A - L’entreprise, sujet et objet du droit des affaires. Sans entrer dans le débat soulevé par
les différentes conceptions de la définition de l’entreprise, qui font l’objet du cours d’Economie de
l’entreprise, la notion juridique de l’entreprise, fut totalement ignorée des juristes jusque dans les
années 80. Elle devient un “concept juridique” à travers le droit social, malgré une opposition
d’approche.
1 - Tandis que le droit des affaires postule une force égale des parties en
présence, le droit social repose sur l’inégalité de fait des intérêts, admet implicitement une lutte
de classes constante. Le droit des affaires s’attache davantage à rechercher des consentements
qu’à mettre en exergue des confrontations.
Le droit social a pu paraître comme un droit répressif, à l’instar du droit
pénal : au XIXème siècle, le patron possédait une présomption de vérité dans le règlement des
différents litiges, il est souvent présumé coupable actuellement... Voir le cours de Droit du
travail, BTS, 2ème année... Le droit des affaires semble reposer sur le “droit de responsabilité” lié à
l’autorité et non à “l’infamie” de la fonction de chef d’entreprise.
Le droit social présente une organisation des droits et obligations individuels
selon des rapports collectifs : l’exemple, de plus en plus en remis en cause, de conventions
collectives, reste le plus significatif du droit social qui limite l’autonomie des entreprises, alors
que le droit des affaires semble vouloir l’organiser.
2 - D’autre part, les différentes approches de la “théorie de l’entreprise
privée” présentent des enjeux sur la vie publique économique évidents : les restructurations de
groupes de sociétés, la localisation de sièges sociaux, les “procédures collectives” face aux
problèmes économiques deviennent l’enjeu de débats publics et politiques.
Elles posent les questions du rôle du capitalisme d’Etat qui ferait “le malheur des entreprises
sans faire le bonheur des travailleurs ” et de l’interpénétration du public et du privé dans laquelle
le droit des affaires prend une place prépondérante.
L’entreprise, sujet de droit, est donc dotée d’un patrimoine composé d’un
actif et d’un passif. Les gestionnaires ont contribué, à leur tour, à l’existence juridique de
l’entreprise à travers la comptabilité en partie double... (voir le cours de Gestion). La
représentation comptable de l’entreprise l’a promue comme entité autonome de la personne de
l’entrepreneur (voir le chapitre Les structures juridiques des entreprises commerciales).
3 - Ainsi le concept juridique de l’entreprise a cheminé, à travers un ensemble
de textes législatifs, jusqu’à l’éclosion d’une doctrine de l’entreprise , née davantage de la pratique
du droit des affaires que d’une construction conceptuelle dont les débats en montrent parfois
les limites
.
La “menace” qui pèserait sur le droit des affaires en tant que discipline
juridique autonome proviendrait de la complexité de relations économiques et entraînerait sa
parcellisation conceptuelle, dommageable aux vertus de droit de synthèse qu’il semble avoir
acquises. Le “droit fiscal” et le “droit social” constituent les deux exemples les plus significatifs,
sans oublier l’autonomisation croissante du “droit de la consommation” (voir le cours de 2ème
année), du “droit de la concurrence”, voire du droit économique
... Mais le droit des affaires
n’en conserve pas moins des caractères originaux qui en constituent sa richesse présente.
Rappelons que seules les notions de société et de contrat définissent indirectement l’existence juridique de
l’entreprise.
Le droit économique présente les mêmes particularités que celles du droit des affaires, notamment dans son
approche universaliste et de synthèse. Mais leur approche politique diffère : ce dernier conçoit un monde
d’échanges économiques égaux entre des individus libres, tandis que le premier représente les relations socio-
économiques entre les individus privées sous l’égide de la puissance publique...