suivi et collaboration interdisciplinaire
La non-adhésion chez cette patiente impliquait une
gestion non rationnelle des médicaments et du matériel
médical (par exemple : surstockage, conservation dans des
conditions inadéquates, etc.). Sa prise médicamenteuse
permettait toutefois d’atteindre les objectifs thérapeutiques.
Rôle des intervenants médicaux
Chez cette patiente, la coordination entre les différents
partenaires de santé a été nécessaire pour améliorer le
suivi et avoir une bonne qualité des soins. La collaboration
interdisciplinaire a permis d’améliorer la gestion des mé-
dicaments et du matériel médical et de sécuriser leur cir-
cuit d’approvisionnement.
Médecin de premier recours
La qualité de la relation va indiscutablement influencer
la confiance que le patient place dans son thérapeute,
avec des répercussions sur l’adhésion thérapeutique. Le
traitement sera mieux suivi lorsqu’il découle d’une déci-
sion libre et réfléchie de la part du patient plutôt que
d’une imposition arbitraire de la part du médecin, d’autant
plus s’il s’agit d’une maladie chronique.6 Le MPR doit pri-
vilégier l’acte d’information et d’éducation dans lequel la
communication médecin-malade joue un rôle essentiel. Il
doit être au courant de l’histoire personnelle du patient,
de ses représentations sociales, de ses croyances, de sa
personnalité, de ses besoins, de ses désirs et de ses craintes.
Le niveau d’anxiété et le
status
émotionnel peuvent induire
un décalage entre l’information donnée par le MPR et celle
reçue par le patient. Le MPR ne peut obliger le patient à se
soigner mais va le motiver à adhérer au mieux aux pres-
criptions, optimiser et simplifier les traitements dans la
forme la mieux acceptée, limiter les manifestations indési-
rables en sélectionnant les médicaments les mieux tolé-
rés, en respectant les contre-indications, les interactions
ainsi que les prises en compte d’échecs antérieurs. En
bref, donner tout son sens à la prescription. Le MPR doit
tout mettre en œuvre pour aider le patient dans le suivi
thérapeutique : remise d’une information écrite, semainier,
soutien social suffisant.
Pharmacien
L’un des rôles du pharmacien est d’être un membre du
réseau informel, constitué autour des patients par les dif-
férents intervenants. Lors du renouvellement de prescrip-
tions ou d’achat d’articles d’hygiène ou de soins, il est pos-
sible d’observer les évolutions de la situation du patient
selon, par exemple, ses comportements, demandes ou
plaintes par rapport à son état de santé ou ses médica-
ments. Selon les informations récoltées, le pharmacien doit
contacter le médecin prescripteur (idéalement le MPR) afin
de faire part de ses observations.7,8 Dans le cas présent, les
différentes demandes répétées de la patiente, sous forme
de téléphones ou de messages écrits transmis par son
conjoint, ont éveillé la vigilance de l’équipe de la pharmacie.
En effet, la patiente demandait régulièrement des embal-
lages de médicaments ou de bandelettes d’autocontrôle
alors que, sur la base des dates de remise et des posologies,
des quantités suffisantes pour plusieurs semaines, voire
mois, lui avaient été remises. Le dialogue téléphonique avec
la patiente, lui rappelant les quantités délivrées et l’invi-
tant à vérifier ce dont elle disposait à domicile, n’a pas eu
d’impact sur ses demandes. Ce type de situation peut être
relativement inconfortable pour l’équipe de la pharmacie.
En effet, ce sont souvent différents interlocuteurs qui com-
muniquent avec la patiente. Un certain temps et le regrou-
pement de notes dans le dossier pharmaceutique de la
patiente peuvent être nécessaires avant d’identifier le ca-
ractère récurrent de la problématique. De plus, sans accès
au dossier médical, le pharmacien n’a pas connaissance de
diagnostics n’ayant pas entraîné la prescription d’un médica-
ment, par exemple ici, l’identification de troubles cognitifs.
Dans ce cas, la pharmacie a transmis des éléments factuels
sur la fréquence et la nature des demandes récurrentes de
la patiente en les mettant en rapport avec les quantités
délivrées. Sur la base de ces observations, le but de la
pharmacie était de savoir si d’éventuels troubles cognitifs
pouvaient être à l’origine des demandes de cette patiente
et si un cadre pouvait être convenu afin de les prendre en
charge de manière adéquate : utilisation rationnelle de mé-
dicaments tout en maintenant un lien permettant un suivi
adéquat de la patiente.9 Le diagnostic de syndrome de
Diogène ayant été posé, un réseau incluant la pharmacie a
été créé autour de cette patiente afin de répondre de ma-
nière uniforme et adéquate aux différentes demandes (in-
cluant notamment la préparation de semainiers par la
pharmacie).
Infirmière à domicile
L’infirmière à domicile identifie les patients à haut ris que,
les motivations du patient à se prendre en charge. Pour
cette patiente, le rôle de l’infirmière était de reconnaître
les signes et critères permettant le repérage du syndrome
de Diogène tels que l’entassement d’objets, la condition
de vie insalubre, la négligence corporelle et vestimentaire,
le refus d’aide et l’isolement social. Les conséquences de
l’insalubrité peuvent conduire à une menace pour la santé
du patient et de son voisinage. L’accumulation d’objets peut
être une menace pour la sécurité, interférer avec l’usage
normal des lieux, rendre le passage difficilement acces-
sible, et comporte le risque d’incendie, les problèmes de
voisinage et les risques d’exclusion.
conclusion
Le syndrome de Diogène est une catégorie diagnos-
tique polymorphe et complexe nécessitant une prise en
charge multidisciplinaire. Le MPR, pivot de cette collabo-
ration, assure la bonne coordination des soins, met en
place des mécanismes de communication efficaces et véri-
fie l’atteinte des objectifs. Le fonctionnement en équipe
multidisciplinaire a eu comme résultat une amélioration
de l’état de la patiente et de sa prise en charge. De plus,
le renforcement du message venant de plusieurs parte-
naires de santé peut avoir un impact positif sur l’accepta-
tion de la prise en charge auprès de certains patients, en
particulier lors de pathologies chroniques. En outre, cette
collaboration interdisciplinaire a permis de mieux protéger
les professionnels de santé contre le sentiment d’épuise-
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