Tribune de Genève | Vendredi 15 avril 2016 Economie 13
Planète réseaux
Philippe Amez-Droz *
Publicité: Brave,
vampire digital
Brave est une start-up
américaine. Elle a
développé un logiciel
destiné à remplacer les
bannières publicitaires
qui parsèment les sites des
médias par une offre combinant
les contenus d’information et de
publicité de manière adaptée aux
usagers numériques. Le concept
est, de fait, un modèle
économique destiné à contrer les
logiciels bloqueurs de publicité,
les fameux «adblocks». La
réaction des éditeurs américains
a été massive (plus de
1200 journaux) et d’une hostilité
criarde (menace de procès). Le
navigateur Brave est pourtant en
phase d’expérimentation. C’est
donc l’idée même du modèle qui
est attaquée. Avec l’énergie du
désespoir. Car Brave est perçu
comme un vampire digital.
Externe aux entreprises médias
traditionnelles qui consentent de
lourds investissements dans le
numérique tout en maintenant
le «print», Brave incarne cette
uberisation de la société tant
redoutée. Pourtant, à y regarder
de plus près, c’est bien une main
tendue que mordent les éditeurs!
Dans un dossier consacré aux
bloqueurs de pub, le magazine
français L’Express (22 mars)
titrait: «Pourquoi il faut bloquer
les bloqueurs de pub». Plus de
22 milliards de dollars de manque
à gagner rien qu’en 2015! Près de
200 millions de personnes
auraient téléchargé dans le
monde un «adblock». Or,
l’audience publicitaire n’existe
que par l’attractivité de
l’audience médiatique ou de la
«conversation» liée à une plate-
forme. D’ores et déjà, les
annonceurs trouvent meilleur
accueil ailleurs: sites spécialisés,
médias sociaux, moteurs de
recherche… à un prix bien
moindre. La publication récente
des chiffres d’audience de la
REMP met en exergue une
poursuite de l’érosion du «print».
Etonnamment, les éditeurs
tardent à utiliser l’indicateur
Audience Totale, qui conjugue
audiences imprimées et digitales.
Grave erreur. Car, loin d’obtenir
l’attention miséricordieuse des
instances politiques qui
trancheront la querelle SSR-
éditeurs privés, loin de susciter
une vague de réabonnements ou
d’achats de la presse payante
face au raz-de-marée de
l’information gratuite, les
éditeurs incitent de nouveaux
acteurs à vampiriser cette
audience publicitaire nécessaire
à leur survie.
* Collaborateur scientifique,
Université de Genève, Medi@LAB
Argent Les marchés boursiers
Indices boursiers
SMI (Swiss Market Index)
ABB N 19.23 +0.8 -9.1
Actelion N 148.70 +0.6 +24.1
Adecco N 64.40 -0.2 -19.8
CS Group N 14.53 +0.1 -44.4
Geberit N 358.20 +0.2 -2.2
Givaudan N 1926.— -0.1 +8.9
Julius Baer N 41.81 +2.4 -19.8
LafargeHolcim N 48.84 +0.7 -31.4
Nestlé N 72.60 +2.0 -5.2
Novartis N 73.35 +1.1 -25.9
Richemont N 64.45 -0.2 -22.4
Roche BJ 248.10 +1.1 -9.9
SGS N 2095.— +0.2 +11.1
Swatch Group P 334.— +0.3 -24.1
Swiss Life N 261.— +0.2 +6.5
Swiss Re N 93.50 +1.4 -2.3
Swisscom N 498.20 +0.3 -9.0
Syngenta N 405.— -0.1 +18.0
UBS N 15.53 +1.1 -18.6
Zurich Ins. N 211.30 +1.1 -31.3
Métaux précieux Monnaies (Billets)
Pétrole CLÔTURE PRÉC.
Retrouvez la Bourse en direct sur
www.tdg.ch/bourse
TITRE CLÔTURE VAR.* VAR.** TITRE CLÔTURE VAR.* VAR.**
* VAR = Variation par rapport à la veille **VAR = Variation sur un an
INDICE CLÔTURE VAR.* INDICE CLÔTURE VAR.*
* VAR = Variation par rapport à la veille
Valeurs romandes importantes
TITRE CLÔTURE VAR.* VAR.** TITRE CLÔTURE VAR.* VAR.**
* VAR = Variation par rapport à la veille **VAR = Variation sur un an
SPI 8606.64 ä+0.94%
SMI 8021.0 ä+1.09%
CAC 40 4511.51 ä+0.47%
FT 100 6365.1 +0.03%
Xetra DAX 10093.65 ä+0.67%
Euro Stoxx 50 3060.86 ä+0.71%
Stoxx 50 2872.8 ä+0.59%
Dow Jones 17926.43 ä+0.10%
Nasdaq 4945.89 -0.03%
Nikkei 16911.05 ä+3.23%
Shanghai comp. 3225.98 ä+0.52%
Bovespa 52411.02 ,-1.39%
Addex 2.77 0.0 -12.9
APG SGA 402.— +0.5 +3.7
BCGE 284.75 0.0 +17.9
BCV 689.— +1.0 +22.5
Edmond Rothschild 15900.— 0.0 +5.0
Bobst 55.— +2.8 +35.8
Co. Fin. Tradition 65.40 -0.9 +15.0
Aevis 39.95 +1.1 -13.2
Groupe Minoteries 341.75 +0.5 +0.8
Kudelski 16.60 -0.6 +27.7
Lem 810.— -1.2 -3.0
Logitech 15.90 +0.3 +15.6
Pargesa 65.20 +1.1 -4.1
Romande Energie 1050.— +7.3 -7.9
Swissquote 24.40 +1.7 -20.5
Temenos 53.30 +0.1 +51.0
Vaudoise Assur. 500.50 -0.4 -1.8
Vetropack 1586.— +4.8 -0.8
ACHAT
CHF/KG VENTE
CHF/KG ACHAT
USD/OZ VENTE
USD/OZ
Or 38264.— 38764.— 1249.10 1249.90
Ag 489.20 504.20 16.09 16.14
Vreneli 220.— 247.—
Mazout
100 l. à 15° (prix indicatif)
73 70.7
Essence
Litre (s/p 95)
1.41 1.38
Brent
Brut en USD par baril
43.99 44.69
ACHAT VENTE
Euro 1.0665 1.1285
Dollar US 0.9290 1.0010
Livre Sterling 1.3210 1.4210
Dollar Canadien 0.7240 0.7860
100 Yens 0.8440 0.9260
100 Cour. suéd. 11.4400 12.4000
100 Cour. norvég. 11.2700 12.4100
100 Cour. dan. 14.1400 15.3200
Londres
James Daunt, sauveur
d’un empire du livre
En cinq ans, l’ancien
banquier a sauvé
le numéro un
britannique du livre
Waterstones
en transformant
le modèle de vente
Tristan de Bourbon Londres
Finie la crise! Deux semaines
avant le Salon du livre et de la
presse à Genève, le Salon du livre
de Londres s’est déroulé cette se-
maine plein d’optimisme! Après
deux années de recul, les ventes
de livres en Grande-Bretagne ont
progressé en 2015 en volume
(+4%) et en valeur (+5%), selon les
données de l’institut Nielsen. Ce
rebond est avant tout dû à la pro-
gression des ventes de livres im-
primés, dont l’effondrement en
2013 et 2014 avait fait craindre le
pire aux acteurs du secteur. Leur
sauveur? James Daunt, le patron
âgé de 52 ans du groupe de li-
brairies Waterstones, numéro un
national de la vente de livres.
Entreprise surendettée
Lors de son entrée en poste en mai
2011, sa tâche s’annonçait gigantes-
que. Le secteur est en crise et Wa-
terstones, surendetté, vient tout
juste d’être sauvé de la faillite grâce
à son rachat par le milliardaire
russe Alexander Mamut pour
80 millions de francs. Plutôt que de
nommer un habitué du monde de
la distribution, le nouveau proprié-
taire opère un choix très osé en
misant sur James Daunt: un ancien
banquier devenu fondateur et
propriétaire d’une chaîne de six
librairies londoniennes.
Pour remettre le géant du livre
sur les rails, James Daunt licencie
d’emblée la moitié des responsa-
bles de magasins et un tiers des
vendeurs. «Nous n’aurions pas
survécu sans ces mesures extrê-
mes», nous a-t-il assuré. Parallèle-
ment, il rompt avec la méthode
traditionnelle d’achat de livres, qui
assurait chaque année 51 millions
de francs au groupe.
«Comme dans toutes les gran-
des chaînes du monde entier, les
éditeurs payaient pour obtenir
une bonne visibilité pour leurs li-
vres dans les magasins et pour les
intégrer aux classements des li-
braires. Nous leur avons dit: nous
ne prenons plus rien, nous ne pre-
nons que ce que nous aimons et
dans les quantités que nous déci-
dons.» Ce changement de la stra-
tégie commerciale bouleverse
l’économie de l’entreprise. Les in-
vendus représentaient entre 20%
et 25% du stock de Waterstones;
ils tournent aujourd’hui entre 3%
et 4%.
Libéré d’une activité très pre-
nante, le personnel se voit offrir
plus d’autonomie. «Nous avons
centralisé les commandes, mais
en disant aux responsables des
magasins: vous gérez vos propres
devantures, votre propre promo-
tion et vos discounts. Si vous vou-
lez commander plus de tel ou tel
livre que prévu, pas de souci, mais
vous êtes désormais responsables
de votre stock, ce qui n’était pas le
cas avant. Nous voulions mettre
fin à notre modèle de magasin
unique.»
«De meilleurs vendeurs»
Les trois cents magasins
Waterstones proposaient en effet
une offre rigoureusement identi-
que, qu’ils se situent dans un quar-
tier cossu de Londres ou une ville
industrielle du nord de l’Angle-
terre. Les effets de la diversification
des magasins se font rapidement
ressentir. «Nous sommes devenus
de meilleurs vendeurs, assure
James Daunt. Nous avons acquis la
mentalité des libraires indépen-
dants. Lorsque l’on vend ce que
l’on aime, on vend toujours mieux.
Nous sommes devenus capables de
transformer les très bons livres en
best-sellers. En revanche, les livres
moyens tournent beaucoup moins
bien.» Waterstones serait rede-
venu profitable en 2015 déjà.
Preuve de sa solidité retrouvée, le
groupe a ouvert une douzaine de
nouveaux magasins.
James Daunt, le patron âgé de 52 ans du groupe de librairies Waterstones, numéro un national de la
vente de livres. DR
La Comco a bouclé de grosses affaires en 2015
Dans son bilan annuel,
la Commission de la
concurrence (Comco) s’est
réjouie de ses décisions,
confirmées par les juges
La Commission de la concurrence
(Comco) a clôturé l’an passé plu-
sieurs enquêtes importantes. Le
gendarme de la concurrence en
Suisse est satisfait de son année et
particulièrement des deux déci-
sions du Tribunal administratif fé-
déral qui renforcent sa position.
«L’année 2015 a été exception-
nelle», a déclaré hier à Berne Vin-
cent Martenet, président de la
Comco. L’Autorité a sanctionné
de grandes affaires, comme le car-
tel des grossistes en sanitaires, les
clauses contractuelles des plate-
formes de réservation d’hôtels
ainsi qu’une entrave à la concur-
rence de Swisscom. «Ces grandes
affaires nous amènent des ensei-
gnements. Dans le domaine des
sanitaires, on voit que les accords
au niveau du marché de gros ont
des effets jusque sur les consom-
mateurs», a dit Vincent Martenet.
La Comco a aussi mis au jour
l’an dernier plusieurs cartels de
prix horizontaux (nettoyages de
tunnels, gros de plomberie, parte-
naires du groupe VW, pianos).
«C’est le cœur de notre action.
Dès que l’on a des indices suffi-
sants, on intervient», a expliqué
Vincent Martenet.
L’Autorité a également mené
en 2015 des examens approfondis
dans les concentrations d’entre-
Vincent Martenet, président de la Comco: «Les grandes affaires
nous amènent des enseignements.» REUTERS
prises, surtout dans les annuaires
en ligne, les annonces d’emplois
et de commercialisation de conte-
nus publicitaires. Cela concerne
par exemple la reprise de Ricardo
par Tamedia ou la coentreprise
publicitaire entre Swisscom, la
SSR et Ringier.
«Ce sont des marchés dynami-
ques et il est difficile de faire des
pronostics, ce qui nous pousse à
une certaine prudence», a ajouté
le président. Selon lui, le pire pour
une autorité de la concurrence est
«d’entraver l’innovation».
Interrogé sur sa position «per-
missive», Vincent Martenet a ré-
torqué que la prudence préalable
ne va pas pour autant empêcher
l’Autorité d’agir en cas de soup-
çon d’abus de position dominante
par la suite. La Comco n’est pas
démunie et possède deux outils:
la prononciation de mesures pro-
visionnelles ou l’ouverture d’une
enquête.
Au total, la Comco a mené 30
enquêtes en 2015. Dans le détail,
15 sont reprises de l’année précé-
dente, 6 ont été ouvertes dans
l’année et 9 sont des nouvelles
recherches résultant d’une sépa-
ration d’une enquête en plu-
sieurs. L’Autorité est spéciale-
ment contente des décisions ren-
dues en 2015 par le Tribunal admi-
nistratif fédéral (TAF) qui a
entièrement confirmé les déci-
sions de la Comco dans les cas de
Swisscom ADSL (une affaire de
2009) et BMW (une affaire de
2012), en rejetant les recours res-
pectifs. ATS