Notes de cours
L1 — MATH120
Herv´
e Le Dret
29 novembre 2004
Chapitre 5
Applications lin´
eaires
Nous allons maintenant nous int´
eresser aux applications entre sev qui conservent
l’addition et la multiplication par un scalaire.
5.1 D´
efinition et premiers exemples
Dans ce qui suit, et sauf mention expresse du contraire, E1d´
esigne un sev de
Rm1,E2un sev de Rm2, et ainsi de suite.
D´
efinition 35 On dit qu’une application f :E1E2est une application lin´
eaire
si et seulement si
i) x,yE1, f(x+y) = f(x) + f(y).
ii) xE1,λR, f(λx) = λf(x).
Il faut noter que les op´
erations qui apparaissent au membre de gauche de ces
´
egalit´
es sont des op´
erations dans E1, alors que celles qui apparaissent au membre
de droite sont dans E2, mˆ
eme si on ne les distingue pas dans la notation.
On v´
erifie facilement que la D´
efinition 35 est ´
equivalente aux deux caract´
eri-
sations suivantes.
i)0x,yE1,λ,µR,f(λx+µy) = λf(x) + µf(y).
ou
i)00 x,yE1,λR,f(λx+y) = λf(x) + f(y).
L´
equivalence de la D´
efinition 35 avec i)0est claire. Pour i)00, si fest lin´
eaire,
alors elle v´
erifie bien sˆ
ur i)00 par application successive de i) et ii). Soit fv´
erifiant
i)00. Notons d’abord, en prenant λ=1 et y=0, que f(x) = f(x+0) = f(x)+ f(0).
On en d´
eduit que f(0) = 0. Prenant ensuite λ=1, on obtient i), puis y=0 et on
obtient ii). Par cons´
equent, fest lin´
eaire.
Remarquons au passage que toute application lin´
eaire satisfait f(0) = 0.
77
78 CHAPITRE 5. Applications lin´
eaires
Exemple 16 1) L’application nulle E1E2,x7→ 0, est lin´
eaire.
2) Si dimE1=ket Best une base de E1, alors l’application ERk,x7→ (x)B
est lin´
eaire.
3) Si Aest une matrice m×n, alors l’application RnRm,x7→ Ax est lin´
eaire.
Introduisons maintenant quelques points de vocabulaire, ainsi que quelques
propri´
et´
es associ´
ees.
On rappelle d’abord les notions de th´
eorie des ensembles suivantes. Une appli-
cation fd’un ensemble Xdans un ensemble Yest dite injective si deux ´
el´
ements
disjoints de Xont des images disjointes par f, c’est-`
a-dire x6=yf(x)6=f(y), ou
encore par contraposition, f(x) = f(y)x=y. Elle est surjective si tout ´
el´
ement
de Yest l’image d’au moins un ´
el´
ement de Xpar f, c’est-`
a-dire yY,xX,
y=f(x). Elle est bijective si elle est simultan´
ement injective et surjective. Dans
ce cas, elle admet une application r´
eciproque not´
ee f1:YXtelle que xX,
f1(f(x)) = xet yY,f(f1(y)) = y.
Si fest une application lin´
eaire bijective de E1dans E2, on dit que c’est un iso-
morphisme entre E1et E2. Dans ce cas, l’application r´
eciproque f1est ´
egalement
lin´
eaire de E2dans E1, et c’est donc aussi un isomorphisme.
D´
emonstration. Soit f:E1E2un isomorphisme. L’application r´
eciproque est
d´
etermin´
ee par
yE2,f1(y) = xy=f(x).
Utilisons la caract´
erisation i)00. On s’int´
eresse donc `
af1(λy1+y2). Ce vecteur
de E1est d´
etermin´
e par
f1(λy1+y2) = xλy1+y2=f(x).
Par ailleurs, on a aussi
f1(y1) = x1y1=f(x1)et f1(y2) = x2y2=f(x2).
En combinant ces deux derni`
eres relations, il vient
λy1+y2=λf(x1) + f(x2) = f(λx1+x2)
par lin´
earit´
e de f. En comparant avec la caract´
erisation ci-dessus, on obtient
f1(λy1+y2) = λx1+x2=λf1(y1) + f1(y2),
et f1est bien lin´
eaire.
Cette propri´
et´
e permet donc dire que s’il existe un isomorphisme de E1dans
E2, alors il en existe un entre E2et E1, et l’on est alors fond´
e`
a d´
eclarer que E1et
E2sont isomorphes.
Si maintenant fest une application lin´
eaire de Edans E, on dit que c’est un
endomorphisme.
5.2. Image, noyau, rang 79
Exemple 17 L’exemple 2) plus haut est un exemple d’isomorphisme. Il montre
que tout sev de dimension kest isomorphe `
aRk.
D´
efinition 36 L’ensemble de toutes les applications lin´
eaires de E1dans E2est
not´
eL(E1,E2). Si E1=E2=E, on le note plus simplement L(E).
La lin´
earit´
e est pr´
eserv´
ee par composition des applications.
Proposition 30 Si f L(E1,E2)et g L(E2,E3), alors gfL(E1,E3).
D´
emonstration. Utilisons la caract´
erisation i)00. On a, pour tous x,yE1et tout
λR,
gf(λx+y) = g(f(λx+y)) = g(λf(x) + f(y)) = λg(f(x)) + g(f(y))
=λgf(x) + gf(y),
par lin´
earit´
e de fpuis de g, donc gfest lin´
eaire.
5.2 Image, noyau, rang
On associe `
a chaque application lin´
eaire deux sous-espaces vectoriels fonda-
mentaux.
D´
efinition 37 Soit f L(E1,E2). On appelle noyau de f l’ensemble
ker f={xE1;f(x) = 0}=f1({0}).
On appelle image de f l’ensemble
im f={yE2;xE1,y=f(x)}=f(E1).
Les expressions de droite sont respectivement l’image r´
eciproque et l’image
directe d’un ensemble. L’image r´
eciproque d’une partie Ad’un ensemble Ypar
une application f:XYn’est autre que l’ensemble des ´
el´
ements de Xdont
l’image par fappartient `
aA,f1(A) = {xX;f(x)A}. Il s’agit d’un concept
purement ensembliste que l’on utilise ici dans le contexte plus sp´
ecifique de l’al-
g`
ebre lin´
eaire.
Proposition 31 Le noyau de f est un sev de E1et l’image de f est un sev de E2.
80 CHAPITRE 5. Applications lin´
eaires
D´
emonstration. On va montrer que ces ensembles contiennent le vecteur nul de
leur espace respectif et sont stables par addition et multiplication par un scalaire.
Comme f(0E1) = 0E2(on distingue exceptionnellement les vecteurs nuls), on
voit que 0E1ker fet 0E2im f.
Soient x1,x2ker fet λR. On a donc f(x1) = f(x2) = 0. Par cons´
equent,
f(x1+x2) = f(x1) + f(x2) = 0 et f(λx1) = λf(x1) = 0, d’o`
ux1+x2ker fet
λx1ker f.
Soient y1,y2im fet λR. Il existe donc x1,x2E1tels que y1=f(x1)
et y2=f(x2). Par cons´
equent, y1+y2=f(x1) + f(x2) = f(x1+x2)et λy1=
λf(x1) = f(λx1), d’o`
uy1+y2im fet λy1im f.
Le noyau et l’image d’une application lin´
eaire sont li´
es de fac¸on cruciale aux
propri´
et´
es ensemblistes de cette application.
Th´
eor`
eme 36 Soit f L(E1,E2). On a
i) L’application f est injective si et seulement si ker f={0}.
ii) L’application f est surjective si et seulement si im f=E2.
D´
emonstration. ii) est trivial, c’est une question de vocabulaire.
Soit fune application lin´
eaire injective. Comme f(0) = 0, c’est donc que 0
E1est l’unique vecteur dont l’image est 0E2, d’o`
u ker f={0}. R´
eciproquement,
supposons que ker f={0}et donnons nous deux vecteurs x1et x2de E1qui
ont la mˆ
eme image par f,f(x1) = f(x2). Passant le second membre au premier
membre, il vient 0 =f(x1)f(x2) = f(x1x2)par lin´
earit´
e. On en d´
eduit que
x1x2ker f, donc x1=x2et fest injective.
Remarque 25 Pour d´
emontrer qu’une application lin´
eaire est injective, on utili-
sera TOUJOURS la caract´
erisation par le noyau i) et non pas la d´
efinition g´
en´
erale
de l’injectivit´
e.
Exemple 18 1) Pour l’application nulle, not´
ee 0, on a ker0 =E1et im0 ={0}.
2) Si Aest une matrice m×n, on notera par abus de langage kerAet imAle
noyau et l’image de l’application lin´
eaire RnRm,x7→ Ax. On a alors
kerA={xRnsolutions du syst`
eme homog`
ene Ax =0},
et imA={bRmtels que le syst`
eme Ax =best compatible},
ce qui montre que ces deux notions sont ´
egalement intimement li´
ees aux questions
de syst`
emes lin´
eaires. On parle dans ce cas de noyau et image d’une matrice.
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