`a ´equivalence pr`es, tout topos est associ´e `a une multitude de sites et il est en mˆeme temps le topos classifiant
d’une multitude de th´eories.
Le pr´esent texte cite en passant un troisi`eme type tout aussi g´en´eral de pr´esentation des topos : celle par
les “quantales” qui les rapproche cette fois non plus de la g´eom´etrie ni de la s´emantique des th´eories mais
des C∗-alg`ebres, donc de l’analyse et peut-ˆetre de la m´ecanique quantique.
Le caract`ere extraordinairement g´en´eral, multi-forme et souple des divers types de pr´esentations des topos
implique que, dans toute situation math´ematique dont on cherche `a exprimer “l’essence” au moyen d’un ou
de plusieurs topos, la d´efinition mˆeme de “bons” topos propres `a exprimer tout ou partie de cette essence,
donc la d´efinition de “bons” sites ou de “bonnes th´eories” donn´ees par de “bons” axiomes dans un “bon”
langage, sont un aspect particuli`erement crucial, subtil et d´elicat de l’utilisation des topos.
2) Un second principe est que la dualit´e entre les topos et leurs pr´esentations par des sites, th´eories ou
autres est encore plus importante que les topos consid´er´es en eux-mˆemes.
Tous les topos partagent avec le plus ´el´ementaire d’entre eux, la cat´egorie des ensembles, des propri´et´es ab-
solument remarquables (existence de limites et de colimites arbitraires, existence des exponentielles, existence
d’un classificateur des sous-objets d´ecouverte par Lawvere, op´erations de Heyting internes `a ce classificateur,
possibilit´e de parler de la “logique interne” d’un topos d´efinie par les propri´et´es de ces op´erations de Hey-
ting) qui rendent possible de r´ealiser `a l’int´erieur de n’importe quel topos `a peu pr`es toutes les constructions,
manipulations et calculs que l’on a l’habitude de r´ealiser dans le cadre ensembliste.
Mais la ran¸con de cette richesse et de cette souplesse op´eratives et calculatoires est que les topos sont
des cat´egories beaucoup trop grosses pour pouvoir ˆetre d´ecrites et saisies directement. C’est ainsi que, pour
commencer, leurs objets ne forment jamais un ensemble (sauf pour le topos trivial).
Les topos sont donc toujours donn´es concr`etement de mani`ere indirecte par des sites de Grothendieck,
par des th´eories du premier ordre qu’ils classifient ou ´eventuellement par d’autres pr´esentations. Et c’est
bien par de telles pr´esentations qu’ils sont associ´es et donc reli´es `a des contenus math´ematiques concrets :
g´eom´etriques dans le cas de sites, s´emantiques dans le cas de th´eories.
3) Un troisi`eme principe est qu’il faut consid´erer les topos `a ´equivalence (de cat´egories) pr`es et que
l’ambigu¨ıt´e essentielle de la th´eorie des pr´esentations des topos – qui consiste en ce que n’importe quel
topos est associ´e `a une infinit´e de sites diff´erents ainsi qu’`a une infinit´e de th´eories diff´erentes – est non
pas un probl`eme mais une structure fondamentale qui oriente la th´eorie des topos, de mˆeme que l’on sait
depuis Galois que l’ambigu¨ıt´e essentielle de la th´eorie des ´equations alg´ebriques – qui consiste en ce que les
racines d’un polynˆome irr´eductible sont alg´ebriquement indistinguables – est non pas un probl`eme mais une
structure fondamentale qui livre la clef de cette th´eorie.
Le fait que deux sites ont des topos associ´es ´equivalents signifie qu’ils ont mˆeme contenu g´eom´etrique. Le
fait que deux th´eories g´eom´etriques du premier ordre sont “´equivalentes au sens de Morita” c’est-`a-dire ont
des topos classifiants ´equivalents, signifie qu’elles ont mˆeme contenu s´emantique. Le fait que le topos associ´e
`a un site soit ´equivalent au topos classifiant d’une th´eorie signifie que le contenu g´eom´etrique de ce site est
´equivalent au contenu s´emantique de cette th´eorie.
L’ambigu¨ıt´e des pr´esentations des topos n’est pas seulement un fait th´eorique mais aussi un fait pratique
et op´eratoire. En effet, plusieurs r´esultats tr`es g´en´eraux et assez simples – comme le “lemme de comparaison”
de Grothendieck – permettent d’´elaborer dynamiquement `a partir d’une seule pr´esentation d’un topos par
un site ou une th´eorie une infinit´e d’autres pr´esentations de ce topos par des sites ou des th´eories.
Un type plus sophistiqu´e et plus particulier mais tr`es important d’´equivalence de topos est fourni par
la th´eorie de Galois g´en´eralis´ee par Grothendieck avec la th´eorie des cat´egories galoisiennes de [SGA1] et
g´en´eralis´ee encore dans l’article [TGT]. Cette th´eorie et ses g´en´eralisations consistent en effet `a montrer que
des classes de plus en plus larges de topos d´efinis concr`etement sont ´equivalentes `a des “topos classifiants”
BG de groupes topologiques prodiscrets G, constitu´es des ensembles discrets munis d’une action continue
de G.
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