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Premier marché du monde, l’UE doit encore renforcer sa capacité d’agir comme
puissance publique européenne pour appuyer le développement de ses propres
capacités technologiques et humaines dans une société de la connaissance où le
savoir devient la clé de la richesse. Un jeu complexe d’émulation et de coopération
des politiques d’innovation, combinant concentration plus généreuse des moyens
de la recherche au niveau communautaire, des réglementations environnementales,
et la mobilisation des commandes publiques, notamment dans les domaines du
transport et de la défense, l’intégration des services financiers et l’activation du
capital risque pour financer les start-ups, constituent autant de voies à explorer
avec plus de détermination et de vision stratégique à l’échelle du continent.
Mais les avancées micro-économiques ne sont possibles que si elles sont portées
pas un cadre macro-économique propice à la croissance : or l’Euro-Groupe doit
encore se doter des outils de coordination pour réaliser un policy-mix axé certes sur
la stabilité interne de l’Euro, mais apte aussi à soutenir la croissance si elle devait
marquer un ralentissement. L’UEM reste en chantier : derrière la monnaie
commune se profile avec une évidence croissante, le besoin d’une gouvernance
économique plus serrée et plus nettement orientée et perceptible. La cohérence
des politiques de soldes budgétaires, la qualité et la robustesse des finances
publiques, la renonciation à une concurrence fiscale sur les facteurs mobiles dans
un espace intégré qui ne peut-être que dommageable et compliquer, au lieu de
faciliter, l’allégement nécessaire de la pression fiscale permis par le
désendettement public relatif, et son re-équilibrage entre capital et travail,
constituent autant de progrès nécessaires.
Les réflexions que je vous livre ici laissent entendre que je ne suis pas partisan
d’une « Europe tout au marché », mais que je me situe dans le camp d’une
gouvernance européenne forte, qui n’implique toutefois pas, dans mon esprit, la
mise en place d’un super Etat européen.Je vois en effet dans une gouvernance
forte, fondée sur une légitimité démocratique qui reste très largement à construire,
la seule réponse possible de la démocratie européenne à la globalisation.
Deux défis en effet nous provoquent ; l’un interne et l’autre externe.
Le premier, c’est l’aggiornamento du modèle social européen qui doit contribuer à la
légitimité démocratique de l’Union Européenne en donnant une direction visible au
processus d’intégration. C’est une entreprise d’envergure dont on peut – on doit –
esquisser le cadre, mais qui relève de la mobilisation des opérateurs économiques
et des acteurs sociaux. Elle doit viser dans un continent en vieillissement
démographique rapide et ouvert dés lors à l’immigration – celle-ci gagnant à être
canalisée et à s’accompagner d’une intégration qui n’est cependant pas une
assimilation - à poursuivre parallèlement des objectifs de compétitivité et de
solidarité. La quête de la croissance ne doit pas – ne peut pas – justifier la montée
de la pauvreté en Europe. Ce serait une absurdité et permettez moi de vous le dire
avec force, une indignité !
Qu’une société comme les Etats Unis atteigne un PIB par tête de 27,3% plus élevé
que le niveau européen, mais n’arrive pas à assurer des soins de santé
convenables à 44 millions d’Américains, doit nous donner à réfléchir : les soixante
millions de pauvres que compte l’Europe doivent nous interpeller plus encore que
l’écart de croissance que nous connaissons aujourd’hui avec les Etat-Unis. La
croissance est indispensable, mais elle ne suffit pas.