IND6406 Cognition située et distribuée 2017

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IND 6406 Ergonomie cognitive
Cognition située,
cognition distribuée et
cognition socialement partagée
Jean-Marc Robert
École Polytechnique de Montréal
Le 31 janvier 2017
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action située
comportement situé
cognition située
apprentissage situé
prise de décision située
émotions situées
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Origine et influence des travaux sur
la cognition située
• Concepts issus des travaux de :
– Edwin Hutchins (anthropologue américain)
– Lucy Suchman (anthropologue américain)
– Terry Winograd (informaticien américain)
• Influencent plusieurs chercheurs :
–
–
–
–
–
–
Pascal Salembier (France)
Kim Vicente (EID, Toronto)
John S. Brown (situated learning)
Garry A. Klein (decision making – E.U.)
L.B. Resnick
…
Hutchins (1995),
Cognition in the wild,
408 p.
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Définition : la cognition située
• Un courant de pensée qui remet en question la
conception classique de l’action humaine en
affirmant que l’action ne peut être interprétée
que par rapport aux données de la situation, en
référence à un contexte.
• L’action n’est pas déterminée par un plan préétabli. Elle n’est pas aussi planifiée que l’on ne
le prétend.
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Contribution fondamentale
de la théorie de la cognition située
• Courant de pensée qui nous amène à
– revoir, élargir la conception classique de l’action
humaine,
– élargir le cadre d’analyse de l’action humaine
• Nouveau paradigme par rapport au cognitivisme
orthodoxe
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Tradition du cognitivisme orthodoxe
(voir les travaux de Sacerdoti 1977, 1978)
• Met l’accent sur l’importance de la planification
et du rôle fonctionnel des plans pour l’action
humaine.
• Le plan : c’est la référence pour le
comportement, il joue un rôle tout puissant, il
prescrit intégralement le comportement.
• Le cadre d’analyse est limité à l’individu : ses
représentations mentales et le traitement de
l’information (symbolique).
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3 grandes caractéristiques de la
cognition située
1. Poids déterminant des facteurs contextuels dans l’action
humaine
– L’action est déterminée par différentes variables de la situation.
– Elle ne peut être interprétée que par rapport aux données de la
situation, en référence à un contexte physique, social, historique,
culturel.
2. Limitations du rôle fonctionnel des plans
– Le plan ne prescrit pas l’action. Il sert plutôt à orienter.
– Est considéré plutôt comme un épiphénomène, comme
émergeant de l’action située
3. Réalité et format des représentations internes
– Forte remise en question de la représentation mentale de
l’opérateur
– C’est un point de divergence fondamentale avec le cognitivisme
traditionnel
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Impact de la théorie de la
cognition située
• On doit absolument tenir compte des éléments
de la situation pour comprendre le
comportement humain.
• Remise en question de l’AHT comme méthode
d’analyse de tâche
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Diagramme AHT de la tâche
Gestion de la petite caisse
- : Séquence imposée d'actions
, : Séquence variable d'actions
( ) : Actions facultative
[ ] : Actions regroupées
: Action décomposée sur une prochaine page
0.Gérer la petite
caisse
Plan 0: .(1)- 2 - 3 - (4 - 5)
1. Avancer fonds
pour dépense
Plan 1: 1- 2 , 3 - 4
1.1. Juger la
demande
3. Vérifier si
remboursement de
caisse requis
2. Recevoir une
facture
1.2. Noter
informations
4. Renflouer
caisse
5. Classer
documents pour la
période traitée
Plan 2: .(1)- 2 - 3 - 4 - 5 -(6)
1.3. Donner
montant
1.4. Ranger
note dans
caisse
2.1. Juger
demande
2.2. Recueillir
facture
2.3. Noter
informations
2.4. Donner
montant
2.5. Ranger
facture
2.6. Retirer
note
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La théorie de la cognition distribuée
• But : comprendre l’organisation des systèmes cognitifs
• Fonctions des SC : apprendre, mémoriser, résoudre des
problèmes, raisonner
• Processus cognitif : incluent tous les éléments qui participent à
celui-ci et qui ont des relations les uns avec les autres
• Événement cognitif : ex., telle chose a été mémorisée, calculée
• 2 caractéristiques fondamentales de la théorie :
– étend la portée de ce qui est considéré comme cognitif au-delà
de l’individu pour inclure les interactions entre les personnes et
avec les ressources et le matériel dans l’environnement
– s’intéresse à toute la cognition plutôt qu’à une sorte particulière
• Liée à 2 principes théoriques :
– L’unité d’analyse de la cognition va au-delà de la personne
– L’étendue des mécanismes qui participent aux processus
cognitifs va bien au-delà de ceux qui sont dans la tête
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Bien-fondé de la théorie
de la cognition distribuée
• Un processus n’est pas cognitif simplement pcq il se produit dans la
tête d’une personne, et il n’est pas non cognitif simplement pcq il se
produit dans les interactions entre plusieurs cerveaux.
• La cognition distribuée s’intéresse aux processus cognitifs, où qu’ils
soient, sur la base des relations fonctionnelles des éléments qui
participent au processus
• La théorie s’intéresse à une plus grande classe d’événements
cognitifs que ceux qui se produisent dans le tête de la personne
(traditionnellement la manipulation de symboles dans la tête de
l’individu)
• Les processus de mémoire dans un cockpit d’avion révèle que la
mémoire implique un riche ensemble d’interactions entre des
processus internes, la manipulation d’objets, et le trafic dans les
représentations des pilotes.
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Cognition distribuée
• La cognition est distribuée entre :
– les personnes et/ou les agents informatiques
(système expert) qui réalisent une activité, et entre
– les éléments de la situation : les objets présents dans
l’environnement incluant l’info sur les écrans et autres
dispositifs de présentation d’infos, les pense-bête, les
listes de commandes ou mots clés, les documents
papier, etc.
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Cognition distribuée
Photo: Julie Saulnier 2013
L’observation de l’activité humaine sur le
terrain mène aux constats suivants
• 3 sortes de distribution des processus cognitifs:
– Les processus cognitifs peuvent être distribués parmi les
membres d’un groupe social
– Les processus cognitifs peuvent impliquer la coordination
entre la structure interne et externe (matérielle,
environnementale)
– Les processus peuvent être distribués dans le temps de
sorte que les résultats des événements passés peuvent
transformer la nature des événements qui se produisent
plus tard
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Dans la cognition distribuée
• On s’intéresse à une plus grande unité que le
seul individu : le groupe et toutes les formes de
représentations utilisées dans le travail
– La granularité d’analyse est plus grande que dans la
cognition individuelle
Méthode d’analyse
• Ethnographie cognitive (Hutchins, 1995): on fait une
analyse détaillée du milieu de travail pour comprendre le
rôle des humains, de différentes formes de
représentations et des pratiques de travail.
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Origine des travaux sur la
cognition distribuée
• Remise en question des capacités du modèle
computationnel classique centré sur l’individu à
rendre compte des activités cognitives dans des
situations naturelles.
– Il ne tient pas compte des représentations externes
dans l’environnement
– Il ne considère pas les aspects socio-culturels
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But du cadre théorique de la
cognition distribuée
• Dépasser le niveau d’analyse classiquement
adopté en science cognitive (l’individu)
– Dans le pilotage, on va s’intéresser au cockpit plutôt
qu’au pilote seulement
• Parvenir à la caractérisation d’une cognition
située et incarnée dans son contexte
d’occurrence
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Objectifs de la cognition distribuée
(P. Salambier)
• Analyser la façon dont les différentes
composantes d’un système fonctionnel sont
coordonnées
• Analyser comment l’info est propagée à travers
le système fonctionnel en termes d’états
représentationnels et technologiques distribués
• Examiner à un niveau micro la façon dont ces
représentations se déplacent à travers le
système fonctionnel
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Implications de la théorie de la
cognition distribuée
• Le cadre d’analyse est + large que l’individu :
• on pense en terme de système fonctionnel qui comprend un
ou des agents humains et des objets de l’environnement
(artefacts)
• On reconnaît le rôle cognitif déterminant des objets
présents dans l’environnement.
• On remet en question la notion de contrôle centralisé
(dans la mémoire d’un individu)
• On s’intéresse à la façon dont l’info se propage à travers
le système fonctionnel (+ agents)
• Les ressources environnementales jouent un rôle
important dans la coordination entre opérateurs en
permettant la reconnaissance d’intentions et
l’actualisation d’un contexte partagé pour le travail
d’équipe.
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Les représentations externes
(Zhang et Norman 1994)
• Peuvent constituer des aides à la mémorisation
• Peuvent fournir une info qui peut être
directement perçue et utilisée sans être
interprétée et formulée explicitement
• Peuvent structurer le comportement cognitif (ex.,
en limitant le champs des comportements possibles)
• Sont une partie indispensable du système de
représentation de toute tâche cognitive
distribuée
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Cognition socialement partagée
• Met l’accent sur l’influence de la culture sur la cognition,
c.-à-d. sur la façon de poser les problèmes, de les
approcher, de les résoudre.
– Ex. : culture de qualité totale; culture d’entreprise
(entrepreneurship, souci de performance, d’excellence); culture
d’ingénieurs, culture des étudiants de Polytechnique, ….
– Question d’histoire, de tradition intellectuelle, …
• Dans le cadre du travail collaboratif, une partie des
connaissances se trouve chez nos collègues.
– Il y a des connaissances communes (mutuelles, partagées)
– Il y a des connaissances de relais (conn. complémentaires)
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Conclusion
• Le cadre d’analyse de la cognition, de l’activité
de travail, ne doit pas se limiter à la personne
seule, mais s’étendre au milieu dans lequel elle
baigne, elle travaille.
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Références
•
Hollan, J., Hutchins, E., Kirsh, D. (2001). Distributed cognition : toward a new
foundation for human-computer interaction research. (chap. 4), in Carroll, J.M. (ed.).
Human-computer interaction in the new millennium. ACM, New York, pp. 75-92
•
Hutchins, E. (1995). Cognition in the wild. MIT Press, Cambridge, MA.
•
Norman, D. (1993). Things that make us smart. Reading: MA: Addison-Wesley. (1
chap. sur la cognition distribuée)
•
Perry, M. (2003). Distributed cognition (chap. 8), in J.M. Carroll (Ed) (2003). HCI
Models, Theories and Frameworks. Morgan Kaufmann, p. 193-
•
Rogers, Y., Ellis, J (1994). Distributed cognition : an alternative framework for
analysing and explaining collaborative woirking. Journal of Information Technology, 9,
119-128.
•
Salambier, P. (1995). Cognition : située, distribuée, socialement partagée. GRIC
ARAMIIHS, Toulouse. Document inédit, 13 pages.
•
Suchman, L. (1987). Plans and situated actions: The problem of Human-Machine
Communication. Cambridge University Press.
•
Young, M.F., McNeese, M.D. (1995). A situated cognition approach to problem
solving (chap. 12). Dans Hancock, P., Flach, J., Caird, J., Vicente, K. (Eds). Local
applications of the ecological approach to human-machine systems. LEA, Hove,UK,
p. 359-391.
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