I. Les offreurs de soins

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ECONOMIE DE LA SANTE
CHAPITRE 4
LE COMPORTEMENT DES AGENTS – L'OFFRE DE SOINS
L'offre se caractérise par sa très grande diversité, en termes de :
-
Statut économique
Objectifs
Demande
Situation
Taille
Concentration
public / privé
gestion d'un service public / profit
local / national / international
monopole / concurrence
grande taille / isolé
fort / faible
I.
LES OFFREURS DE SOINS
A. LES MEDECINS
1. Organisation de la profession
La profession médicale est une profession très réglementée caractérisée par :
-
Un diplôme d'Etat obligatoire
-
Une protection pénale contre l'exercice illégal
-
L'existence d'un ordre professionnel
-
L'existence d'un code de déontologie
Les principes de la médecine libérale :
-
Liberté d'installation du médecin
-
Liberté de choix par le malade de son médecin (dont accès direct au spécialiste, même
s'il sera moins bien remboursé)
-
Liberté de prescription du médecin
-
Entente directe entre le médecin et son patient essentiellement caractérisé par le
"paiement à l'acte" sans intervention d'un "tiers-payant" (tierce personne payant à la
place du malade) et assortie du secret professionnel
L'exercice de la médecine, tout en respectant ces principes, est néanmoins conditionné par
la position du médecin au regard de la Sécurité Sociale.
Conventionnement :
-
La convention médicale régit les relations entre le corps médical et les caisses de
Sécurité Sociale. Ce procédé fondé sur un double engagement :
o
Engagement des syndicats de médecins à l'égard des honoraires demandés aux
malades
__________________________________________________________________________________________________________
S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
1
o
Engagement des caisses pour ce qui est des remboursements dus aux assurés
sociaux
-
-
Trois partenaires dans la convention :
o
L'Assurance maladie, le payeur
o
Le corps médical, l'ordonnateur des dépenses
o
Les pouvoirs publics (= le Gouvernement) qui contrôlent sans gérer
Les secteurs :
o
Secteur 1 : Le montant de l'acte est fixé dans la convention ; tous les patients
bénéficient d'un même tarif et d'un même taux de remboursement de l'ordre de 70 %.
En échange, les cotisations sociales personnelles du médecin sont prises en charge
par la Sécurité Sociale.
o
Secteur 2 : Le médecin peut pratiquer un dépassement d'honoraire avec "tact et
modération" pour une partie de sa clientèle. Les patients sont alors remboursés sur la
base du tarif du secteur 1, le dépassement d'honoraires étant à leur charge. En
contrepartie, le médecin devra participer pour une grande part à ses propres
cotisations sociales.
-
L'afflux de plus en + importants de médecin vers le secteur 2 à conduit les pouvoirs
publics à "geler" son accès en 1990 (il faut désormais certains titres hospitaliers, une
certaine ancienneté…).
Mesure de l'activité :
-
Leur activité se mesure selon une échelle + ou – détaillée, la grille d'honoraires qui en
France, se présente sous la forme de lettres clés (nature de l'acte) assortie d'un
coefficient (complexité) et d'un prix unitaire ajustable :
o
o
o
o
o
C
V
K
B
Z
Consultation
Visite
Acte de Chirurgie
Acte de Biologie
Acte de Radiologie
-
Certaines interventions sont rémunérées au forfait (comme les accouchements)
-
Cette classification est en retard par rapport à l'évolution des pratiques médicales.
2. Quelques données chiffrées
Evolution des effectifs de médecins :
1973
1980
1995
2007
% 2007
Omnipraticiens
44 097
65 265
94 556
101 549
48,8 %
Spécialistes
24 681
38 818
92 144
106 642
51,2 %
Total
68 778
104 083
186 700
208 191
100,0 %
Libéraux
83 222
116 286
122 103
58,6 %
Salariés exclusifs
57 078
70 414
86 088
41,4 %
__________________________________________________________________________________________________________
S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
2
Féminisation du corps médical :
-
Taux de féminisation : 8 % (1960)  31,5 % (1991)  38 % (2005)
-
Féminisation variable :
o
selon les secteurs : 30 % en exercice libéral / 49% en exercice salarié (2005)
o
selon les spécialités : 88 % en gynécologie médicale ; 67 % en endocrinologie ; 63 %
en dermatologie … 17 % en cardiologie ; 6 % en chirurgie générale (2005)
Mode d'exercice :
Les médecins se répartissent en 3 groupes :
-
Exercice libéral exclusif : 1/3
-
Exercice salarié exclusif : 1/3
-
Exercice mixte : 1/3
Conventionnement :
Généralistes
Secteur 1
Secteur 2 + Dépassement
Spécialistes
Secteur 1
Secteur 2 + Dépassement
1990
2004
78 %
20 %
86 %
14 %
58 %
42 %
62 %
38 %
3. Modèles de comportement
Plusieurs modèles économiques de comportement sont disponibles. Ils montrent que les
médecins recherchent :
-
à maximiser leur résultat financier (Médecins du secteur II à honoraires libres)
-
à atteindre un revenu net déterminé (Médecins conventionnés)
B. ETABLISSEMENTS DE SANTE
1. Missions des établissements de santé
-
Assurer les examens de diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des
blessés et des femmes enceintes
-
Participer à des actions de santé publique
-
Participer à la mise en œuvre du dispositif de vigilance
-
Lutter contre les infections nosocomiales et les affections iatrogènes
-
Mener une réflexion sur les questions éthiques posées par l'accueil et la prise en charge
médicale
__________________________________________________________________________________________________________
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3
Au niveau des soins, les établissements de santé ont pour objet de dispenser :
-
des soins de courte durée en médecine, chirurgie, obstétrique, odontologie ou
psychiatrie, avec ou sans hébergement
-
des soins de suite ou de réadaptation
-
des soins de longue durée comportant un hébergement
2. Typologie des établissements
On distingue traditionnellement 3 catégories d'établissements de soins (chiffres 2004) :
-
les établissements publics de santé (EPS) : 1.000 établissements qui fondent
largement le service public hospitalier. Les EPS :
o
sont des PM de droit public régies par les principes de :

la spécialisation : l'EPS assure la gestion d’un SP

l'autonomie administrative et financière : l'EPS dispose de la capacité juridique et
d’un budget

la tutelle : le plus souvent communale (EPS = EPA placés sous le contrôle de
l’Etat)
-
o
sont organisés en services, voire départements
o
sont classés selon leur structure de SPH
o
sont administrés par un Conseil d'Administration
o
sont dirigés par un directeur (autorité sur le personnel)
les établissements privés : 1.940 établissements :
o
établissements participant au service public hospitalier (1/3 du privé) :
établissements à but non lucratif de droit privé (en particulier des établissements
gérés par des mutuelles, associations, fondations, congrégations)
o
établissements privés, habituellement désignés sous le terme de “cliniques privées”
(SA, SARL…) (2/3 du privé) : établissements à but lucratif.
Total : 2.940 établissements (public / privé + hospitalisation à temps complet / court séjour)
Les établissements assurent principalement des soins en hospitalisation complète. Mais les
évolutions récentes des technologies et des pratiques médicales conduisent les hôpitaux à
s'orienter cers de nouvelles prises en charge des malades :
-
Hospitalisation de jour
-
Hospitalisation de nuit
-
Hospitalisation à domicile
__________________________________________________________________________________________________________
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4
3. Le service public hospitalier (SPH)
Contenu – Quoi ? :
Les 3 piliers du SPH sont : le diagnostic, le soin et le service d'urgence
En plus des missions de tout établissement de santé, le SPH participe :
-
à l'enseignement médical et pharmaceutique, universitaire et post-universitaire
-
à la formation continue des praticiens hospitaliers
-
à la recherche médicale, biomédicale
-
à des actions de médecine préventive
-
à l'aide médicale d’urgence
-
à la lutte contre les exclusions sociales
-
au service de santé dans les établissements pénitentiaires
Les principes directeurs du SPH – Comment ?
Les soins dans le service public sont :
-
Egaux pour tous (sans discrimination des malades)
-
Adaptés en fonction de l'évolution médicale (concentration des équipements
sophistiqués, des laboratoires et des explorations fonctionnelles dans des départements
transversaux car toutes les unités de soins y ont recours)
-
Assurés en permanence de jour comme de nuit (principe de la continuité du SP)

-
UNIVERSALITE : les établissements assurant le SPH sont ouverts à toutes les
personnes dont l’état requiert leurs services
-
EGALITE : les établissements assurant le SPH garantissent l’égal accès à tous aux soins
qu’ils dispensent ; ils ne peuvent établir aucune discrimination entre les malades en ce
qui concerne les soins
-
CONTINUITE : les établissements assurant le SPH :
o
doivent être en mesure d’accueillir toute personne jour & nuit, éventuellement en
urgence ou d’assurer leur admission dans un autre établissement assurant le SPH =
PERMANENCE
-
dispensent aux patients les soins préventifs, curatifs ou palliatifs que requiert leur état
et veillent à la continuité de ces soins, en s’assurant qu’à l’issue de leur admission ou
de leur hébergement, tous les patients disposent des conditions d’existence
nécessaires à la poursuite de leur traitement = CONTINUITE
__________________________________________________________________________________________________________
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5
Structures des charges :
Hôpitaux publics et hôpitaux privés participant au SPH
Type de charges
Personnel non médecin
Médecins
Médicaments, prothèses, biens médicaux
Hôtellerie
Amortissement et frais financiers
Part des dépenses en %
57 %
11 %
14 % (16 à 18 % dans les CHU)
10 %
6%
Participants au SPH – Qui ? :
Font partie du SPH :
-
les hôpitaux publics : les EPS
-
les hôpitaux privés à but non lucratif, à leur demande et sur autorisation au cas par cas
par arrêté ministériel. Sont examinés : la complémentarité des activités par rapport aux
EPS, le coût de cette participation pour la Sécurité sociale
-
les hôpitaux privés à but lucratif par contrat de concession pour l’exécution du SPH,
pour une activité déterminée (contrat approuvé préalablement par le directeur de l’ARH +
signé par le préfet de département)
-
le service de santé des armées
4. Les structures du SPH
Elles sont classées en 4 grandes catégories d'établissements :
-
Les Centres hospitaliers ou établissements de court séjour :
o
Les Centres Hospitaliers Régionaux (CHR) dont les missions sont les suivantes :

ils assurent les soins de la population environnante

ils ont un rôle d’appel ou de seconde instance dans les soins

ils possèdent des services très spécialisés : chirurgie cardiaque, neurochirurgie,
réanimation néonatale intensive, transplantation d’organes, traitement des grands
brûlés, hématologie hautement spécialisée…
Quand ils sont liés aux universités, ils assurent une fonction d’enseignement aux
étudiants : CHRU ou plus communément CHU.
o
Les Centres Hospitaliers Généraux (CHG) :
Ils comportent au – les unités suivantes :

accueil et urgences

anesthésiologie réanimation

médecine générale
__________________________________________________________________________________________________________
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
chirurgie générale

gynécologie-obstétrique

radiodiagnostic

biologie médicale

pharmacie

exploration fonctionnelle et rééducation fonctionnelle.
Ces hôpitaux sont le plus souvent dotés de services spécialisés et sont donc de plus
en plus technicisés.
o
Les Centres Hospitaliers Spécialisés (CHS) :
Dans ces hôpitaux, une ou plusieurs unités de disciplines différentes ont pour objectif
le traitement d’une même pathologie :
o

les maladies mentales dans les hôpitaux psychiatriques

le cancer dans des structures spécifiques (centres de lutte contre le cancer).
Les Centres hospitaliers de secteur :
Destinés aux besoins les plus courants de la population, ils comportent au moins une
unité d’hospitalisation pour pratique médicale, chirurgicale ou obstétricale et une unité
de radiodiagnostic. En l’absence de laboratoire de biologie ou de pharmacie, ces
hôpitaux peuvent passer convention avec des établissements publics ou privés pour
accéder à ces prestations.
-
Les établissements pour soins de suite et de réadaptation (= établissements de
"moyen séjour")
Ils sont destinés à assurer, après la phase aiguë de la maladie, le prolongement des
soins actifs et les traitements nécessaires à la réadaptation :
o
centres de postcure pour les malades mentaux, les alcooliques et les toxicomanes
o
centres de cure médicale (poursuite du traitement de la phase aiguë, rééducation et
réadaptation des malades)
o
-
centres de rééducation fonctionnelle et de réadaptation
Les établissements pour soins de longue durée (= centres et unités de long séjour)
Ils sont destinés à l’hébergement des personnes n’ayant plus d’autonomie de vie et dont
l’état nécessite une surveillance médicale constante et des traitements d’entretien.
-
Les hôpitaux locaux
Ils comprennent des unités d'hospitalisation destinées à la pratique médicale courante où
les MG exerçant en secteur libéral peuvent suivre leurs patients atteints d'une pathologie
aiguë ne nécessitant pas des techniques complexes.
__________________________________________________________________________________________________________
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5. Logique économique
Deux situations se présentent :
-
Les hôpitaux abritent des "services techniques" (cuisines, buanderie, chaufferie…)
dont le produit se mesure en unités sont faciles à comptabiliser et à valoriser : nombre
de repas, kilos de linge lavé, unités caloriques fournies. Ces services sont de + en +
industriels et rationalisés, et leur logique peut être purement économique et
concurrentielle. Ces services dont d'ailleurs de + en + sous-traités à l’extérieur et mis
en concurrence avec le secteur privé (exemple : la restauration).
-
Les hôpitaux abritent des "services médicaux" obéissant à une logique non
financière : le produit (la guérison) intervient hors de l’hôpital et se mesure en unités
non comptabilisables dans le compte d’exploitation de l’hôpital.
Les hôpitaux publics se trouvent en situation de quasi-monopole pour :
-
l’accueil en urgence (en hausse de 6% par an mais 80 % des "urgences" pourraient être
traitées par la médecine de ville)
-
les malades les plus démunis
-
les malades présentant un risque vital
-
les soins de long séjour aux personnes âgées
-
la psychiatrie
-
les soins en médecine générale.
Cette position résulte en partie de leurs contraintes de service public et des rigidités dues
au statut du personnel, soumis aux règles de la fonction publique.
Les hôpitaux ont tendance à externaliser les soins pré et postopératoires à la médecine
de ville, et à sous-traiter les services logistiques pour obtenir des prix de revient + bas et
satisfaire aux nouvelles contraintes financières.
Ils ont aussi tendance à intégrer leur activité dans une filière de soins qui leur apporte une
clientèle régulière (ce mouvement est important aux Etats-Unis mais encore limité en
France).
Les cliniques privées, de plus petite taille et gérées selon une logique de marché,
accueillent au contraire surtout des clients programmés. Elles sont spécialisées dans :
-
l’appareil digestif
l’œil
l’oreille
la main
le système ostéo-articulaire
la chirurgie
la maternité
les endoscopies.
__________________________________________________________________________________________________________
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Cette spécialisation tend à se renforcer sous l’influence de la réglementation et des
incitations liées à la tarification. Le plateau technique joue un rôle central dans cette
spécialisation.
C. LABORATOIRES PHARMACEUTIQUES
1. Quelques chiffres
-
Marché mondial du médicament : 550 milliards de dollars en 2004 (contre moins de
200 milliards en 1990)
-
1ers producteurs : EU – Japon – France
-
France : 1er producteur européen : 35 milliards euros (2003)
-
Industrie à forte valeur ajoutée
-
Exportations : 40% de la production (France : 3ème rang mondial), à destination de
l'Europe principalement (54%). Principaux clients : Belgique, Allemagne, Etats-Unis
-
Les français : 50 boites / personne / an (1ers consommateurs) soit 498 € / personne / an
-
En France : Part du médicament dans la CMT : 17 % (1985)  20 % (2006)
-
Fort taux de croissance (+7,4% / an pendant 20 ans), toutefois limité par des mesures
de maîtrise des dépenses de santé (contrôle des prix)
-
Accélération de l'internationalisation et globalisation depuis le milieu des années 90
avec la concentration du secteur : les 10 premiers groupes contrôlent 56 % du marché
(France au 01/01/2004) même si ce marché est peu concentré par rapport à d'autres
secteurs (Nombre de laboratoires France : 1660 (1950)  339 (2005)). Aucun laboratoire
ne dépasse 8 % de PDM.
-
20 % de la population mondiale consomme la quasi-totalité (88 %) des médicaments (en
valeur) :
Répartition des achats de médicaments (2004) :
o
o
o
o
o
Amérique du nord :
49 %
Europe :
28 %
Japon :
11 %
Asie, Afrique, Océanie : 8 %
Amérique Latine :
4%
2. Croissance des laboratoires
Croissance interne :
La croissance des laboratoires est principalement tirée par l'innovation et le progrès
scientifique : effet qualité – structure : les médicaments + anciens sont remplacés par des
produits + récents, + chers et souvent (mais pas toujours) + efficaces
__________________________________________________________________________________________________________
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9
Croissance des dépenses de médicaments : env. 7,4 % par an sur 20 ans, mais :
-
 volume : 2,4 %
-
 prix des produits existants : 0,4 %
-
Le reste s'explique par les lancements de produits nouveaux : 36 % des dépenses de
médicaments sont le fait de médicaments récents (moins de 5 ans).
Croissance externe :
La place d'un laboratoire dépend :
-
Soit de la découverte de produits phares (blockbusters)
-
Soit d'opérations de croissance externe
Novartis = Ciba + Sandoz
Astra-Zeneca = Astra + Zeneca
Aventis = Hoechst + Rhône Poulenc
Sanofi = Sanofi Synthelabo + Aventis
Pfizer = Pfizer + Warner Lambert
GSK = Glaxo Welcome + Smith Kline Beecham
Ces fusions permettent de :
-
rationaliser la production
-
partager les frais fixes de R&D et de commercialisation
-
partager les risques
En effet, la découverte et le lancement de molécules innovantes se raréfie et coûte de + en +
cher : 2 milliards $ en moyenne. Il faut amortir ces coûts grâce aux économies sur la
production permises par l’accès à un large marché. Les molécules innovantes sont donc
d’emblée commercialisées sur un vaste marché national (EU) ou internationalisées.
3. Evolution du modèle économique de croissance
Dans les années 80 et 90, on a assisté à un flux soutenu d'innovations qui ont
profondément renouvelé les gammes de médicaments dans les grands domaines
thérapeutiques :
-
Cardiovasculaire
-
Système nerveux central
-
Gastro-entérologie
-
Maladies infectieuses
-
Maladies respiratoires
-
Douleur
-
Anti-inflammatoires
Ces médicaments :
__________________________________________________________________________________________________________
S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
10
-
mettaient en œuvre de nouveau concepts pharmacologiques (issus de la biologie
moléculaire)
-
visaient des pathologies répandues (large prévalence)
-
étaient + efficaces ou mieux tolérés (démonstration faire par des recherches cliniques +
rigoureuses)
-
étaient beaucoup + chers que les médicaments remplacés (jusqu'à 10 fois)
Le développement de l'industrie pharmaceutique reposait sur :
-
de gros budgets de R&D
-
beaucoup de molécules nouvelles
-
des prix élevés
-
un élargissement des marchés grâce à la promotion
 Industrie pharmaceutique très rentable : blockbusters au CA mondial > 1 milliard $
Les budgets promotion et R&D étaient complémentaires : les profits générés par des
médicaments à l'apport thérapeutique indéniable permettaient de dégager les financements
de R&D nécessaire à la mise au point de nouveaux produits.
A la fin des années 90, ce modèle est rentré en crise pour 3 raisons :
-
crise de l'innovation
-
crise de confiance
-
politique de maîtrise des dépenses
Crise de l'innovation :
Le modèle économique précédent reposait sur la capacité à maintenir un flux continu
d'innovation. Or la source d'innovation s'est progressivement tarie :
-
Baisse du nombre de blockbusters
-
Blockbusters non remplacés une fois leur brevet tombé dans le domaine public (Antiulcéreux Mopral© : CA = 500 millions euros ; expiration du brevet en avril 2004 ;
Effondrement de la consommation en quelques semaines car report sur le médicament
générique 40 % moins cher)
-
Percée des génériques : copies légales d'un médicament pouvant être commercialisées
à l'expiration du brevet du médicament princeps.
Génériques : sont considérées comme génériques les molécules légèrement dérivées de
princeps (type isomères ou remplacement de principes actifs par un sel ou un ester...) à
condition que les caractéristiques d’efficacité et de sécurité ne présentent pas de
différences significatives par rapport au médicament déjà autorisé.
-
Incapacité à développer des remplaçants aux médicaments généricables
__________________________________________________________________________________________________________
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-
Raccourcissement du cycle de vie des médicaments :
Le dépôt de brevet confère une protection de l'innovation pendant 20 ans + 5 ans
maximum avec un CCP (Certificat Complémentaire de Protection). Le brevet prend effet
dès que la molécule est identifiée. Les tests pré-cliniques et cliniques s’étendent sur une
dizaine d’années, auxquels s'ajoutent 2 à 3 ans de procédures administratives :
o
Autorisation de Mise sur le Marché (AMM)
o
Evaluation par la Commission de la Transparence
o
Fixation du prix du médicament lors des négociations avec le Comité Économique
des Produits de Santé (CEPS)
Aussi, la durée d'exclusivité commerciale n'est pas de 20 ans mais de 7 à 10 ans
seulement.
Crise de confiance :
-
Quelques affaires médiatisées ont altéré profondément l'image de l'industrie
pharmaceutique, y compris celle de la big pharma réputée sérieuse. Exemples :
o
En 2004 : Retrait de l'anti-inflammatoire Vioxx© (Merck) suspecté de toxicité
cardiaque
o
En 2001 : Retrait de l'anti-cholestérolémiant Cérivastatine© (Bayer)
La survie des laboratoires peut être menacée en cas de condamnation à verser des
dommages - intérêts aux victimes (effets secondaires et le lien de causalité démontrés)
-
Reproches faits aux laboratoires :
o
Pressions commerciales exercées sur les prescripteurs
o
Relations ambiguës avec les agences autorisant les mises sur le marché
o
Embellissement des résultats des tests cliniques en majorant l'efficacité et en
minorant les effets secondaires
o
Manque de réactivité lorsque surviennent les accidents thérapeutiques
Remarque : le marché de masse augmente mécaniquement le risque statistique de voir
apparaître les effets secondaires graves des médicaments.
Soit un médicament responsable de 1 décès / 10.000 patients : effet rare indétectable par les
moyens de la recherche clinique
Si le médicaments est consommé par 10 millions de patients dans le monde : 1.000 morts
Le lien de causalité pourra être démontré et le laboratoire sera reconnu responsable…
__________________________________________________________________________________________________________
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-
Modification de l'attitude à l'égard des médicaments : L'équilibre risque / bénéfice
pour un nouveau médicament se modifie : le bénéfice tiré du traitement compense-t-il le
risque statistique pris par le patient ? Le rapport étant apprécié lors de l'octroi de l'AMM
subjectivement et historiquement, la tendance va vers une plus grande sécurité.
Politique de maîtrise des dépenses :
-
Déremboursement de certains médicaments
-
Encouragement à la prescription des génériques et à la substitution par les pharmaciens.
A propos des génériques :
o
Le prix des produits génériques est de 30 à 50 % inférieur.
o
La PDM des génériques est + ou – importante selon que l’usage en est favorisé ou
non (7% du marché remboursable en 2004 contre à peine 2% en 19991).
o
Le marché des génériques est évidemment lié au cycle de vie des produits princeps
qui subissent une double pression : certification de la qualité + baisse des prix.
o
Les génériques sont souvent commercialisés par des entreprises spécialisées qui
ne font pas ou peu de recherche d'où des coûts réduits de moitié, voire + si le
générique provient d'un pays tel que l'Inde, la Chine, le Brésil, alliant bonne
compétence scientifique et très bas coût de main d'œuvre
o
Economies possibles en France grâce aux génériques : 1 milliard euros dont les 2/3
imputables aux 56 grosses molécules généricables entre 2004 et 2008.
4. Caractéristiques du marché français
La France se distingue structurellement par :
-
une prescription orientée vers des produits récents et chers, souvent importés (car
innovants et à forte teneur en R&D)
-
une
prescription
de
produits
"de
confort"
(veinotoniques,
somnifères
ou
antidépresseurs)
-
une consommation élevée dans certaines classes thérapeutiques comme :
o
les psychotropes (3 fois plus qu’en Allemagne ou en GB)
o
les antibiotiques (2 fois plus que les pays voisins)
-
une prescription élevée de médicaments relevant de l'autoconsommation
-
une consommation de médicaments incompatibles entre eux suscitant des
hospitalisations pour maladies iatrogènes.
Le marché français peut se scinder en 3 catégories de produits, correspondant à trois
marchés différents.
1
Génériques en % du répertoire des génériques (le répertoire comprend les princeps et les
génériques) : 57,2% (2004) en volume contre 27,2% (1999).
NB : le répertoire des génériques représente 23% (2004) du marché remboursable, contre 13,7%
(1999).
__________________________________________________________________________________________________________
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5. Les marchés du médicament
Le marché des produits innovants :
-
Ce segment représente entre 8 et 15 % du marché selon les pays.
-
Les médicaments y sont protégés par un brevet. Le laboratoire se trouve alors en
situation de monopole et les prix sont le plus souvent à la fois libres et élevés, car
internationaux. Le médecin ne peut prescrire le médicament que dans les situations pour
lesquelles le produit a démontré son efficacité (médecin contrôlé et sanctionné).
-
L’utilité sociale de ces médicaments est peu contestée.
-
Ils sont bien remboursés.
-
La concurrence porte sur l’innovation.
-
La communication s’adresse uniquement au médecin.
-
Exemples : traitements du VIH et certains anticancéreux.
Le marché des produits courants :
-
Ce segment représente entre 50 et 60 % du marché selon les pays.
-
Sur ce segment, la concurrence porte de + en + sur les prix et le remboursement tend à
s’établir au niveau du plus bas prix offert sur le marché.
-
Ce marché est celui des médicaments dont l’efficacité a été démontrée, et qui sont
remboursés. Ces médicaments ont des concurrents. Sur ce marché coexistent le produit
"princeps" (médicaments d'origine) et ses copies légales (les génériques) produites soit
par le laboratoire l’ayant créé soit par un spécialiste des génériques.
-
La communication s’adresse uniquement au médecin et au pharmacien, et de + en +
au patient (communication plus générale, pour une classe thérapeutique et non pour un
médicament en particulier).
-
-
Concernant le médecin, sa liberté de prescription est limitée par :
o
le droit de substitution du pharmacien (accordé en 1999)
o
des incitations financières à privilégier les médicaments à bas prix (à efficacité égale)
Exemples : antibiotiques, anti-ulcéreux, anti-HTA, antidépresseurs…
Le marché des autres médicaments :
-
Ce segment hétérogène représente entre 20 et 40 % de la consommation de
médicaments selon les pays (30% en volume, en France). Il comprend :
o
les médicaments non remboursés ou déremboursés, dit "d'automédication",
prescrits ou non, dont la demande  fortement. Leur PDM varie selon les pays : 20%
au RU ; 33% en France. Exemples : Mopral®
o
Les produits identiques aux produits princeps, mais vendus sous un autre nom à
prix libre (+ élevé ou + bas selon la clientèle recherchée) et libres d’accès. Exemple :
Zyrtec® et …
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S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
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o
Les produits innovants dont les laboratoires ne sollicitent pas le remboursement en
espérant toucher une clientèle limitée à prix libre et parfois élevé. Exemples :
Viagra®, certaines pilules contraceptives…
o
Les produits à la frontière entre le médicament et l’alimentation ou la beauté.
Exemple : les vitamines, Exfoliac® (acné)…
o
-
Les granules en homéopathie.
Ce groupe se développe de + en + dans les hypermarchés (vitamines…) et sur Internet
(Viagra®…). La concurrence porte sur le concept et sur le prix. Le consommateur est
informé.
-
La communication s’adresse au client (pour l'inciter à acheter) et au pharmacien (pour
l'inciter à vendre).
6. Prise en charge du médicament en France
En France, pour être commercialisé, un médicament doit obtenir une Autorisation de Mise
sur le Marché (AMM), délivrée par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de
Santé (AFSSAPS). Selon les caractéristiques du produit, le nouveau médicament peut être
accessible sans prescription ou, au contraire, uniquement sur prescription.
La France exerce aussi un contrôle direct sur les prix des médicaments remboursables.
Ces prix font l’objet d’une négociation entre le laboratoire producteur et le Comité
Economique des Produits de Santé (CEPS) et doivent tenir compte :
-
de l’Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR)2 qu’apporte le médicament
-
des prix des produits comparables inscrits sur la liste
-
et des volumes de ventes prévus.
Depuis septembre 2003, un système de prix de référence, le Tarif Forfaitaire de
Responsabilité (TFR), a été introduit dans les groupes génériques ayant un taux de
pénétration insuffisant.
Pour être remboursable, un médicament doit figurer sur la liste des spécialités
pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux (liste positive) 3. La Commission de
Transparence, sous tutelle de la Haute Autorité de Santé (HAS) depuis août 2004, évalue le
service médical rendu (SMR) et l’amélioration du service médical rendu (ASMR) du
médicament. Si le SMR est jugé suffisant, la Commission recommande l’inscription du
produit sur la liste et fixe un taux de prise en charge : 35 %, 65 % ou 100 % en fonction du
SMR (faible, modéré ou important) et de la gravité de la pathologie traitée.
L’ASMR compare le service médical rendu par un médicament aux autres traitements existants pour la
pathologie.
3 Ceci concerne les médicaments délivrés en ville. Les médicaments dispensés dans les hôpitaux ou d’autres
collectivités doivent figurer sur la liste des spécialités agréées aux collectivités.
2
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S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
15
L’inscription sur la liste peut être limitée à certaines indications.
La Commission de Transparence a procédé à plusieurs reprises à des réévaluations du
SMR de plusieurs milliers de spécialités remboursables. Elle a recommandé le
déremboursement de 20% d'entre elles. Certaines l'ont été effectivement.
D. DENTISTES
En France, les dentistes représentent 5,7 % de la CSBM (2006).
Nombre de dentistes
Dentistes
1981
1990
2005
31 872
37 931
41 083
Financement des soins dentaires en France :
-
2/3 pour le secteur privé (malades, mutuelles, assurances)
-
1/3 pour la Sécurité sociale.
L’efficacité des soins dentaires repose sur la prévention des caries et sur leur traitement
précoce. Cet investissement est rentable à la fois pour le malade (coût moindre, qualité de
vie, intégration sociale) et pour le payeur collectif (coût moindre).
Paradoxe : les dentistes ne sont pas chargés de la prévention et sont mal rémunérés pour
les traitements conservatoires (tarif imposé). Par contre, le prix des prothèses est librement
négocié avec le client (qui sera au final mal remboursé).
L’incitation financière pousse les dentistes à laisser s’aggraver les caries pour faire surtout
des prothèses (50% de leur rémunération globale).
Exemples de pratiques pour que la prévention soit efficace et ne relève plus seulement de
la famille ou de l'école :
-
EU : certains HMO imposent aux assurés une visite annuelle + faire exécuter les soins
conseillés par leur dentiste pour leur accorder un remboursement élevé.
-
Danemark : un dentiste référent est imposé aux enfants ; il est payé en fonction inverse
du nombre de caries apparaissant dans leur clientèle ; les dentistes sont donc incités à
une prévention efficace et les caries sont en voie de disparition…
E. AUXILIAIRES MEDICAUX (AUTRES PROFESSIONS DE SANTE)
L'activité des auxiliaires médicaux (masseurs-kinésithérapeutes, infirmiers diplômés d'Etat,
infirmiers psychiatriques, orthophonistes, orthoptistes...) dépend de la prescription par les
médecins. Ils ne peuvent donc susciter une demande induite.
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S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
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Ces professions (hors infirmiers) sont :
-
soit salariées : exercice dans un établissement : 22 % (2007)
-
soit rémunérées à l’acte ou au forfait : exercice libéral de ville : 78 % (2007).
Les proportions sont inversées pour les infirmiers : 86 % sont salariés et 14% libéraux (2007)
En France, les AM représentent 5,9 % de la CSBM (2006) :
1981
Infirmiers
Infirmiers DE
Infirmiers psychiatriques
Masseurs-kinésithérapeutes
1990
2007
249 450
192 913
56 537
32 229
304 480
242 953
61 527
38 257
483 380
Orthophonistes
7 110
10 000
17 135
Orthoptistes
1 200
1 445
2 808
289 989
354 182
565 925
Total Auxiliaires médicaux
62 602
Les effectifs des AM  avec celui des médecins, mais de façon moindre, tant dans le secteur
hospitalier que dans le secteur libéral.
Leur activité constitue de + en + un complément ou un substitut de l’hospitalisation ou
des traitements médicamenteux. Exemples :
-
Kinésithérapeutes : les médecins recourent davantage à la kiné respiratoire pour les
enfants et les personnes âgées souffrant d’infections (à la place d’antibiotiques et parfois
d’hospitalisation)
-
Infirmières : le maintien à domicile des personnes âgées exige leur intervention
permanente pour éviter l’hospitalisation.
Situation inégale selon les AM :
-
L'offre de kinésithérapie semble suffisante (tant en médecine de ville qu’en établissement de soins).
-
L’offre de soins infirmiers semble insuffisante en France au regard de l'évolution : faible nombre par
habitant, quotas d'actes à ne pas dépasser, crise des vocations, bas salaires…
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II. CARACTERISTIQUES DE L'OFFRE
A. DEMANDE INDUITE PAR L'OFFRE
Illustration Knock : "les gens bien portants sont des malades qui s'ignorent."
Le concept de demande induite remonte au début des années 1970.
Principe : Le médecin ou l'hôpital qui définissent pour le compte du malade leurs besoins
d'examens ou de traitement seraient en mesure de stimuler cette demande pour atteindre
leurs propres objectifs de revenu ou d'activité. Cette demande, non justifiée par un
besoin reconnu du malade, est la demande induite par l'offre.
La demande induite est difficile à mettre en évidence à partir de données macroéconomiques ; seuls des modèles micro-économiques la révèlent avec précision.
Ont été démontrés :
-
Hôpital : des corrélations fortes entre le nombre de lits par habitant et le nombre de
journées d'hospitalisation
-
Dans le secteur I conventionné : existence d’une demande induite :
o
les généralistes poussent à la consommation quand ils le peuvent
o
les spécialistes accroissent leur offre et multiplient les prestations pour maintenir leur
revenu (élasticité demande/revenu forte).
-
Dans le secteur II à honoraires libres : pas de demande induite.
-
Les
laboratoires
pharmaceutiques
peuvent
influencer
la
prescription
et
la
consommation pharmaceutique : promotion commerciale des médicaments dans les
journaux médicaux + visites médicales. Les produits les + récents et les + chers seront
mieux promus, mieux connus et mieux prescrits.
Cette demande induite est d'autant plus forte que l'information est asymétrique et que
cette asymétrie est de nature à engendrer un comportement opportuniste chez le
médecin : le patient ne dispose pas des informations, connaissances et compétences du
médecin. L'asymétrie est surtout au profit des MG et des chirurgiens.
B. VARIABILITE DES PRATIQUES MEDICALES ET SOINS APPROPRIES
On peut observer une variabilité inexpliquée des pratiques médicales :
-
certaines techniques sont sur-utilisées et leur coût injustifié : procédures chirurgicales
très fréquentes (angiographie coronarienne, opération de la carotide, endoscopie,
pontage coronarien) injustifiées dans un 1 cas sur 3 ou correspondant à des indications
équivoques.
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S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
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-
d'autres techniques sont sous-utilisées
La "médecine justifiée" se compose de "soins appropriés" :
-
soins dont le risque relatif de réussite dépasse le risque relatif de nuire
-
Mais : le risque diffère d’un centre à l’autre selon le nombre d'opérations, la densité
d’opérations et l’entraînement de l’équipe chirurgicale
L'introduction de références médicales dans la pratique courante peut donc contribuer à
éliminer les soins inappropriés.
C. EFFETS DU PROGRES TECHNIQUE
1. Diffusion du progrès technique
L’innovation peut porter :
-
soit sur le produit (elle répond alors à un besoin non satisfait)
-
soit sur le processus de production du soin (elle permet alors de le satisfaire à moindre
coût et/ou à meilleure qualité)
L'innovation se diffuse d’autant + vite qu’elle exige moins d’investissements lourds et cette
diffusion s’accélère avec le temps.
La médecine a connu plusieurs générations de progrès technique depuis 1945 :
-
antibiotiques et vaccins (années 1950)
-
traitements médicamenteux des maladies mentales (années 1960)
-
traitements médicamenteux des cancers (années 1970)
-
imagerie médicale (années 80) : échographie, scanner, IRM puis toute la grappe des
techniques d'imagerie liée à la miniaturisation ou à la fibre optique
-
nouvelles classes thérapeutiques (années 90) : statines, anti-rétroviraux…
-
thérapies géniques (années 00)
Toutes ces générations de progrès technique se substituent ou s’additionnent les unes
aux autres :
-
les vaccins remplacent les traitements lourds de la tuberculose
-
le médicament remplace la chirurgie pour traiter les ulcères.
Conséquences des innovations :
-
peuvent
générer
des
dépenses
pharmaceutiques
et
réduire
les
dépenses
hospitalières : antibiotiques et chimiothérapies psychiatriques
__________________________________________________________________________________________________________
S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
19
-
peuvent augmenter à la fois les équipements lourds, les personnels qualifiés et les
dépenses de ville : imagerie et transplantations.
-
suscitent souvent une réorganisation complète des structures hospitalières : réduction
de la chirurgie traditionnelle, création de structures de jour…
Le progrès technique médical se diffuse différemment :
-
-
selon le type d’innovation :
-
technique pure (ex : angioplastie)
-
matériels (ex : IRM)
-
organisation (prévention des accidents de la naissance)
selon qu’il exige ou non la constitution d’équipes formées et entraînées (ex :
transplantations)
-
selon la présence ou non d'obstacles à l'innovation :
o
acceptation par la population ou le corps médical
o
contrôles
o
normes administratives
o
précautions d’usage à imposer (une législation exigeante sur la responsabilité
médicale pousse à multiplier les investigations techniques et les thérapeutiques pour
diminuer le risque d’échec ou l’aléa)
o
coût (et les systèmes de tarification)
Par ordre de rapidité on trouve :
-
les médicaments
-
les équipements lourds
-
les procédures complexes
-
les innovations exigeant une filière ambulatoire et hospitalière coordonnées.
2. Loi des rendements décroissants
Historique du rendement des innovations :
-
Dans les années 50, la génération de progrès technique des antibiotiques et des
vaccins améliora fortement l’état de santé à faible coût, en sauvant surtout des jeunes
 rendements croissants
-
Dans les années 70 et 80, la génération de techniques de l’imagerie, des
chimiothérapies et des chirurgies peu invasives s’est traduite par des dépenses +
importantes pour un gain moindre au niveau de la santé collective  rendements
décroissants
-
Dans les années 90, le coût des soins  vite, alors que leurs effets, compte tenu du
vieillissement
et
des vides thérapeutiques,
restent faibles 
rendements
décroissants
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S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
20
-
Cette évolution se traduit par une courbe croissante reliant l’accroissement des coûts et
celui des effets sur la santé. La nouvelle vague de progrès techniques et sociaux
(thérapies du vivant, prévention et redéploiements) déplacerait cette courbe vers la droite
et ferait faire, à coût égal ou moindre, un pas décisif en matière préventive ou
thérapeutique, ayant un effet nouveau sur la santé collective : on pourrait retrouver une
phase de rendements croissants comparable à celle des années 1950.
Au fur et à mesure de la diffusion des innovations, le ratio coût / efficacité se détériore. Il
faut dépenser des sommes considérables pour obtenir un effet minime. La prévention se
heurte toujours à cette loi (exemple : lors de la détection des cancers du col de l’utérus,
l’accroissement de la fréquence de l’examen permet de sauver un nombre de vies
décroissant pour un coût toujours croissant).
Les coûts augmentent très rapidement dès lors qu’une technique est appliquée hors des
conditions pour lesquelles elle est efficace : le dénominateur (taux de succès) diminuant,
on voit augmenter le rapport coût / efficacité et se déclencher la loi des rendements
décroissants. Cette loi justifie que la collectivité vérifie le bon usage des techniques
coûteuses à l’unité ou d’application généralisée.
3. Paradoxes
Alors qu’en médecine, comme dans les entreprises, le progrès technique permet le +
souvent de soigner mieux et à moindre coût, on y voit souvent la source principale de
l’inflation des dépenses dans la santé.
Pourtant, de nombreux exemples témoignent pourtant que le coût micro-économique 
pour une même affection avec le progrès des techniques médicales ou de l’organisation :
-
la cataracte opérée en hôpital de jour coûte – cher qu’en chirurgie traditionnelle
-
l’IVG par RU486 est + léger que par aspiration
Souvent les dépenses de médicaments ou d'instruments techniques et d’analyses  alors
que la dépense purement hospitalière et les arrêts de travail  suffisamment pour réduire le
coût total.
Ainsi, non seulement le coût du traitement individuel , mais la souffrance, la durée du
séjour et l’arrêt de travail  aussi, donc les coûts sociaux et humains .
Cinq raisons expliquent cependant que le progrès technique semble coûteux et
apparaisse souvent comme tel dans la comptabilité des offreurs de soins et au niveau
macroéconomique :
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S. LALANDE – Economie de la Santé ISIS – 04 Offre de soins
21
-
Les hôpitaux ou les cliniques supportent les coûts d’investissement et de personnel
sans pouvoir ou vouloir en comptabiliser toutes les retombées qui en découlent : ce sont
l’employeur (production + forte) et la famille (salaire + élevé) qui profiteront de la
réduction de la durée de séjour à l’hôpital.
-
Ces techniques exigeraient des restructurations, qui se font souvent avec retard :
suppression de lits et développement plus rapide d’activités chirurgicales de jour. En
médecine, il n'y a pas d'actionnaires ou de clients exigeant la disparition des produits
obsolètes et des techniques de production anciennes ! L’investissement dans la
technique nouvelle s'additionne au coût des techniques anciennes si celles-ci
subsistent (exemple : radios qui subsistent à côté de certains scanners). Ainsi, le progrès
technique est vu comme source de dépense nouvelle.
-
La diffusion de techniques en dehors des "indications médicales" (définies par les
AMM et les RMO) pour lesquelles elles ont fait la preuve de leur efficacité, provoque
d'importants gaspillages. Exemple : 40 à 50% des médicaments antiulcéreux seraient
prescrits sans raison.
-
La diffusion des techniques à de nouvelles indications, même justifiées, se fait
souvent avec des rendements décroissants. Les nouvelles techniques peuvent trouver
de nouvelles indications : sujet âgé, interventions + complexes et risquées… avec des
risques supérieurs et des coûts plus élevés. On voit ainsi se développer une nouvelle
phase du cycle de vie de la technique, dont les indications concernent de nouvelles
populations de patients. Cette extension des indications des innovations justifiée ou
non par l'amélioration des états de santé, constitue une source permanente
d'augmentation de l’offre et de la demande de soins.
-
Son efficacité même condamne le progrès technique à paraître cher : en sauvant en
bas âge des personnes qui vieilliront, il remplace les maladies de la jeunesse par des
maladies dégénératives + coûteuses ultérieurement. Économe au niveau microéconomique, il se condamne ainsi à coûter cher au niveau macro-économique.
Toutefois, même au niveau global les techniques de soins avancées sont loin de
constituer l'essentiel des dépenses de santé. Le cancer ne représente que 4% des dépenses
de santé. Et plus les malades sont vieux, plus ils exigent des soins intensifs en
personnels, + pour prendre soin d’eux que pour les soigner. La substitution capital – travail
exige des déplacements de personnels des services d’aigus vers les services de longs
séjours, mais aussi plus de personnels  Modification de la nature et de la structure de
l'offre.
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ECONOMIE DE LA SANTE
CHAPITRE 4
OFFRE DE SOINS
I.
LES OFFREURS DE SOINS .......................................................................................... 1
A. LES MEDECINS ........................................................................................................ 1
1. Organisation de la profession ................................................................................ 1
2. Quelques données chiffrées .................................................................................. 2
3. Modèles de comportement .................................................................................... 3
B. ETABLISSEMENTS DE SANTE ................................................................................ 3
1. Missions des établissements de santé................................................................... 3
2. Typologie des établissements ............................................................................... 4
3. Le service public hospitalier (SPH) ........................................................................ 5
4. Les structures du SPH........................................................................................... 6
5. Logique économique ............................................................................................. 8
C. LABORATOIRES PHARMACEUTIQUES .................................................................. 9
1. Quelques chiffres .................................................................................................. 9
2. Croissance des laboratoires .................................................................................. 9
3. Evolution du modèle économique de croissance ..................................................10
4. Caractéristiques du marché français ....................................................................13
5. Les marchés du médicament ................................................................................14
6. Prise en charge du médicament en France ..........................................................15
D. DENTISTES ..............................................................................................................16
E. AUXILIAIRES MEDICAUX (AUTRES PROFESSIONS DE SANTE) .........................16
II.
CARACTERISTIQUES DE L'OFFRE ............................................................................18
A. DEMANDE INDUITE PAR L'OFFRE .........................................................................18
B. VARIABILITE DES PRATIQUES MEDICALES ET SOINS APPROPRIES ................18
C. EFFETS DU PROGRES TECHNIQUE......................................................................19
1. Diffusion du progrès technique .............................................................................19
2. Loi des rendements décroissants .........................................................................20
3. Paradoxes ............................................................................................................21
__________________________________________________________________________________________________________
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