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AS/Soc/Inf (2002) 2
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- avoir consulté au moins un autre praticien indépendant, qui doit voir le patient et certifier par écrit
que le médecin traitant a bien respecté les quatre premiers critères;
- enfin, le médecin doit employer les moyens adéquats pour mettre fin à la vie du patient ou pour
l’assister dans son suicide.
Il est évident que ces critères donnent un rôle essentiel au médecin. Le patient doit prendre une
décision volontaire et bien considérée et le médecin doit le consulter à chaque étape. Mais, au bout
du compte, c’est l’action du praticien qui est soumise à vérification et c’est lui qui porte l’ultime
responsabilité. Cela montre les limites du libre-arbitre du patient : aux Pays-Bas, il n’a pas le droit à
l’euthanasie et le médecin n’est pas obligé d’accéder à sa requête.
Quand un médecin est confronté pour la première fois à une telle demande, il trouve souvent que la
décision est bien difficile à prendre. Nous avons donc formé une équipe de consultants expérimentés,
qui peuvent aider leurs collègues à prendre une décision prudente et respectueuse des critères de
minutie.
Je reviens à l’histoire de notre législation. En 1990, avant le vote de la première loi, le gouvernement
de coalition entre sociaux-démocrates et démocrates-chrétiens commanda une étude sur les effets
réels de l’euthanasie et des autres décisions médicales de mettre fin à la vie. Une étude identique fut
conduite à nouveau cinq ans plus tard. Elles firent toutes deux l’objet d’une grande attention dans le
monde : c’était la première fois que ce sujet sensible était l’objet de travaux objectifs, grâce à des
questionnaires et des à entretiens approfondis avec des médecins auxquels l’anonymat était garanti.
En 1995, l’étude a montré que 2,4 % de l’ensemble des décès étaient dus à une euthanasie ou à un
suicide assisté et que seulement un tiers des demandes étaient satisfaites, les médecins répondant
aux autres par un nouveau palier dans le traitement de la douleur. Dans les deux tiers des cas
d’euthanasie, le patient était atteint d’un cancer en phase terminale. Dans 70 % des cas, la mort était
donnée par le médecin de famille, au domicile du malade.
Les deux études montrent que dans bien des cas, l’état du patient l’empêchait de faire connaître sa
volonté. Cela a prêté à un certain nombre de fantasmes et d’histoires horribles. La vérité, c’est que les
patients avaient clairement indiqué, avant d’être dans cet état, qu’ils ne souhaitaient plus continuer à
vivre à ce stade de la maladie. La plupart souffraient de cancers et les médecins étaient convaincus
d’avoir agi conformément à leurs souhaits. Dans tous les cas, les praticiens avaient respecté les
critères de minutie.
Après l’étude de 1990, le gouvernement décida que les médecins devaient informer le procureur
lorsqu’ils procédaient à une euthanasie et ce dernier appréciait l’opportunité de la décision et le
respect des critères de minutie. Dans ce cas, il n’engageait pas de poursuites. Mais il est apparu en
1995 que, bien qu’ils aient tous respecté les critères, seulement 40 % des médecins avisaient le
parquet - ce taux était même tombé à 30 % deux ans plus tard -, tout simplement parce qu’ils ne se
considéraient pas comme suspects de meurtre.
Le gouvernement suivant retira donc à la justice l’appréciation des actes des médecins pour la confier
à des commissions de contrôle, présidées par un juriste assisté d’un médecin et d’un spécialiste de
l’éthique. Si cette commission concluait au respect des critères, elle informait le procureur qu’il n’y
avait pas lieu de poursuivre. Ces commissions furent opérationnelles en 1998. la même année, la
coalition au pouvoir proposa de franchir une étape supplémentaire en accordant automatiquement
l’immunité au médecin dont la commission avait jugé l’action régulière. Le gouvernement soumit cette
proposition au parlement et c’est ainsi qu’est née notre législation actuelle. Depuis que le nouveau
texte est entré en application en avril, le rôle des commissions de contrôle est encore plus important
puisqu’elles sont devenues, à l’exception de quelques cas particuliers, de véritables instances de
jugement.
Nous avons choisi cette architecture légale parce que 90 % de la population pense qu’un médecin qui
pratique l’euthanasie ne doit pas être poursuivie, parce que la Cour Suprême a rejeté l’idée
d’exception médicale, parce que le corps médical souhaite que son action ne soit appréciée que par
des commissions de contrôle juridiquement et médicalement compétentes. Il est, bien sûr, trop tôt
pour faire un bilan de l’application de la nouvelle loi.
Enfin, je veux indiquer à Madame la Présidente qu'aux Pays-Bas, tout le monde bénéficie d'une