CRYPTOSPORIDIUM SP
INTRODUCTION
"Robin 16 mois, sans antécédent médical majeur en dehors de
quelques rhino-pharyngites à répétition, présente, après 15 jours de
vacances passées dans l’Aveyron, un syndrome diarrhéique non fébrile
avec un amaigrissement et émission de trois à quatre selles par jour,
sans glaire ni sang. Le médecin traitant évoque une gastro-entérite
d’origine virale. Cependant, la persistance de la symptomatologie
pendant trois semaines motive la demande d’examens coprologiques.
Les recherches bactériennes et virales sont négatives. Un examen
parasitologique des selles, couplé à la recherche des oocystes de
Cryptosporidium, permet de poser le diagnostic de cryptosporidiose."
(cas clinique extrait des Annales de Biologie Clinique, 1997, 55, p494-
495).
De découverte récente chez l’homme, la cryptosporidiose est une
parasitose de plus en plus fréquemment diagnostiquée, non seulement
au cours de déficits immunitaires, particulièrement lors du SIDA, mais
aussi en l’absence de toute immuno-dépression, au cours de diarrhées
aiguës bénignes notamment infantiles. Elle est due à un protozoaire
intestinal : Cryptosporidium sp (seules 2 espèces de cryptosporidies : C.
parvum et C. muris, ont été décrites chez l'homme).
EPIDEMIOLOGIE
Il s’agit d‘une anthropozoonose, la contamination humaine se fait au
contact de l’homme ou d’animaux infectés, malades ou porteurs sains.
La forme infestante du parasite est l’oocyste, éliminé dans les selles. Sa
transmission est le plus souvent indirecte par ingestion d’eau ou
d’aliments souillés (les oocystes de cryptosporidium sp. sont résistants
aux concentrations de chlore contenues dans l'eau potable). Des
épidémies, liées à des contaminations de l'eau du robinet, affectant des
centaines de patients, ont été décrites.
Selon les auteurs, la maladie rend compte de 0,5% à 13% des épisodes
de diarrhées ou de gastro-entérites. Dans certaines études,
Cryptosporidium sp. apparaît au 1
er
, 2
ème
ou 3
ème
rang des agents
infectieux isolés des selles.
ASPECTS CLINIQUES
Le tableau clinique de la cryptosporidiose est dominé par une diarrhée
hydrique, de physiopathologie inconnue, des vomissements et des
douleurs abdominales parfois accompagnées d’un cortège de
manifestations non spécifiques : fièvre, céphalées, asthénie, anorexie,
sueurs. Chez les personnes immuno-déprimées, la cryptosporidiose est
à l'origine de sévères déshydratations parfois mortelles.
La durée d'incubation n'est pas précisément connue. Elle serait d'une
dizaine de jours (extrême de 4 à 21 jours). Les symptômes
disparaissent habituellement spontanément en 10 jours en moyenne.
La cryptosporidiose doit être envisagée systématiquement devant une
diarrhée aiguë ou chronique survenant chez un patient immunodéprimé,
ainsi que dans le diagnostic étiologique d’une diarrhée aiguë au retour
d’un voyage, chez des jeunes enfants ou chez des sujets vivant au
contact d’animaux d’élevage ou de patients infectés.
Chez la personne immuno-déprimée, le parasite peut se localiser, après
avoir emprunté la voie hématogène, au niveau du poumon, de la
trachée, de la vésicule biliaire et même du pancréas. Il peut donc être
recherché dans le liquide provenant d'un lavage broncho-alvéolaire et
dans la bile.
Il faut rappeler qu'une cryptosporidiose avec diarrhée évoluant de manière
prolongée (au delà d'un mois), est considérée comme une infection
opportuniste indicatrice de SIDA.
DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE
Rappel : les cryptosporidies sont des parasites appartenant à la famille des
protozoaires et à la sous-classe des coccidies, qui comprend aussi
Cyclospora sp, Sarcocystis hominis, Isospora belli.
L’examen parasitologique des selles tel qu’il est réalisé dans les conditions
habituelles ne permet pas toujours le diagnostic. L’identification de
Cryptosporidium sp. nécessite la mise en œuvre de techniques spécifiques,
parmi lesquelles la coloration de Ziehl-Neelsen modifiée qui colore en rose
intense les oocystes.
Chez tout sujet atteint de syndrome d'immuno-déficience humaine, la
recherche de cryptosporidies doit être faite non seulement dans les selles,
mais aussi, si possible dans les liquides d'aspiration bronchique, d'aspiration
jéjunale et dans la bile.
La recherche des oocystes de Cryptosporidium sp ne fait pas partie de la
demande d'un examen parasitologique classique. Donc, chez tous les
enfants de moins de 6 ans présentant un syndrome diarrhéique persistant
d'allure infectieuse, le clinicien doit penser à demander un diagnostic
parasitologique de cryptosporidiose.
Il existe aussi un diagnostic sérologique utile surtout dans le cadre d'enquête
épidémiologique.
TRAITEMENT / PROPHYLAXIE
A l’heure actuelle, il n’existe pas de traitement spécifique réellement efficace.
Un traitement symptomatique de la déshydratation est le plus souvent
instauré, quel que soit l’état d’immunocompétence du sujet.
Dans les établissements de soins, l'isolement des patients infectés doit être
réalisé.
Jean-Pierre Bouilloux
prochain sujet : Diagnostic étiologique d'une hypokaliémie