CC_SP_Georges

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cAS CLINIQUE N°8
Georges 78 ans
Georges est porteur d’un cancer de la vessie étendu localement et métastasé à distance.
Le patient est suivi pour une chimiothérapie de 4è ligne palliative. Il est régulièrement hospitalisé
pour altération de l’état général et syndrome sub-occlusif. À la fin de son dernier séjour à l’hôpital,
le patient souhaite retourner à son domicile, où il vit avec son épouse.
Questions 1 :
- Le retour au domicile de ce patient vous semble-t-il envisageable ?
- Si oui, quel dispositif vous semble le plus approprié ?
Une équipe d’hospitalisation à domicile (HAD) prend contact avec le médecin traitant. L’équipe de coordination
se rend à l’hôpital auprès du patient pour une évaluation de son état, élaborer un projet thérapeutique et
préparer le retour à domicile. contact est pris avec l’équipe mobile de soins palliatifs (EMSP) du centre
hospitalier. La psychologue rencontre le patient et son épouse afin de prendre en compte la charge émotionnelle
d’un retour à domicile. Le patient exprime son souhait de mourir à domicile et l’écrit dans des directives anticipées.
Il désigne son épouse comme personne de confiance.
Le matériel nécessaire est livré à domicile par l’équipe logistique. Un protocole de soins est mis en place
(traitements, surveillance clinique et biologique). L’équipe et la psychologue assurent un soutien psychologique
du patient et de son entourage. Le patient pouvant bénéficier du fonds FNASS1, l’aide d’une garde-malade est
mise en place. L’association de bénévoles d’accompagnement “Alliance” est contactée et propose la visite
programmée de bénévoles deux après-midis par semaine.
Le projet de soins est réévalué en équipe pluridisciplinaire chaque semaine (médecin traitant, IDE, aide-soignante,
IDE coordinatrice, médecin coordonnateur, psychologue, assistante sociale).
À l’occasion d’un épisode d’exacerbation douloureuse, sont découvertes des métastases hépatiques.
La chimiothérapie palliative se complique d’une perte des défenses immunitaires avec fièvre traitée au domicile.
Question 2 :
- Pensez-vous que la situation mérite de se poser la question
de la poursuite des traitements ? comment prendre la décision ?
Le médecin hospitalier, le médecin traitant et le médecin coordonnateur de l’HAD décident ensemble d’arrêter
la chimiothérapie et de poursuivre la prise en charge palliative avec accompagnement.
Le patient montre des crises d’angoisse et d’agitation nocturne, motivant un arrêt des anxiolytiques oraux et leur
prescription sur une pompe en dérivation (midazolam). L’état général du patient s’aggrave (tension artérielle basse,
pouls filant, œdème de compression, encombrement bronchique). Il est très angoissé, agité, et présente quelques
troubles de la vigilance. Il dit au psychologue son épuisement et son désir d’en finir.
Question 3 :
- Que faire face à ce désir “d’en finir” exprimé par le patient ?
Une réunion pluridisciplinaire est convoquée (soignants, psychologue, assistante sociale, médecins traitant et
coordonnateur). Une décision de sédation est finalement prise à l’issue de cette procédure collégiale. Les modalités
en sont expliquées au patient et à ses proches, qui donnent leur accord.
Le patient décède 48 heures après le début de la sédation, à son domicile, entouré de son épouse et de sa famille.
Un accompagnement psychologique de l’équipe et des proches a été proposé après le décès.
Questions 4 :
- Que pensez-vous de la sédation en phase terminale ?
- Par qui et sur quels critères une telle décision doit-elle être prise ?
Source : d’après Dr Henri Rodière, médecin coordonateur Santé - Service de Dax (HAD et SSIAD).
(1)
FNASS : Fonds National d’Action Sanitaire et Sociale.
cAS CLINIQUE N°8
Fiche technique
formateur
POINTS ABORDÉS
• Hospitalisation à domicile
• Décision d’arrêt de traitement
• Sédation
PISTES DE RÉPONSES
ET RÉFLEXIONS
1. Intérêts de l’hospitalisation à domicile
(HAD)
En tant qu’établissements de santé, les structures HAD sont soumises
à l’obligation d’assurer des soins palliatifs. L’HAD peut être prescrite
lorsque le patient nécessite une importante charge de soins, des soins
complexes ou d’une technicité spécifique. La pertinence de la prise
en charge en HAD est évaluée par le médecin coordonnateur de
l’HAD.
Elle permet le maintien du malade dans son lieu de vie habituel
jusqu’à son décès, si ce maintien est souhaité par le malade et ses
proches, dans le respect des principes de la démarche palliative qui
répondent à des principes de collégialité et d’interdisciplinarité.
Elle intervient en lien avec le médecin traitant, les acteurs du domicile,
et a vocation à faire partie du réseau de santé en soins palliatifs
quand il existe.
Elle doit se donner les moyens d’anticiper une hospitalisation si
nécessaire et dans un service adapté à la situation (conventions avec
des services hospitaliers, (LISP(1), USP(2)).
Elle met en place un soutien et un accompagnement adaptés des
proches.
2. Décision d’arrêt de traitement
La loi du 22 avril 2005 relative aux droits du malade et à la fin de
vie renforce les lois du 9 juin 1999 et du 4 mars 2002 ainsi que le
Code de déontologie médicale. La loi fixe pour les professionnels de
santé le droit d’interrompre ou de ne pas entreprendre des traitements
jugés inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le maintien
artificiel de la vie (Art.1 et 9).
L’Article 1 de la loi stipule que lorsque les traitements apparaissent
inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien
artificiel de la vie, ils constituent une obstination déraisonnable
(acharnement thérapeutique) et peuvent être suspendus ou ne pas
être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité de la
personne et assure la qualité de sa vie en dispensant des soins palliatifs
et un accompagnement. L’Article 9 stipule que lorsqu’une personne,
en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable,
quelle qu’en soit la cause, est hors d’état d’exprimer sa volonté,
le médecin peut décider de limiter ou d’arrêter un traitement inutile,
disproportionné ou n’ayant d’autre objet que la seule prolongation
artificielle de la vie de cette personne, après avoir respecté la procédure
collégiale définie par le décret 2006-120 du 6 février 2006.
La loi distingue deux situations selon que le patient est en état
d’exprimer sa volonté ou non. La loi ne précisant pas ce que signifie
“patient en état d’exprimer sa volonté”, l’appréciation de cette capacité
reste de l’ordre de la responsabilité médicale, dans le cadre du
dialogue médecin – malade.
Si le patient est en état d’exprimer sa volonté d’abstention ou de
limitation de traitement, le médecin doit respecter la volonté du
patient.
Si le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, pensez à recueillir
des informations auprès de la personne de confiance et/ou de son
entourage. Le médecin doit ensuite respecter la procédure collégiale.
Le médecin doit avoir une concertation avec l'équipe de soins si elle
existe, et obtenir l'avis motivé d'au moins un autre médecin, appelé
en qualité de consultant. Il ne doit exister aucun lien de nature
hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant.
L'avis motivé d'un deuxième consultant est demandé par ces médecins
si l'un d'eux l'estime utile (décret d’application 120 modifiant
l’article 37 du Code de déontologie médicale).
3 et 4. Sédation (d’après les recommandations SFAP, juin 2009)
La sédation est la recherche, par des moyens médicamenteux, d’une
diminution de la vigilance pouvant aller jusqu’à la perte de
conscience. Son but est de diminuer ou de faire disparaître la
perception d'une situation vécue comme insupportable par le
patient, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à cette
situation ont pu lui être proposés et/ou mis en œuvre sans permettre
d’obtenir le soulagement escompté. Elle peut être intermittente,
transitoire ou continue.
La décision et la mise en pratique d’une sédation en phase terminale
pour détresse, posent, en pratique clinique, plus de questions
qu’elles n’en résolvent. Pendant un coma pharmacologiquement
induit le malade semble “apaisé” mais, que savons-nous de son vécu
et/ou de son travail intra-psychique ?
La pratique de la sédation expose à un risque élevé de “dérives” :
- Un décalage entre l’intention affichée de soulager le patient et celle
d’accélérer la survenue du décès ou de le provoquer délibérément
(frontière entre euthanasie et sédation).
- Une prise de décision reposant plus sur le ressenti de l’entourage
ou des soignants que sur la sensation d’insupportable vécue par le
malade lui-même.
- Une utilisation de la sédation comme réponse directe à une demande
d’euthanasie ou d’assistance au mourir.
La décision de sédation fait poser trois questions incontournables :
pourquoi ? Pour qui ? De quel droit ?
En phase terminale, les indications de sédation sont les complications
aiguës à risque vital immédiat (hémorragie cataclysmique, notamment
extériorisée, détresse respiratoire asphyxique), et les symptômes
réfractaires et pénibles pour la personne malade.
La décision fait suite à une procédure collégiale multidisciplinaire,
intégrant le consentement du patient chaque fois qu’il est possible
de le recueillir, conformément aux dispositions exposées dans la loi
n° 2005-370 relative aux droits des malades et à la fin de vie,
complétée du décret n° 2010-107 du 29 janvier 2010 relatif aux
conditions de mise en œuvre des décisions de limitation ou d’arrêt
de traitement.
La décision est prise par le médecin en charge du patient, au mieux
après avis d’un médecin compétent en soins palliatifs.
(1)
(2)
LISP : Lits Identifiés de Soins Palliatifs.
USP : Unité de Soins Palliatifs.
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