Traitement curatif
de la fibrillation ventriculaire
L’élimination des éléments déclencheurs et/ou la mo-
dification du substrat perpétuateur est efficace dans le
traitement à long terme des FA. De même, alors que les
déclenchements et/ou le substrat pourraient théorique-
ment être la cible de l’ablation dans les FV, les études
jusqu’à présent ont exclusivement rapporté l’ablation de
l’élément déclencheur. Ceci peut-être le reflet de notre
connaissance limitée du substrat impliqué dans la FV et le
rôle d’une masse plus importante de myocarde [8-16].
Fibrillation ventriculaire idiopathique
La FV sur cœur apparemment normal représente 5 à
10 % des causes de morts subites. Elle est définie d’une
part par l’absence de cardiopathie organique, d’autre part,
par l’absence d’anomalie électrique décelable actuelle-
ment : syndrome du QT long, syndrome de Brugada ou TV
polymorphe catécholergique. La FV idiopathique a
d’autres éponymes dans la littérature : FV récurrente, TV
polymorphe idiopathique, torsade de pointe à couplage
court. Récemment, nous avons présenté une série de
patients avec FV récidivante dont nous avons pu cartogra-
phier les extrasystoles ventriculaires (ESV) déclenchantes
et en effectuer l’ablation par radiofréquence (RF) [11, 12].
Caractéristiques cliniques
Trente-deux patients âgés de 41 ± 14 ans, avec des
épisodes récidivants de FV ont été étudiés. Six d’entre eux
décrivent une histoire familiale de mort subite. Des syn-
copes inexpliquées sont retrouvées chez 17 patients avant
la mise en évidence des FV. La cartographie endocavitaire
a eu lieu dans les2à3jours après les FV. Le nombre de FV
documentée et traitée par un défibrillateur implantable
avant l’exploration est de 9 ± 13 épisodes (5 à 50). Une
moyenne de 3 ± 2 antiarythmiques (classe I, bêtabloqueurs,
amiodarone et vérapamil) a été essayée sans succès.
Les épisodes de FV surviennent durant l’activité jour-
nalière chez la majorité des patients, durant le sommeil
chez certains, mais aucun ne se produit pendant l’effort. Il
s’agit de FV primaire, non précédée de TV monomorphe
initiatrice. L’absence de cardiopathie organique [17] a été
définie par l’examen clinique, l’électrocardiogramme,
l’échocardiogramme, un bilan hémodynamique et coro-
narographique voire par biopsie endomyocardique
(n = 6). Ont été aussi éliminées une dysplasie du ventri-
cule droit, la possibilité de spasme coronarien (test à
l’ergonovine, n = 5) et une TV polymorphe catécholergi-
que par épreuve d’effort ou test à l’isopropyl moradréna-
line (Isuprel
®
). Une administration de classe IC permet
d’exclure un syndrome de Brugada chez 12 patients alors
qu’une recherche génétique sur le SCN5A/HERG est effec-
tuée chez 12 d’entre eux.
Morphologie des extrasystoles ventriculaires
Alors que cette série représente des patients consécu-
tifs, chez tous sauf deux, l’arythmie survient par période
de quelques jours (orage rythmique) au cours desquels
peuvent être documentées ESV, TV polymorphe et FV ; les
arythmies disparaissent ensuite pendant des mois ou an-
nées pour réapparaître soudainement. Dans deux cas, les
extrasystoles ventriculaires sont constamment présentes
sur les enregistrements Holter.
L’examen attentif des ESV sur ECG 12 dérivations
montre qu’elles sont polymorphes (2 ± 1 morphologies
variant de1à5)dans la majorité des cas (66 %), qu’elles
ont un couplage très variable en moyenne de
297 ± 42 ms, et que les couplages les plus courts indui-
sent les TV polymorphes ou FV. Un phénomène R sur T est
observé chez 11 patients tandis que des couplages plus
longs (survenant dans le segment descendant de l’onde T)
sont notés dans les autres cas. Il est enfin noté fréquem-
ment des ESV interpolées.
Trois classes morphologiques d’ESV peuvent être dis-
tinguées :
–des extrasystoles à type de bloc gauche, axe droit
(morphologie infundibulaire provenant du myocarde
commun) chez 5 patients ;
–des ESV provenant de la face antérieure du ventri-
cule droit : aspect de bloc gauche et axe gauche chez 10
patients (provenant du système de conduction distal
droit) ;
–des ESV provenant du ventricule gauche (provenant
du système de conduction distal gauche) puisque positives
dans la dérivation V1 (figure 2) mais avec la caractéristi-
que d’être très fines (durée moyenne 128 ± 18 ms des
complexes QRS contre 145 ± 13 ms dans l’infundibulum
pulmonaire) chez 13 patients ; 4 patients ont à la fois des
morphologies ventriculaires droites et gauches.
Cartographie endocavitaire des ESV initiant
les FV et ablation par radiofréquence (RF)
La cartographie est réalisée au moment où les ESV sont
fréquentes et en phase d’orage rythmique. Deux à 4 cathé-
ters multipolaires introduits via une voie d’abord fémorale
sont utilisés. L’ESV naît du muscle ventriculaire « ordi-
naire » dans seulement 5 cas (infundibulum pulmonaire)
alors que la majorité des autres ESV naissent du réseau de
Purkinje, soit sur la face antérieure du ventricule droit, soit
dans le ventricule gauche (face septale).
Le potentiel distal de Purkinje est défini par la présence
en rythme sinusal d’un potentiel rapide qui précède de
quelques msec (moins de 15 ms) un potentiel plus lent qui
représente l’activation ventriculaire locale. Des temps de
plus de 15 ms reflètent l’enregistrement d’un système de
conduction plus proximal, proche de la branche de
conduction (figure 3). Un potentiel de Purkinje précédant
l’activation ventriculaire locale en rythme sinusal et lors
mt cardio, vol. 1, n° 1, janvier-février 2005 49
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.