L’enquête menée par l’assistant social du service révèle que Mme P est connue des
services sociaux ; c'était sa cousine qui avait fait un signalement mais Mme P. a toujours
refusé toute aide extérieure.
Il est donc décidé d’organiser une visite à domicile à laquelle participent l’assistant social
ainsi qu’un des médecins du service, afin de mesurer la dégradation avant toute prise de
décision, en particulier sur le mode d'hébergement ultérieur ou une éventuelle mesure de
protection juridique.
La visite au domicile confirme l’insalubrité et l’ incurie extrême du domicile, témoin de
l’absence ancienne de soins d’hygiène.
A l’intérieur du domicile régnait une odeur nauséabonde liée à l’accumulation de
nourriture dans un coin de l’appartement ;
certaines pièces étaient inaccessibles du fait de l’entassement de multiples piles de
magasines et autres objets divers.
Le lit de la patient n'était pas accessible non plus, et n'avait pas dû être utilisé depuis au
moins plusieurs semaines (mois ou années ?) puisqu'il était complètement recouvert lui
aussi d'objets hétéroclites, et c'est un fauteuil qui semblait faire office de lit.
De plus, ils ont pu constater un état de dégradation important des lieux, nécessitant
d’importants travaux : murs vétustes; électricité à refaire; pas de douche ni baignoire, juste
un lavabo avec lequel la patiente devait faire sa toilette; aucun électroménager, juste un
réchaud à pétrole dans un coin ; et toujours et encore des piles de livres, CD, magazines
anciens...qui s'accumulent dans chaque recoin, sur chaque meuble.
Le diagnostic de syndrome de Diogène qui était suspecté a définitivement été
confirmé par cette visite.
S’est ensuite posée la question de la suite de la prise en charge : quel hébergement? Faut-il
mettre en place une mesure de protection juridique ?
Si Mme P. réclame depuis le début un retour au domicile, il paraît impossible qu’elle y
retourne.
Même si le ménage est fait, de nombreux travaux de peinture, électricité, rachat de
matériel sont à prévoir. Mme P, propriétaire de son appartement, ne touche qu'une maigre
retraite et n’a pas l’argent nécessaire.
De plus, elle ne trouve pas ces travaux indispensables et ne veut de toute façon pas
entendre parler d’aide au domicile, ce qui laisse présumer un risque important de récidive.
Il a été donc été décidé au cours d’un staff du service par l’ensemble de l’équipe médicale
et paramédicale du service qu’un retour à domicile n’était pas envisageable, et qu’il fallait
donc envisager une institutionnalisation pour Mme P.
Après 1long refus, la patiente a fini par accepter un projet d’hébergement en foyer
logement, avant aboutissement des démarches pour l’institutionnalisation en maison de
retraite, et une mesure de curatelle a été mise en place.
Discussion :
Mme P constitue le seul cas de syndrome de Diogène rencontré au cours de mon cursus
médical.
Et il m'a semblé que la prise en charge de ces patients était délicate et complexe.
En effet, c’est de façon fortuite, au décours d’une pathologie médicale intercurrente que le
syndrome de Diogène de Mme P. a été découvert.
Au départ, il s’agit d’une patiente parfaitement autonome et qui ne présente pas de trouble
des fonctions supérieures, ni de trouble psychiatrique évident.