R E V U E D E P R E S S E Revue de presse ● A. Travade* THS L’hormonothérapie substitutive accentue-t-elle le risque de cancer du sein ? Plusieurs études récentes ne confirment pas cette hypothèse. Par ailleurs, le pronostic d’un cancer apparu sous THS n’est pas aggravé. Gapstur S.M. et coll. Hormone replacement therapy and risk of breast cancer with a favorable histology. JAMA 1999 ; 281 : 2091. Pour les auteurs, l’exposition à un THS accentue le risque d’avoir un cancer du sein d’histologie favorable, mucineux, tubuleux ou médullaire, alors que ce même traitement n’augmente pas le risque de cancer canalaire in situ ou de cancer invasif canalaire ou lobulaire. Il faut lire le commentaire de Bush et Whiteman (JAMA 1999 ; 281 : 2140) : pourquoi les auteurs n’ont-ils pas choisi de démontrer par la même étude que le THS n’augmente pas le risque de cancer du sein du type canalaire in situ ou invasif canalaire et lobulaire ? En effet, les formes d’histologie dite favorable ne représentent que 5 % des cancers étudiés. Il n’y a, en outre, pas d’explication biologique plausible. Si l’on combine toutes les tumeurs et si on les stratifie par durée d’utilisation du THS, le risque relatif pour moins de cinq ans et plus de cinq ans est respectivement de 1,07 et 1,11, ce qui ne correspond pas à une augmentation significative. Sourander L. et coll. Cardiovascular and cancer morbidity and mortality and sudden cardiac death in postmenopausal women on oestrogen replacement therapy. Lancet 1998 ; 352 : 1965. Une équipe finlandaise a étudié le rapport entre THS, cancers et maladies cardiovasculaires sur 7 944 femmes participant à un programme de dépistage de cancer du sein. Les femmes sous traitement ont un risque moindre de mortalité cardiovasculaire et de mort subite. En revanche, la morbidité cardiovasculaire n’est pas diminuée. Le risque de cancer de l’endomètre est discrètement augmenté. Soulignons le point important de cette étude : l’incidence du cancer du sein n’est pas augmentée. cebo n’ont aucune augmentation, les femmes sous estrogènes seuls ont une augmentation de 8 % et les femmes sous estroprogestatifs de 19 à 24 % (la densité augmente davantage lorsqu’on ajoute des progestatifs !). Le problème se pose alors de l’éventuelle augmentation de risque liée à la densité, mais cela n’a pas été confirmé en pratique clinique. Les articles suivants traitent des données actuelles concernant traitement hormonal substitutif et risque de cancer du sein, ainsi que des modifications liées à ce traitement sur l’imagerie mammaire, et en particulier sur la densité radiologique. Noël G. et coll. Traitement hormonal substitutif de la ménopause et cancer du sein. Bull Cancer 1998 ; 85 : 997. Brettes J.P. et coll. Traitement hormonal substitutif et risque de cancer du sein. Concours Médical 1999 ; 121 : 20. Gairard B. Le traitement hormonal substitutif de la ménopause : son impact sur la densité radiologique des seins et ses conséquences sur l’interprétation des mammographies. Genesis 1998 ; 41 : 15. Grumbach Y. et coll. Modifications de l’imagerie mammaire sous traitement hormonal substitutif de la ménopause. Feuillets de Radiologie 1999 ; 39 : 99. Cobleigh M.A. et coll. Hormone replacement therapy and high S phase in breast cancer. JAMA 1999 ; 281 : 1528. Les patientes sous THS ont plus fréquemment une phase S élevée, mais seulement lorsque les récepteurs hormonaux sont positifs. Les auteurs ont conclu que le THS stimule la croissance des cancers estrogéno-dépendants, mais pas celle des tumeurs ayant des récepteurs aux estrogènes négatifs. Toutefois, la signification pronostique d’une phase S élevée chez ces patientes sous THS ayant des récepteurs estrogéniques positifs est inconnue. Greendale G.A. et coll. Effects of estrogen and estrogen-progestin on mammographic parenchymal density. Ann Intern Med 1999 ; 130 : 262. L’augmentation de densité mammographique a été étudiée de façon comparative dans trois groupes. Les femmes sous pla- Holli K. et coll. Low biologic aggressiveness in breast cancer in women using hormone replacement therapy. J Clin Oncol 1998 ; 16 : 3115. Article à rapprocher du précédent. Il s’agit d’une étude finlandaise chez des femmes sous THS. Les indicateurs étudiés sont la taille, l’envahissement ganglionnaire, le grade SBR, les récepteurs aux estrogènes et à la progestérone. Les femmes de ce groupe qui ont développé un cancer du sein ont des critères de meilleur pronostic que les femmes sans traitement. * Centre de sénologie République, 63000 Clermont-Ferrand. Fowble B. et coll. Postmenopausal hormone replacement therapy (HRP) : effect on diagnosis and outcome in early 34 La Lettre du Sénologue - n° 7 - février 2000 stage invasive breast cancer treated with conservative surgery and radiation. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1998 ; 42 : 180. Les patientes sous THS n’ont pas un cancer du sein de plus mauvais pronostic que les autres patientes. Il y a même une diminution significative du risque métastatique. Les données de l’imagerie mammographique suggèrent que l’éventuelle augmentation de densité parenchymateuse liée au traitement n’interfère pas avec la détection du cancer. RADIOTHÉRAPIE On savait depuis longtemps que la radiothérapie diminuait le risque de récidives locorégionales, mais son efficacité sur l’amélioration de la survie a été parfois contestée. Plusieurs études montrent de façon indiscutable, dans des sous-groupes bien déterminés, qu’elle réduit le risque de métastases, que ce soit après mastectomie ou après traitement conservateur. De plus, en cas de cancer du sein gauche, le risque de toxicité cardiaque paraît négligeable. Overgaard M. et coll. Postoperative radiotherapy in high-risk postmenopausal breast-cancer patients given adjuvant tamoxifen : Danish Breast Cancer Cooperative Group (DBCG) 82c randomised trial. Lancet 1999 ; 353 : 1641. Les auteurs ont comparé, par une étude randomisée, la survie de femmes ménopausées atteintes d’un cancer du sein stade II ou III ayant eu une mastectomie : tamoxifène seul pendant un an ou tamoxifène et radiothérapie. La survie est améliorée d’environ 10 % dans le groupe radiothérapie. Harris J.R. et coll. Consensus statement on postmastectomy radiation therapy. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1999 ; 44 : 989. L’ASTRO a réuni un panel d’experts qui a élaboré des recommandations concernant les indications de la radiothérapie après mastectomie. Le bénéfice est certain s’il y a au minimum quatre ganglions envahis. Pour les patientes ayant de un à trois ganglions et des tumeurs inférieures à 5 cm, il est très probable, mais demande à être confirmé par d’autres études randomisées. Le problème des sites d’irradiation est détaillé ; la paroi doit être traitée en même temps que les aires ganglionnaires. Hardenbergh P.H. et coll. Treatment-related toxicity from a randomized trial of the sequencing of doxorubicin and radiation therapy in patients treated for early stage breast cancer. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1999 ; 45 : 69. Dans cette étude après traitement conservateur, l’effet délétère cardiaque de la radiothérapie n’est pas plus important lorsque le sein gauche est irradié plutôt que le sein droit. Gustavsson A. et coll. No serious late cardiac effects after adjuvant radiotherapy following mastectomy in premenopausal women with early breast cancer. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1999 ; 43 : 745. Après mastectomie, les auteurs n’ont pas retrouvé de séquelles cardiaques importantes chez les patientes ayant reçu une radiothérapie sur la paroi gauche après un suivi moyen de 13 années. La Lettre du Sénologue - n° 7 - février 2000 GANGLIONS AXILLAIRES Personne ne met en doute l’intérêt de connaître l’état histologique des ganglions axillaires dans les cancers du sein opérables d’emblée. Pour éviter les séquelles d’un curage classique, la technique du ganglion sentinelle est en cours d’évaluation par de nombreuses équipes. Le ganglion sentinelle est le premier ganglion qui draine la tumeur mammaire, et il est identifié par l’injection d’un colorant et/ou d’un isotope radioactif. L’hypothèse est qu’un ganglion histologiquement négatif est représentatif d’un curage axillaire négatif dans 95 à 100 % des cas. [La Lettre du Sénologue 1999 ; 4 : 5-18] Salmon R.J. et coll. Actualité du curage axillaire. Gynécologie internationale 1999 ; 1/2 : 20. Mise au point sur la technique classique du curage axillaire de façon à éviter les séquelles. Conseils en ce qui concerne le drainage et la rééducation postopératoire, l’évaluation à un an ne montrant en fait pas de différence de mobilité entre les groupes rééduqués précocement ou tardivement. Les auteurs rappellent qu’il est admis qu’un curage correct doit comprendre plus de six ganglions. Si la technique du ganglion sentinelle est validée par les études en cours, elle représentera une solution intermédiaire séduisante entre abstention et curage, avec ses risques de séquelles. Krag D. et coll. The sentinel node in breast cancer. N Engl J Med 1998 ; 339 : 941. Les auteurs ont utilisé l’injection de colloïde radioactif. Il y a eu dans tous les cas un curage axillaire complet. Le ganglion sentinelle a été trouvé dans 93 % des cas. La concordance avec le résultat du curage est de 97 %. À noter que le ganglion a été repéré en dehors de l’aisselle dans 8 % des cas et en dehors du niveau I dans 11 % des cas. Dans 3 % des cas, le ganglion sentinelle positif n’était pas dans l’aisselle. Cette méthode est toutefois encore en cours d’évaluation, le risque de faux négatif (11 % dans cette étude) et le caractère opérateur-dépendant ne permettant pas actuellement le passage en routine. Liberman L. et coll. Sentinel lymph node biopsy after percutaneous diagnosis of nonpalpable breast cancer. Radiology 1999 ; 211 : 835. L’originalité de cette étude est de s’adresser à des cancers du sein impalpables diagnostiqués par microbiopsie stéréotaxique avec aiguille 14 G et pistolet automatique ou aiguille 11 G du Mammotome. Le ganglion sentinelle, repéré par colorant bleu et radio-isotope, a été retrouvé chez 30 des 33 patientes étudiées (91 %). La fiabilité de la technique augmente avec l’expérience de l’opérateur. IMAGERIE, STÉRÉOTAXIE, KYSTES Orel S.G. et coll. BI-RADS categorization as a predictor of malignancy. Radiology 1999 ; 211 : 845. La classification mammographique BI-RADS de l’ACR est encore mal diffusée en France, mais est un élément de référence usuel aux États-Unis. Il faut rappeler que la catégorie 3 correspond aux lésions très probablement bénignes dont le risque de malignité est inférieur à 2-3 %. Elle n’a donc rien à voir avec la 35 R E V U E D classification III de Papanicolaou. Dans cette étude, le risque de cancer dans la catégorie 3 est si faible (2 %) qu’il permet de mettre en place une surveillance plutôt que de réaliser une biopsie, afin d’éviter l’inflation de cette dernière technique. Liberman L. et coll. Calcification retrieval at stereotactic, 11gauge, directional, vacuum-assisted breast biopsy. Radiology 1998 ; 208 : 251. Évaluation rétrospective des microbiopsies percutanées pour microcalcifications réalisées avec le système Mammotome* et aiguille de 11 G. Dans 95 % des cas, la radiographie des échantillons prélevés confirme la présence de microcalcifications. L’utilisation d’une aiguille 11 G et d’un système assisté par le vide améliore le diagnostic. Liberman L. et coll. Lobular carcinoma in situ at percutaneous breast biopsy : surgical biopsy findings. AJR 1999 ; 173 : 291. Les auteurs ont analysé les carcinomes lobulaires in situ découverts lors de microbiopsies stéréotaxiques. Lorsque le CLIS s’associe à une lésion plus péjorative, hyperplasie atypique, cicatrice radiaire ou CCIS, il faut opérer. Lorsqu’il s’agit d’une lésion isolée, trouvée par hasard à côté d’une lésion bénigne, elle a davantage la signification d’un marqueur de risque et impose la poursuite d’une surveillance bilatérale prolongée. Le commentaire de H. Gabriel dans le même numéro de l’AJR (“The dilemma of lobular carcinoma in situ at percutaneous biopsy : to excise or to monitor”. AJR 1999 ; 173 : 300) mérite d’être lu car il complète bien les données actuelles sur les hyperplasies lobulaires atypiques et le CLIS. Les estrogènes de la recherche à la pratique médicale Cancers hormonodépendants et ménopause Montpellier, 16-17 mars 2000. Renseignements et inscriptions : Alpha Visa Congrès/ERPM 2000 624, rue des Grèzes, 34070 Montpellier Tél. : 04 67 03 03 00 - Fax : 04 67 45 57 97 E-mail : [email protected] 36 E P R E S S E Lee C.H. et coll. Follow-up of breast lesions diagnosed as benign with stereotactic core-needle biopsy : frequency of mammographic change and false-negative rate. Radiology 1999 ; 212 : 189. Après un diagnostic histologique bénin obtenu par microbiopsie stéréotaxique, il est habituel de proposer une simple surveillance. Toutefois, si l’anomalie radiologique se modifie de façon péjorative, il faut refaire une microbiopsie ou opérer : les auteurs ont estimé le taux de faux négatifs à 2 %. Ils conseillent un contrôle à un an pour les lésions spécifiquement bénignes et à six mois dans les autres cas. Dixon J.M. et coll. Risk of breast cancer in women with palpable breast cysts : a prospective study. Lancet 1999 ; 353 : 1742. Dans les pays occidentaux, 7 % des femmes ont au moins un kyste palpable. Cette étude montre que ces femmes présentent un risque accru de cancer du sein (trois fois celui de la population normale). Le taux d’incidence dépend de l’âge, et est plus élevé chez les femmes de moins de 45 ans (5,94). Il diminue ensuite, et n’est plus que de 1,73 après 54 ans. Ces résultats sont pour l’instant isolés et sont à confirmer par d’autres analyses. En effet, dans leur commentaire, M.G. Lê et M. Spielmann (Le Concours Médical, 16/10/1999, 2459) mettent en évidence des problèmes méthodologiques et des biais qui entraînent une sous-estimation du nombre de cancers attendus dans la population générale, une surestimation des cancers survenus dans la série de Dixon, et donc une augmentation artificielle du risque. Cela n’empêche toutefois pas de proposer un suivi chez les femmes jeunes atteintes de kystes. ■ DCIS Course European School of Oncology Ductal Carcinoma in-situ Athens, Grèce, 15-16 mars 2000. Renseignements : Mrs Mina Zaroyianni, Secretary of Pr Lydia Ioannidou-Mouzaka, 6, Kifissias Avenue, GR-115 26 Athens Greece. Tél. : 301 77 71 246 - 74 70 257 - Fax : 301 77 16 834 E-mail : [email protected] La Lettre du Sénologue - n° 7 - février 2000