I Commutation d’op´
erateurs
Chapitre VI
Les relations d’incertitude
I Commutation d’op´erateurs
Un des esultats importants ´etablis dans les chapitres pr´ec´edents concerne la mesure d’une
observable ˆ
A: une valeur pr´ecise ade cette observable est obtenue uniquement dans le cas
o`u aest une valeur propre et o`u le syst`eme est dans l’´etat propre correspondant. D`es lors
si on consid`ere 2 observables ˆ
Aet ˆ
Bil ne sera possible d’obtenir des valeurs pr´ecises lors
d’une mesure de ˆ
Aet d’une mesure concomitante de ˆ
Bque sous la condition d’avoir un
syst`eme dans un ´etat propre simultan´e de l’op´erateur ˆ
Aet de l’op´erateur ˆ
B. On dira que
deux observables ˆ
Aet ˆ
Bsont compatibles si elles sont “simultan´ement mesurables” ou, plus
pr´ecis´ement si elles poss`edent un syst`eme complet commun de fonctions propres (ou d’´etats
propres).
Dans ces conditions, chaque fonction propre peut ˆetre indic´ee par les valeurs propres
correspondantes des deux op´erateurs ˆ
Aet ˆ
B:
ˆ
Aφai,bj=aiφai,bj(6.1)
ˆ
Bφai,bj=bjφai,bj(6.2)
D`es lors
ˆ
Bˆ
Aφai,bj=ˆ
Baiφai,bj=bjaiφai,bj
et, de mˆeme
ˆ
Aˆ
Bφai,bj=aibjφai,bj.
Par cons´equent
(ˆ
Aˆ
Bˆ
Bˆ
A)φai,bj= 0 (6.3)
et comme les ´etats φai,bjconstituent une base de l’espace de Hilbert l’´equation (6.3) est
valable pour tout ´etat physique (combinaison lin´eaire des φai,bj) et il en r´esulte
ˆ
Aˆ
Bˆ
Bˆ
A= 0 = [ ˆ
A, ˆ
B].(6.4)
111
Chapitre 6 — Les relations d’incertitude
Une condition n´ecessaire de la compatibilie de deux op´erateurs est qu’ils commutent. R´eci-
proquement on peut d´emontrer que si deux op´erateurs ˆ
Aet ˆ
Bcommutent il est possible
de construire un syst`eme complet de fonctions propres communes `a ces op´erateurs. La
d´emonstration ne sera pas donn´ee ici.
Nous avons d´ej`a rencontr´e quelques exemples d’op´erateurs qui commutent : !ˆp2
2m,ˆp"= 0,
[P, ˆ
HHarm] = 0 o`u Pest l’op´erateur parit´e et ˆ
HHarm l’hamiltonien de l’oscillateur harmonique
(`a une ou `a deux dimensions). Vu l’importance des relations de commutation, il est bon de
se familiariser avec quelques r`egles ´el´ementaires de ces “alg`ebres d’op´erateurs”.
Nous en donnons quelques unes qui se v´erifient ais´ement
!ˆ
A, ˆ
A"= 0
!ˆ
A, ˆ
B"=!ˆ
B, ˆ
A"
!ˆ
A, ˆ
B+ˆ
C"=!ˆ
A, ˆ
B"+!ˆ
A, ˆ
C"
!ˆ
A, ˆ
Bˆ
C"=!ˆ
A, ˆ
B"ˆ
C+ˆ
B!ˆ
A, ˆ
C"
!ˆ
Aˆ
B, ˆ
C"=!ˆ
A, ˆ
C"ˆ
B+ˆ
A!ˆ
B, ˆ
C"
#ˆ
A, !ˆ
B, ˆ
C"$+#ˆ
B, !ˆ
C, ˆ
A"$+#ˆ
C, !ˆ
A, ˆ
B"$= 0 (identit´e de Jacobi)
Si ˆ
Aet ˆ
Bsont deux op´erateurs qui chacun commute avec leur commutateur i.e. si #ˆ
A, !ˆ
A, ˆ
B"$=
#ˆ
B, !ˆ
A, ˆ
B"$= 0, alors
!ˆ
A, ˆ
Bn"=nˆ
Bn1!ˆ
A, ˆ
B"
et
!ˆ
An,ˆ
B"=nˆ
An1!ˆ
A, ˆ
B".
Une application utile de ces derni`eres relations ( ˆ
A= ˆp, ˆ
B= ˆxn) est donn´ee par
[ˆp, ˆxn] = i!nˆxn1.
Plus g´en´eralement si f(ˆx) est une fonction “raisonnable”
[ˆp, f (ˆx)] = i!df(ˆx)
dˆx(6.5)
de mˆeme
[ˆx, g(ˆp)] = i!dg(ˆp)
dˆp.(6.6)
Une fonction op´eratorielle que l’on rencontre souvent en m´ecanique quantique est l’expo-
nentielle d’un op´erateur eˆ
Ad´efinie par
eˆ
Adef
= 1
|+ˆ
A+1
2! ˆ
A2+1
3! ˆ
A3+···
112
II Les relations d’incertitude de Heisenberg
On peut alors erifier l’identit´e suivante
eˆ
Aˆ
Beˆ
A=ˆ
B+!ˆ
A, ˆ
B"+1
2!#ˆ
A, !ˆ
A, ˆ
B"$+1
3!%ˆ
A, #ˆ
A, !ˆ
A, ˆ
B"$&+··· (6.7)
En eet soit
f(λ) = eλˆ
Aˆ
Beλˆ
A(λC)
df(λ)
dλ=!ˆ
A, f(λ)"
et de mˆeme
d2f(λ)
dλ2=#ˆ
A, !ˆ
A, f(λ)"$
et ainsi de suite. Un d´eveloppement de Taylor autour de λ= 0 donne alors le esultat (6.7)
puisque f(0) = ˆ
Bet que f(1) est le membre de gauche de l’´eq. (6.7).
Si ˆ
Aet ˆ
Bcommutent avec leur commutateur,
eˆ
Aeˆ
B=eˆ
A+ˆ
B+1
2[ˆ
A, ˆ
B](6.8)
etc ...
II Les relations d’incertitude de Heisenberg
Nous avons vu dans le paragraphe pr´ec´edent que pour des observables ˆ
Aet ˆ
Bqui commutent,
il existe des ´etats propres communs `a ces observables. Il en esulte qu’une mesure “pr´ecise”
de ˆ
Aet de ˆ
Best en principe possible. Plus pr´ecis´ement si φa,b(x) est un ´etat propre de ˆ
Aet
de ˆ
Bde valeurs propres aet b(que nous supposons non d´eg´en´er´ees) alors
ˆ
Aφa,b =aφa,b ˆ
Bφa,b =bφa,b.
Un ´etat physique dont l’amplitude de probabilit´e est donn´ee par φa,b est un ´etat pour
lequel une mesure de ˆ
Aet/ou de ˆ
Bdonnera toujours pour r´esultat aet/ou b:
#ˆ
A$a,b ='φ
a,b(x)ˆ
Aφa,b(x)dx =a(6.9)
#ˆ
B$a,b ='φ
a,b(x)ˆ
Bφa,b(x)dx =b(6.10)
(ˆ
A)a,b ='φ
a,b(x)( ˆ
Aa)2φa,bdx = 0 (6.11)
(ˆ
B)a,b ='φ
a,b(x)( ˆ
Bb)2φa,bdx = 0.(6.12)
113
Chapitre 6 — Les relations d’incertitude
Par contre si ˆ
Aet ˆ
Bne commutent pas, il est impossible de trouver un ´etat physique
pour lequel une mesure de ˆ
Aet une mesure de ˆ
Bdonneraient des valeurs pr´ecises. Nous
d´efinissons l’op´erateur hermitien ˆ
Cpar la relation
!ˆ
A, ˆ
B"=iˆ
C. (6.13)
Le th´eor`eme d’Heisenberg (ou les relations d’incertitude de Heisenberg) est l’assertion que de
la relation (6.13) il suit que
(ˆ
A)(ˆ
B)1
2|#C$|(6.14)
soit encore que le produit des incertitudes dans la mesure des observables ˆ
Aet ˆ
Best toujours
plus grand (ou ´egal) `a la moiti´e de la valeur absolue de la valeur moyenne du commutateur
de ˆ
Aet ˆ
B!
Pour emontrer l’in´egalit´e (6.14) nous avons besoin du
Lemme de Schwatz :si fet gsont deux fonctions de carr´e sommable,
('+
−∞
|f|2dx)('+
−∞
|g|2dx)****'fgdx****
2
(6.15)
Pour emontrer ce lemme nous partons de l’in´egalit´e
'+
−∞
(f+λg)(f+λg)dx 0λC(6.16)
Soit
'+
−∞
|f|2dx +λ'+
−∞
fgdx +λ'+
−∞
gfdx +|λ|2'+
−∞
|g|2dx 0 (6.17)
Comme cette in´egalit´e est valable pour tout nombre complexe λ, elle le sera pour
λ=++
−∞ gfdx
++
−∞ |g|2dx .(6.18)
En substituant (6.18) dans (6.17) nous obtenons (6.15) et le lemme de Schwartz est donc
d´emontr´e. Notez que l’in´egalit´e de Schwartz devient une ´egalit´e si et seulement si les fonctions
de carr´e sommable f(x) et g(x) sont proportionnelles.
Avec (6.15) il est `a pr´esent ais´e de d´emontrer le th´eor`eme de Heisenberg. Puisque
l’op´erateur ˆ
Aest hermitien
(ˆ
A)2='(ˆ
A− # ˆ
A$)φ(ˆ
A− # ˆ
A$)φdx ='****
(ˆ
A− # ˆ
A$)φ(x)****
2
dx
et de mˆeme pour (ˆ
B)2. L’in´egalit´e de Schwartz avec f= ( ˆ
A<ˆ
A$)φ(x) et g= ( ˆ
B
#ˆ
B$)φ(x) donne alors
(ˆ
A)2(ˆ
B)2****'+
−∞
φ(ˆ
A− # ˆ
A$)( ˆ
B− # ˆ
B$)φdx****
2
(6.19)
114
II Les relations d’incertitude de Heisenberg
o`u, rappelons le, l’in´egalit´e ne devient une ´egalit´e que lorsque
(ˆ
B− # ˆ
B$)φ=α(ˆ
A− # ˆ
A$)φ α C.(6.20)
D’autre part
(ˆ
A− # ˆ
A$)( ˆ
B− # ˆ
B$) = 1
2,(ˆ
A− # ˆ
A$)( ˆ
B− # ˆ
B$) + ( ˆ
B− # ˆ
B$)( ˆ
A− # ˆ
A$)-+1
2iC
=F+1
2iC (6.21)
o`u Fet Csont des op´erateurs hermitiens dont les valeurs moyennes sont par cons´equent
r´eelles. Avec (6.21) l’´equation (6.19) devient
(ˆ
A)2(ˆ
B)2≥ #F$2+1
4#C$21
4#C$2(6.22)
et le th´eor`eme d’Heisenberg est donc d´emontr´e. Remarquons que dans (6.22) on n’aura une
´egalit´e que si
#F$= 0.(6.23)
Dans le cas particulier o`u ˆ
A= ˆxet ˆ
B= ˆp, nous avons
[ˆx, ˆp] = i!1
|
et l’´eq. (6.22) donne alors
(ˆx)(ˆp)1
2!(6.24)
c’est-`a-dire la “relation d’incertitude” de Heisenberg !
A ce stade, il est particuli`erement int´eressant de sp´ecifier l’´etat physique pour lequel
l’´eq. (6.20) devient une ´egalit´e : pour un tel ´etat le produit des incertitudes de “position et
d’impulsion” est minimal.
En vertu de l’´eq. (6.20), nous avons, pour un tel ´etat ”d’incertitude minimum”, φmin.(x)
'φ
min.(ˆx− #ˆx$)(!
i
x− #ˆp$)φmin.dx =α(ˆx)2(6.25)
et
'φ
min.(!
i
x− #ˆp$)(ˆx− #ˆx$)φmin.dx =1
α(ˆp)2(6.26)
mais, comme #F$min. = 0, nous devons avoir
α(ˆx)2+1
α(ˆp)2= 0.(6.27)
Par ailleurs, en soustrayant (6.26) de (6.25)
α(ˆx)21
α(ˆp)2=i!(6.28)
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