Introduction
Enseigner c’est « faire apprendre une science, un art, une discipline à
quelquun, à un groupe, le lui expliquer en lui donnant des cours, des
leçons » (Enseigner”, s.d.). Apprendre, toujours selon la dénion du
Larousse, cest « acquérir par létude, par la praque, par lexpérience
une connaissance, un savoir-faire, quelque chose dule » (“Apprendre,
s.d.). Ces deux acons, au cœur du travail de lenseignant, sont à lorigine
de cee étude. Comment enseigner pour que les élèves apprennnent,
sachant que dès les premières années de la scolarité obligatoire, certains
enfants rencontrent des dicultés dapprenssage ?
Ces inégalités face aux acquisions scolaires sont souvent liées aux
diérentes manières de faire et dapprendre de chacun (Caeaux,
2011). Le rapport à lécole, au savoir, aux apprenssages dière d’un
enfant à l’autre, dune famille à lautre. On sait que les praques ensei-
gnantes peuvent inuencer le fonconnement des élèves dans leurs
apprenssages et favoriser ou pas leur développement : l’inégalité
scolaire n’est pas une fatalité socioculturelle (Bauer, 2006 ; Caeaux,
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2011 ; Cèbe, 2001). Ainsi, les praques enseignantes devraient être en
mesure daider les élèves dans leurs apprenssages et non de rendre
ces apprenssages plus diciles.
Enseigner demande donc de faire des choix pédagogiques et di-
dacques ainsi que d’interroger ses praques en regard des progres-
sions des élèves. Dans cee recherche, cest à travers la catégorisaon
que les praques enseignantes et les apprenssages des élèves seront
interrogés. Catégoriser et conceptualiser les objets du monde est un
processus universel qui permet de sadapter à notre environnement.
Dans un souci de développer des compétences catégorielles et des
procédures ecaces chez les élèves, je me suis intéressée à lenseigne-
ment de la catégorisaon dans une classe de deuxième année primaire
Harmos (2P) en Suisse.
Le Plan d’études romand (ci-après PER ; CIIP, 2010), document de réfé-
rence commun à lensemble des cantons de Suisse romande, ne traite
pas explicitement de la catégorisaon. En revanche, dans la plupart des
domaines disciplinaires, des tâches de catégorisaon sont requises : par
exemple en langues (comparaison des informaons données par l’image
et par le texte, construcon de lordre chronologique dune histoire, trier
des ouvrages, idener des livres), en mathémaques (classement
dobjets, idener, trier et organiser des informaons, comparer des
collecons…) ainsi qu’en sciences humaines (catégorisaon des éléments,
classement, disncon d’étapes de la vie…).
Dans le domaine disciplinaire « Mathémaques et Sciences de la
nature », sous commentaires généraux, il est indiqué :
Face aux évoluons toujours plus rapides du monde, il est ces-
saire de développer chez tous les élèves une pensée conceptuelle,
cohérente, logique et structurée, dacquérir souplesse desprit et
capacité de concevoir permeant d’agir selon des choix rééchis.
Dans le même ordre d’idées, il est également important de per-
mere aux élèves de contextualiser lulisaon des nombres, élé-
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ments essenels dans la communicaon d’informaons et de don-
nées, ainsi que de structurer lespace par lulisaon de repères
universels. Par un quesonnement sur le monde qui les entoure,
on favorise chez eux une prise de conscience des conséquences
de leurs acons sur leur environnement. Lapproche ludique dans
la résoluon de problèmes logiques et de stratégies leur ore une
manière de s’ouvrir à des situaons avec conance et réexion.
(CIIP, 2010, p. 7)
Il est ainsi recommandé de permere aux élèves de développer une
pensée conceptuelle, une prise de conscience de leurs actes et dacquérir
de la exibilité. En dautres termes, il sagit de favoriser la métacognion,
lautorégulaon et l’autonomie.
Dans la brochure de présentaon générale du PER « Organisa-
on du Plan d’études romand », sous le tre « compétences trans-
versales », les auteurs relèvent l’importance de ces dernières en tant
qu’elles parcipent aux apprenssages :
En tant qu’intenons de formaon, les capacités transversales
peuvent trouver diérentes formes dexpression dans la formula-
on du plan détudes, sans être perçues comme des objets dap-
prenssage en soi. [...] Ce faisant, elles constuent un appui à
l’apprenssage de noons plus complexes. Intégrées à tous les do-
maines denseignement, elles sont clairement reconnues comme
relevant de la responsabilide l’ensemble du milieu scolaire. (CIIP,
2010, p. 35)
Les instrucons ocielles demandent aux enseignants de travailler à
la construcon de ces compétences dites « transversales » dès le pre-
mier cycle de lécole dans le cadre de situaons contextualisées. Les
élèves seront ainsi amenés à construire des concepts fondamentaux
impliqués dans un grand nombre de ches scolaires. Les compétences
transversales sont dénies dans le PER comme permeant à lélève
daméliorer sa connaissance de lui-même ainsi que dopmiser et -
guler ses apprenssages. Elles dénissent « les contours des diverses
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aptudes fondamentales, lesquelles traversent à la fois les domaines
dapprenssage et lensemble de la scolarité » (p. 6). Catégoriser permet
de faire face aux diverses situaons de la vie quodienne et favorise
lapprenssage. Cest une conduite adaptave fondamentale qui permet
à l’intelligence humaine de duire la complexité du monde qui lentoure
en l’organisant, en meant de l’ordre dans ses connaissances et en les
subdivisant en catégories. La catégorisaon joue donc un rôle fonda-
mental dans lapprenssage car elle est impliquée dans de nombreuses
acvités cognives, des plus simples aux plus complexes : idener,
déduire, désigner, représenter, abstraire des relaons, mémoriser, rap-
peler, apprendre. Savoir catégoriser permet alors de réussir un grand
nombre de tâches scolaires et de situaons de la vie quodienne (Cèbe,
Paour & Goigoux, 2004).
Dans la brochure de présentaon générale du PER, il est précisé :
« les capacités transversales ne sont pas enseignées pour elles-mêmes,
mais se mobilisent au travers de nombreuses situaons contextuali-
sées leur permeant de se développer et détendre progressivement
leur champ dapplicaon » (CIIP, 2010, p. 35). Il est bien demandé aux
enseignants de favoriser le développement de ces compétences trans-
versales mais, de même que le constatent Cèbe et al., (2004) pour la
France, aucun texte ociel ne statue sur les praques denseignement
ou les méthodes pédagogiques capables de les faire apprendre.
Le PER précise que l’enseignant dispose dune certaine liber
quant aux moyens denseignements qu’il désire exploiter : « Le choix
des moyens d’enseignement et la responsabilité pédagogique des en-
seignants dans leur classe laissent toutefois une marge de manœuvre
qui reste conforme à l’harmonisaon voulue par le peuple et les
cantons suisses » (CIIP, 2010, p. 1). Compte tenu de la liberlaissée
à lenseignant quant aux moyens ulisés et les direcves concernant
le développement de capacités transversales, j’ai choisi de travailler
la catégorisaon dans une classe de deuxième enfanne à laide de
l’outil Des procédures aux concepts, catégoriser des catégories (ci-
après Catégoriser des catégories).
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La catégorisaon est une compétence requise dès lentrée à lécole
et tout au long de la scolarité. Catégoriser est au cœur non seulement
des processus dapprenssage mais aussi de nombreuses situaons de
la vie quodienne. Bien que requise dans toutes les disciplines scolaires,
la catégorisaon fait pare, selon une formule de Bernardin (2001) des
« impensés du quodien scolaire » (p. 91), car cee compétence n’est
jamais enseignée en tant que telle.
Omniprésente dans le prescrit, usitée mais jamais enseignée, c’est
le développement de la catégorisaon en classe de deuxième enfan-
ne qui fait l’objet de cee étude. Tout dabord du point de vue de
lenseignement, il s’agira d’idener les gestes professionnels requis
pour enseigner la catégorisaon à l’aide dun oul adapté. Puis, du
point de vue des apprenssages, il s’agira de mesurer l’impact des ac-
vités proposées sur le développement de la catégorisaon chez des
enfants de 5-6 ans.
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