Le désir

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Le désir
Qu’est ce que le Désir ?
Le désir est souvent conçu comme l’expression d’un manque. Le mot vient du langage des
oracles où il désigne l’absence d’une étoile dans le ciel. On distingue le désir du besoin (qui
appelle une satisfaction urgente) et du souhait (dont la réalisation est souvent utopique).
Lorsque le désir est si intense qu’il devient exclusif, on parle de passion. Inversement,
l’absence de désir signale un manque de force (asthénie), de goût (apathie). Deux disciples
s’intéressent particulièrement au désir : la psychanalyse qui le rapproche de la pulsion, et la
morale qui s’interroge sur la possibilité de contrôler les désirs. Ainsi Epicure distingue-t-il les
désirs sains (naturels et nécessaires) et les désirs que doit fuir le sage (plaisirs du corps, quêtes
des richesses, de la gloire …). L’attitude qui vise à annihiler les désirs, nommés ascétisme, est
peu valorisé dans la philosophie (sauf dans le stoïcisme) parce qu’elle engendre souvent des
frustration qui peuvent conduire à la névrose ou à la perversion.
Quelle différence principale existe-t-il entre désir et besoin ?
Le besoin est nécessaire et naturel alors que le désir est artificiel. Le besoin est un manque à
combler alors que le désir est une recherche d’un objet artificiel inutile. Le besoin répond à
l’utilité alors que le désir à la satisfaction et au plaisir. Il est plus facile de satisfaire ses
besoins avec des objets simples, il se contente de peu, il n’a pas pour prétention de rechercher
des choses compliqués à obtenir. Le désir semble toujours insatisfait, insatiable, comme si
tous les objets mis à sa disposition étaient insuffisants. Platon utilise deux métaphores pour
décrire le désir, il le compare au phénix et au tonneau des Danaïdes. Il semble impossible de
satisfaire pleinement tous nos désirs. Le besoin se contente de se qu’il trouve alors que le
désir ne se contente jamais de se qu’il trouve il est toujours exagéré, excessif, tyrannique et
porte la marque de nos préférences individuelles. Eprouver le besoin de manger ou de boire se
n’est pas la même chose que désirer manger son plat favori ou boire sa boisson favorite (le
désir est sélectif). Alors que le besoin est rationnel, le désir semble un peu fou, irrationnel.
Hegel considère que l’homme n’est pas un être de besoin mais de désir. Si l’homme n’était
qu’un être de besoin il pourrait vivre comme les animaux en ayant la même existence toute au
long de son histoire. Un être de besoin ne peut pas faire de progrès dans l’histoire car cela ne
lui est pas utile et peu se contenter de vivre au jour le jour en accomplissant les mêmes
activités. Hegel considère que c’est la conscience que l’homme à de lui-même qu’il le porte à
désirer sans cesse de nouveaux objets dans le but de reconnaitre et faire reconnaitre sa
supériorité sur le monde animal, sa dignité par pure prestige. Le désir, l’ambition pour Hegel
est le vrai moteur du progrès. Carl Marx, disciple de Hegel, parlera de la lutte des classes pour
leurs privilèges comme les désirs. Les besoins sont toujours communs à une même espèce
animale et sont toujours assurés par la nécessité de la survie. Le besoin est naturel et lié à
l’animalité. Le désir à un caractère social et culturel. Tous les objets que nous désirons sont
les mêmes que tous ceux que les autres désirs. A force de désirer ce que les autres désirent
cela va ressembler à un besoin encadré par le monde de la société. Dans le monde de la pub et
la mode le désir se porte sur un objet supposé désiré par quelqu’un d’autre. Puisque le désir
est toujours plus ou moins mimétique il en résulte que les plaisirs les plus intenses sont ceux
trouvés dans la vie en société et pas les plaisirs solitaires. Le désir est toujours encadré par un
certain nombre de réglés auxquelles il doit se soumettre, alors que le besoin ne s’entoure pas
de règle. Le désir repose sur des interdits qu’il lui est possible de transgresser en procurant
ainsi à celui qui les transgresse par une plus grande jouissance. Lewis-Strauss distingue au
sein des cultures 3 manières de préparer la nourriture : le cru, le cuit et le bouilli.
Le Désir condamne-t-il à la souffrance ?
Le désir se n’est pas le plaisir. Le plaisir c’est le sentiment de satisfaction que l’on éprouve
momentanément une fois que certains de nos désirs se sont accomplis. Le désir est toujours
promesse de plaisir, espérance de satisfaction. Le désir s’alimente dans l’image des rêves dans
lesquels on peut voir les différents objets qui vont nous apporter un sentiment de plénitude. Le
désir annonce à l’avance les conditions qui devront nous permettre d’être soit pleinement
heureux ou d’avoir un contentement intérieur. Parce que le désir est toujours annonce de
quelque chose qui ne pourra peut-être pas se réaliser, il peut dans une certaine mesure
engendrer en nous un malaise existentiel. Même dans l’espérance il y a une sorte d’angoisse.
Dans le bouddhisme l’existence humaine est perçue comme nécessairement douloureuse
parce que nous sommes condamné sans cesse à désirer ce qui nous manque sans pouvoir
combler ce manque. Notre existence terrestre est provisoire et éphémère ce qui nous oblige à
rester emprisonné dans notre individualité et dans nos passion égoïste. Le « nirvana »
correspond à la sérénité ultime que l’on ne peut atteindre. Le désir renait sans cesse, cherche
une nouvelle existence sans pouvoir se fixer sur un objet précis. La sagesse bouddhiste
consiste à apprendre à se détacher au désir. La tradition bouddhiste enseigne à chacun une
certaine sagesse à se détacher du monde, prendre du recul à ce qui nous entour en partant du
principe que le monde n’est qu’illusion. Cette philosophie n’engage pas à l’action, il y a une
sorte de conservatisme et de traditionalisme, elle ne se rend pas contre que l’on ne peut pas
lutter contre un désir sans un autre désir. Désirer le « nirvana » c’est désirer. Le bouddhisme
semble contenir une incapacité à régler le problème du désir parce que vouloir supprimer le
problème du désir c’est encore désirer et il semble humainement impossible de ne pas désirer.
Schopenhauer est célèbre pour avoir la doctrine la plus pessimiste de la philosophie, ce
pessimiste repose sur le postulat : « vivre c’est être condamné à désirer continuellement ».
Schopenhauer va utiliser 6 arguments différents :
« désirer c’est chercher à reproduire » ; « le désir s’inscrit toujours dans un manque » ; « le
désir est aussi un effort, une poussée, tension qui nous fait vivre dans une certaine inquiétude
(absence de repos) » ; « le désir est contradictoire en lui-même (il veut sa propre mort pour
renaitre ensuite) » ; « le désir une fois assouvi laisse toujours un gout amer de déception,
regret, nostalgie ». Schopenhauer ; « la vie oscille comme un pendule, de gauche à droite, de
la souffrance à l’ennui ».
Le monde comme volonté et comme représentation, Arthur Schopenhauer :
Schopenhauer a une vision pessimiste de l’existence bien que pouvant être considéré comme
réaliste.
Pour lui la matière en elle-même contient une énergie qui permet aux particules qui la
compose de se conserver et de préserver la combinaison qui leur permet de s’unir les unes aux
autres. L’énergie vit sans but, aveugle sans savoir vers quoi elle tend. Il adopte un point de
vue athée. Sans repos signifie que cette énergie se transforme continuellement sans qu’il y ait
la moindre immobilité. L’univers est en mouvement perpétuel qui obéi à une force, énergie
qui ne parvient jamais à s’arrêter. Cet énergie, Schopenhauer l’appel la « volonté ». Cette
forme s’exprime chez les animaux et chez l’homme sous la forme de pulsions inconscientes
qui ne peuvent jamais être totalement satisfaites. Tous les désirs peuvent se ramener à cette
force inconsciente. Schopenhauer l’appel le « vouloir vivre ». En tant qu’être vivant notre
destiné c’est la mort mais on ne sait pas ce que c’est ni vers quoi tendent les animaux et les
hommes. Il n’y a pas de but dans l’existence des êtres vivants. Tous les efforts que l’on fait
pour vivre repose sur des besoins fondamentaux. Tous nos désirs qui se rattachent
nécessairement à des besoins produisent en nous un sentiment de déplaisir, des sensations
désagréables. Même la satisfaction a des conséquences désagréables. Même un désir comblé
va renaitre et va provoquer un sentiment de monotonie. « post coïtum, animal triste » après
l’orgasme l’animal devient triste, comme abattu. Toute notre existence est une sensation de
souffrance et d’ennui. Les hommes ont inventé la religion pour trouver dans le ciel une
compensation à leur souffrance et à leur ennui. Au sommet de l’échelle des êtres vivants on ne
retrouve pas seulement l’homme mais aussi tous les animaux qui possèdent un corps qu’ils
doivent nourrir en vu de maintenir la vie qui est en eux et de lui permettre de se perpétuer.
Nos besoins les plus primitifs se rapportent à la faim et ses besoins sont révélés à notre
conscience par des pulsions qui nous portent à manger, à nous préserver dans la vie (pulsion
de conservation du moi, selon Freud). Il y a un second besoin fondamental, un besoin sexuel
qui provoque des pulsions sexuel que Freud appellera libido. Ce texte annonce la
psychanalyse. Les animaux sont des êtres de besoins et les hommes des êtres de désirs.
L’homme est condamné à désirer sans cesse et sans qu’il ne trouve dans la vie un quelconque
repos qu’il pourrait assimiler au bonheur. Les hommes ne savent pas d’où ils viennent ni où
ils vont, l’existence de chacun est une existence sans raison.
Puisque le désir semble nous faire vivre dans la douleur comment peut-on parvenir à les
modérer ou à les maitriser ?
Dans l’antiquité deux grandes sagesses ont proposé des remèdes contre la souffrance, le
stoïcisme et l’épicurisme. Elle repose sur la recherche du bonheur, philosophie eudémonistes
(le but de la vie humaine c’est le bonheur et le bonheur est identifié à l’ataraxie).
Selon l’épicurisme il faut commencer par faire la différence entre les désirs naturels et
nécessaires, les désirs de richesse et de grandeur qu’il faut éviter car impossible à réaliser
entre les deux on retrouve des désirs tels que la gourmandise, le confort que l’on doit calculer
si on doit les satisfaire ou pas. Dans la conception épicurienne il ne s’agit pas de supprimer le
désir, qui est indispensable à l’existence, que l’on doit lutter contre le désir avec d’autres
désirs et que le désir en lui-même n’est pas mauvais. L’usage que l’on peut faire de ces
désires peu être mauvais, leur céder de façon capricieuse sans chercher à les modérer. Les
épicuriens prévoient les joies et les souffrances amenées par nos désirs pour choisir la
satisfaction ou non des désirs. L’épicurien évite tous les excès qui laissent une impression de
malaise, de dégoût. La morale épicurienne est simple : il ne faut pas chercher les
complications, trouver le bonheur dans la simplicité de nos désirs en les variant, dès lors que
l’on sait sélectionner les désirs en fonction des effets positifs ou négatifs qu’ils vont nous
apporter on peut trouver le bonheur. Le stoïcisme impose une morale plus stricte, ascétique.
C’est une morale qui repose sur l’abstinence, la maitrise de soi par la volonté. Pour les
stoïcien, il est facile d’être heureux à partir du moment où l’on arrive à se contenter du peu
que l’on possède, il existe des choses qui sont en notre pouvoir (nos pensées, opinions,
jugements, désirs conscients) et des choses qui ne le sont pas (les lois de la physique, le
destin, les richesses, honneurs, le jugement des autres). C’est à nous d’orienté nos désirs vers
des objets qui sont facilement accessible, on peut continuer à désirer ce que l’on a déjà.
Quand on désir encore un objet déjà acquis c’est que l’on ne veut pas en être séparé. Désirer
que ce qui m’est totalement accessible et ne pas désirer l’impossible mène au bonheur. On
retrouve cette morale chez Descartes au XVIIe siècle : « changer ses désirs plutôt que l’ordre
du monde ». La morale des stoïciens repose sur le courage face à l’adversité, une forme de
sérénité grâce au fait de pouvoir mettre une certaine distance et une très grande fidélité aux
engagements. L’épicurien est un bon vivant, qui évite les excès, qui se complait dans une
certaine forme d’individualisme : « pour vivre heureux, vivons caché ». Le stoïcien prône une
morale universel, qui ressemble à celle du christianisme, tous les hommes doivent se monter
courageux et luttent ensemble contre les injustices. Pour les stoïciens les seules choses que
l’on doit éviter de désirer c’est la guérison définitive quand on se sait malade, la liberté
absolue quand on est emprisonné, la richesse illimité quand on est pauvre.
Le désir peut être dangereux à partir du moment où il nous conduit à des excès et à
l’intempérance. Ce n’est pas le désir lui-même qui responsable de cette intempérance mais soi
même. Le bonheur ne consiste pas à vouloir satisfaire tous ses désirs inlassablement, on
risque toujours de rencontrer une certaine lassitude, monotonie, une forme d’insatisfaction.
Est-ce véritablement vivre heureux que de se gratter à son aise et de passer sa vie à se gratter
quand on a la galle et quand on a envie de se gratter ? Le désir est toujours utile et nécessaire
à l’existence dans la mesure où il nous pousse à éprouver l’envie de vivre et de persévérer
dans l’existence. Toute notre activité consciente est désirante, on ne peut pas percevoir
quelque chose ou quelqu’un si l’on n’est pas attentif à ce qu’il est. Toute notre activité
inconsciente est aussi désirante, elle repose sur un certain nombre de groupes de pulsions. Il
est impossible de supprimer le désir. On peut essayer de les maitriser comme les stoïciens ou
satisfaire ceux que l’on trouve les meilleurs comme les épicuriens. Pour que cette maitrise du
désir soit possible il est indispensable de connaitre la nature profonde des désirs et des objets
que l’on recherche, il est indispensable de bien se connaitre. La connaissance du désir et la
connaissance de soi doit être une tache permanente
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