Les politiques de maîtrise des dépenses de santé

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Conférence d’économie
M. Stevant
Sophie Parat
Les politiques de maîtrise des dépenses de santé
dépenses globales de santé= 9% du PIB des pays de l’OCDE (des années 1970 à la fin des
années 90, de 6 à 10% PIB en France, de 7 à 13% aux EUA)
En 2000= 140 milliards € en France (dépenses hospitalières=55milliards € en 1998)
En France l’exercice de la médecine est libéral. Elle repose sur les principes de liberté de
prescription, de choix du médecin par le malade, d’entente directe entre médecin et malade
et paiement direct au médecin. Le financement socialisé des dépenses de santé remet ces
principes en cause d’où la difficulté des réformes du système français.
concepts microéconomiques dans le domaine de la santé : les asymétries d’information(dans
la relation médecin/malade et médecin/organisme qui finance), l’aléa moral(les patients, se
sachant couverts, adoptent des comportements plus risqués), la loi de la demande
induite(niveau de la demande serait déterminé par celui de l’offre).
La régulation de l’économie de la santé peut se faire par plusieurs techniques : par la
demande, par le financement, par le contrôle de l’offre, par la concurrence. /La France a
utilisé les principales techniques de maîtrise des dépenses. Le plan Juppé de 1995 modifie le
rôle des acteurs et introduit un contrôle des dépenses par le Parlement (ONDAMº fixé dans la
LFSS¹)/ Les perspectives d’avenir pour la maîtrise des dépenses de santé ouvrent vers des
politiques plus orientées vers la prévention, des mesures de maîtrise médicalisée, une
meilleure organisation des filières de soins et une responsabilisation des patients.
I Bilan des politiques de maîtrise des dépenses de santé
* Il est possible d’agir sur la demande : l’augmentation du taux de la part non
remboursable (« ticket modérateur »), ainsi que celui d’autres frais restant a à la charge de
l’assuré est un phénomène qui se retrouve dans la plupart des pays de l’OCDE (le but n’a pas
été le même partout : en France, permettre la mise en place de la CMU², en Corée, étendre le
nb de personnes couvertes par les régimes publics tout en réduisant les soins couverts).
* La plupart des pays ont mis en place des politiques dans un objectif de gestion financière.
Les plans précédant le plan Juppé de 1995 visaient à couvrir ex post les déficits de la Sécurité
Sociale (augmentation des cotisations sociales, financement par un nouvel impôt comme la
CSG et la CRDS créées en 1991 et 1995…). Depuis 1996, le Parlement vote la LFSS, qui fixe
ex ante son équilibre financier. Une fois fixée l’enveloppe des dépenses remboursées ou sous
tiers payant, se pose la question de la limitation des dépenses globales. En 1999 et 2000,
M.Aubry a choisi de contrôler la dépense globale, afin d’éviter d’augmenter le financement
direct par les patients (l’ONDAM s’accompagne alors d’une « dépense totale autorisée »).
* Des mesures de maîtrise au niveau de l’offre sont courantes :
La planification consiste à contrôler l’implantation des hôpitaux (en France, SROS³), certains
équipements lourds (dans tous les pays européens mais pas aux EUA), voire les cabinets de
généralistes (planifiés et ouverts par le NHS au R-Uni).
La répartition des dépenses peut se faire soit par région (R-Uni : chaque région se voit
attribuer une enveloppe globale et les pouvoirs sont décentralisés à son niveau), soit par
spécialité médicale (=dissocier l’ONDAM en un objectif de dépense pour les hôpitaux, un
objectif de dépense d’honoraires des professions médicales, enfin un pour les médicaments).
Les filières de soins intégrées et le médecin référent (gatekeeper au R-Uni) :les HMO
américains (rémunérés pour l’ensemble des soins) et les gatekeepers (à l’entrée de la filière,
rémunérés à la capitation) montrent que cette formule réduit la dépense et améliore la qualité
et l’égalité d’accès aux soins.
ºONDAM : objectif national de dépense d’assurance maladie ¹LFSS : loi de financement de la Sécurité Sociale
²CMU : Couverture maladie universelle, mise en place en 2000, qui permet d’offrir aux personnes disposant de
peu de ressources une couverture des dépenses de santé.
³SROS : schémas régionaux d’organisation sanitaire
* La concurrence entre les assureurs est possible (ex des EUA). Les organismes privés
répercutent une partie de leurs gains de productivité sur les assurés. En Europe, on distingue
le financement du risque de sa gestion : financement socialisé, seule la gestion peut faire
l’objet d’une concurrence entre les assureurs. Au R-Uni, la réforme du NHS de 1991 a
introduit des mécanismes de marché dans son fonctionnement : une distinction entre les
prestataires de soins (hôpitaux, médecins) et les acheteurs (agences locales du NHS) est
instaurée. Les acheteurs passent des contrats de services avec les prestataires de soins, qui
sont désormais en concurrence entre eux. On parle parfois de managed care.
II Limites de ces politiques
* Réduction de la part non remboursable : le « ticket modérateur » restant à la charge de
l’assuré est souvent pris en charge par les assurances privées ou les mutuelles. Cette mesure
est en fait inefficace au niveau macroéconomique et conduit à des inégalités (qui ont justifié
en France la création de la CMU), à la création d’un système à deux vitesses.
* La politique des enveloppes pose des problèmes d’équité et de qualité des soins. De plus, le
renouvellement des budgets se fait de façon systématique d’une année sur l’autre pour les
hôpitaux par exemple, ce qui ne rend pas la gestion efficace et peut conduire à une mauvaise
allocation des ressources.
* Contrôle de l’offre : la planification, poussée trop loin, se heurte à des difficultés topiques :
comment définir les besoins, s’adapter aux aspirations de la population et au progrès
technique, éviter la rigidité bureaucratique ? Tandis que la répartition régionale doit être
limitée et laisser certains pouvoirs au niveau central, la répartition par spécialité médicale
renforce les inégalités au niveau de l’offre de soins entre les régions.
* Concurrence entre assureurs : exclusion des risques lourds, sélection de la clientèle,
exclusion d’une partie de la population (contraires aux principes européens). De plus, elle ne
suffit pas à produire une bonne régulation macro-économique des dépenses de soins.
III Perspectives d’évolution
* le développement de la prévention : insuffisante alors que son développement permettrait
d’éviter des dépenses de soins importantes, particulièrement face à des problèmes de santé
publique (tabagisme ou alcoolisme). Le dépistage précoce de certaines maladies réduit le coût
de traitement. Cela passe par des incitations financières appropriées pour les professionnels de
santé et les patients (ex : paiement différé des actes de prévention pour les praticiens).
* des mesures portant sur l’offre, son volume ou son prix : un équilibre judicieux doit être
trouvé dans le cadre d’une maîtrise médicalisée. Les choix médicaux doivent être faits en
fonction des différents éléments humains, du coût et de l’efficacité des traitements. Ils doivent
faire l’objet de débats collectifs et détaillés, pour définir les bonnes pratiques médicales,
opposables éventuellement aux tiers. Le développement de la comptabilité hospitalière et de
l’informatique médicale va permettre la fixation d’objectifs plus fins que les seuls éléments
d’encadrement budgétaires globaux. Le mode de rémunération joue un rôle important (le
système de rémunération à l’acte incite à leur multiplication, au détriment de la prévention).
Le système de rémunération par capitation, avec des forfaits incitatifs pour s’installer dans des
régions sous-médicalisées, permet une meilleure régulation d’ensemble.
* une meilleure organisation des filières de soins : la mise en concurrence des filières de soins
peut favoriser l’efficacité des centres de soins. L’organisation de filières de soins autour des
généralistes permet une gestion de la dépense plus proche et un meilleur contrôle de l’activité
médicale et de la qualité des soins (au prix d’une certaine limitation de la liberté de choix des
malades).
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