DIRECTION DES STATISTIQUES ET DES ÉTUDES
LA CONSOMMATION MÉDICALE DES BÉNÉFICIAIRES DE LA
CMU EN 2000
N° 35
En 2000, un patient bénéficiaire de
la CMU complémentaire a présenté
au remboursement une somme
moyenne de 1 953 . Cette
dépense, qui couvre les frais
engagés en ville et à lhôpital est
supérieure de 30 % à celle dun
autre patient du Régime Général.
A âge et sexe équivalents, cet écart
est encore plus important puisquil
atteint 82 %. Les bénéficiaires de la
CMU ont donc consommé en
moyenne près de deux fois plus
que les autres patients du Régime
Général présentant les mêmes
caractéristiques d’âge et de sexe.
Cet écart de consommation était
déjà net lors de la première étude
réalisée par la CNAMTS sur les
seuls soins de ville, dès octobre
2000, mais la prise en compte des
dépenses dhospitalisation laccroît
fortement. Les bénéficiaires de la
CMU conservent en effet un mode
de recours aux soins fortement axé
sur lhôpital, ce qui est probable-
ment la conséquence dun état de
santé précaire. Ainsi, 35 % des
patients protégés au titre de la
CMU ont eu recours à des soins
hospitaliers en 2000 contre seule-
ment 18 % pour les autres patients.
Après prise en charge par la CMU
complémentaire dune partie des
dépenses engagées, plus de 72 %
des patients bénéficient de
lentière gratuité des soins.
Isabelle GIRARD-LE GALLO
Depuis le 1er Janvier 2000, la couverture maladie universelle
(CMU) garantit notamment aux personnes dont les revenus sont
les plus faibles, le droit à une protection maladie complémen-
taire. Les études précédemment effectuées sur les seuls soins de
ville avaient déjà montré que, dès les premiers mois de la mise en
place du dispositif, la CMU avait favorisé laccès aux soins des
personnes parmi les plus démunies1.
Cette analyse vise à compléter notre connaissance des comporte-
ments de consommation de soins des premiers bénéficiaires de la
CMU. En effet, nous pouvons avoir aujourdhui une vision quasi-
ment exhaustive de leur dépense de soins de ville et surtout
dhôpital2en 2000 (cf. Méthodologie).
Des dépenses de santé relativement élevées dès la première
année de mise en place du dispositif
En 2000, un patient bénéficiaire de la CMU a dépensé au total
pour sa santé 1 953 en moyenne, soit près de 30% de plus quun
autre patient du Régime Général (1 504 ). Les frais médicaux
sont dautant plus importants que le patient est âgé, mais restent
toujours plus élevés pour les bénéficiaires de la CMU (cf. encadré I).
La population étudiée se caractérise par un fort recours aux soins
hospitaliers. Ainsi, un patient de la CMU a généré en 2000, des
frais hospitaliers dun montant moyen 1,7 fois supérieur à ceux
dun autre patient du Régime Général (resp. 1 159 et 663 ).
A lopposé, la dépense moyenne de soins de ville présentée aux
remboursements pour un patient de la CMU (794 ) est légèrement
inférieure à celle dun autre patient du Régime Général (841 ).
1
1Point stat n°29, Point stat n°31.
2Un an de liquidation est nécessaire pour connaître lensemble des dépenses dhospitalisation dun mois
donné. Concernant les soins de ville, « après quatre mois de remboursements, on connaît déjà 90% à 95% du
montant total de la consommation de soins de ville du mois » Point de conjoncture n°1 «Lactivité médicale
à travers la consommation de soins » Mai 2002 CNAMTS.
LA CONSOMMATION MÉDICALE DES BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU EN 2000
2
L’âge paraît déterminant dans le niveau de
consommation de soins de ville ; en effet, à
chaque âge et jusqu’à la soixantaine, les patients
de la CMU consomment davantage que les autres.
Ensuite, le vieillissement contribue à réduire les
inégalités face à la santé: ainsi, les 5% de patients
de la CMU âgés de 60 ans et plus ont eu des
dépenses similaires à celles des 21,1% de patients
du Régime Général de même âge, non couverts
par la CMU (respectivement 1 832 et 1 866 ).
La consommation plus importante des patients de
la CMU est probablement le reflet dun état de
santé et dun recours aux soins très spécifiques,
comme on avait déjà pu le constater au cours des
premiers mois de la mise en place du dispositif.
Un recours aux services de santé orienté davan-
tage vers des soins de première nécessité
La plus forte dépense individuelle des patients de
la CMU au cours de lannée dinstauration du
dispositif est essentiellement due à un recours à
lhôpital plus fréquent. En effet, 35,1% des
patients de la CMU ont bénéficié de soins hospi-
taliers durant lannée alors que ce taux atteint
Dépense hospitalière (Autres patients)
Dépense de soins de ville (Autres patients)
0
500
1 000
1 500
2 000
2 500
3 000
3 500
4 000
4 500
5 000
Dépense hospitalière (CMU)
Dépense de soins de ville (CMU)
60 ans et + 50-59 ans 40-49 ans30-39 ans20-29 ans10-19 ans
<10 ans
Dépense globale moyenne selon l'âge des patients
Montant en
425 365 375 345 662 396 976 561 1 152 724 1 377 1 051 1 832 1 866
748 329 737 457
958
296
1 042
388
1 357
468
2 385
664
2 771 1 543
Méthodologie
Cette étude sur les résultats définitifs de lannée 2000, a été réalisée à partir de lEchantillon Permanent des
Assurés Sociaux (EPAS). Elle est centrée sur les personnes protégées par le Régime Général de France
Métropolitaine, qui ont consommé des soins de ville (et/ou des soins hospitaliers) au titre du risque maladie
(hors indemnités journalières) au cours de lannée 2000, et dont les remboursements ont été effectués avant
janvier 2002. On relève 70 530 personnes, dont 6 093 bénéficiaires ayant eu des dépenses remboursées au titre de
la CMU complémentaire.
Lindicateur de consommation pris en compte dans lanalyse des dépenses globales sur lannée 2000 est la base
de remboursement (ou la «dépense reconnue»). En effet, en dehors de forfaits sur certains actes dentaires et
doptique, les médecins ont lobligation dappliquer les tarifs du secteur 1 à tout bénéficiaire de la CMU.
La répartition selon les postes de dépenses correspond à celle définie par la Statistique Mensuelle. Ainsi, les soins
de ville prennent en compte aussi les honoraires relevant du secteur privé hospitalier et des centres de santé. Les
prestations hospitalières comprennent les autres actes effectués en établissement dont les honoraires du secteur
hospitalier public.
Pour lanalyse des dépenses spécifiquement prises en charge par la CMU complémentaire en 2000, l’échantillon
est restreint aux patients couverts toute lannée par le dispositif. L’étude se limite donc aux patients ayant bénéfi-
cié dune prise en charge intégrale du ticket modérateur pour leurs dépenses de soins de ville en 2000. Cette
partie porte ainsi sur 4 463 personnes, soit 73,2% des personnes ayant eu au moins une dépense remboursée au
titre de la CMU durant lannée.
Les dépenses prises en charge par la CMU complémentaire sont les tickets modérateurs de lensemble des pres-
tations, les forfaits journaliers hospitaliers et certains frais supplémentaires sur les soins dentaires et loptique.
seulement 18% pour les autres patients du
Régime Général. Toutefois, quand ils ont eu
recours à lhôpital, les bénéficiaires de la CMU
ont eu des dépenses, en moyenne, un peu moins
élevées (resp. 3 299 contre 3 680 ). Plus jeune,
cette population a effectivement eu moins de risques
LA CONSOMMATION MÉDICALE DES BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU EN 2000
3
Encadré I : Comparaison de la dépense moyenne au cours de lannée 2000 dun patient de la CMU avec celle
dun autre patient du Régime Général de même âge et de même sexe
Au cours de lannée 2000, un bénéficiaire de la CMU a présenté au remboursement 1 953 . À âge et sexe compa-
rables*, un patient couvert par le Régime Général à un autre titre a dépensé en moyenne pour sa santé 1 071 .
59% de la consommation moyenne dun patient de la CMU correspond à des frais hospitaliers alors que le
recours à lhôpital compte pour environ 44% de la dépense moyenne des autres patients du Régime Général,
après correction d’âge et de sexe.
Concernant les soins de ville, avec 794 en moyenne, la dépense " reconnue " par la Sécurité Sociale dun
patient de la CMU est supérieure denviron 33,5% à celle dun autre patient du Régime Général de même âge et
de même sexe. Au cours des 5 premiers mois de lannée 2000, la consommation moyenne à structure d’âge et de
sexe équivalente était respectivement de 357 et 291 , soit 22,7% d’écart. Sur les 11 premiers mois, les dépenses
moyennes étaient respectivement évaluées à 696 et 538 , soit 29,4% d’écart1. L’écart de consommation de
soins de ville entre ces deux populations saccentue progressivement tout au long de lannée.
* : la méthode consiste à calculer ce que serait la dépense moyenne des patients protégés par le Régime Général (hors CMU), si
cette population avait la même structure d’âge et de sexe que celle des patients protégés par la CMU complémentaire. Le calage est
centré sur la population des personnes non couvertes par la CMU, plus largement représentée à tout âge.
Autre patient du Régime
Patient de la CMU Général de même âge et
de même sexe
Moyenne Répartition Moyenne Répartition
() (%) () (%)
Dépense Totale 1 953 100% 1 071 100%
Dont dépense de soins de ville 794 41% 595 56%
Dont dépense hospitalière 1 159 59% 476 44%
Proportion de consommants et dépenses individuelles moyennes
selon les postes de prestations hospitalières
Bénéficiaires de la CMU Autres patients du Régime
(6 093) Général (64 437)
Dépense Dépense
%consommants moyenne/cons.* %consommants moyenne/cons.
()()
Dépense totale 100,0% 1 953 100,0% 1 504
Dépense hospitalière 35,1% 3 299 18,0% 3 680
Consultations externes 21,0% 25 1,7% 52
Médecine 10,6% 4 310 7,0% 3 647
Chirurgie 11,2% 1 862 10,0% 1 900
Gynécologie obstétrique 1,3% 1 571 0,8% 1 734
Autres disciplines34,9% 9 671 2,3% 8 888
* Il sagit de la consommation moyenne dun type particulier de prestations pour les patients qui ont effectivement eu accès à ce type de soins.
3Comprend les disciplines de prestations suivantes : moyen séjour, long séjour, lutte contre les maladies mentales et les toxicomanies ainsi que les établissements
relevant de la loi sociale.
LA CONSOMMATION MÉDICALE DES BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU EN 2000
4
davoir des soins coûteux : dans ce cas, les
patients de la CMU sont âgés en moyenne de 29
ans alors que les autres patients du Régime
Général ont une moyenne d’âge de 46 ans.
Lobservation des disciplines de prestations
montre, en outre, que ces deux populations
fréquentent lhôpital pour des soins très
différents. Dun accès largement facilité, lhôpital
permet, en effet, aux patients de la CMU de
consulter un médecin de toute spécialité : 21% ont
eu recours à des consultations externes et dans ce
cas ont dépensé en moyenne 25 durant lannée.
Les autres patients du Régime Général
fréquentent rarement ce secteur hospitalier
(1,7%), en revanche leur consommation moyenne
est alors 2 fois plus importante que celle dun
patient de la CMU.
Concernant les autres secteurs hospitaliers, les
patients de la CMU sont toujours plus nombreux
à y avoir accédé. En médecine, conséquence de
durées de séjour plus longues, le coût de leur
hospitalisation est aussi sensiblement plus élevé
que celui dun séjour dune personne du Régime
Général non couvert par la CMU. En chirurgie et
en gynécologie, la dépense moyenne est au
contraire moins conséquente quand elle touche
un patient de la CMU. Pour les autres disciplines
et les établissements relevant de la loi sociale, les
montants élevés sexpliquent aussi par la durée
dhospitalisation. Ils ne concernent cependant
quun faible nombre de personnes.
Le détail des dépenses de soins de ville révèle
aussi de nettes divergences dans le recours aux
soins de ces deux populations. Les patients
couverts par la CMU complémentaire sont plus
nombreux à faire appel aux médecins généralistes :
non seulement ils bénéficient de consultations plus
fréquemment, mais aussi de visites à domicile. A
linverse, ils sont moins nombreux à recourir aux
spécialistes en ville. De même, malgré une moin-
dre fréquentation des cabinets dentaires, la
dépense des bénéficiaires de la CMU complémen-
taire est plus conséquente. Enfin, loptique ne
semble pas une priorité pour ces bénéficiaires en
dépit dune meilleure prise en charge.
Proportion de consommants et dépenses individuelles moyennes
selon les postes de prestations de soins de ville
Bénéficiaires de la CMU Autres patients du
Régime Général
(6 093) (64 437)
Dépense Dépense
%consommants moyenne/cons. %consommants moyenne/cons.
()()
Dépense totale 100,0% 1 953 100,0% 1 504
Dépense de soins de ville 100,0% 794 100,0% 841
Honoraires 96,4% 302 96,1% 297
Actes domnipraticiens 89,6% 139 85,7% 113
Actes de spécialistes 55,7% 187 65,4% 205
Soins dentaires 35,3% 175 37,7% 147
Prescriptions 96,2% 476 95,0% 549
Auxiliaires médicaux 25,8% 230 30,0% 292
Infirmiers 17,6% 135 20,5% 211
Masseurs-kiné9,2% 280 12,3% 292
Biologie 38,3% 104 44,4% 107
Pharmacie 94,6% 340 92,4% 368
Optique 12,3% 32 16,7% 22
Autres LPS425,9% 126 23,6% 182
4Liste des Produits de Santé pour les appareillages, les matériels et les pansements (anciennement dénommé TIPS).
Concernant les autres postes de prescriptions, les
personnes protégées par la CMU complémentaire
utilisent moins souvent les services des auxiliaires
médicaux et bénéficient plus rarement danalyses
médicales, vraisemblablement du fait de leur rela-
tive jeunesse.
LA CONSOMMATION MÉDICALE DES BÉNÉFICIAIRES DE LA CMU EN 2000
5
Encadré II : Caractéristiques démographiques des patients de la CMU
Les patients de la CMU représentent environ 9% des bénéficiaires de soins du Régime Général en 2000.
Le dispositif mis en place depuis le 1er Janvier contribue largement à améliorer la protection médicale des
plus jeunes : en moyenne, ces bénéficiaires ont 27 ans alors que les autres patients du Régime Général ont
11 ans de plus. Près de 42% des personnes couvertes par la CMU ont moins de 20 ans et un tiers des autres
patients du Régime Général a plus de 50 ans. En effet, le seuil douverture des droits limite, le plus souvent
laccès des bénéficiaires du fond de solidarité vieillesse et de ceux de lallocation pour adulte handicapé. De
plus, le niveau des ressources pour bénéficier de la CMU étant évalué à partir du revenu par unité de
consommation, les chances de pouvoir bénéficier de cette couverture complémentaire sont dautant plus
élevées que la taille de la famille5est importante. Le dispositif touche ainsi plus facilement les ménages
avec des enfants6.
L’âge des patients de la CMU explique aussi le plus faible nombre de personnes souffrant dune affection
longue durée (ALD). Ils représentent cependant 10,2% de ces patients alors que ce taux atteint plus de 12%
parmi les autres. Néanmoins, avant 60 ans, ils sont proportionnellement plus nombreux à être exonérés du
ticket modérateur pour affection longue durée (resp. 8,4% et 4,5%).
La prépondérance des femmes (54%) parmi les patients rappelle quelles sont plus nombreuses à recourir à
des soins médicaux indépendamment de leur inscription ou non à la CMU.
25 20 15 10 5 0 0 5 10 15 20 25
Bénéficiaires
de la CMU
Age moyen : 27 ans
% de
p
atients en ALD (CMU)
Autres patients
du Régime Général
Age moyen : 38 ans
Répartition des patients selon leur âge
% de patients en ALD (Autre patient)
< 10 ans
10-19 ans
20-29 ans
30-39 ans
40-49 ans
50-59 ans
60 ans et +
22,7% 13,3%
19,1% 12,8%
15,0% 12,4%
16,3% 15,1%
12,5% 14,0%
8,8%
5,6% 21,1%
11,4%
%
5On entend ici par famille, le foyer composé de lassuré, de son conjoint et éventuellement des enfants âgés de moins de 20 ans.
6«Opinions sur la couverture maladie universelle et bénéficiaires au premier trimestre 2000 » Questions d’économie de la santé- n°38 Juillet 2001 CREDES.
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