
Éditorial
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 mai  931
Tests diagnostiques  
de laboratoire  
hypersensibles veutil  
toujours dire hyperutiles?
Prs VALÉRIE D’ACREMONT et FRANÇOIS CHAPPUIS
Au cœur de la consultation se trouve le diag-
nostic… Ceci est aussi vrai pour la ou le mé-
decin dont la tâche principale est d’identifier 
de quelle maladie souffre son patient, que 
pour ce dernier qui veut «savoir ce qu’elle ou 
il a». Pendant longtemps, l’outil déterminant 
utilisé était la clinique, dont la fiabilité n’est 
pas aussi bonne qu’on l’espérait, en tout cas 
pour les syndromes avec un diagnostic diffé-
rentiel très large, comme la fièvre par exemple.
En parallèle, avec l’explosion de la technolo-
gie, les tests de laboratoire ont proliféré avec 
un rendu de résultat de plus en plus rapide. 
Ceci permet de prendre une décision au mo-
ment même de la consultation, mais laisse 
peu d’espace de réflexion pour s’assurer que le 
résultat du test soit vraiment utile, et surtout 
supprime le bénéfice du recul de quelques 
jours laissant souvent le temps au 
patient de guérir spontanément. 
Lors d’une pathologie aiguë né-
cessitant une prise en charge le 
jour même, cette rapidité est par 
contre un avantage indéniable.
Le médecin doit alors se poser la 
question: quel test choisir? Alors 
qu’il n’y a pas si longtemps en-
core, il n’existait qu’un seul type 
de test pour confirmer une maladie, il en 
existe actuellement souvent plusieurs qui 
ont chacun leurs particularités. Il peut d’ail-
leurs s’agir aussi bien de simples tests rapides 
immunochromatographiques –pouvant avoir 
une sensibilité équivalente au test conven-
tionnel – que de tests moléculaires multi-
plexés. Ces derniers sont souvent (mais pas 
toujours, par exemple pour les bactériémies) 
beaucoup plus sensibles que les tests utilisés 
jusqu’à présent. Cette excellente performance 
implique qu’ils vont détecter non seulement 
des pathogènes potentiellement responsables 
de la maladie mais également ceux qui repré-
sentent un simple portage ou une excrétion 
prolongée après un épisode antérieur.
Même si la très bonne spécificité analytique 
doit être saluée, la spécificité clinique par 
contre est discutable. Que dire en effet d’un 
test qui, dans les études contrôlées, est sou-
vent retrouvé positif chez les personnes en 
parfaite santé? Ceci est d’autant plus vrai que 
ces tests étant souvent multiplexés, des pa-
thogènes que l’on n’aurait habituellement 
pas recherchés (pour cause de prévalence 
très faible dans la population de patients 
considérée par exemple) vont tout de même 
être détectés. La tentation de donner quand 
même un médicament pour traiter ce patho-
gène va être évidemment grande pour le mé-
decin et le patient. Lorsqu’il s’agit d’un virus, 
un résultat positif peut aider à se retenir de 
prescrire un antibiotique qui n’aura comme 
seuls effets que de provoquer des effets 
 secondaires et d’induire des résistances chez 
le patient et son entourage. Par 
contre, dans le contexte d’une 
diarrhée par exemple, où le panel 
intestinal par PCR multiplex dé-
tecte avant tout des bactéries, 
l’incitation à prescrire un anti-
biotique (qui n’aura souvent 
 aucune incidence sur le cours de 
la maladie) est alors forte. Il con-
vient de rappeler que la recom-
mandation de l’OMS est de ne 
traiter que la shigellose, les autres bactéries 
guérissant la plupart du temps par elles-mêmes.
Dans ce contexte, on réalise vite que tout 
nouveau test introduit sur le marché doit s’ac-
compagner d’une guidance pour les cliniciens 
sur la pertinence de son utilisation dans un 
contexte déterminé et sur l’interprétation du 
résultat dans le contexte clinique (voir article 
de Rochat et coll. dans ce numéro). Ces re-
commandations, quand elles existent, sont 
souvent émises avec plusieurs années de dé-
calage, sauf peut-être dans les pays à ressources 
limitées où les garde-fous de santé publique, 
permettant de lutter contre la surconsomma-
tion médicale, sont heureusement plus solides 
Articles publiés  
sous la direction de 
FRANÇOIS 
CHAPPUIS
Service de médecine 
tropicale et 
humanitaire 
Département de 
médecine 
communautaire, de 
premier recours 
etdes urgences 
HUG, Genève
BLAISE GENTON
Policlinique médicale 
universitaire  
Département de 
médecine 
CHUV, Lausanne
CES RECOMMAN-
DATIONS, qUAND 
ELLES ExISTENT, 
SONT SOUVENT 
ÉMISES AVEC 
PLUSIEURS 
ANNÉES  
DEDÉCALAGE