. Supposons k ≥ 2. Posons K 0 = B1 ∪ · · · ∪ Bk−1 . On a K 0 ∩ Bk = (B1 ∩
Bk )∪· · ·∪(Bk−1 ∩Bk ). Comme Bi ∩Bk est convexe (et compact), on voit par hypothèse
de récurrence que Hi (Rn , Rn − K 0 ) = Hi (Rn , Rn − Bk ) = Hi (Rn , Rn − K 0 ∩ Bk ) = 0. Il
en résulte par (2) que Hi (Rn , Rn − K) = Hi (Rn , Rn − K 0 ∪ Bk ) = 0.
(4) Tout compact de Rn étant l’intersection d’une suite décroissante de réunions
finies de boules compactes. Il suffit de traiter le cas où K est l’intersection d’une
famille décroissante de compacts K0 ⊃ K1 ⊃ K2 ⊃ . . . tels que Hi (Rn , Rn − Ki ) = 0.
Or ceci résulte du fait que Rn − K est la limite inductive (réunion croissante) des
Rn − Ki et du fait que l’homologie commute aux limites inductives d’ouverts.
o
+ 5 Lemme. Si U est un ouvert de Rn , on a Hi (U ) = 0 pour tout i ≥ n.
Démonstration. (1) Supposons d’abord que U soit le complémentaire d’un compact, c’est-à-dire U = Rn − K, avec K compact. On a la suite exacte (pour i ≥ n) :
/
0 = Hi+1 (Rn , U )
Hi (U )
/
Hi (Rn ) = 0
(2) Supposons maintenant que U est un ouvert borné de Rn . Soit B une boule fermée
contenant U . Alors les ouverts U et V = Rn − B sont disjoints, V et U ∪ V sont des
complémentaires de compacts, et on a la suite exacte :
0 = Hi (∅) = Hi (U ∩ V )
/
Hi (U ) ⊕ Hi (V )
2
/
Hi (U ∪ V ) = 0
Comme Hi (V ) = 0, on obtient Hi (U ) = 0.
(3) Soit enfin U un ouvert quelconque de Rn . Comme U est la réunion croissante
d’une suite d’ouverts bornés, le fait que l’homologie commute aux limites inductives
d’ouverts montre que Hi (U ) = 0 (toujours pour i ≥ n).
o
Nous pouvons maintenant démontrer le théorème 1.
Démonstration. (théorème 1) (1) Si U est un ouvert de X homéomorphe à un
ouvert de Rn , on a Hi (U ) = 0 pour i ≥ n, donc a fortiori pour i > n.
(2) Si U = U1 ∪ · · · ∪ Uk est une union finie d’ouverts homéomorphes à des ouverts de
Rn , on raisonne par récurrence sur k. Le cas k = 0 est trivial et le cas k = 1 est traité
en (1). Supposons k ≥ 2. Posons U 0 = U1 ∪· · ·∪Uk−1 . L’ouvert U 0 ∩Uk est homéomorphe
à un ouvert de Rn (car il est inclus dans Uk ). On a donc Hi (U 0 ∩ Uk ) = 0 pour i ≥ n.
On a aussi Hi (U 0 ) = 0 pour i > n par hypothèse de récurrence. Par ailleurs, on a la
suite exacte (pour i > n) :
0 = Hi (U 0 ) ⊕ Hi (Uk )
/
Hi (U )
/
Hi−1 (U 0 ∩ Uk ) = 0
qui montre que Hi (U ) = 0 pour i > n.
(3) Soit enfin U un ouvert quelconque de X. Il est la limite inductive (union) d’un
diagramme d’ouverts qui sont tous des unions finies d’ouverts homéomorphes à des
ouverts de Rn . Le résultat vient encore du fait que l’homologie commute aux limites
inductives d’ouverts.
o
On étend facilement le résultat aux variétés à bord par une méthode analogue.
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