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1 Le plan complexe
En posant (x1, y1)+(x2, y2) = (x1+x2, y1+y2)et (x1, y1)×(x2, y2) = (x1x2−y1y2, x1y2+1.a
y1x2)on munit R×Rd’une addition et d’une multiplication commutatives et associatives,
qui étendent celles de R(en identifiant xau couple (x, 0)). En notant i= (0,1), et donc
(x, y) = x+iy =x+yi,1on voit que i2=−1et que réciproquement en imposant i2=−1
on retombe sur les lois précédentes. On notera Cl’anneau commutatif ainsi défini.
Si z=x+iy et si l’on pose z=x−iy on calcule zz =x2+y2. Donc si z6= 0 et1.b
si w=x
x2+y2−iy
x2+y2alors zw =wz = 1. L’anneau (C,+,×)est donc un corps : tout
élément non nul est inversible.
On peut considérer que le nombre complexe z=x+iy correspond au point Pd’un plan1.c
cartésien, de coordonnées (x, y)dans un repère orthonormé. Alors zz =x2+y2est le carré
de la distance à l’origine. On note |z|=√zz la distance elle-même.
L’addition correspond à la construction d’un parallélogramme, ou d’un triangle, et sur1.d
cette base, ou algébriquement, on obtient l’importante inégalité :
|z+w| ≤ |z|+|w|
La multiplication a elle-aussi une interprétation géométrique. Tout d’abord la multipli-1.e
cation par iagit selon (x, y)7→ (−y, x)c’est-à-dire une rotation de 90˚autour de l’origine
des coordonnées, dans le sens dit « direct », ou « trigonométrique » (qui est l’opposé du
sens de rotation des aiguilles d’une montre).
Plus généralement si z6= 0 on peut écrire en coordonnées polaires z=rcos(θ)+ir sin(θ),
r=|z|=px2+y2. Alors, par les identités trigonométriques de base, on obtient :
z1z2=r1r2(cos(θ1+θ2) + isin(θ1+θ2))
Autrement dit la multiplication par z1agit par rotation autour de l’origine par un angle θ1
et dilatation des coordonnées d’un facteur r1. Notons aussi l’importante égalité :
|zw|=|z||w|
C’est cette interaction entre la condition algébrique i2=−1et les transformations1.f
affines du plan qui justifie que l’on parle du « plan complexe », ou « plan de Argand-
Gauss » à propos du corps C.2Car le fait qu’un espace vectoriel de dimension deux sur
Rcorresponde à un plan n’a rien de spécialement notable. L’algèbre (via i2=−1, la
distributivité, la commutativité, l’associativité) correspond à la géométrie des rotations et
dilatations : ça c’est notable.
Hamilton 3a montré que les rotations de l’espace avaient aussi un pendant « algé-1.g
brique » : mais pour cette compréhension des rotations de l’espace de dimension trois
il est nécessaire d’introduire un corps de dimension quatre : le corps des quaternions
q=x+ia +jb +kc,x, a, b, c ∈R,i2=j2=k2=−1,ij =k,jk =i,ki =j, mais
ij =−ji,jk =−kj,ki =−ik. Le corps de Hamilton est donc non-commutatif. Il existe
aussi les octonions de Cayley 4, une algèbre qui n’est ni commutative, ni associative, et est
1. on abrège z×wen zw.
2. Gauss 1777–1855 ; Argand 1768–1822
3. Hamilton 1805–1865
4. Cayley 1821–1895
Université Lille 1 c
JF Burnol, 2006–2007