Société Tunisienne de Biologie Clinique Journée de formation La sécurité tranfusionnelle Rôle de l’hémovigilance dans la sécurité transfusionnelle: Expérience du CNTS Dr Manel Chaâbane MCA en hématologie Centre National de Transfusion Sanguine Faculté de Pharmacie de Monastir è Gabès, le 12 avril 2016 1 Introduction • La transfusion sanguine: thérapeutique substitutive incontournable • Mais effets indésirables parfois très graves : incidents transfusionnels • Hémovigilance : Ensemble de procédures de surveillance organisées • De la collecte des PSL au suivi des receveurs et des donneurs Recueillir et évaluer les informations sur les effets inattendus ou indésirables Dans le but d’en prévenir l’apparition 2 Introduction • La France: 1er pays où l’hémovigilance a été instaurée (4 janvier 1993) • En Tunisie: • Avant 2003: installation du système d’hémovigilance par un effort personnel • Le 18/11/2003: la procédure de déclaration a été documentée au CNTS • Le 13 Février 2007: instituée sur le plan réglementaire avec la parution de la circulaire N°24/2007 3 Organisation de l’hémovigilance Trois niveaux Niveau national Niveau régional Niveau local 4 Organisation de l’hémovigilance Niveau local Services transfuseurs Comités hospitaliers de transfusion sanguine Banques du sang et centres de transfusion sanguine 5 Organisation de l’hémovigilance Niveau régional Direction régionale de la santé publique 6 Organisation de l’hémovigilance Niveau national Unité centrale de la transfusion sanguine et des banques du sang (UCTSBS) Commission technique d'hémobiologie 7 Objectifs de l’hémovigilance • Assurer la traçabilité des PSL • Renforcer la sécurité transfusionnelle • Alerter en cas d’incidents transfusionnels • Effectuer des enquêtes épidémiologiques 8 Incidents transfusionnels Mécanismes physiopathologiques • Incidents immunologiques Hémolytiques: globules rouges Non hémolytiques: leucocytes, plaquettes, protéines • Incidents infectieux • Incidents de surcharge : volémique ou métabolique Incidents transfusionnels Classification Selon l’ordre chronologique INCIDENTS TRANSFUSIONNELS IMMEDIATS Survenant dans un délai de 8 jours après l’acte transfusionnel Signes cliniques orientent vers le diagnostic INCIDENTS TRANSFUSIONNELS RETARDES Survenant au delà de 8 jours après l’acte transfusionnel Diagnostic souvent biologique (séroconversion virale, alloimmunisation) La surveillance d’une transfusion • • • Contrôle ultime au lit du malade Pose de la transfusion Surveillance clinique du patient – – – – • • Pouls, TA, température, diurèse, RR, coloration des muqueuses, absence de douleur, angoisse? Les premières minutes Au moins toutes les demi heures pendant la transfusion Toutes les 3 heures après la transfusion au cours des 24 premières heures Remplir le dossier transfusionnel et le document de traçabilité (à retourner à l’ETS) Surveillance clinique et biologique au-delà de 48 h – – Efficacité de la transfusion Absence de complications • • • • • Ictère retardé, déglobulisation Transfusion inefficace, purpura post transfusionnel RAI positive Surveillance à long terme 3 – 4 mois Ordonnance de sortie • • RAI Sérologies HIV, HCV, Ag HBs 11 EN CAS D’INCIDENT TRANSFUSIONNEL 12 Procédure de la déclaration des incidents transfusionnels • Informer Recueillir • Analyser • Agir Evaluer Prévenir Prélèvements Fiche d’incident transfusionnel Poche du PSL FIT 13 Enquête étiologique Fiche d’Incident Transfusionnel 14 F I iche d’ ncident Transfusionnel 15 F I iche d’ ncident Transfusionnel 16 F I iche d’ ncident Transfusionnel 17 F I iche d’ ncident Transfusionnel 18 Bilan d’un incident transfusionnel • A la réception de la FIT: réception de prélèvements sanguins (patient/ PSL) • Compléter l’enquête et identifier l’étiologie de l’incident • Examens immuno-hématologiques (patient / PSL): Groupage ABO et RhD: sur microplaque par la méthode d’agglutination en phase liquide. Phénotypage Rh-Kell: 2 déterminations et 1 méthode pour chaque détermination: o 1ère détermination: sur microplaque o 2ème détermination: sur cartes gel NaCl- enzyme 19 Bilan d’un incident transfusionnel RAI: - Technique de Coombs indirect (cartes Liss Coombs) -Technique enzymatique (cartes Liss Enzyme) -Technique en milieu salin à 22°C Test de compatibilité (en cas de besoin): consiste à mettre en contact le PSL avec le sérum du receveur. TCD: consiste à mettre en contact les GR du patient avec l’antiglobuline polyvalente. Recherche d’Ac anti-HLA: technique de microlymphocytotoxicité ou ELISA de One Lambda® • Examen bactériologique (hémoculture) 20 Analyse des FIT déclarées par les établissements de santé de Tunis au CNTS sur une période de 9 ans (1er janvier 2005 – 31 décembre 2013) 22 Incidence de la déclaration des IT par année pour 1000 PSL distribués L’incidence moyenne • Tunis = 0.5 ‰ • France= 2.5 ‰ • Lausanne= 4.2 ‰ • Casablanca= 0.5 ‰ • Sous-déclaration • Variable d'un pays à un autre 23 Causes de la sous-déclaration des IT o La non information des acteurs impliqués de l’importance de ces déclarations o Le manque de traçabilité o La banalisation de certains IT sans gravité o Un problème de communication entre les différents établissements (En Tunisie la déclaration se fait encore sur support papier) • Pour y remédier o Des formations continues o Généralisation d’un guide de remplissage de la FIT o Un réseau informatique 24 Répartition des IT selon le PSL incriminé En France et en Suisse Les CP: PSL les plus incriminés dans les IT, suivis par les CGR En Tunisie: Utilisation non systématique de CGR appauvris en leucocytes 25 Critères de classification des IT en fonction du grade de gravité 26 Répartition des IT selon le grade de gravité En France: Grade 1: 94% Grade 3: 4.2% Grade 2: 1.1% Grade 4: 0.7% IT de grade 0 • Importants à déclarer • Mise en évidence de dysfonctionnements souvent méconnus • Non précisés par la circulaire 24/2007 27 Critères de classification des IT en fonction de l’imputabilité Au niveau de la circulaire 24/2007 : les différents degrés ne sont pas définis 28 Répartition selon le degré d’imputabilité En France: Degré 3: 37% Degré 4: 17% En Tunisie Les acteurs de l'hémovigilance ne déclarent pas tous les IT où la transfusion n'a pas été clairement impliquée. L'imputabilité est appréciée par les services cliniques avant de mener l'enquête immunohématologique qui révèle parfois que l'imputabilité n'est pas certaine. 29 Répartition des IT en fonction du délai de survenue IT immédiats : 37% 30 Répartition selon le sexe des patients Allo-immunisations (antileucocytaires / antiérythrocytaires) dues aux grossesses 31 Répartition des IT en fonction des signes cliniques observés Syndromes frissons-hyperthermie IT immédiats les plus fréquents A Lausanne: 57.9% A Casablanca: 62% 32 Les syndromes frissons-hyperthermie • Intérêt clinique des SFH: peuvent représenter le seul signe d'une incompatibilité immunologique ou d'une contamination bactérienne. • Toujours réaliser un diagnostic différentiel devant ce type de réactions • Pour les cas où l'origine est immunologique o La transfusion de PSL frais o Déplasmatisation o Déleucocytation 33 Répartition des IT en fonction du diagnostic étiologique 34 Réactions allergiques • • • • • • • France : 15.4% : 3ème place Casablanca: 26% 2ème place Lausanne: 21.9% Tunis: 30.84% la plus fréquence Réactions souvent bénignes Parfois des réactions anaphylactiques graves Mesures préventives (anti-histaminiques, déplasmatisation) 35 Incompatibilité leucocytaire • En Belgique: 29% • A Tunis : 19.31% : Sous-déclaration • Le plus souvent en relation avec la transfusion de concentrés de plaquettes et plus rarement avec les CGR. • Prévention de l’allo-immunisation: o Déleucocytation des PSL • Prévention de l’inefficacité plaquettaire: o Absence d’un répertoire typé HLA de donneurs de plaquettes o Compatibilité leucoplaquettaire: CUP compatibilisé o Pool de CSP 36 Allo-immunisation érythrocytaire • En France: 36.4%: diagnostic étiologique le plus fréquent • A Tunis: 3.11% • Réactions souvent banalisées • Pour prévenir: Prescrire systématiquement du sang phénotypé pour les malades polytransfusés • La mention de la pathologie sur la demande de sang permet au centre de transfusion ou banque du sang de rattraper un éventuel oubli de la part du prescripteur. • La demande de qualification « phénotypé » : en fonction de l'espérance de vie 37 Incompatibilité ABO • • • • • • • • En France: 0.7% A Casablanca: 4% A Tunis: 2.49% Accidents hémolytiques immédiats Aucun décès Ces incidents transfusionnels = normalement prévisibles Le résultat d'une erreur humaine évidente Pour les prévenir: o Sensibiliser les acteurs impliqués sur le danger de ces accidents. o Insister sur l’importance du test ultime au lit du malade 38 Incompatibilité dans d’autres systèmes érythrocytaires • 0.62% (Duffy, Kidd) • Prévention: Insister sur o Les règles de prélèvement et de phénotypage o Les règles de la RAI o Les règles d'utilisation de sang phénotypé et compatibilisé o Les règles de prescription, de distribution et de contrôle des PSL distribués o Les procédures d'identification du PSL et du patient 39 CGR hémolysé • 2.7%: fréquence non négligeable • Un accident était à l'origine d'un décès par hyperkaliémie chez un nourrisson âgé de 2 mois et demi en 2012. • Ces réactions pourraient être évitées avec o De meilleures conditions de conservation o Un contrôle visuel de la qualité du CGR lors de la transfusion o Le contrôle ultime au lit du malade 40 TRALI Œdème pulmonaire lésionnel post-transfusionnel « TRALI » Tranfusion Related Acute Lung Injury 41 TRALI • En France: 1.1%. • En Tunisie: suspicion dans 1.5% des cas o Arguments cliniques o Arguments radiologiques o Arguments thérapeutiques (évolution rapidement favorable sous oxygénothérapie) • Un seul cas a été confirmé par la mise en évidence des Ac anti-HLA chez le donneur du PSL. • La prévention repose sur: o Le retrait du circuit transfusionnel de tous les PSL issus du don incriminé o Informer le donneur: ne plus se présenter pour un nouveau don. 42 Surcharge volémique • La transfusion rapide ou massive de PSL peut provoquer chez certains malades un œdème pulmonaire de surcharge: TACO (TransfusionAssociated Cardiac Overload) • Casablanca: 2% • France: 3.5% • Tunisie : 0.62% • Faible fréquence: o Sous-déclaration des TACO o Diagnostic de TRALI fait par excès aux dépens de celui du TACO. 43 Incidents bactériens • • • • France: 0.2% Tunisie : 1.24% Incidents bactériens sous-déclarées? Diagnostic clinique et étiologique difficile: o La diversité des manifestations o L’absence de manifestation clinique spécifique o L’existence de nombreuses autres causes, liées aux pathologies sous-jacentes (contexte septique préexistant) 44 Incidents bactériens • o o o o o o o o o o o Pour les prévenir, il faut insister sur: La sélection des donneurs La numération globulaire Le choix des dispositifs de prélèvement L’hygiène dans l’environnement du don La désinfection du point de ponction Le détournement des 30 premiers millilitres Le pré-stockage à 20 ◦C La leuco-réduction systématique L’utilisation du système clos Le stockage, le transport L’examen visuel 45 Séroconversions virales • Rares mais existent • Risque résiduel dû à la fenêtre sérologique silencieuse • En France, sur 9 ans (2000-2008), ont été rapportées o 1 contamination par le VHC , 2 par le VIH , 4 par le VHB • A Tunis : 0.6% o 1 séroconversion pour le VHB et 1 pour le VHC • Sous-déclaration de ces incidents infectieux: très probable • Difficulté de pouvoir refaire une sérologie pour le donneur afin de confirmer l'hypothèse d'un don contaminé •La Le suivi desdes receveurs probablement pas réalisé dans diminution risques n'est de contamination repose actuellement sur:certains cas : séroconversions virales qui passent inaperçues o Une stricte sélection des donneurs o L'introduction de nouveaux tests comme le DGV o L’amélioration des "performances" de ceux existants 46 Etiologie inconnue ou indéterminée • France: 10% • Tunis : 31.46% o 16.5%: diagnostic étiologique indéterminé o 14.95%: diagnostic inconnu • Ces fréquences élevées: o Manque de prélèvements (malade ou PSL) o Insuffisance des investigations complémentaires qui permettraient d'aboutir à des diagnostics certains, possibles ou probables. 47 Erreurs pré-transfusionnelles • • • • • Lausanne: 6.9%. Tunis : 0.93% Ces erreurs sont probablement sous-déclarées. Leur gravité n'est pas négligeable. Ces erreurs devraient être déclarées systématiquement comme pour le reste des IT afin de pouvoir en analyser les causes. • Du point de vue réglementaire, la circulaire n'a pas abordé ce point. 48 Conclusion • L’hémovigilance: Agir pour améliorer la sécurité transfusionnelle • Améliorer notre réseau d'hémovigilance – Formations continues – Guide d’utilisation de la FIT – Un réseau informatique pour la déclaration – Circulaire 49 Remerciements Pr Houda KAABI Dr Leila BEN HAMED 50 Merci pour votre attention 51