VOLUME 4, NO. 1 PRINTEMPS 2012 DANS CE NUMÉRO Notre invité : Greg Wirtz « De nos archives » – une nouvelle chronique! Croissance du secteur des croisières au Canada L’environnement et l’économie peuvent-ils tous deux gagner avec le projet pipelinier Northern Gateway? Lignes directrices sur l’échange d’information entre pilotes et capitaines Message du Président Depuis la crise économique de 2009, les gouvernements, particulièrement dans le monde occidental, ont été confrontés aux défis de contenir l’endettement et d’amorcer une relance économique durable. Bien que le Canada soit dans une meilleure position que beaucoup d’autres, notamment en ce qui a trait au rapport entre la dette et le PIB, la lenteur de la croissance économique et une dette publique élevée demeurent des défis qui, comme dans bien d’autres pays, doivent être relevés. Le budget du gouvernement fédéral, présenté par le ministre des Finances, Jim Flaherty, le 29 mars, reflète ces préoccupations, particulièrement en termes de réduction du déficit. La plupart des Canadiens sont maintenant au courant du fait que le gouvernement diminuera ses dépenses de 6.9% et que près de 20 000 postes seront éliminés au sein de la fonction publique. Des compressions d’une telle ampleur ne peuvent être apportées qu’après un examen rigoureux des priorités et de la valeur ajoutée de chaque dépense. Dans certains cas, le gouvernement a décidé que certaines activités devaient être éliminées ou que leur portée devait être réduite (e.g., le programme Katimavik ainsi que la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie). Le gouvernement a également fait part de son intention d’examiner la possibilité de livrer certains services selon des modes alternatifs. Le système de pilotage maritime canadien est encadré par la Loi sur le pilotage. La performance du système est supervisée par Transports Canada, les tarifs de pilotage tombent sous la juridiction de l’Office des transports du Canada et le service est livré par des sociétés d’État fédérales. On peut aisément comprendre dans ce contexte que non seulement les pilotes, mais plusieurs autres au sein de la communauté maritime, s’intéressaient à la question de savoir si les décisions du gouvernement concernant les opérations et programmes fédéraux pouvaient avoir un impact sur le pilotage. En fin de compte, le budget de M. Flaherty ne contenait pas de modifications du système de pilotage canadien et il n’y a pas non plus de signes que cela soit à l’agenda gouvernemental. Il y a de bonnes raisons à cela. Les opérations en matière de pilotage sont menées de manière efficace et atteignent les objectifs de sécurité et d’efficience mis de l’avant par le Parlement. Le pilotage ne coûte rien aux contribuables puisque ce sont les utilisateurs du service qui en défraient le coût et le système est auto-suffisant sur le plan financier. Les utilisateurs en tirent une réelle valeur ajoutée, comme le pays dans son ensemble d’ailleurs. Les transits des navires sont optimisés et se déroulent sans accidents, bénéficiant au commerce canadien et, ultimement, à l’économie du pays. Tout cela est de plus réalisé dans ce qui peut être décrit, à mon avis, comme un remarquable esprit de collaboration entre les divers intervenants y compris les responsables des politiques gouvernementales, les pilotes, les administrations de pilotage, les compagnies de transport maritime, les administrations portuaires, les expéditeurs et la garde côtière. En ce qui me concerne, la véritable leçon à tirer de tout ceci n’est pas de se féliciter en raison de l’excellent travail ou de se flatter égoïstement d’avoir en quelque sorte échappé au couperet, mais tient plutôt à la réalité simple que livrer une bonne performance requiert une constante attention aux détails, une attention sincère et considérée des besoins des autres et que le fait de chercher à continuellement s’améliorer est la règle du jour, à chaque jour. L’autre leçon est qu’un travail bien fait est une récompense en soi. Simon Pelletier Notre invité : Greg Wirtz À la suite du tragique accident du Costa Concordia, nous sommes touchés par le sentiment de solidarité que nous avons senti au sein de l’industrie et il nous apparaît important de s’assurer que tous les partenaires de notre secteur soient tenus au courant d’un certain nombre d’initiatives présentement en cours. En tout premier lieu, nous tenons à exprimer nos plus sincères condoléances aux familles et aux amis des victimes. Les circonstances de cet accident ont été proprement extraordinaires et uniques et, en raison de ce fait, il est d’autant plus important de bien comprendre et mettre en application toutes les leçons que nous pouvons en tirer pour l’avenir. Nous rendons également hommage aux courageux efforts de la garde côtière italienne et des nombreuses personnes qui ont appuyé les efforts de sauvetage et d’évacuation. Note de l’éditeur : Greg Wirtz est impliqué dans l’industrie des croisières depuis plus de 20 ans. Avant d’être nommé Président de la North West and Canada Cruise Association (NWCCA) en 2011, M. Wirtz dirigeait les opérations et le marketing du secteur des croisières au sein du port de Vancouver, le plus important à cet égard au pays. Il y a eu beaucoup d’attention médiatique au sujet du Concordia. Puisuqe l’enquête est toujours en cours, je ne peux pas traiter de l’accident lui-même mais je tiens à présenter certaines initiatives menées par l’industrie. Les pilotes maritimes apprécient la relation positive et constructive qu’ils ont avec la NWCCA et sont heureux d’accueillir M. Wirtz comme invité de ce numéro du Pilote canadien. • E xamen de la sécurité opérationnelle : dans le cadre des efforts constants de l’industrie des croisières pour examiner et améliorer les mesures de sécurité, la Cruise Lines International Association (CLIA) a récemment annoncé le lancement d’un examen de la sécurité opérationnelle au sein de l’industrie afin d’aborder les questions de sécurité qui découleront de l’étude de l’accident du Concordia. Cet examen comportera une évaluation des facteurs humains et des aspects opérationnels les plus critiques en matière de sécurité. Il permettra aux croisiéristes de partager leurs meilleures pratiques et procédures, de consulter des experts externes indépendants et de collaborer étroitement avec l’Organisation maritime internationale, les gouvernements et les organismes de réglementation pour mettre en œuvre tout changement nécessaire. PUBLIÉ PAR L’Association des pilotes maritimes du Canada 155 Queen, bureau 1302 Ottawa, ON K1P 6L1 Téléphone : Télécopieur : Courriel : Site web : (613) 238-6837 (613) 232-7667 [email protected] www.apmc-cmpa.ca • Nouvelle politique sur les exercices d’urgence : l’industrie a mis en place une nouvelle politique sur les exercices d’urgence pour les passagers exigeant que ces exercices aient lieu avant que le navire S’il vous plaît, n’hésitez pas à nous faire part de vos suggestions et commentaires. LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 2 quitte le port au tout début du voyage. Cette politique, mise en place de manière volontaire par les membres de la CLIA, va au-delà des exigences légales actuelles qui requièrent qu’un rassemblement des passagers ait lieu dans les 24 heures suivant leur embarquement. Il s’agit de la première initiative résultant de l’examen de la sécurité opérationnelle mené par l’industrie. • Communications : l’intérêt et l’inquiétude du public au sujet de l’accident du Concordia ont été à juste titre très intenses. Les gens cherchent à mieux comprendre comment et pourquoi cet accident est survenu et à obtenir l’assurance que ce type de voyage est toujours sécuritaire. Dès le premier jour, nous nous sommes donc efforcés de donner la priorité aux communications, mettant ainsi à la disposition des médias, des représentants gouvernementaux, des partenaires de l’industrie et du public plusieurs experts techniques et une grande quantité d’informations. Nous avons répondu à des centaines de demandes et continuerons bien sûr à le faire. Au sein de toutes ces activités se trouve une question fondamentale : les navires de croisière sont-ils sécuritaires? La réponse est – sans aucune ambiguîté – oui. Les faits démontrent clairement que, par comparaison avec presque toute autre forme de loisirs de masse ou de voyages, les croisières sont l’une des activités les plus sécuritaires qui soient. Ainsi, au cours des cinq ans ayant précédé l’accident du Concordia, il n’y a eu que 16 victimes reliées à un accident ou une collision impliquant un navire de croisière alors que plus de 100 millions de personnes ont utilisé ce moyen de transport. La sécurité des passagers est prise très au sérieux par l’industrie et celle-ci va souvent bien au-delà des exigences réglementaires internationales et nationales déjà fort considérables. Bien que n’apaise pas notre tristesse au sujet des victimes du Concordia, nous sommes néanmoins fiers de la performance générale de notre industrie en matière de sécurité. Partout à travers le monde, la sécurité et la protection de nos passagers et de nos équipages est notre toute première priorité. Éphémérides AVRIL 03–04 Rencontre du Conseil d’administration de l’APMC, Ottawa 04 11è Conférence annuelle de la Fédération maritime du Canada, Canada’s World Trade Outlook, Montréal 11–13 Conférence annuelle des pilotes de la Côte-ouest nord américaine, San Francisco 23–26 Rencontre du Conseil consultatif maritime canadien, Ottawa 30–0443 è rencontre du sous-comité des normes de formation et de veille de l’OMI (STW), Londres MAI DE NOS ARCHIVES : des pilotes néo-écossais décorés de l’Ordre de l’Empire britannique Note du rédacteur : Cet article est le premier d’une série visant à illustrer des épisodes du passé qui ont une signification particulière pour les pilotes maritimes. Il y a environ un an, Cathy Enright a fait une visite au bureau de l’Association des pilotes maritimes du Canada à Ottawa, portant sous le bras un fascinant manuscrit. Mme Enright, une fonctionnaire fédérale sympathique et dynamique, apportait en effet avec elle le journal tenu par son grand-père, le capitaine Nicolas LaMont Power, de 1906 à 1954 au port d’Halifax. En 1906, « Mont » Power a débuté sa carrière au service de pilotage à Halifax. Jusqu’à son départ à la retraite en 1954, il a accompli plus de 8000 missions reliées au transit de navires dans le port. Il a piloté les plus grands navires de l’époque, y compris le Queen Mary et le Queen Elizabeth, il était présent lorsque plus de 150 corps ont été ramenés à Halifax pour être enterrés après la perte du Titanic et il était également à proximité lors du naufrage du bateau pilote Hebridean qui a fait plusieurs victimes. Durant les deux guerres mondiales, il était en service actif et a aidé à rassembler, en dépit des actions ennemies, les milliers de navires ayant formé les convois qui ont assuré un lien maritime vital à travers l’Atlantique. L’un des plus fiers moments de la carrière du capitaine Power a eu lieu en 1949, moment qu’il a partagé avec trois autres pilotes néo-écossais. En février de cette année-là, l’honorable J. A. McCurdy, lieutenantgouverneur de la Nouvelle-Écosse, a en effet décoré le capitaine Power et ses trois collègues de l’Ordre de l’Empire britannique. Leur investiture dans l’Ordre visait à rendre hommage au remarquable travail qu’ils ont accompli en tant que pilotes de port tout au long de la 2 e guerre mondiale. Le journal de bord laissé par le capitaine Power n’est pas seulement un précieux bien de famille, c’est aussi le merveilleux registre d’un demi-siècle de trafic maritime dans le port d’Halifax. Les brèves anecdotes sur la vie quotidienne de l’époque constituent aujourd’hui un document historique de grande valeur. Les entrées sont évocatrices, nostalgiques et bondées de renseignements sur un lieu et une époque révolus et presque oubliés. Par exemple : « 5 juillet 1931 – le SS Aquitania a été retardé par le brouillard entre New York et Halifax et n’est pas arrivé à temps pour accoster. Une grande réception s’est tenue à l’hôtel Nova Scotia en l’honneur de la fondation de la compagnie Cunard Line il y a 91 ans; la réception était censée avoir lieu à bord mais le navire est arrivé trop tard et il a donc posé l’ancre au mouillage de quarantaine jusqu’à 18:00, heure à laquelle il est reparti pour New York. Le port entier était bordé de gens et nous avons été salués à la sortie du port par des navires de guerre canadiens et des avions. Il s’agit du plus grand navire Cunard que j’ai piloté tandis que le navire Olympic est le plus grand navire que j’ai jamais piloté ». 11–12 Assemblée annuelle de l’Association canadienne de droit maritime, Vancouver 16–2590 è rencontre du Comité de la sécurité maritime de l’OMI (MSC), Londres JUIN 06 Assemblée annuelle, Société de développement économique du Saint-Laurent, Québec JUILLET 02–0658 è rencontre du sous-comité de la sécurité de la navigation de l’OMI (NAV), Londres SEPTEMBRE 24–2821è Congrès de l’International Maritime Pilots’ Association, Londres Voici un autre extrait du journal de bord du capitaine Power avant que nous le mettions en toute sécurité dans nos archives. « 3 mars 1938 – le SS City of Auckland est arrivé aujourd’hui. Après que le navire ait accosté au Quai 37, l’un des membres d’équipage a été transporté à l’hôpital Camp Hill où les médecins ont constaté qu’il était atteint de la variole. Le navire a reçu l’ordre de retourner au mouillage de quarantaine et G. H. Latter, qui avait piloté le navire jusqu’au port, a été également mis en quarantaine à bord. Le marin atteint de la variole est décédé et a été enterré sur l’île Lawlors. Deux garçons de salle de l’hôpital Camp Hill ont également contracté la maladie mais ont ensuite recouvré la santé. Suite à cela, environ 30 000 citoyens ont été vaccinés. » 3 LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 Le secteur des croisières au Canada : une industrie en croissance L’industrie des croisières en Amérique du Nord a connu une croissance soutenue au cours de la dernière décennie, à l’exception de 2009 qui a été une année difficile dans la plupart des secteurs. Lorsque l’économie mondiale s’est relevée en 2010, l’industrie des croisières menait le peloton, devançant la croissance de l’activité économique dans son ensemble et, en particulier, celle de l’industrie du voyage et du tourisme. L’industrie des croisières au Canada La croissance de l’industrie des croisières au Canada, bien que plus modeste que celle des États-Unis, a néanmoins été impressionnante, le nombre de passagers augmentant de 24% entre 2003 à 2007. L’essentiel de cette croissance s’est déroulée en ColombieBritannique où les ports de Campbell River, Nanaimo, Prince Rupert, Victoria et Vancouver recoupent presque les trois quarts du nombre total de passagers. Bien que des chiffres consolidés plus récents ne seront disponibles que plus tard cette année, un coup d’œil sur certains des principaux ports canadiens indique que l’industrie poursuit son élan. Ainsi, Vancouver a connu une augmentation de 15% du nombre de passagers en 2011 et prévoit une solide année 2012, tout comme Halifax et Saint John. Une croissance remarquable Les chiffres se passent de commentaires. Entre 2002 et 2009, le volume annuel des passagers a augmenté de 79%. Les faits saillants de l’année 2010 soulignent encore davantage la réussite de l’industrie en Amérique du Nord. • Le nombre des navires de la flotte a augmenté de neuf, pour un total de 176 ayant une capacité combinée de 307 707 places. • Ces navires ont transporté environ 14,8 millions de passagers autour du monde, une augmentation de plus de 10 % par rapport à l’année précédente. • 67% de ces passagers résidaient aux Etats-Unis, ce qui a fait de 2010 la première année où le nombre de passagers américains a atteint 10 millions. LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 L’impact économique de l’industrie est considérable. Les retombées économiques comprennent notamment les dépenses des passagers et des équipages pour l’achat de biens et services, y compris le transport jusqu’au point d’embarquement et les dépenses avant et après les vacances; les dépenses reliées aux services portuaires, les dépenses d’investissement pour de l’équipement ou des installations terrestres ainsi que l’entretien, la réparation et l’approvisionnement des navires. 4 En 2007, l’industrie a généré 1,1 milliard de dollars de dépenses directes au Canada par les croisiéristes, leurs passagers et leurs équipages. Elle a maintenu près de 10 000 emplois à temps plein et partiel, résultant en 642 millions de dollars de salaires, 86 millions de dollars d’impôts directs des sociétés, 112 millions de dollars d’impôts des particuliers et 200 millions de dollars supplémentaires d’impôts indirects des sociétés et des particuliers. La ColombieBritannique a bénéficié de plus des deux tiers de ces retombées, le reste allant essentiellement au Québec et aux provinces de l’Atlantique. Les ports suivent le rythme En raison de cette croissance de l’industrie, le nombre de ports d’attache en Amérique du Nord a aussi augmenté. Un port d’attache est généralement le lieu où les passagers commencent et terminent leur voyage et où les navires embarquent l’essentiel de leurs approvisionnements. Les ports d’attache ne sont pas nécessairement des destinations autant que des points d’accès vers des destinations. Un port d’attache doit idéalement être facile d’accès pour les passagers, incluant des liens aériens et terrestres aisés, une bonne capacité hôtelière, des installations des terrains de pratique de golf, des glissoires d’eau ainsi que des salles de cinéma ou des salons réservés aux adolescents. Pilotes et navires de croisière Une mesure importante pour assurer le transit sécuritaire des navires dans les zones de pilotage obligatoire est l’affectation de pilotes possédant une connaissance des conditions locales. Il en va également ainsi en ce qui concerne les navires de croisière. Plusieurs milliers de passagers et membres d’équipage sont souvent à bord des navires et la sécurité de ceux-ci constitue la priorité absolue des croisiéristes, de l’équipe à la passerelle et des pilotes. Pour cette raison, les croisiéristes, comme les expéditeurs maritimes, voient de manière favorable l’ajout d’un expert local. Comme c’est le cas dans plusieurs autres secteurs, les croisiéristes se montrent soucieux de l’environnement, allant souvent au-delà des normes réglementaires. Parmi leurs initiatives, citons les systèmes avantgardistes d’épuration des eaux usées, la réduction des émissions atmosphériques, l’usage d’éclairage DEL, d’énergie solaire, d’appareils à haute efficacité et de fenêtres à haut rendement énergétique, des revêtements de coque respectueux de l’environnement, la consommation de combustibles à faible teneur en soufre, le traitement des déchets et les économies de carburant. portuaires appropriées pour les passagers, le contrôle et la manutention des bagages ainsi que des services de douane et d’immigration. Depuis 1980, le nombre de ports d’attache en Amérique du Nord est passé de trois à plus de vingt. Le Canada en a trois : Québec, Montréal et Vancouver, de loin le plus important des trois. Pour les situer dans le contexte des autres ports d’attache en Amérique du Nord, notons que Miami est le plus actif avec 4,33 millions de passagers en 2010 alors que Vancouver a accueilli près de 580 000 passagers. Nouvelles destinations, offres innovatrices et respect de l’environnement Bien que les croisières vers les régions traditionnelles des Caraïbes, de l’Alaska et de l’Europe soient toujours populaires, plusieurs nouveaux parcours en Asie, en Afrique, au Brésil, au Moyen-Orient et en Arctique sont maintenant de plus en plus recherchés. Le succès de l’industrie est dû, en partie, à sa capacité à séduire de nouveaux marchés en diversifiant l’expérience offerte. Il se trouve ainsi un nombre accru de croisières à thème, intergénérationnelles ou familiales ainsi que des services spécialisés comme des centres de bien-être, des salles de quilles, Les navires de croisière d’aujourd’hui peuvent atteindre jusqu’à 340m de longueur alors que les vraquiers ont généralement une longueur de l’ordre de 180à 225m. Les navires de croisière sont généralement dotés d’un équipement à la fine pointe de la technologie, souvent complété par les unités de pilotage portables des pilotes eux-mêmes. Bien que la dimension des navires de croisières constitue un défi, particulièrement dans les zones portuaires où l’espace est restreint, leur manœuvrabilité est facilitée par la présence d’hélices doubles et, pour les navires plus récents, de systèmes de propulsion « azipod ». L’une des initiatives les plus intéressantes est peut-être l’installation au port de Vancouver de stations de branchement au réseau électrique terrestre pour les navires à quai. Cela permet d’éteindre les moteurs diesel du navire, réduisant ainsi les émissions dans un secteur densément peuplé. Vancouver est le premier port au Canada, et le troisième au monde, à offrir de telles prises d’alimentation à quai. Cette initiative n’est pas sans occasionner des dépenses considérables, tant pour le port que les croisiéristes. Les pilotes sont fiers du rôle qu’ils jouent dans l’industrie des croisières au Canada. Comme le souligne le capitaine Fred Denning, Vice-président de l’APMC pour la région du Pacifique, qui a mené à bon port des centaines de navires de croisière : « Piloter de tels navires est un travail exigeant. Leurs horaires serrés sont compliqués par les marées qui limitent les moments auxquels ils peuvent transiter, ce qui exige une planification soigneuse. Les virages étroits, qui ne peuvent se faire qu’à vitesse réduite, doivent être planifiés longtemps à l’avance. Mais le fait de travailler sur ces grands navires modernes et présenter notre superbe littoral à des voyageurs du monde entier est une expérience très satisfaisante ». L’augmentation de par le monde du nombre de personnes bénéficiant d’un revenu disponible substantiel, jumelé à la capacité de l’industrie à séduire une tranche de population plus large, stimule la croissance globale de l’industrie. Bien que les prévisions concernant celle-ci au Canada reflètent ce phénomène, cela ne va pas aussi sans défis. Le Canada doit en effet rivaliser avec les destinations populaires bien établies ainsi que les destinations ensoleillées. La manière dont le pays va investir dans l’expérience touristique offerte et la mettre en marché sera déterminante pour parvenir à capturer une juste part d’un marché en pleine croissance. « Il y a incontestablement de la croissance et des perspectives dans notre secteur » mentionne Greg Wirtz, président de la North West and Canada Cruise Association. « La clé est d’attirer les voyageurs vers des destinations canadiennes et de faciliter leur arrivée à celles-ci». 5 LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 Projet pipelinier Northern Gateway et forêt pluviale du Grand Ours : L’économie et l’environnement peuvent-ils tous deux être vainqueurs? L’économie du Canada dépend fortement du commerce international, en premier lieu avec les États-Unis. Accroître nos échanges commerciaux au-delà de l’Amérique du Nord constitue donc un objectif souhaitable puisque cela est de nature à tempérer l’impact que peut avoir sur nous tout ralentissement de l’économie américaine. En particulier, les marchés de l’Asie-Pacifique – aisément accessibles par les ports de la côte ouest canadienne – sont d’une importance croissante pour le Canada, surtout depuis que la Chine est devenue la deuxième puissance économique mondiale. Le Canada est l’un des principaux producteurs de gaz naturel et de pétrole brut, ses exportations – essentiellement vers les ÉtatsUnis – s’étant élevées à 60 milliards de dollars en 2009. La majeure partie des réserves de pétrole et de gaz du pays est située au nord de la Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan et dans les Territoires du Nord-Ouest. Si le Canada tient à diversifier ses exportations, le pétrole et le gaz sont certainement au haut de la liste des produits pouvant être vendus dans d’autres marchés. L’acheminement du pétrole et du gaz jusqu’aux marchés actuels se fait largement par pipelines. Environ 100 000 kilomètres de pipelines sillonnent le pays, les trois quarts transportant du gaz naturel et le reste du pétrole brut et d’autres produits pétroliers LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 6 raffinés. Les trois millions de barils de pétrole brut qui sont ainsi transportés quotidiennement rempliraient à eux seuls 5000 wagons, soit un train de 90 kilomètres. L’infrastructure existante de pipelines n’est pas destinée à servir les nouveaux marchés de la région Asie-Pacifique, au premier rang desquels figurent la Chine et l’Inde. Dans un contexte où le Canada possède des réserves parmi les plus importantes au monde et où l’on prévoit une augmentation de 35% de la demande au cours des vingt prochaines années, la construction de pipelines et de l’infrastructure portuaire permettant de transporter de manière efficace et sécuritaire les ressources de l’ouest apparaît névralgique pour diversifier nos exportations et consolider l’avenir économique du pays. Le Northern Gateway Project, proposition de 5,5 milliards de dollars d’Enbridge, est un système de pipelines d’une longueur de 1170 kilomètres qui transporterait le pétrole de la région d’Edmonton jusqu’à Kitimat, d’où il serait ensuite expédié sur des pétroliers. Ce projet controversé vise à combler le fossé infrastructurel entravant les exportations d’énergie vers l’Asie-Pacifique et à tirer profit de «l’avantage Pacifique» du Canada, résultant du fait que la traversée entre nos ports de la côte ouest et l’Extrême-Orient est plus courte (de deux jours) que de tout autre port de l’hémisphère occidental. Un tel projet n’est évidemment pas sans risques considérables. Le pipeline proposé, ainsi que les navires transportant le pétrole jusqu’aux marchés de l’Asie-Pacifique, traverseraient des zones écologiquement sensibles, y compris la forêt pluviale du Grand Ours, qui abrite l’espèce rare d’ours kermode (aussi appelés ours-esprits) et qui est l’une des plus larges étendues vierges de forêt pluviale tempérée au monde. Cela augmenterait également de 250 pétroliers Un retour sur… Robert Chisholm, député de Dartmouth-Cole Harbour et Megan Leslie, députée de Halifax ont eu l’opportunité de se familiariser avec le travail quotidien des pilotes maritimes alors qu’ils ont fait une sortie sur un bateau pilote dans le port de Halifax en octobre dernier. par an le trafic par le chenal marin de Douglas qui mène à Kitimat. Le projet s’inscrit aussi dans le sombre sillage du désastre de Deepwater Horizon, ainsi que de l’accident de pipelines impliquant Enbridge même, qui a entraîné le déversement d’un million de litres de pétrole dans la rivière Kalamazoo. Les mesures proposées pour atténuer les risques liés au transit des pétroliers présentent un intérêt particulier pour les pilotes. L’Association des pilotes maritimes du Canada est heureuse de s’être associée une fois de plus à l’événement “Hockey Night in St Catharines”, une initiative du député de St. Catharines, Rick Dykstra, visant à supporter l’organisation Centraide de St. Catharines. Rick est ici en compagnie du capitaine Mike Burgess, Vice-président de l’APMC pour la région des Grands Lacs. • Les navires utilisant le terminal de Kitimat seraient de construction récente et à double coque; ils feraient l’objet d’une approbation par des tiers indépendants et devraient répondre à des normes sécuritaires et environnementales strictes. • La vitesse des navires dans les chenaux serait limitée à entre 8 et 12 nœuds. • Un système radar de pointe serait déployé pour des tronçons importants du parcours, assistant les pilotes et le trafic maritime de la côte nord-ouest. Des aides à la navigation supplémentaires seraient aussi installées le long du chenal. • Les pétroliers seraient escortés pas de puissants remorqueurs. • Lors du chargement de la cargaison au terminal, les pétroliers seraient entourés de barrages flottants permettant de contenir tout déversement. En janvier dernier, une commission d’examen fédérale a commencé un processus d’évaluation du pipeline qui devrait prendre jusqu’à deux ans. Elle se déplacera notamment dans plusieurs communautés afin de considérer le point de vue des milliers de personnes ayant demandé à s’exprimer sur ce projet. La commission aura la tâche ardue de trouver un juste équilibre entre des préoccupations environnementales sérieuses et réelles et l’objectif d’assurer un avenir économique prospère par le biais de la diversification du commerce extérieur du pays, une question intimement liée à notre position d’important fournisseur d’énergie. 7 LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 Lignes directrices de l’APMC sur l’échange d’informations entre capitaines et pilotes (MPX) Des lignes directrices sur l’échange d’informations entre capitaines et pilotes – ce par quoi toute affectation de pilotage devrait débuter – ont été adoptées lors de l’Assemblée annuelle de l’APMC l’automne dernier. Ces lignes directrices sont basées sur les meilleures pratiques en la matière et reflètent notamment les prescriptions de la Résolution A960 de l’Organisation maritime internationale (Recommendation on training and certification and on operational procedures for maritime pilots other than deep sea pilots) et tiennent aussi compte des observations formulées par les quatre Administrations de pilotage du Canada. De votre point de vue LE PILOTE CANADIEN g PRINTEMPS 2012 Les lignes directrices présentent de l’information sur des sujets tels que le cadre légal applicable à la conduite des navires dans les zones de pilotage obligatoire, les plans de passage et l’utilisation de systèmes de courses automatiques. Elles se veulent un point de référence pour faciliter le développement de procédures par les Administrations et groupes de pilotes régionaux qui permet de maintenir un certain standard tout en tenant compte des procédures liées à la navigation propres à chaque endroit. Elles sont disponibles au: www.apmc-cmpa.ca. Cette photographie nous provient du capitaine Louis Rhéaume, pilote dans la circonscription de pilotage du Bas Saint-Laurent. Les pilotes maritimes opèrent par tous les temps, d’un bout à l’autre du pays, parfois en des conditions clémentes en des lieux à la beauté spectaculaire mais parfois aussi en des conditions pouvant être extrêmement éprouvantes. Nous apprécions recevoir toute photographie illustrant la profession de pilote et la nature de ce fascinant travail. 8