Circonscription A-SH de la Marne Décembre 2010 Les troubles spécifiques des apprentissages Synthèse de l’intervention du Docteur Fontaine, médecin scolaire à Reims Mercredi 1er décembre 2010 Définition des troubles spécifiques de apprentissages (TSA) Constat : Etude de l’European Association for Spécial Education : 16 à 24 % des élèves ont des besoins éducatifs spéciaux ; - 2 à 3 % en raison d’une déficience avérée ; - 10 à 15 % en raison d’une origine multifactorielle des difficultés d’apprentissage : socioculturelle, psychopédagogique, etc ; - 4 à 6 % en raison de troubles spécifiques des apprentissages (TSA). Définition : Ensemble hétérogène des troubles causés par un dysfonctionnement détecté ou non, du système nerveux central et qui n’a pas pour origine un handicap visuel, auditif ou moteur, ni un retard mental, un trouble psychoaffectif ou environnemental. Ces troubles sont : la dysphasie, la dyslexie, la dyspraxie, la dyscalculie et les troubles déficitaires de l’attention / hyperactivité (TDAH). La dysphasie La dysphasie est un trouble sévère et spécifique du développement du langage oral. Il s’agit d’un trouble structurel qui doit être différencié d’un retard de langage. - Sa prévalence est de 1 %. - Il concerne une majorité de garçons. - On décèle des cas familiaux. Le diagnostic n’est pas certain avant 5 ou 6 ans car avant cet âge beaucoup d’enfants présentent des troubles du langage oral : 7 % chez les enfants de 3 ans et demi. Le dysphasique développe son langage de façon déviante. Il a souvent un grand désir de communiquer. Il n’est pas atteint de surdité ou autre handicap. Il est conscient de son trouble. Ce trouble se retrouve souvent à l’écrit mais ce n’est pas systématique. Signes d’alerte : - peu de babillage ; - premiers mots tardifs ; - peu de baisers ; - boivent avec difficulté ; - ne formulent pas de questions vers l’âge de 3 ans ; - comprennent le langage au 1er degré et de façon concrète. Il existe différents types de dysphasie 1 - La dysphasie expressive qui comme son nom l’indique est caractérisée par des troubles de l’expression. Elle peut se présentée sous quatre formes : - La dysphasie phonologico-syntaxique qui se caractérise par une réduction verbale massive, un trouble phonologique de complexification des sons, des difficultés à produire certains sons, un trouble de l’encodage syntaxique, un lexique restreint, une bonne compréhension par le contexte. 1 Circonscription A-SH de la Marne Décembre 2010 - La dysphasie de production phonologique qui se caractérise par un défaut d’intelligibilité, des troubles d’encodage syntaxique, le manque du mot, un langage informatif, une bonne compréhension orale. - La dysphasie lexicale syntaxique qui se caractérise par une recherche permanente des mots et de la structure de la phrase. - La dysphasie sémantique-pragmatique qui se caractérise par un choix de vocabulaire inadéquat, un trouble de compréhension et un trouble de l’informativité 2 - La dysphasie réceptive qui comme son nom l’indique concentre les difficultés au niveau du décodage. Elle se caractérise par un trouble majeur de la compréhension, une difficulté à donner du sens aux sons perçus, le manque du mot et un discours incohérent et redondant. Conséquences : - risque d’isolement ; - souffrance des parents ; - incompréhension des autres enfants et des proches ; - les apprentissages scolaires très compromis : 90 % de risque d’échec scolaire. Il est souhaitable de faire un dépistage tôt car : - il n’y a pas d’évolution positive spontanée, il faut une rééducation orthophonique intensive. - Il faut un accompagnement des parents le plus tôt possible. - Il faut aussi une adaptation scolaire dès les petites classes. La Marne bénéficie d’un centre de dépistage qui est le Centre de Référence et de Diagnostic des TSA. C’est un service à l’hôpital de Reims dirigé par le docteur Raynaud Genson. A l’heure actuelle, les délais de consultation et de bilan sont supérieurs à un an. Conseils généraux pour la classe : - L’enfant doit être sécurisé et entouré, ne pas resté à l’écart. - Si l’enfant et les parents sont d’accord, informer les autres élèves de la classe sur la dysphasie. - Ne sachant pas poser de questions, ni demander de l’aide, le dysphasique est déstabilisé face à une situation nouvelle et pour cette raison, il faut prévenir des changements et expliquer les causes de ces changements. - Le dysphasique peut être déstabilisé par des supports de travail inhabituels ou avec une présentation différente. - Une aide visuelle (pour les consignes par exemple) aide le dysphasique. - Les consignes et les attentes par rapport au travail demandé doivent simples et claires. - Il faut reformuler la parole de cet élève en corrigeant ses erreurs de langage (sans pointer les erreurs) afin de lui redonner la bonne formulation, de s’assurer de la bonne compréhension de ce qu’il a voulu dire et lui éviter de trop répéter du fait de sa fatigabilité. - Les nouvelles connaissance sont mieux comprises en partant des cas concrets vers la notion abstraite. - Il a des difficultés de mémorisation. - Il lui faut une aide pour s’approprier les repères temporels. - Dans certains cas, l’apprentissage de l’écrit aide le dysphasique. Le langage écrit aide à enrichir et à structurer le langage oral - 90 % des dysphasiques sont aussi dyslexiques. La dyslexie 2 Circonscription A-SH de la Marne Décembre 2010 La dyslexie est un trouble spécifique de la lecture. Pour parler de dyslexie, il faut qu’il y ait un retard d’au moins 18 mois entre l’âge réel et l’âge de lecture. C’est pour cela qu’on ne peut commencer à diagnostiquer une dyslexie qu’à partir du CE2. Le dyslexique dépense beaucoup d’énergie à déchiffrer. Ainsi, il se retrouve rapidement en surcharge cognitive et ne peut pas traiter le sens de ce qu’il lit. Il accède difficilement voir jamais (pour certains types de dyslexie) aux automatismes du lecteur expert, c'est-à-dire lecture par voie d’adressage (reconnaissance orthographique des mots). C’est un apprenti lecteur qui prend du retard. C’est un lecteur lent dont les résultats sont très inférieurs à ses efforts. Une dysorthographie est souvent associée à la dyslexie. La dyslexie touche 3 à 4 garçons pour 1 fille. Il existe différentes formes de dyslexies. 1 - Les dyslexies phonologiques : atteinte de la voie d’assemblage qui utilise une conversion graphème-phonème non efficiente. - trouble sélectif de la lecture des mots nouveaux : confusions de sons, omissions, inversion ou ajouts de phonèmes. Mot écrit Mot lu Nature de la difficulté tracteur trateur Phonémique lourdeur lourd Visuo-morphologique Ontage (non mot) otage lexicalisation - troubles associés :dysorthographie, trouble du langage, déficit de la conscience phonémique, trouble de la mémoire à court terme. Conséquences : - grandes difficultés en début d’apprentissage ; - difficultés pour les mots nouveaux puis progressivement l’élève arrive à développer des compétences de reconnaissance immédiate des mots par voie d’adressage (reconnaissance orthographique des mots). 2 - La dyslexie de surface : - L’élève ne peut utiliser QUE la voie d’assemblage (déchiffrage). - Il n’a pas de reconnaissance orthographique des mots comme le lecteur expert. - Il écrit phonétiquement et on observe une importante dysorthographie car l’élève écrit à chaque fois le mot d’une façon différente. - Le dyslexique a un déficit cognitif au niveau visuo-attentionnelle, c’est pour cette raison qu’ il ne peut pas mémoriser une orthographe. Conséquences : - le trouble peut passé inaperçu en début de primaire ; - la lecture est lente, syllabée, jamais fluide. Comment aider l’élève dyslexique ? - Partager les informations entre tous les intervenants qui entourent l’élève car chaque dyslexique est différent. - Être attentif à l’estime de soi et à maintenir la motivation. Et pour cela : expliquer la dyslexie à l’élève ; s’il est d’accord, l’expliquer aux autres élèves ; valoriser ses efforts et ses réussites malgré les difficultés ; le placer près d’un élève calme en raison de sa fatigabilité ; limiter le nombre d’objets sur sa table. Les aménagements possibles en lecture et écriture : - Pour les sons complexes, lire avec lui et les répéter. 3 Circonscription A-SH de la Marne - - Décembre 2010 Travailler sur la typologie des textes, leur construction. Cela permet à l’élève d’aller plus rapidement là où il faut pour trouver l’information et cela représente une économie d’énergie pour lui. Surligner les informations importantes. Enregistrer les leçons. Faire lire les consignes par un autre élève. En orthographe, préparer un texte à trous pou r la dictée ou une dictée à choix multiples. Faire relire le texte à corriger avec une consigne différente à chaque fois (une lecture pour vérifier les confusions F/V, une autre pour vérifier les accords de verbes, etc). La dyspraxie ou T.A.C. (Trouble d’Acquisition des Coordinations) La dyspraxie est une pathologie de la conception, de la programmation ou de la réalisation des gestes appris. C’est une anomalie de la planification et de l’automatisation des gestes volontaires. Faire du vélo, conduire, écrire correctement sont des activités qui ne sont pas « naturelles » mais qui s’apprennent. Ces gestes, une fois appris sont normalement exécutés, sans y penser, sans y prêter une attention particulière, sans fatigue. Ils constituent ce que l’on appelle une routine, qui s’exécute naturellement et qui peut même être réalisée en même temps qu’une autre tâche. L’enfant dyspraxique n’en est pas capable, il se retrouve en difficulté pour l’exécution de gestes qui nous paraissent faciles. Conséquences : - Malgré des répétitions, l’enfant reste en difficulté dans des tâches banales. - La réalisation de tâches mêmes simples requiert de l’enfant une attention permanente. - L’enfant est constamment concentré pour mener à bien la moindre tâche et donc, la fatigue est considérable. - Il va progresser par rapport à lui-même, mais aggraver son retard par rapport aux autres. - On constate que le plus souvent les fonctions verbales sont intactes. - On constate des difficultés à acquérir la notion d’invariant du nombre. - La rééducation demande une rééducation de psychomotricité spécialisée qui s’appuie sur le verbal. La dyspraxie visuo-spatiale ; Elle associe à la maladresse, une maladresse du « regard » (l’enfant « voit » bien mais a du mal à organiser son « regard »). Conséquences : - L’élève a du mal à fixer quelque chose. - Il a du mal à construire des empans oculaires en lecture, il risque d’oublier des lettres, d’oublier des mots ou de sauter des lignes. - L’élève a des difficultés à dénombrer une collection, il oublie des éléments, il en compte certains plusieurs fois et le résultat est presque toujours faux : il a donc beaucoup de difficultés à acquérir la notion de nombre. - La notion d’espace est une notion complexe, le dyspraxique a des difficultés à situer les éléments les uns par rapport aux autres, mais également à orienter les éléments par rapport à son propre corps. La conséquence de tout cela est une grande difficulté pour l’écriture qui est maladroite, malhabile et une quasi impossibilité de réaliser des traçages géométriques. 4 Circonscription A-SH de la Marne - Décembre 2010 Une rééducation orthoptique est souvent nécessaire en plus de la rééducation psychomotrice. Conseils généraux pour la classe. - Structurer, baliser l’espace, adapter la présentation. - Eviter les tâches en copie avec modèle. - Systématiser des stratégies que l’enfant pourra utiliser dans différents contextes. - Valoriser les points forts de l’enfant, s’appuyer sur ce qui fonctionne. - Eviter les « doubles tâches ». - Favoriser un « découpage » séquentiel de l’activité pour étayer l’enfant dans son organisation et son raisonnement. - Eviter la présentation en tableau pour la prise d’information ou alors, matérialiser les lignes avec des fonds de couleurs différents et l’inciter à se repérer dans les colonnes à l’aide d’un cache ou de la règle. - Favoriser la verbalisation : expliquer avec des mots plutôt que des schémas, mettre en valeur les liens logiques. (maths, sciences, histoire,…); parfois, accepter que l’enfant chuchote pour lui-même quand il réfléchit… - Si le déchiffrage en lecture est coûteux, une tierce personne peut relire les consignes des exercices. - Proposer l’ordinateur dès que nécessaire pour limiter l’écriture manuelle et la manipulation d’outils. Les aménagements possibles en lecture et écriture : - Pour la lecture :faire attention à la qualité d’impression des documents, soigner la présentation. - Présenter les exercices l’un après l’autre en évitant les colonnes et « décorations ». - Pour ne pas mélanger les lignes : utiliser des caches, marquer le début de chaque ligne en alternant des signes différents ; au besoin, agrandir légèrement la police et surtout les interlignes ; utiliser des repères de couleur pour matérialiser le bas, le haut, le début et la fin de la ligne d’écriture - Pour rechercher des éléments dans un texte :on peut inciter l’enfant à lire les questions avant de lire le texte et utiliser un surligneur. - Pour l’orthographe : insister sur l’épellation, l’apprentissage du mot plus comme une comptine auditive que comme une image. Les aménagements possibles en arithmétique : - Pour les opérations simples : la présentation en colonne est souvent nocive, on peut préférer une présentation en ligne en ajoutant si besoin un code de couleur : 35 + 123 = 158. - Favoriser le calcul mental. - Proposer très tôt d’utiliser la calculatrice pour vérifier ses résultats ou résoudre des problèmes dont la difficulté principale est la logique. Le cas de la géométrie : - Savoir que cette activité restera probablement difficile. - Insister sur une description orale des figures et la connaissance de leurs propriétés. - Permettre à l’enfant d’utiliser l’ordinateur pour dessiner les figures. 5