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Petit guide du Verdi à l'usage des snobs ignares
N° 201 Semaine du 26 février 2001 au 04 mars 2001
Cent ans après sa mort, il irrite toujours, le grand compositeur. Trop populaire, pas assez moderne, selon
les canons wagnériens. Pourtant, il offre une étonnante source d'inspiration novatrice.
Auteur : Duteurtre Benoît
Nous voici au coeur du cyclone verdien: une demi-douzaine de biographies éditées ou rééditées, une vague de
parutions discographiques, des productions d'opéras, un spectacle géant à Bercy, des spots télé pour nous tenir au
courant de cette activité fiévreuse... Chaque année,
l'actualité musicale prédigérée sélectionne ainsi quelques
événements, destinés à soutenir le marché du disque,
exsangue. Le plus impressionnant du genre fut, en 1991,
le bicentenaire de la mort de Mozart, avec sa flopée
d'intégrales, de nouveautés, de rééditions qui - sans
révéler de chef-d'oeuvre inconnu -, ont surtout exhumé
une collection de fonds de tiroir parfois dignes de rester
dans l'oubli !
En 2001, des organisateurs d'anniversaires inspirés
auraient pu célébrer le bicentenaire de la mort de
Cimarosa - merveilleux compositeur d'opéras bouffes
italiens; ou le centenaire d'Henri Sauguet, compositeur
du ballet les Forains ou de l'opéra la Chartreuse de
Parme. Plus prompte à suivre le marché qu'à le
précéder, la presse accompagne de ses flonflons le
centenaire de la mort de Giuseppe Verdi, qui n'avait
besoin pas de cela pour être populaire... à moins que
l'occasion s'avère favorable, si cette bruyante
commémoration permet de battre en brèche certains
lieux communs répandus, depuis un siècle, sur le compositeur de Rigoletto.
Un musicien traditionaliste
Car, malgré cette immense popularité (et probablement à cause d'elle), Verdi a toujours irrité une bonne partie du
milieu musical et du public snob, comme un artiste surévalué. Selon la doxa officielle - répétée dans les livres
d'histoire et reprise par nombre de commentateurs -, ses débuts seraient marqués par la banalité et la vulgarité de
l'inspiration; après quoi Verdi aurait gravi lentement les échelons de l'art lyrique, pour donner quelques
chefs-d'oeuvre à la fin de sa vie, en particulier ses deux derniers opéras: Otello et Falstaff.
Pour comprendre cette idée, il faut remonter au milieu du XIXe siècle, quand les musiciens italiens régnaient sur la
vie musicale européenne. Inventeurs de l'opéra, ils avaient fixé les règles du genre, avec ses ouvertures, ses airs,
ses ensembles, ses récitatifs. Fidèle à la tradition incarnée avant lui par Rossini ou par Donizetti, le jeune Verdi
devait connaître rapidement le succès en Italie et en France. Mais, au même moment, l'avant-garde romantique
cherchait à briser les conventions. Des artistes comme Berlioz et, surtout, Wagner rêvaient d'un opéra plus souple,
moins figé dans son découpage, plus riche dans son écriture symphonique. Le «drame lyrique» wagnérien marque
le triomphe de cet art nouveau et l'un des points de départ de notre «modernité». Tous les grands compositeurs du
début du XXe siècle allaient suivre ce sillage, d'une manière ou d'une autre: Debussy, Janacek, Strauss, ou même
Puccini.
Le XXe siècle musical s'est ainsi défini «contre» la tradition italienne, avec une sévérité excessive (en dénigrant des
ouvrages que Wagner savait pourtant admirer-lui qui fit l'éloge de Bellini). Dans cette perspective, Verdi
apparaissait comme un compositeur étranger au mouvement de l'histoire.
Et ses oeuvres françaises ?
Même ses chefs-d'oeuvre de la maturité - la Traviata ou le Trouvère- semblaient enfermés dans des formules
conventionnelles, avec leurs airs héroïques et leurs accompagnements en rythme de valse. Seul le vieux Verdi
intéressait l'Europe wagnérienne, parce que ses dernières oeuvres - composées après la mort du compositeur de
Tristan - flirtent avec le modèle allemand, en délaissant les airs et les ensembles traditionnels. De nos jours encore,
le wagnérisme exerce une influence dominante sur la pensée musicale - comme un point de départ de notre
«modernité». Mais il se trompe en jugeant Verdi à l'aune de Wagner. Agacé par ces comportements, Alberto
Moravia écrivait dès 1963: «Le retour de Verdi aujourd'hui est fondé sur un malentendu fondamental, celui de
vouloir rechercher et revaloriser en lui un caractère de modernité. Verdi n'est en rien un moderne: au XIXe siècle, il
était déjà un anachronique.» De fait, si Verdi reste fidèle à une tradition antérieure, il sait lui insuffler un
extraordinaire accent dramatique, une énergie sans précédent dans l'histoire de l'opéra. Il manie l'architecture
musicale avec subtilité, dans un opéra vraiment personnel. En somme, s'il ne participe pas directement au
«mouvement historique», il porte l'ancienne tradition à un sommet d'accomplissement - exactement comme Bach ou
Mozart.
Aborder Verdi pour lui-même serait probablement l'effet le plus bénéfique de ce centenaire: ne pas négliger les
oeuvres de jeunesse, mais savoir au contraire déceler, dans Ernani, Attila, Macbeth, le génie théâtral naissant, la
spontanéité mélodique, l'efficacité naturelle des moyens les plus simples; redécouvrir les chefs-d'oeuvre de
maturité, notamment la géniale trilogie (Rigoletto, la Traviata, le Trouvère), sans négliger certains ouvrages moins
prisés par les scènes d'opéra, comme la Force du destin, Simon Boccanegra ou les Vêpres siciliennes; admirer la
fraîcheur et l'invention du vieux Verdi, à.'Aida à Falstaff- sans faire de ces pages le nec plus ultra. Mais aussi aller
redécouvrir certains aspects négligés de cette oeuvre: comme la carrière française de Verdi, qui - comme tous les
compositeurs italiens du XIXe siècle - passa une grande partie de sa vie à Paris. Pour le public français et en langue
française, il a composé plusieurs opéras qu'on préfère aujourd'hui interpréter en italien (Don Carlos, les Vêpres
siciliennes, Jérusalem) et l'on peut s'étonner que nos maisons d'opéra ne songent pas à en faire des fleurons de
leur répertoire.
L'alternative à Wagner
A sa mort, en 1901, Verdi était une gloire universelle, grâce à l'engouement du public, tandis que Wagner était le
dieu des artistes et des intellectuels. Un siècle plus tard, la situation n'a pas tellement changé et chacun des deux
génies conserve son impact. Mais le système wagnérien a fini par s'épuiser à son tour, telle une nouvelle
convention lyrique imitée sans fin par les compositeurs, avec sa discontinuité mélodique et sa prééminence
orchestrale. Dès le milieu du XXe siècle, certains compositeurs comme Igor Stravinski - pressés de rompre avec le
modèle wagnérien ont trouvé chez Verdi une source d'inspiration. Ainsi le compositeur «attardé», fort de son instinct
théâtral et de son génie mélodique, révèle-t-il sur le tard une étonnante force novatrice
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